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LES MALADIES DES CRUSTACES

M. VANELLI

INTRODUCTION

Au cours des dernières années, l'élevage des crustacés s'est remarquablement développé à travers le monde. Plusieurs pays ont poussé ce type de production et d'autres lancent des programmes de développement.

De cette manière, comme dans tous les autres types d'élevage, il est possible que les agents pathogènes se multiplient et causent des pertes considérables.

Dans ce rapport, j'exposerai les principales situations pathologiques rencontrées chez les crevettes Pénéides qui sont les espèces de crustacés les plus exploitées et ensuite certaines expériences que j'ai eues dans ce domaine. Les causes des maladies sont très peu connues mais les facteurs principaux sont les conditions environnementales qui sont difficiles à définir, par suite des particularités de chaque type d'élevage : extensif, semi-intensif, intensif (spécialement pour la reproduction et les stades larvaires).

C'est pourquoi nous n'avons pas non plus d'indications sur les interventions thérapeutiques à cause de l'insuffisance des données disponibles dans la littérature en ce qui concerne l'utilisation des antibiotiques ou d'autres thérapeutiques.

Par conséquent, la prophylaxie est le meilleur moyen de succès pour l'élevage des crevettes, en maintenant le plus possible une bonne qualité d'eau, avec un renouvellement en eau correct, en évitant l'excès de sédiment de matière organique, la surpopulation et les manipulations fréquentes et en retirant les animaux morts.

LES MALADIES VIRALES

Baculovirus : Communément trouvé comme germe infectant l'hépatopancréas de la crevette dans la nature. Aucun effet évident n'a été décrit; dans un frottis préparé à partir de l'hépatopancréas et examiné au microscope en phase ou en contraste de phase, on observe des changements cytopathologiques avec une hypertrophie nucléaire et des inclusions polyhédriques.

Le virus IPN : est un Réovirus isolé dans plusieurs organismes aquatiques. Dans Penaeus japonicus, il a été isolé en 1983, lors d'un cas de mortalité chez les reproducteurs. Au cours d'essais successifs de transmission, le virus n'a pas été réisolé à chaque fois; des dommages histologiques sont rapportés.

LES MALADIES BACTERIENNES

Les “Black spots” causés par plusieurs espèces de bactéries chitinovores (Benezckea, Vibrio, Pseudomonas), caractérisés par de petites taches sur l'exosquelette et les appendices dues aux dommages mécaniques, provoquent la rupture de la cuticule. Dans les cas avancés, une érosion considérable et une destruction de l'épiderme sont notées. Les effets de la maladie sont éliminés à la mue sauf quand les tissus sous-jacents sont endommagés.

Vibrio: C'est une bactérie Gram négative, d'habitude opportuniste, qui cause la maladie chez les crevettes stressées, avec des mouvements désorientés, alternés par des périodes de léthargies, l'opacificité du muscle et finalement la mort. Dans un cas unique, caractérisé par un important rougissement de la queue, Vibrio fischeri a été isolé.

Les bactéries filamenteuses : causées par les bactéries ectocommensales du genre Leucothrix qui, dans les eaux riches en substrats organiques et à une température adéquate, peuvent proliférer. Les colonies consistent en des chaînes septées de bactéries en formes de carrés, s'attachant individuellement sur la surface des crevettes, sans pénétrer les tissus.

Chez les larves et post-larves, elles croissent sur les appendices, génant les mouvements et causant des mortalités sévères. Chez les crevettes plus grandes, Leucothrix croît sur les filaments branchiaux, causant une interférence avec la diffusion des gaz à travers la cuticule branchiale.

LES MALADIES FONGIQUES

Lagenidium : Il cause une unfection systémique des larves, avec un mycelium fongique se répandant graduellement à travers les tissus internes des crevettes, les remplissant d'hyphes hautement ramifiées. La diffusion par sporogénèse avec la libération de zoospores libres nageant à travers les tubes de sortie touche des stades larvaires différents selon les espèces de crevettes. (P. aztecus est la plus sensible, P. japonicus est plus résistante).

Fusarium : Il pousse d'habitude sur des tissus endommagés et ne cause pas de problèmes sévères. Chez P. japonicus, on a décrit une “black gill” (branchie noire) causée par Fusarium. Le nom est du à l'important dépot de mélanine dans les branchies. Une lésion de l'oeil a également été décrite, caractérisée par une tache blanche.

