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6. RECOMMANDATIONS

Sans toutefois préjuger des effets de la prédation exercée par le fibata dans les années à venir, les recommandations qui suivent concernent la gestion rationnelle de la pêche, la reconstruction des stocks et l'aménagement piscicole à long terme, ont été élaborées de manière à en tenir compte.

6.1 GESTION RATIONNELLE

  1. Application stricte de la réglementantion existente, en particulier concernant la maille minimum (4 cm de noeud à noeud) et de là fermeture de la pêche pendant 2 mois en octobre–novembre (époque de fraie la plus propice)

  2. limitation de l'effort de pêche au niveau actuel

  3. surveillance continue de l'état des stocks, afin de détecter à temps les changements et d'appliquer les mesures de gestion appropriées.

Effets probables de ces recommandations: maintien des stocks à leur niveau actuel ou même amélioration des rendements, du moins jusqu'à ce que l'impact de prédation par le fibata commence à se faire sentir (probablement quelques années).

Suggestions concernant leur implémentation:

  1. Créer un brigade de vulgarisation qui éduquera les pêcheurs dans ce domaine dans le but de s'assurer leur coopération. (Ceci est déjà prévu par la Direction Pêche dans le cadre du projet de développement.)

  2. organiser l'application effective de la réglementation (la répression) en utilisant à cette fin les agents des Eaux et Forêts (ceci est également prévu dans le cadre de la réorganisation récente de ces services), afin de ne pas envenimer les bonnes relations entre pêcheurs et vulgarisateurs .

  3. appliquer un système de licences de pirogues ou de licences de pêche (à chaque pêcheur), redevable annuellement; ceci constituant en même temps l'impôt unique à la pêche. En ce qui concerne les licences et enregistrements des pirogues, il faudra l'appliquer à toutes, sans exception. Dans le cas des pêcheurs, il sera-utile d'émettre une carte (permis) sur laquelle paraitraient les données essentielles: nom, adresse, dates, type et nombre d'engins,etc. Cette licence annuelle ne devrait pas être transférable. Au cas où il y aurait lieu de limiter l'effort de pêche (si, par exemple, les stocks baissent, à cause des fibata ), il sera facile de le faire en limitant le nombre des permis de pêche, donnant la préférence aux riverains du lac. Il semble peu probable que l'effort par UEP augmente sensiblement, à moins que des changements dans le type d'engins ou les méthodes de pêche ne se produisent. Le cas échéant, le permis peut être spécifique afin de limiter certaines activités.

  4. Elaboration et application' d'un système de collecte des statistiques compréhensif (effort, production), basé sur le modèle standard de la FAO, au moyen de sondages et échantillonages au hazard, mais de façon régulière (aux 4 débarcadères principaux, sans oublier des sondages - mensuels, par exemple - dans la partie est, vers Manazary). L'analyse de ces données devrait permettre d'évaluer, de manière continue, l'intensité de la pêche, son rendement, la production débarquée et, par échantillonages, la composition des stocks, les classes de taille/poids, le recrutement, la maturité sexuelle, etc.

  5. Composition de la brigade de vulgarisation. Un technicien responsable (adjoint technique de 1ère ou 2eme classe), capacité pour compléter le programme des données statistiques, les évaluer (avec l'assistance du personnel du Projet - biologiste, par exemple - au début); pour l'organisation des pêcheurs (en association pour l'acquisition de matériel, pour commencer) et pour la vulgarisation en général, mais surtout concernant la gestion des ressources, le traitement du poisson et la gestion financière (du pêcheur individuel, du groupe et, plus tard, de l'organisation de commercialisation). Des connaissances de base en pisciculture seraient également utiles. Deux adjoints (stagiaires) techniques qui se spécialiseraient l'un en pisciculture l'autre en commercialisation (et gestion administrative) pour les développements de ces aspects à moyen et long-terme.

  6. Il est indispensable que ce personnel soit pleinement mobile; donc un véhicule et un canot (avec hors-bord) seront nécessaire, vu l'état des pistes (impraticables en saison de pluies).

