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Futures ressources en bois à pâte dans le monde

S.L. Pringle

S.L. PRINGLE, forestier et économiste, dirige le Service d'économie et de statistique forestières du Département des forêts de la FAO. Le présent article est adapté d'une communication présentée au 29e Congrès de la Fédération italienne d'éditeurs de journaux tenu à Bologne en juin 1976.

Quelles seront les régions du monde qui manqueront de matière première pour la production de pâte dans les prochaines 10 à 2 5 années? Y aura-t-il des régions autosuffisantes?

En un quart de siècle, de 1949 à 1974, la production mondiale de pâte de cellulose est passée de 29 à 120 millions de tonnes. Cinq pays de la zone tempérée de l'hémisphère nord: Etats-Unis, Canada, Suède, Finlande, Norvège, qui se partageaient 81 pour cent de la production mondiale en 1949, y entraient encore pour 69 pour cent en 1974, mais de nombreux et importants changements se sont produits. L'U.R.S.S. et le Japon ont pris respectivement les troisième et quatrième places parmi les producteurs mondiaux, devançant les trois pays nordiques. Ces derniers, d'exportateurs de bois, sont devenus importateurs, et dépendent toujours plus de la matière première importée pour alimenter leurs usines de pâte.

La consommation de pâte et sa transformation en papier se sont dans le même temps fortement concentrées dans un nombre relativement restreint de pays. Plus de la moitié de la production mondiale de papier se situe à l'heure actuelle dans trois pays: Etats-Unis, Japon et Canada, qui avec sept autres pays représentent plus des quatre cinquièmes de cette production. Six de ces dix pays, toutefois, sont importateurs nets de pâte, et ce dans une proportion croissante. On note cependant une nette tendance à transformer une quantité croissante de pâte en papier dans les pays producteurs de pâte eux-mêmes; aussi le commerce du papier est-il passé de 12 pour cent de la production en 1960 à 19 pour cent en 1974, alors que celui de la pâte n'a que faiblement progressé de 15 à 16 pour cent.

Meilleure utilisation

Bon nombre de pays très industrialisés ont porté la production de leurs industries du bois à l'extrême limite, ou presque, des possibilités de leurs forêts et, pour accroître la production, ont surtout dû s'efforcer de mieux utiliser les bois récoltés ou d'intensifier les investissements dans l'aménagement forestier. Les exportations de pays relativement riches en bois vers ceux dont les ressources ligneuses sont plus limitées ont marqué une avance rapide.

Deux tendances importantes dans le sens d'une meilleure utilisation de la matière première méritent une attention particulière. La première consiste à transformer en pâte des résidus provenant d'autres industries forestières telles que scieries, usines de placages et de contreplaqués, menuiseries industrielles. On en est ainsi venu à créer des complexes intégrés d'industries forestières, et à utiliser la matière première ligneuse dans le cadre d'une planification intégrée en vue d'en tirer le meilleur parti pour la fabrication de deux ou plusieurs produits. La deuxième grande tendance est un recyclage accru des vieux papiers en mélange avec des pâtes vierges.

Les Etats-Unis, la Communauté économique européenne (CEE) et le Japon représentent à eux trois plus des deux tiers de la consommation mondiale de papier, et sont (en particulier la CEE et le Japon) importateurs nets de papier ou de matière première pour le fabriquer - la première de papier et de pâte, le second de pâte et de bois à pâte; ils utilisent également des quantités importantes de vieux papiers. Le Canada, les pays nordiques, et dans une mesure moindre l'U.R.S.S., sont exportateurs nets: le Canada de papier, pâte et bois, L'Europe septentrionale de papier et pâte tout en étant, paradoxalement, importatrice nette de bois à pâte dont une bonne part provient d'U.R.S.S., laquelle fournit également une certaine quantité de pâte et de papier aux pays de l'Europe orientale.

Les Etats-Unis sont à peu près autosuffisants en ce qui concerne leurs approvisionnements en matière première, tandis que la CEE dépend largement de l'extérieur pour la pâte et le papier, et que le Canada et les pays de l'Europe septentrionale exportent les quatre cinquièmes ou plus de leur production. Les régions en développement importent une part très importante de leurs besoins; certains pays asiatiques, toutefois, exportent des quantités importantes de bois à pâte.

La production mondiale de pâte en 1974 a absorbé environ 435 millions de mètres cubes de bois (dont plus d'un quart provenant de résidus industriels), ainsi que des quantités considérables de bambous, de bagasse et d'autres fibres non ligneuses.

BOIS A PÂTE DANS UNE PAPETERIE EUROPÉENNE l'approvisionnement va probablement diminuer d'ici à la fin du siècle

Perspectives

L'augmentation de la consommation de papier peut évidemment provenir à la fois d'une utilisation plus intensive de vieux papiers, et d'un accroissement dans la fourniture de pâte vierge, ce qui suppose dans ce dernier cas de produire plus de matières premières de base, bois et autres matières cellulosiques.