Le diagnostic est fait par démonstration des macroconidies en forme de bateau.

LES MALADIES PROTOZOAIRES

Microsporidan : Causéepar plusieurs espèces de microsporidan (Nosema, Pleistophora, Thelophania). Communément appelée “Crevette laiteuse ou cotonneuse”. Caractérisée par une invasion du muscle abdominal qui devient blanc opaque. En disséquant l'abdomen, aucun muscle ne peut plus être détecté.

Les ciliés : Beaucoup d'espèces commensales comme Zoothamnium, Epistylis, Acineta, Lagenophris, etc… peuvent proliférer dans des conditions environnementales adéquates. Habituellement attachés aux bouts des filaments branchiaux, ils peuvent s'étendre aussi à l'exosquelette et aux appendices.

Le premier effet est l'interférence avec l'échange gazeux, causant l'hypoxie et l'agitation des crevettes venant à la surface ou s'encombrant aux bords des étangs. La diffusion passe par des stades libres (nage).

LES MALADIES A ETIOLOGIE INCONNUE

La nécrose spontanée : Des plaques blanches sur l'abdomen s'étendent rapidement dans le muscle; Elle est liée à des conditions environnementales impropres telles que la surpopulation, le faible taux d'oxygène, les changements environnementaux soudains, etc… Elle peut être reversible si les facteurs de stress diminuent rapidement.

ISOLATION DU VIRUS NPI (Nécrose Pancréatique infectieuse)

En 1983, une grande mortalité chez les reproducteurs de Penaeus japonicus a été observée.

Des symptomes cliniques, y compris une profonde dépression juste avant la mue qui était très difficile. Les seules lésions détectées sont des phénomènes de nécrose et d'érosion sur les membres thoraciques et les uropodes. L'investigation bactériologique a montré la présence de Neisseria sp et d'Aeromonas sp sans importance pathogénique. Des échantillons de groupes d'hépatopancréas ont été traités pour une investigation virologique. Des cellules RT G 2 et PG ont été inoculées avec un matériel homogénéisé et incubé à 15° C. Après 72 heures, un CPE clair est apparu, très similaire à la NPI CPE. L'immunofluorescence a confirmé la NPI suspectée. Des essais d'infection ont été faits à l'aide de crevettes adultes d'élevage, auxquelles le virus est injecté. L'investigation virologique a mis en évidence la réplication virale dans l'hépatopancreas, une immunofluorescence positive et des changements histologiques.

Il y a quelques mois, de nouveaux essais d'infection ont été faits sur des postlarves immergées pendant 60 minutes dans un bain avec 7 × 105u.f .p/ml de virus, mais les investigations successives n'ont pas mis en évidence la réplication virale, même si des changements histologiques ont été observés.

De plus amples recherches sont en cours.

L'INFESTATION PAR LE ZOOTHAMNIUM

Pendant l'été 1985, dans un bassin expérimental pour l'élevage des crevettes, on a noté une grande mortalité. Le bassin avait été fertilisé avant l'entrée des post-larves, à une concentration de 15 individus/m2 : l'alimentation était naturelle avec distribution de crabe haché.

Dans la deuxième moitié du mois d'aout, il a été observé un état de souffrance et une agitation des crevettes pendant la nuit; les animaux qui remuaient encore pendant la journée se regroupaient aux bords, près des berges de l'étang, certains léthargiques et beaucoup d'autres morts.

Les crevettes vivantes et mortes ont été échantillonnées et observées. Les signes évidents étaient des taches brunâtres, floconneuses sur l'exosquelette, souvent étendues aux appendices; les branchies étaient aussi brunâtres.

L'examen au microscope a montré un grand nombre de colonies de Zoothamnium cilié, péritriche, pédonculé.

Dans l'étang en question, la prolifération du Zoothamnium était favorisée par l'augmentation de la température de l'eau (jusqu'à 29 – 30° C), l'impossibilité de renouveler l'eau pendant quelques jours à cause de marées contraires, une grande quantité de déchets organiques et une grande concentration de crevettes.

Deux jours après l'observation du phénomène, les conditions environnementales ont changé avec une diminution de la température (23 – 24° C°), le rétablissement des marées et la possibilité de distribuer les crevettes sur une superficie double. Dans les échantillons ultérieurs, le Zoothamnium n'a plus été détecté et un arrêt de croissance des crevettes a été observé.


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