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Etude de la coopération internationale pour le développement de la foresterie


M.K. Muthoo

Maharaj K. Muthoo a été Directeur du Service des opérations forestières de la FAO de 1980 à 1994. Lorsqu'il a écrit le présent article il était Conseiller spécial du Sous-Directeur général.

Le présent article est centré sur l'assistance technique et financière internationale à l'appui des efforts nationaux en foresterie, dans le cadre global du développement durable. Il retrace l'évolution de la coopération internationale en foresterie, en soulignant les programmes de terrain mis en oeuvre par la FAO, et examine les tendances actuelles et les perspectives, compte tenu des difficultés et des possibilités résultant de la CNUED.

La coopération internationale pour le développement de la foresterie a commencé après la seconde guerre mondiale, dans les années 50 plus précisément, avec le lancement du Programme élargi d'assistance technique des Nations Unies, puis du Fonds spécial pour le développement économique des Nations Unies, qui incluaient tous deux des projets forestiers dans leurs activités. Cette assistance était adressée surtout aux pays qui sortaient du colonialisme, mais s'étendait aussi à plusieurs autres pays, en particulier dans le bassin méditerranéen: Grèce, Yougoslavie et Portugal. Vers le milieu des années 60, les deux programmes ont été fusionnés en un programme unique, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui a permis de financer les grands comme les petits projets à l'aide de contributions volontaires des gouvernements annoncées aux conférences des contributions annuelles du PNUD. L'adoption de programmes pluriennaux par pays pour l'assistance du PNUD a marqué la fin de l'approche par projet qui avait caractérisé les deux précédents programmes.

Au départ, la coopération internationale en foresterie, y compris l'assistance bilatérale, était axée sur la fourniture d'assistance technique par le biais d'experts résidents, le plus souvent pour des enquêtes sur les ressources visant à déterminer le potentiel d'investissement. Elles étaient suivies par des projets de promotion des industries forestières, notamment de la pâte et du papier, de sciages et de production de panneaux. De vastes plantations ont été créées, destinées surtout à concentrer les matières premières nécessaires à l'industrie, tout en servant aussi à compenser et éviter la destruction des forêts naturelles. La formation et les bourses, maillon important dans la chaîne des intrants d'assistance technique, ont toujours fait partie des projets forestiers, en particulier ceux dont l'exécution incombait à la FAO. En conséquence, beaucoup d'instituts nationaux existants d'éducation, de formation et de recherches forestières doivent leur origine à la coopération internationale pour le développement.

Dans les années 70, trois grands événements internationaux ont influé considérablement sur la nature, le type et la portée des projets d'assistance technique. Le premier a été la Conférence des Nations Unies sur l'environnement, tenue à Stockholm en 1972; le deuxième a été le huitième Congrès forestier mondial organisé à Djakarta (Indonésie) en 1978; et le troisième a été la Conférence mondiale sur la réforme agraire et le développement rural (CMRADR), qui a eu lieu au siège de la FAO à Rome en 1979. Ces manifestations internationales ont traduit l'évolution des conceptions aux niveaux politique et professionnel. Dans les années 50 et 60, la "solution" envisagée était l'industrialisation rapide, tandis que dans les années 70 on a reconnu la valeur du développement rural. Les résolutions qui émanent de ces réunions reflètent clairement ce changement de priorité et ont eu une influence considérable sur le développement forestier; on est passé d'un développement axé simplement sur la production, le commerce et l'industrie du bois, à un développement centré sur la population elle-même et accordant plus d'attention à la conservation et la gestion durables des forêts.

C'est à cette époque que la première génération de projets forestiers, spécifiquement axés sur les besoins de la population locale qui y participait, a été lancée grâce aux efforts financés conjointement par la FAO et l'Agence suédoise d'aide au développement international (ASDI). Ces projets sont les précurseurs de nombreuses initiatives internationales dans des domaines divers: foresterie communautaire, pratiques agroforestières, petites entreprises forestières, produits forestiers non ligneux, rôle des femmes dans le développement et contribution des forêts à la sécurité alimentaire; toutes ces activités se distinguent par l'importance accordée à la participation populaire. Cette tendance se caractérise notamment par la formulation de projets forestiers adoptant une approche multidisciplinaire à la lutte contre la pauvreté ainsi que par l'inclusion d'activités forestières dans les projets de développement rural.