A moyen terme, toutefois, la production de pâte sera forcément limitée par la capacité maximale des usines existantes ou en cours d'installation. Il faut trois ans ou plus pour construire une usine de pâte, tandis que la planification porte sur un horizon plus lointain encore, généralement sur cinq à sept ans au moins.

On peut avoir une bonne idée des perspectives à moyen terme en consultant la publication récente intitulée Capacités mondiales de la pâte et du papier, 1975-1980, qui collationne les prévisions industrielles pour les cinq prochaines années. Les chiffres des trois premières années sont assez sûrs mais peuvent varier légèrement selon que sont accélérés, ajournés ou ralentis les travaux de construction et surtout d'amélioration des usines. Quant aux données relatives aux quatrième et cinquième années, elles risquent encore de se trouver modifiées en baisse ou en hausse selon les décisions qui seront arrêtées maintenant.

L'enquête fait état de prévisions de croissance pour la période 1975-80 s'élevant à 25,4 millions de tonnes supplémentaires de pâte à papier (dont 2,6 millions de tonnes de pâte de fibres non ligneuses), et 31,1 millions de tonnes de papiers et cartons. L'accroissement prévu pour la capacité de production de pâte est de près de 3 millions de tonnes supérieur à celui de la période 1970-75, tandis que l'expansion en matière de papiers et cartons est de plus de 3 millions de tonnes inférieure à celle des cinq années précédentes. Cependant, pour l'un et l'autre de ces groupes, le taux de croissance accuse un fléchissement continu au cours des trois dernières périodes quinquennales.

Il est intéressant de noter, toutefois, que le taux de croissance du papier journal et de sa matière première essentielle, la pâte de bois mécanique, est très au-dessus des faibles taux d'expansion de la période 1970-75.

La proportion de pâte par rapport aux papiers et cartons n'a pas cessé de reculer; alors qu'elle atteignait le niveau élevé de 82,8 pour cent en 1967, époque à laquelle la pâte était nettement en excédent sur le papier, elle devrait tomber à 76,8 pour cent en 1977. Ce déplacement dans les proportions tient d'une part aux disponibilités excédentaires de pâte au cours de la période précédente, et d'autre part à l'emploi accru de vieux papiers, mais il risque de conduire à une insuffisance temporaire de la capacité de production de pâte pour répondre à la capacité de production de papier, compte tenu des taux actuels d'utilisation des fibres. On prévoit une amélioration de cette proportion, qui remonterait à 78,4 pour cent en 1980.

Les calculs indiquent pour l'ensemble des économies de marché un déficit de plus de 5 millions de tonnes de pâte en 1977, correspondant de 7 millions de tonnes de papier si les capacités de production étaient utilisées à plein. Il est douteux, toutefois, que la reprise économique permette d'atteindre ce niveau en 1977, et il existe en tout état de cause une réserve de pâte du fait qu'un ou deux pays producteurs continuent d'en produire des quantités excédant les besoins du marché. Mais, même en 1980, la capacité de production de pâte de ces pays pourrait être insuffisante pour répondre à la pleine capacité des papeteries, à moins que la proportion de vieux papiers utilisés n'augmente sensiblement et passe des 25 pour cent actuels à 27 pour cent au cours des cinq années considérées.

Quant à savoir si la capacité de production de papier prévue pour 1980 sera en mesure de satisfaire la demande future, c'est là un problème beaucoup plus complexe, que nous n'examinerons pas ici.

A long terme

La pleine utilisation de la capacité mondiale de production de pâte en 1980 suppose un accroissement de la production de bois de quelque 85 millions de mètres cubes par rapport à 1974, ainsi qu'une augmentation de plus de 25 pour cent du volume d'autres fibres utilisées (principalement en Asie et en Amérique latine), soit près de 25 millions de tonnes de plus que le niveau record de 1975 (d'environ 125 millions de tonnes).

La répartition des accroissements prévus appelle cependant encore quelques remarques. Sur près de 25 millions de tonnes de pâte de capacité supplémentaire, on prévoit que 4,5 millions de tonnes seront installées dans les économies centralement planifiées et près de 7 millions de tonnes dans les économies de marché en développement, dont plus de 5 millions de tonnes dans la seule Amérique latine, le Brésil représentant près de 3,5 millions de tonnes.

Cette expansion inégale selon les pays influera beaucoup sur les équilibres régionaux et les structures des échanges, et ce d'autant plus que les accroissements de la capacité de production de papier ne vont pas de pair avec ceux de la capacité de production de pâte. Du coup, les besoins de pâte de l'ensemble des pays développés (pour répondre à leur capacité de production de papier) devraient augmenter de plus de 2 millions de tonnes, notamment en ce qui concerne la CEE et le Japon, et les excédents exportables de l'Europe septentrionale devraient diminuer. On envisage toutefois un changement positif en Amérique du Nord vers la fin de la période, du fait d'une amélioration relative de la proportion de pâte par rapport à la capacité de production de papier, surtout aux Etats-Unis. Selon les prévisions actuelles, les pays en développement pourraient devenir dans l'ensemble exportateurs nets de pâte. L'excédent viendrait du Brésil, tandis que toutes les autres régions consolideraient leur autosuffisance en matière de pâte.