  7. Dans le cadre général du développement de la zone du lac, il est urgent de réparer au moins la piste le long de la cote nord du lac (jusqu'à Manazary).

6.2 RECONSTITUTION DES STOCKS

Pour ceci, plusieurs introductions sont à envisager, afin d'utiliser les niches “vides” disponibles et de produire ainsi plus de poissons.

  1. Introduction d'un Carnivore halieuthique, de préférence un silure. L'espèce africaine Auchenoglanis bisentatus (Bagridae) Geoffr, 1827, serait idéale du point de vue trophique (vermine, insectivore et malacophage), ainsi que de la qualité de sa chair, mais on ne connaît que très peu de choses sur sa croissance et sa reproduction. Alternativement, on pourrait considérer des silures asiatiques, dont la biologie est mieux connue et certains sont déjà utilisés en pisciculture, par exemple, Heteropneustes fossilis (Block, 18 ) Pargascies spp, par exemple, P. satichi, déjà introduit avec succès dans des lacs de barrage en Thaïlande (Baluyut, 1983). P. pangasius (Ham., est principalement malacophage et est cultivé au Bangladesh et en Thaïlande. A la limite le silure nord-américain Ictalurus punctatus (Ref. ) capable de s'adapter au climat local et déjà utilisé à grande échelle aux Etats-Unis en pisciculture, donc à biologie bien connue, pourrait aussi être considéré.

  2. Introduction d'un microphytophage de la famille des cyprinidae. Hypophthalmichthys molitrix (Vol 18), Labeo rohita (Ham., 1822), parmi les asiatiques; un Labeo africain, par exemple, L. victoriae ou L. altivelis, dont les exigences biologiques sont connus, mais qui n'ont jamais encore été utilisés en pisciculture.

  3. Introduction éventuelle, après étude de la qualité et quantité des composants organiques des vases du fond, d'un limnivore approprié. En Afrique, il y a les Citharinus (Cithaniridae) mais ce sont plutôt des espèces d'eaux chaudes et la températuree des eaux au lac Itasy pourraient constituer un facteur limite. Certains Labeo africains sont également limnivores, notamment L. victoriae. Parmi les espèces d'Asie, qui ont l'avantage d'être déjà cultivées, citons Lates calbasu (Ham., ) kontius (Jerd, ), bata. (Ham., ), Cirrhinus mrigala (Ham., 1822).

  4. Introduction d'un zooplanctonophage: ici le choix d'une espèce africaine se fait très difficile, car il n'y a pratiquement que des petites espèces, la plupart peu fécondes ( Schilbeidae, Characinidae, Cyprnidae -Engraulicypris par exemple) ou des clupéides qui remplissent ces niches. Parmi les espèces asiatiques, la plus indiquée serait Catla catla (Ham., 1822) bien connu en pisciculture, ou encore la carpe marbrée (Aristichthys nobilis).

Reste a définir la programmation de ces propositions, à rechercher les espèces les plus aptes, à faire l'étude de leur adaptation, reproduction, etc. (en station piscicole), à déterminer la densité de stockage, etc., bref, tout un éventail de recherches qui pourrait occuper plusieurs techniciens pendant quelques années. Certains de ces aspects ont déjà été traités et planifiés (Collar et al. , 1979 -pp 30–33 surtout). Comme sites possibles pour une station piscicole (voir figure 1) il y a le lac Mahiatondro (sur la route d'Analavory), le lac Thempona1 (au nord), ou bien une des baies de la cote ouest, ou encore près de l'exutoire (la “piscine”, en contrebas de ce dernier-, ne convient pas à cause de ses rives trop abruptes) . Rappelons que T. macrochir fut introduit (en 1968/69) au lac Kariba et n'a jamais pu s'y établir, en présence de T. mossambica mortimeri.