En fait, la catégorie de projets d'aide au développement qui s'accroît le plus rapidement inclut la foresterie au service du développement rural, qui comprend la plupart du temps des activités de foresterie communautaire. Par exemple, un projet en cours au Népal sur la foresterie en tenure à bail et le développement fourrager dans les régions de collines, bénéficiant d'une contribution de 16 millions de dollars EU du Fonds international pour le développement agricole (FIDA), amorce une nouvelle approche des activités intégrées de foresterie, d'agriculture et d'élevage, sous l'égide de mécanismes locaux autonomes.

La catégorie de projets forestiers bénéficiant d'une aide de la FAO qui se développe le plus rapidement est celle des projets forestiers de développement rural

La dimension de l'environnement a toujours constitué un aspect fondamental de l'aménagement forestier scientifique, mais son inclusion dans les programmes forestiers est récente. De plus en plus les projets de foresterie et d'industrie forestière viseront à instaurer un équilibre approprié entre l'aménagement de l'environnement et le développement économique. Ces projets pourraient attirer des financements non traditionnels, tels que des arrangements novateurs de conversion des créances en action en faveur de la nature et une participation accrue des ONG (internationales et locales), du secteur privé et des fondations. Au Sri Lanka, par exemple, un projet d'aménagement de l'environnement en foresterie est exécuté par la FAO en collaboration avec l'Alliance mondiale pour la nature (UICN), et financé par le Fonds pour la protection de l'environnement.

L'aménagement des bassins versants, la foresterie en zone aride et la lutte contre la désertification font également partie de cette catégorie d'activités, de même que les projets qui visent la conservation et l'aménagement des ressources de la faune sauvage et la création de forêts cultivées. Citons par exemple la lutte contre la désertification au Sénégal, où plusieurs milliers de travailleurs volontaires, provenant d'organisations de développement rural et des populations locales, ont entrepris des activités de reboisement des forêts claires, de protection des terres irriguées et d'aménagement des pâturages. Ces initiatives ont sensibilisé l'opinion publique à l'importance du couvert forestier pour l'amélioration de l'environnement, de l'emploi et du revenu locaux.

La transition de nombreux anciens pays centralement planifiés d'Europe et d'Asie vers une économie de marché et la demande qui accompagne ce processus ont une incidence considérable sur la coopération internationale en foresterie. La coopération technique dans ce domaine est axée sur des questions prioritaires comme la réforme des politiques du secteur forestier, les nouveaux accords sur le titre de propriété des forêts et des industries forestières, la constitution d'une capacité institutionnelle, l'amélioration des technologies, la normalisation et le contrôle de la qualité, les informations sur les marchés et la promotion des investissements.

On assiste en même temps à une prise de conscience accrue de l'incidence du déboisement des forêts tropicales sur l'environnement et le secteur socioéconomique. Des informations et des recherches supplémentaires sont nécessaires en ce qui concerne les écosystèmes fragiles comme les forêts tropicales humides, les terres arides et les palétuviers, de même que l'aménagement des bassins versants de montagne, qui subissent tous une pression démographique croissante exacerbée par le problème des paysans sans terre et de la pauvreté.

La lutte contre la désertification dans les zones arides est un domaine important de l'assistance technique

ÉVOLUTION DU PROGRAMME FORESTIER DE TERRAIN DE LA FAO

Le programme forestier de terrain de la FAO est passé d'un montant inférieur à 1 million de dollars par an en 1953 à près de 80 millions de dollars en 1990. Le nombre de projets de coopération forestière s'est également accru rapidement, de 53 projets représentant une valeur de 46 millions de dollars en 1971 à 290 projets équivalant à 481 millions de dollars en 1993. Le renouvellement annuel de ce programme par l'approbation de nouveaux projets a atteint une centaine de millions de dollars, ce qui correspond à une multiplication par plus de cinq depuis 1980. Aujourd'hui, la FAO est le premier organisme de coopération technique du système des Nations Unies. En 1994, son Programme forestier de terrain comprenait 330 projets d'assistance technique dans plus de 90 pays, employant 690 experts et consultants. Les projets de terrain sont appuyés par le Département des forêts qui concentre le plus grand nombre de spécialistes forestiers parmi toutes les organisations internationales. Ce programme utilise également diverses connaissances spécialisées disponibles dans les autres départements techniques de l'Organisation.