A long terme la situation de l'offre dépendra beaucoup de la mesure dans laquelle:

1. Les Etats-Unis pourront continuer à satisfaire leurs propres besoins, en exploitant toutes les voies qui s'ouvrent à eux à cet effet.

2. La CEE et le Japon pourront restreindre leurs besoins d'importation en intensifiant le recyclage des vieux papiers, et en exploitant mieux leur potentiel forestier limité.

3. Les pays d'Europe septentrionale peuvent intensifier l'aménagement de leurs forêts.

4. L'U.R.S.S. développera son potentiel d'exportation, notamment en Sibérie, face à l'accroissement de ses besoins intérieurs.

5. Le Canada tirera profit de ses forêts moins accessibles, et intensifiera l'utilisation de celles qu'il exploite déjà.

6. On pourra mobiliser les vastes ressources forestières des régions tropicales en développement, pour satisfaire des besoins intérieurs en rapide croissance, voire pour exporter dans les cas les plus favorables.

7. Le progrès technique permettra d'obtenir de meilleurs rendements en pâte, de mieux tirer parti des bois récoltés grâce à l'exploitation par arbres entiers, de réduire les frais de l'aménagement, de l'exploitation et de la transformation des bois tropicaux d'essences multiples, présentant souvent des densités très diverses et une répartition géographique irrégulière, et d'améliorer l'efficacité des opérations de fibres autres que le bois.

8. D'autres industries forestières, notamment celles des panneaux de particules et des panneaux de fibres, disputeront la matière première à l'industrie papetière.

On ne peut parler de perspectives à long terme en ce qui concerne l'accroissement de la production de fibres de cellulose sans examiner un certain nombre de sources possibles de fibres, ainsi que les mesures destinées à en améliorer le rendement: recyclage des vieux papiers et des déchets de bois, nouvelles sources de fibres ligneuses, utilisation d'autres fibres, innovations techniques. Chacune de ces possibilités sera examinée successivement.

Vieux papiers

En 1974 les vieux papiers représentaient 38 millions de tonnes, soit 24 pour cent de la consommation totale de fibres estimée à 160 millions de tonnes. Le taux de consommation de vieux papiers varie beaucoup d'un pays à l'autre, mais s'est, dans la plupart des cas, considérablement accru ces quelque vingt dernières années. Par taux de consommation, on entend le pourcentage de vieux papiers par rapport à la quantité totale de fibres utilisée pour la fabrication de papier.

Ce taux est actuellement en Europe de 28 pour cent environ, mais il varie autour de cette moyenne d'un peu plus de 5 pour cent dans les pays nordiques à 40 pour cent ou plus dans les pays de la CEE, certains pays montrant des taux voisins de 50 pour cent. Ce pourcentage dépend évidemment en premier lieu des disponibilités en vieux papiers, bien que celles-ci ne se soient avérées un facteur limitant que dans un petit nombre de cas.

Le taux maximal de récupération, c'est-à-dire le pourcentage de vieux papiers collectés par rapport à la quantité totale de papier consommée, est peut-être celui qu'a atteint le Royaume-Uni en temps de guerre, à savoir 62 pour cent. A l'heure actuelle, il est de 40 pour cent ou plus aux Pays-Bas, en Suisse et au Japon. Selon l'étude FAO/CEE1, Consommation, production et commerce du bois en Europe: évolution et perspectives, le taux de récupération de vieux papiers pourrait s'accroître en Europe jusqu'à 35-45 pour cent d'ici à la fin du siècle.

1Le sigle FAO/CEE se réfère à la Division du bois FAO/Commission économique pour l'Europe, dont le siège se trouve au Bureau des Nations Unies pour l'Europe à Genève.

Le taux de consommation réelle et potentielle et le taux de récupération dépendent de nombreux facteurs, dont la structure et l'importance de la consommation de produits papetiers, les systèmes de collecte existants, les types et quantités de papiers produits, et les facilités d'approvisionnement en fibres vierges. Un point important à considérer est le rapport entre la consommation totale et la production de papier. Si ce taux de consommation de vieux papiers peut être très élevé dans un pays qui consomme de grandes quantités de papier importé et en produit relativement peu, comme le Royaume-Uni ou la République fédérale d'Allemagne, des pays principalement exportateurs tels que le Canada ou la Finlande connaissent la situation inverse.

De nombreux facteurs favorisent une utilisation accrue des vieux papiers, parmi lesquels le coût croissant des fibres vierges et les divers aspects de la lutte contre la pollution. On peut donc s'attendre que la consommation relative de vieux papiers augmente pendant quelque temps, mais à un rythme assez modéré et progressivement décroissant.