Résultats espérés de ces introductions: amélioration de l'équilibre écologique piscicole, par la meilleure utilisation des niches trophiques existentes, et par conséquent, une productivité plus grande et une augmentation sensible de la production (désirée par les pécheurs), cela rélève plutôt de l'utopie, car si l'espèce a disparu alors qu'elle était dominante, elle n'a pratiquement aucune chance de se réétablir en présence des T. nilotica et Til. 3/4 actuellement dominants. Il serait néanmoins intéressant d'étudier en étang les relations entre ces espèces et de rechercher la parenté du Til. 3/4 en essayant l'hybridisation entre T. nilotica et T. nigra.

6.3 DEVELOPPEMENT DE LA PISCICULTURE

Ceci peut prendre plusieurs formes, soit:

  1. pisciculture en cage, de nombreux endroits s'y prêtent, spécialement dans le col du lac, dans les baies abritées de la cote ouest et du sud et de l'extrême est où cependant les risques de sédimentation et peut-être, de contamination par pesticides, sont considérables. Les Chinois sont intéressés pour exécuter un projet de ce genre. Il faut veiller à ce que les poissons cultivés ainsi, appartiennent à des espèces déjà présentes ou considérées pour l'introduction (voir section 6.2);

  2. pisciculture en chenaux (dans les marais, bordant le lac, les rizières);

  3. rizipisciculture, dans les rizières avoisinantes;

  4. pisciculture en étangs là, où les conditions s'y prêtent, autour du lac;

Ces trois derniers pourraient être combinés de différentes façons, selon les lieux.

La culture en cage est indiscutablement la plus intéressante à long terme, étant donné les conditions favorables du milieu; baies abritées et eaux assez profondes, d'où peu de turbulence, eaux riches en plancton, bien oxygénées, etc. De plus, la région (surtout à l'ouest et au nord-ouest) est fertile, ce qui assure une abondance de déchets agricoles. Dans les villages, le son de riz par exemple, est simplement jeté en tas, sans autre utilisation, sauf accessoirement, pour appâter (pêche à l'épervier) ou pour composter les jardins parfois. Un projet pilote est recommande dès que possible (Chinois?).

6.4 RECOMMANDATIONS DIVERSES

  1. surveillance et étude de l'évolution du peuplement de Channa sp., afin d'évaluer l'impact de ce prédateur sur la faune ichthyologique du lac;

  2. étude (en saison de pluies) sur l'intensité d'apport de sédiments, qui peuvent influencer négativement la productivité des eaux (turbidités, les frayères et le développement de la pisciculture (en cage) dans certaines zones du lac. Accessoirement, l'utilisation des pesticides et herbicides agricoles dans le bassin du lac (parait-il très bas, selon informations sur place);

  3. essais des panneaux dits “kakabans” pour améliorer la reproduction de la carpe, en fournissant ainsi des surfaces adéquates pour les pontes, étant donné que la végétation aquatique est pauvre. Dans les baies de la côte ouest et dans le col du lac, il y a des zones calmes et peu profondes qui conviendraient parfaitement, et la brigade de vulgarisation devrait - avec les pêcheurs - procéder à leur installation et les responsabiliser pour leur maintien;

  4. étude (éventuelle) du peuplement et des migrations des anguilles, surtout du recrutement en civelles, dans la zone du lac, afin de déterminer les facteurs de mortalité. (Les civelles sont, parait-il pêchées dans les rizières, en été);

  5. étude de la fréquence et durée de ponte du Til. 3/4 (en étang) pour quantifier la production des différents stades jusqu'au juvénile. Eventuellement aussi impact de prédation du fibata sur cette espèce.

1 Ce lac a des eaux claires, à l'aspect peu productif (confirmé par les pêcheurs qui disent qu'ils stockent eux mêmes ce lac en Tilapia, carpes, etc. Il y a aussi des blackbass, du Marakely et des Gambusia, 2–3 pêcheurs pêchent entre septembre et octobre surtout, utilisant divers engins. Les plantes aquatiques sont principalement du type émergeant marginal, le fond sableux près des bords et l'exutoire vers le lac Itasy coule toute l'année (?)


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