La rareté des ressources de coopération pour le développement justifie l'emploi de méthodes novatrices et les programmes doivent être planifiés et exécutés de façon cohérente et rentable. La FAO a entrepris dans ce but un processus de restructuration qui vise, entre autres, à utiliser les capacités et les compétences techniques de l'Organisation de la façon la plus efficace et à renforcer le partenariat avec les pays membres, les organisations internationales et les organismes d'aide. Une de ces initiatives a été la création, en 1994, d'un Département de coopération technique qui sert de pivot aux activités opérationnelles englobant les services consultatifs, les investissements, la mobilisation de ressources extrabudgétaires, l'exécution des opérations de terrain et la coopération avec les organismes multilatéraux et bilatéraux, le secteur privé et les organisations non gouvernementales (ONG). Le Service des opérations forestières fait à présent partie du Département de coopération technique et il maintiendra en même temps son identité sectorielle distincte, sa supériorité technique et ses liens professionnels avec toutes les autres unités compétentes de la FAO, notamment le Département des forêts.

L'assistance technique au secteur forestier des pays en transition pose des problèmes nouveaux

COOPÉRATION TECHNIQUE INTERNATIONALE EN FORESTERIE APRES LA CNUED

Tout comme la CMRADR et la Conférence des Nations Unies sur l'environnement ont changé les perspectives de la foresterie dans les années 70, la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), qui s'est tenue à Rio de Janeiro en 1992, et le Programme Action 21 qui en découle, ont modelé la perception du développement forestier dans le monde entier, contribuant à une nouvelle vision du secteur orientée explicitement vers les questions et les défis concernant l'environnement. La contribution des forêts au développement par le biais de leur aménagement durable, de leur conservation et de leur utilisation de manière compatible avec le rôle du secteur dans l'environnement, devra figurer en bonne place dans les programmes de coopération pour le développement international. Les Conventions sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou par la désertification, en particulier en Afrique, et sur la Diversité biologique, de même que l'effort actuel d'élaboration de critères et d'indicateurs d'aménagement durable des forêts, devront se traduire en actions concrètes sur le terrain par le biais de programmes et de projets bien conçus. Tout cela nécessitera une meilleure compréhension des liens intersectoriels pour favoriser une collaboration interdisciplinaire en vue d'arriver à des programmes concrets et harmonieux dans le contexte global de la planification de l'utilisation des terres.

Dans le cadre du système des Nations Unies, la FAO est le maître d'oeuvre chargé de promouvoir une collaboration active en matière de suivi de la CNUED aux Principes forestiers et, notamment, aux Chapitres 11 et 13 d'Action 21. Elle appuie en outre les travaux envisagés au titre du Chapitre 15 (Préservation de la diversité biologique), et le secrétariat de la Convention sur la Diversité biologique, ainsi que les travaux du comité de négociation intergouvernemental pour une convention de lutte contre la désertification, dont le texte final a été approuvé en juin 1994.

En tant que maître d'ouvre pour la foresterie, la FAO assure la collaboration et la coopération entre les divers acteurs de la foresterie au sein du système des Nations Unies [NDLR: pour plus de détails sur le rôle de la FAO dans le développement forestier post-CNUED, voir article de Chipeta et Michaelsen]. Les paragraphes qui suivent passent brièvement en revue les activités de certains de ces acteurs du système des Nations Unies.

Les craintes exprimées dans le rapport Brundtland (1987) concernant une pénurie grave de ressources pour financer les projets et stratégies de conservation a amené à établir en 1990 à titre pilote, le Fonds pour la protection de l'environnement. Le PNUD, le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et la Banque mondiale ont accepté de superviser l'exécution des programmes financés par le Fonds qui est devenu opérationnel grâce à l'allocation d'environ 2 milliards de dollars. L'éventail des projets habilités à être financés au titre du Fonds a été élargi pour inclure les programmes de remise en état des terres dégradées (notamment en ce qui concerne la désertification) et les terrains déboisés (en particulier dans le cadre de la mise en ouvre des Principes forestiers). La FAO participe déjà à l'exécution de deux grands projets forestiers financés par le Fonds en Afrique de l'Est et en Asie du Sud, visant la conservation de la diversité biologique.

Une des conséquences de la CNUCED est le renforcement du PNUE, qui comporte des activités juridiques, économiques et de surveillance et d'évaluation de l'environnement. Le principal véhicule de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) en matière de coopération internationale en foresterie est son programme L'homme et la biosphère, axé sur la recherche et la synthèse des informations sur l'écologie et l'utilisation durable des systèmes forestiers, l'importance de la diversité biologique et la coopération pour l'aménagement des ressources naturelles dans les zones tropicales humides. Le programme forestier de l'Organisation internationale du travail (OIT) se concentre sur la formation spécialisée, l'emploi et la création de revenu, et l'amélioration des conditions de travail, de santé et de sécurité dans les activités forestières. Le suivi du Programme Action 21 comprend notamment la promotion des pratiques et des codes environnementaux les meilleurs dans les activités de foresterie et d'abattage et la production de bois, de pâte et de papier.