Déchets et copeaux

Le dernier quart de siècle a connu un rapide développement de l'utilisation des déchets de bois comme matière première pour la fabrication de pâte, de panneaux de fibres et de panneaux de particules. C'est ainsi qu'en Europe leur consommation est passée d'une moyenne annuelle estimée à 5 millions de mètres cubes en 1949-51 à 13 millions de mètres cubes en 195961, puis à 30 millions en 1969-71, et à 40 millions en 1974. Par ailleurs, du fait des récents perfectionnements dans l'usinage des moulures, tels que les machines de sciage-déchiquetage, une proportion plus importante de matière première qui autrefois passait à travers les scieries est maintenant transformée en copeaux. En fait, on est passé d'une politique de récupération de résidus d'industries du bois à une utilisation intégrée rationnelle de la matière première bois. Cette source additionnelle de matière première pour l'industrie, sans prélèvement supplémentaire ou presque sur la forêt, sera forcément limitée en définitive par le volume maximal de résidus récupérables, et ne pourra plus ensuite s'accroître que dans la mesure où les sciages, placages, contreplaqués et autres industries du bois se développeront.

En 1970-72, la proportion de déchets réduits en copeaux utilisés pour la fabrication de pâte, de panneaux de fibres et de panneaux de particules a atteint 28 pour cent du volume de bois en grumes en Amérique du Nord, où la récupération était le plus poussée. En Europe, cette proportion n'a été que de 18 pour cent, mais elle a atteint près du tiers dans les pays nordiques et au Canada. Le rendement à l'usinage étant d'environ 60 pour cent du volume de grumes pour les sciages, placages et contreplaqués, ce dernier chiffre correspondrait à une récupération d'environ 80 pour cent du volume total de déchets disponible. En 1974, cette proportion avait atteint 53 pour cent en Europe. Pour l'ensemble du monde, la récupération des déchets de bois pour ces usages est bien inférieure à ce niveau. Le Japon est un cas à part, car le rendement, très élevé au sciage et au déroulage (plus de 70 pour cent), exclut la possibilité de disposer de grandes quantités de résidus.

Outre les déchets de bois et les copeaux provenant de la transformation en sciages, d'importances quantités de copeaux proviennent directement de bois ronds. Il est difficile de les distinguer dans les statistiques.

On estime que dans le monde on a utilisé en 1974 environ 85 millions de mètres cubes de bois de trituration pour les panneaux de fibres et panneaux de particules, en plus des 435 millions de mètres cubes utilisés pour la pâte. De ces 520 millions de mètres cubes, environ 155 millions étaient sous forme de déchets de bois ou de copeaux résultant de la production de sciages. En 1985, les résidus pourraient fournir, pense-t-on, 220 millions de mètres cubes. D'après l'étude récente concernant l'Europe, il se peut qu'or utilise 70 à 80 millions de mètres cubes de résidus rien qu'en Europe d'ici à l'an 2000, soit près du double du volume utilisé en 1973. Il est certain toutefois, que l'industrie des panneaux de particules, en expansion rapide, en absorbera une part de plus en plus grande.

Nouvelles sources de fibres ligneuse

L'expansion de la production de pâte et de papier s'est faite à un rythme très supérieur à celui de la production en forêt de bois ronds de trituration. Cela tient à l'augmentation rapide des disponibilités de fibres, due elle-même à une utilisation plus poussée des vieux papiers et surtout des déchets de bois. Ainsi qu'on l'a vu, cette expansion se poursuivra, mais elle s'alignera progressivement sur les taux de croissance de la production de pâte vierge et de sciages, placages et contreplaqués. On peut donc s'attendre que les volumes de bois fournis par la forêt n'augmentent plus autant et limitent par conséquent les disponibilités de pâte et de papier.

Parmi les «nouvelles» sources de bois de trituration utilisées au cours du dernier quart de siècle, une part importante est revenue aux essences feuillues non classiques. En 1950, les Etats-Unis qui se trouvaient alors en tête des pays utilisateurs de feuillus pour la pâte, n'utilisaient que 14 pour cent des bois ronds de trituration constitués par des essences feuillues; en 1974, cette part était montée à 32 pour cent. Pour l'ensemble du monde, les chiffres correspondants sont passés de 18 pour cent en 1961 à 27 pour cent en 1974. Au Japon, où on utilise beaucoup de bois feuillus aussi bien sous forme de bois ronds que de copeaux obtenus à partir de déchets industriels provenant de grumes feuillues indigènes ou importées, la part des feuillus est passée de 15 pour cent en 1956 à nettement plus de 50 pour cent dans les années soixante-dix. Même dans les pays de l'Europe septentrionale (Finlande, Norvège et Suède), où prédominent les forêts de résineux, l'extraction de feuillus de trituration est passée de moins de 3 pour cent du total des bois de trituration en 1950 à plus de 16 pour cent en 1972.

Cet accroissement rapide de la proportion relative d'essences feuillues tient évidemment aux progrès techniques accomplis en matière de procédés de fabrication de pâte et de papier, mais il a aussi été favorisé par le prix des feuillus sur pied, inférieur à celui des résineux, qui permet aux usines de se ravitailler à meilleur marché. Outre de meilleurs rendements en pâte, les industriels ont pu ainsi offrir des pâtes de feuillus à fibres courtes à des prix inférieurs à ceux des pâtes à fibres longues. Les pâtes de feuillus à fibres courtes, tout aussi bonnes sis non préférables pour certains usages, sont très demandées par les papeteries.

L'accroissement de la part des fibres courtes dans la pâte de bois sera inévitablement limité par un certain nombre de facteurs. Il y a un plafond, à la fois économique et technique, au-delà duquel ne peut plus progresser la proportion de ce type de pâte pour certains usages, en raison de caractéristiques mécaniques. Plus la demande de feuillus s'accroît, moins leur prix est intéressant; en fait ce qui se produit déjà dans certaines régions. Il existe évidemment une limite aux disponibilités en bois feuillus et, dans certains pays de la zone tempérée où la production de bois à pâte de résineux avait précédemment à peu près cessé d'augmenter, la limite est maintenant atteinte pour les bois feuillus, ou le sera à brève échéance.

Le tableau 1 indique les volumes de bois d'œuvre et d'industrie extraits en 1973 par pays ou région, en fonction des volumes totaux sur pied existant dans les forêts fermées (c'est-à-dire en excluant les forêts claires et formations ouvertes). La dernière colonne montre le pourcentage de bois extrait par rapport au matériel sur pied, et reflète ainsi le degré d'intensité de l'exploitation. Là où ce pourcentage est supérieur à 2 pour cent on peut considérer que la forêt est utilisée intensivement; c'est le cas des forêts de résineux des pays de la CEE et de l'Europe septentrionale, du Japon, et sans doute des Etats-Unis. En revanche, les pourcentages inférieurs à 1 pour cent indiquent à coup sûr une sous-exploitation de la forêt et l'existence d'un potentiel inutilisé, encore que cela puisse être dû à la difficulté d'accès ou à la présence d'essences et de qualités peu recherchées. Les forêts de résineux et de feuillus de l'U.R.S.S. et du Canada sont nettement sous-exploitées, comme le sont les forêts feuillues dans toutes les régions tropicales, notamment en Amérique latine. C'est dans ces pays ou régions que l'on peut intensifier l'exploitation en l'étendant à de nouvelles zones, ou à des essences et des qualités jusqu'à présent délaissées. Dans les pays où l'exploitation est au contraire plus intensive, on dispose encore d'un certain nombre de moyens pour accroître les disponibilités de bois; souvent ces moyens peuvent y être mis en œuvre étant donné la forte demande dans les régions densément peuplées et fortement industrialisées.

Le tableau 2 donne une idée de la diversité des «nouvelles» ressources ligneuses. Elles vont d'une meilleure récupération des déchets de coupe et des résidus industriels dans les zones forestières déjà intensivement aménagées, à l'exploitation d'essences et de qualités peu ou pas utilisées dans les forêts moins accessibles. Les plantations forestières représentent naturellement une des possibilités les plus intéressantes surtout dans les zones où l'on peut obtenir un rythme de croissance rapide; le potentiel d'accroissement de volumes produits par unité de surface est dans ce cas souvent considérable. Les modèles de développement futur de la production forestière à l'intérieur de cette gamme de possibilités dépendront de nombreux facteurs, parmi lesquels les plus importants sont sans doute les taux comparés d'expansion économique d'une part, la nature et la rapidité des progrès techniques d'autre part. D'importants accroissements de la production de bois sont encore aisément réalisables sur beaucoup de fronts, mais les coûts relatifs correspondants s'élèveront inévitablement.

Il peut être utile de résumer ici certaines conclusions d'études sur les perspectives de la demande et de l'offre concernant la production future de bois ou de pâte et papier.

Selon une étude FAO/CEE en cours, Consommation, production et commerce du bois en Europe: évolution et perspectives, 1950-2000, il serait possible de porter les volumes de bois d'œuvre et d'industrie récoltés en Europe (y compris la Turquie) de 273 millions de mètres cubes en 1974 à 355, voire 440 millions de mètres cubes en l'an 2000, selon la conjoncture économique plus ou moins favorable et le degré d'intensité des aménagements forestiers. Cet accroissement se répartit sur toutes les régions, mais une bonne part reviendrait aux pays de la CEE et plus particulièrement à la France. Toutefois, même dans l'hypothèse la plus optimiste, et en admettant que les importations actuelles fassent plus que doubler, cela ne suffira pas pour satisfaire aux prévisions de consommation les plus modestes retenues par cette étude, et pourrait résulter en une hausse des prix qui réduirait la consommation et encouragerait la recherche de nouvelles ressources. Il est intéressant de noter que la pâte et le papier, de même que les panneaux de particules, absorberont selon les prévisions une part de plus en plus grande des ressources en bois.