Pour être efficace, l'assistance technique nécessite des approches souples et novatrices qui s'adaptent à l'évolution des conditions

Le Bureau des Nations Unies pour la région soudano-sahélienne (BNUS) centre ses activités sur les zones arides du nord, et semi-arides et subhumides sèches, en Afrique. En réponse au Chapitre 12 d'Action 21 (Gestion des écosystèmes fragiles: lutte contre la désertification et la sécheresse), le BNUS encourage l'utilisation intégrée des terres qui inclut les plantations d'arbres pour répondre aux besoins essentiels de nourriture, d'énergie et de fourrage, pour améliorer la qualité de vie des communautés locales et pour renforcer et protéger la base de ressources productives. Le BNUS favorise les approches qui incluent des systèmes agrosylvopastoraux, l'agro-foresterie, les parcelles boisées et la forêt communautaire dans les villages, et la plantation de rideaux brise-vent.

Le PNUD a lancé son Programme Capacité 21 durant la CNUED, pour répondre spécifiquement aux besoins d'Action 21. La foresterie est une composante essentielle de Capacité 21 et un Programme de capacité nationale pour les forêts a été préparé. Entre autres choses, ce programme devrait renforcer les capacités de préparation et d'exécution des plans d'action forestiers nationaux et établir des mécanismes de coopération, consultation et coordination. Outre ce programme, grâce à une coopération avec les pays, le PNUD soutient les activités forestières en ce qui concerne les conventions sur la désertification et la diversité biologique.

Depuis sa création, la Banque mondiale accorde des prêts pour financer une centaine de projets dans le secteur forestier, pour un engagement total dépassant 2,5 milliards de dollars. Dernièrement, la tendance a consisté à renforcer la foresterie sociale et les questions d'environnement dans les projets forestiers, et à mettre l'accent sur la réforme des politiques et le renforcement des institutions, l'expansion des ressources et la conservation des zones forestières intactes par le soutien des initiatives visant à élargir les zones protégées et à en améliorer l'aménagement. La Banque encourage actuellement les gouvernements à adopter des politiques prudentes en matière d'utilisation des ressources dans les forêts tropicales humides et elle n'accorde pas de prêts pour l'abattage commercial dans les forêts tropicales humides primaires; le financement des projets d'infrastructure dans ces zones fait l'objet d'une évaluation rigoureuse de l'environnement. De plus en plus, la politique de prêts de la Banque est centrée sur les projets d'aménagement des ressources nationales dans lesquels la foresterie est intégrée dans le contexte plus vaste de l'utilisation des terres et de la protection de l'environnement. La Banque accorde une attention toute spéciale aux 20 pays dans lesquels la forêt tropicale humide est gravement menacée.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) est celui des organismes de l'ONU qui apporte la plus grande contribution aux activités de coopération pour le développement dans des domaines liés à la foresterie. Dans presque tous les cas, l'aide alimentaire est utilisée pour amorcer les activités d'investissement qui donneront des bénéfices à plus long terme. Les projets du PAM contribuent à la conservation des forêts existantes et à la création de nouvelles plantations dans lesquelles le droit d'exploitation et d'utilisation des arbres plantés est accordé spécifiquement à des personnes et à des groupes, et où l'aménagement est effectué en collaboration entre les collectivités locales et les services publics. La FAO collabore étroitement avec le PAM et fournit l'appui technique nécessaire à l'identification et l'évaluation des projets bénéficiant d'une aide alimentaire ainsi qu'à leur surveillance, leur évaluation et leur suivi.

La CNUED a lancé un appel à la communauté internationale pour qu'elle soutienne les pays dans la préparation et l'exécution des programmes d'action forestiers nationaux (PAFN), en particulier ceux qui relèvent du Programme d'action forestier tropical (PAFT). Les pays en développement qui participent à ce programme sont au nombre de 92, et 31 plans d'action forestiers nationaux sont actuellement exécutés. Il faut relancer la coopération internationale dans le domaine du soutien aux plans nationaux pour renforcer la capacité des pays en matière de développement global, par des investissements dans les ressources humaines, les institutions et les projets pilotes. La FAO s'efforce de renforcer son soutien aux PAFN par une décentralisation des structures et un élargissement de la portée du PAFT à tous les types de forêts.