Tableau 1. - Volumes de bois d'œuvre et d'industrie exploités et comparaison avec les volumes totaux sur pied, 1973

GROUPES D'ESSENCES


Région ou pays


Matériel sur pied dans les forets

Volumes de bois d'œuvre et d'industrie extraits

milliards m3

millions m3

% volume sur pied

Toutes essences

Monde

287

1 345

0,5

RÉSINEUX










MONDE

107

948

0,9

Etats-Unis

12

247

2,0

Canada

14

130

0,9

Europe septentrionale

3,6

89

2,5

CEE

1,5

42

2,8

Autres pays d'Europe occidentale

2,1

26

1,2

Japon

1,1

25

2,3

Europe orientale

2,3

42

1,8

U.R.S.S

61

264

0,4

Tous autres pays

9,4

83

0,9

FEUILLUS















MONDE

180

397

0,2

Zone tempérée

35

250

0,7

Etats-Unis

5,9

75

1,3

Canada

3,6

11

0,3

Europe septentrionale

0,67

10

1,5

CEE

1,4

27

1,9

Autres pays d'Europe occidentale

1,5

12

0,9

Japon

0,9

17

1,9

Europe orientale

1,6

22

1,3

U.R.S.S

12

34

0,3

Tous autres pays

7,5

42

0,6

Zone tropicale

145

147

0,1

Asie-Extrême-Orient

25

87

0,3

Afrique

42

31

0,1

Amérique latine

78

29

0,04

Tableau 2. - Principales sources de bois de pâte (nouvelles ou améliorées)

SOURCE

TYPE

PRINCIPALES RÉGIONS

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

Forêts existantes





FORÊTS AMÉNAGÉES ET EXPLOITÉES

1. Récupération accrue des déchets de fabrication



Résineux Feuillus



Régions de production concentrée de sciages, placages, contreplaqués et autres dérivés du bois


Ressources souvent proches des usines de pâte. Solution aux problèmes d'élimination des déchets et de pollution


Utilisation déjà intensive dans les régions les plus propices: Etats-Unis, Canada, Europe septentrionale, Allemagne

Concurrence de la part des industries de panneaux dérivés du bois

Voir également 4 c) ci-dessous


Les coûts augmentent rapidement dans le cas de production dispersée et à petite échelle

2. Récupération accrue des résidus de coupe (houppiers, branches, grumes défectueuses, souches, etc.)


Résineux Feuillus


Régions productrices de grumes de sciage et de placage

Ressources souvent proches des usines de pâte

Peut être très coûteux à moins d'intégration des opérations

Grumes résineuses de grande dimension dans l'ouest de l'Amérique du Nord, feuillus aux Etats-Unis et en Europe


Les coûts augmentent rapidement avec des bois de faible dimension, de forme tordue, etc

3. Exploitation de peuplements de qualité inférieure (faible densité, arbres de faible valeur, etc.)

Résineux Feuillus

Principalement zones moins accessibles au voisinage des forêts exploitées

Répartit les frais généraux de construction de routes, etc.

Peut, dans les stations peu favorables, créer des problèmes de régénération et de protection Les coûts augmentent rapidement à mesure que la qualité décroît

4. Gamme plus étendue d'essences



a) Résineux

Possibilités limitées



b) Feuillus tempérés

Etats-Unis (est et nord), U.R.S.S. (sud) France, Yougaslavie, Australie, Inde

Souvent grandes quantités disponibles

Les qualités technologiques peuvent être peu appréciées. Peuplements souvent dispersés

c) Feuillus tropicaux

Afrique occidentale, Sud-Est asiatique, Amazone

Enormes quantités disponibles

Difficulté d'obtenir un mélange uniforme d'essences diverses dans des forêts qui présentent une distribution irrégulière d'essences

5. Reclassement du bois de feu

Principalement feuillus

U.R.S.S., pays européens
Pour la plupart des régions productrices de pâte, il reste peu de possibilités

Revalorisation du bois ainsi reclassé

Peuplements souvent dispersés, et coûts de récolte élevés La valeur du bois de chauffage a augmenté

6. Traitements sylvicoles plus intensifs (éclaircies plus fréquentes, fertilisation, régularisation des peuplements, conversion protection contre le feu)

Résineux
Feuillus

Peuplements accessibles et exploités fréquemment

Réduction des frais de transport et des frais généraux d'exploitation

Investissements longs à rapporter
Rendements décroissants en fonction de l'intensification

FORÊTS PEU ACCESSIBLES ET NON EXPLOITÉES




Résineux

Intérieur de la Colombie britannique, de l'Ontario septentrional et du Québec, Sibérie Mexique et Amérique centrale

Essences appréciées

Coûts d'exploitation et de transport accrus Pour certaines régions, par exemple la Sibérie, le rythme de développement doit être lent et progressif

Feuillus tempérés

Canada septentrional, Australie, U.R.S.S. (est)

Grandes quantités disponibles

Coûts d'exploitation et de transport accrus

Feuillus tropicaux

Voir ci-dessus

Voir ci-dessus

Voir ci-dessus

Résineux

Stations à potentiel de croissance élevé en climat tempéré doux et en altitude sous les tropiques

Possibilités de récolte concentrée et systématiquement planifiée sur des sites choisis

Coûts d'installation élevés
Conflit possible avec d'autres formes d'utilisation des terres

Reboisements

Feuillus (notamment eucalyptus et peupliers)

Large répartition géographique. Nombreuses régions tropicales, méditerranéennes et tempérées

Croissance rapide, révolution courte, souvent main-d'œuvre bon marché

Limite éventuelle à la demande de fibres courtes

L'étude The outlock for timber in the United States, publiée en 1973 par le U.S. Forest Service (voir Unasylva, Vol. 26, n° 105), prévoit pour l'an 2000, en fonction de différentes hypothèses de prix, un accroissement de la consommation de bois de trituration de 85 à 175 pour cent par rapport au niveau de 1970. Les perspectives en ce qui concerne les ressources supplémentaires nécessaires sont considérées comme relativement favorables pour l'industrie de la pâte et la papeterie, car on pourra utiliser des bois de faible dimension et de basse qualité, et recourir davantage aux feuillus. On ne prévoit aucun changement majeur dans la situation de la balance commerciale.

Bien que le document intitulé «Plan directeur pour les ressources forestières et projections à long terme de la demande et de l'offre des grands produits forestiers», présenté par le ministère japonais de l'agriculture et adopté en 1973 par le Cabinet japonais, prévoie un accroissement inattendu des disponibilités nationales en bois d'œuvre et d'industrie (de 46,3 millions de mètres cubes en 1971 à 94,3 millions en 2021), on s'attend que les importations continuent de progresser. En fait, les volumes exploités ont tendu à décroître depuis 1967.

Ainsi, malgré la forte progression attendue dans les volumes de bois exploités, les perspectives indiquent un sérieux accroissement ou, au mieux, une stabilisation des importations nettes de bois de pâte, de pâte et de papier pour ces grandes régions consommatrices.

On se livre souvent à bien des conjectures sur les possibilités qui s'offrent d'augmenter sensiblement la production et les exportations forestières de l'U.R.S.S., notamment de la Sibérie. Mais on reconnaît aussi que la demande intérieure de pâte et de papier, aussi bien en U.R.S.S. que chez ses partenaires commerciaux d'Europe orientale, peut sans doute absorber d'importants surcroîts de production. Selon l'étude FAO/CEE, qui s'intéresse aux possibilités d'exportation de l'U.R.S.S., les volumes de produits forestiers exportés doubleraient presque entre 1970 et 2000, mais l'Europe en recevrait une part plus faible car l'accroissement de production serait surtout le fait de la Sibérie et de l'Extrême-Orient.

Les réserves du Canada

Le Canada possède encore de très substantielles réserves de bois. On a récemment calculé que l'excédent annuel signalé était presque égal aux volumes actuellement exploités. Une grande part de cet excédent, toutefois, est située dans des zones peu accessibles, et on estime que l'exploitation en serait généralement plus coûteuse. Néanmoins, on dispose là d'évidentes réserves pour une expansion future. D'après d'autres projections qui envisagent les structures possibles de la consommation et du commerce de pâte et de papier jusqu'en 1990 dans les principales régions du monde, et qui prévoient pour le Canada un doublement des exportations de papiers et cartons, et un quadruplement de celles de pâte entre 1970 et 1990, la forêt d'ici à 1990 subirait une pression accrue, et une nouvelle expansion importante des industries du bois serait donc difficile.

C'est dans les forêts feuillues des régions tropicales en développement que l'on trouve les volumes les plus impressionnants de bois sous-exploités; ceux-ci représentent la moitié du volume mondial de bois. Non seulement une grande partie de ces régions est d'accès difficile, comme l'intérieur de l'Amazone et du Congo, mais, ce qui est sans doute plus important, une proportion généralement très grande du matériel ligneux, dans les forêts déjà exploitées ou en cours d'exploitation, est laissée sur pied. Cela tient à ce que l'on se concentre sur la coupe des grumes de placage et de sciage de premier choix d'essences traditionnellement recherchées, dans des forêts qui sont très complexes et renferment un grand nombre d'essences aux propriétés technologiques très diverses. Il arrive fréquemment que les bois des forêts exploitées, ou même inexploitées, soient sacrifiés à l'agriculture, souvent sur des sols impropres à une production agricole soutenue. Un des problèmes majeurs posés par l'utilisation de ces bois pour la fabrication de pâte résidait dans l'extrême diversité d'essences que l'on rencontre sur une parcelle quelconque de forêt. On a cependant réussi dans certains cas à produire de la pâte à partir de feuillus tropicaux mélangés. De plus, des recherches récentes laissent entrevoir des solutions aux problèmes fondamentaux posés par les mélanges variables d'essences diverses. L'utilisation de cette source de fibres sera vraisemblablement orientée au début essentiellement vers la satisfaction de la demande intérieure. Souvent, l'exploitation de la forêt tropicale mélangée spontanée pourra être une étape transitoire, avant de recourir aux reboisements comme principale source de fibres.

Les plantations d'essences à croissance rapide installées sur des prairies, des savanes herbeuses, ou en conversion sur des terrains forestiers, prennent de plus en plus d'importance comme source de fibres pour la pâte, notamment dans les zones tropicales et subtropicales. Un accroissement moyen de 10 m3/ha/an, ce qui est modeste, suffirait aux besoins actuels de pâte des pays du tiers monde avec un peu plus de 5 millions d'hectares de plantations, chiffre que l'on peut comparer aux superficies de forêts fermées de ces régions qui couvrent largement plus de I milliard d'hectares. Plusieurs millions de mètres cubes de bois à pâte sont déjà exploités dans les plantations forestières des régions en développement, et alimentent des usines de pâte de plusieurs pays dans ces régions. De nombreux pays développés, bien entendu, complètent leurs ressources en bois par des reboisements, et quelques-uns en ont fait leur principale source de fibres.

Utilisation d'autres fibres

On produit quelque 7 millions de tonnes de pâte à partir de bambous, de bagasse et d'autres fibres cellulosiques non ligneuses. Au cours des cinq prochaines années, la capacité de production de ces pâtes augmenterait de 5 pour cent, principalement en Chine, en Amérique latine et en Asie méridionale. Un obstacle majeur à l'utilisation de ces matières premières est le coût élevé de récolte, problème résolu en grande partie dans le cas de la bagasse. Il est probable que la production de pâte tirée de cette source de fibres continuera de s'accroître, mais qu'elle servira surtout à satisfaire les besoins intérieurs des pays en développement mal pourvus en bois.

Entre-temps . . .

Depuis plus ou moins un an que le présent article a été rédigé, l'industrie mondiale de la pâte et du papier, suivant l'évolution économique, a marqué une reprise considérable par rapport à son faible niveau d'activité de 1975. Elle n'est toutefois pas revenue à ses niveaux records de 1973 et 1974.

La production de pâte par les plus gros fabricants a continué de dépasser les besoins, de sorte que les stocks sont restés très élevés et ont parfois même encore augmenté.

Vu la reprise modeste et l'attente générale d'un ralentissement de la croissance économique, les plans d'expansion de l'industrie de la pâte et du papier ont été de nouveau freinés.

L'enquête récemment publiée Capacités mondiales de la pâte et du papier, 1976-81, indique un fléchissement continu des taux de croissance, tant passés que prévus, en ce qui concerne la capacité de production de pâte, de papier et de carton. Cette baisse est manifeste pour presque toutes les régions et catégories de produits.

De plus, le risque de déséquilibre entre, d'une part, la capacité de production de papier et de carton, et d'autre part, la capacité de production de pâte dont il est question dans le présent article, semble avoir été écarté du fait des récents changements intervenus dans les exigences en ce qui concerne l'apport de matière première - réduction de la quantité totale de fibre par tonne de papier et accroissement correspondant de la proportion de vieux papiers.

A moins d'une exceptionnelle montée de la demande de papier et de carton résultant d'une fluctuation à court terme de l'activité économique, il semble qu'à l'échelle mondiale la capacité prévue jusqu'à 1981 soit suffisante pour répondre aux besoins de pâte et papier.

Innovations techniques

Un grand nombre d'innovations techniques, dans le domaine des méthodes d'exploitation, des transports et des procédés de fabrication, pourraient favoriser l'expansion de la production de pâte. Le procédé thermomécanique, d'introduction relativement récente, devrait permettre de réduire la consommation moyenne de bois par unité de pâte produite. De même que le procédé mécanique classique, il nécessite environ 2,5 mètres cubes par tonne de pâte au lieu de 4, voire plus de 5 mètres cubes par tonne de pâte chimique. La pâte thermomécanique, à la différence de la pâte mécanique ordinaire, peut remplacer au moins en partie la pâte chimique pour la fabrication de papiers d'écriture et d'impression. On a réussi à fabriquer du papier journal entièrement à partir de pâte thermomécanique. Un autre avantage de ce procédé est qu'il peut être appliqué économiquement dans des usines de taille beaucoup plus petite que le procédé chimique, et peut donc convenir dans le cas de sources de matière première limitées, ou de marchés restreints. Il requiert toutefois de grandes quantités d'énergie, et il convient mieux aux essences résineuses les plus recherchées.

Un certain nombre de points ressortent de l'analyse qui précède. Tout d'abord, il apparaît que dans les cinq ans à venir la capacité de production de pâte dans les économies de marché risque d'être insuffisante par rapport à la capacité de production des papeteries. Cependant, cette dernière indus trie n'en sera sans doute pas sérieusement affectée, à moins d'un fort développement économique général, et on dispose de toute façon de stocks de réserve de pâte.

A plus long terme, les disponibilités physiques de bois ne limiteront pas celles de pâte, mais il se peut que se produise une hausse des coûts relatifs. Jusqu'à la fin du siècle, le déficit de matière première continuera de s'accroître au Japon, dans la CEE et dans certains autres pays européens. Les Etats-Unis continueront d'être à peu près autosuffisants. Les exportations des pays actuellement excédentaires ne progresseront que modérément. A moyen et long termes, le Canada et peut-être l'U.R.S.S. intensifieront considérablement leurs exportations, mais ce sont les pays tropicaux et subtropicaux en développement qui, après avoir atteint quasiment le seuil d'autosuffisance, devraient en définitive devenir les grands fournisseurs de fibre de cellulose de l'avenir.


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