RÉFLEXIONS
Gumersindo Borgo

RESSOURCES FINANCIEREs POUR LA COOPÉRATION INTERNATIONALE EN FAVEUr dU DÉVELOPPEMENT FORESTIER

Les ressources nécessaires pour faire face aux défis du développement forestier, qui comprennent, mais pas uniquement, celles qui ont été explicitement définies dans le processus de la CNUCED, dépassent les moyens de la plupart des gouvernements. Une coopération internationale accrue en faveur du développement et des ressources supplémentaires et un accès amélioré aux technologies pour permettre aux pays en développement de mettre en ouvre un développement forestier durable sont donc essentiels.

Les quatre grands programmes prévus au Chapitre 11 (Lutte contre le déboisement) d'Action 21 - soutien aux rôles multiples des forêts, activités de verdissage, amélioration de l'utilisation des produits forestiers et accroissement des capacités de planification intégrée des forêts - nécessiteront un investissement de 31,3 milliards de dollars par an, pour la période 1993-2000. Sur ce montant, près de 20 pour cent, soit 5,7 milliards de dollars, seront sous forme d'aide internationale au développement. Ce dernier chiffre est plus de quatre fois supérieur à la valeur de toute l'aide publique au développement (APD) accordée à la foresterie en 1990.

La CNUED n'était pas une conférence de contributions mais certains pays et groupes de pays ont annoncé leur intention d'engager des fonds supplémentaires pour soutenir Action 21. La Communauté européenne (CE) s'est engagée à accroître l'APD de 4 milliards de dollars par an; le Japon a déclaré qu'il augmenterait son APD de 7,7 milliards de dollars par an d'ici à l'an 2000; l'Espagne a accepté de tripler son APD. L'objectif de consacrer 0,7 pour cent du PNB à l'aide au développement a été réaffirmé et les Pays-Bas ont décidé d'accroître ce pourcentage à 0,8 pour cent si les autres pays faisaient de même.

Toutefois, les progrès n'ont pas été aussi rapides que l'on pouvait l'espérer. Les engagements pris à Rio n'ont pas été suivis par des réalisations à la mesure de ces engagements. Cette réaction lente au Programme Action 21 est évidente dans le secteur forestier aussi, sans aucun doute parce que les priorités du Programme Action 21 n'ont pas été clairement établies à la CNUED, mais aussi à cause des difficultés budgétaires dans la plupart des pays donateurs et parce que les organismes donateurs ont limité les fonds disponibles pour certains types d'investissements forestiers sous l'impulsion d'ONG influentes avec lesquelles il faudrait renforcer les contacts et l'échange d'informations.

En effet, sans même considérer la CNUED, les niveaux de financement de l'APD en matière de foresterie ont progressé lentement depuis 1990, même si l'objectif de doubler l'APD à la foresterie entre 1985 et 1990 a probablement été atteint. L'APD dans le domaine de la foresterie s'élevait à 1,35 milliard de dollars en 1990, soit une augmentation de 23,9 pour cent par rapport à 1988. Toutefois, cela ne représente que 9,2 pour cent de la valeur de toute l'APD dans le secteur agricole et 2,8 pour cent du montant total de l'APD.

Par ailleurs, certains signes indiquent une stagnation des ressources consacrées à l'APD alors qu'un sentiment de "lassitude" des donateurs règne dans certains milieux. A cause de cela, ainsi que de la demande croissante d'aide humanitaire, de secours et d'opérations de maintien de la paix, les ressources disponibles pour renforcer les efforts nationaux de suivi de la CNUED risquent d'être très inférieures aux besoins.

Les ressources des pays donateurs consacrées à la coopération pour le développement international ont augmenté plus rapidement pendant la période 1988-1990 (12,5 pour cent par an), en raison surtout de l'accroissement des contributions du Japon et du Canada; toutefois, le taux de croissance des contributions des pays donateurs a été moins élevé en 1988-1990 qu'en 1986-1988. De plus, les prévisions établies par les donateurs en 1991 concernant leurs futurs niveaux de dépenses étaient inférieures pour la période allant jusqu'en 1995, avec un accroissement annuel prévu de 5 pour cent seulement pour les pays donateurs et 6 pour cent pour les organisations des Nations Unies. Un certain nombre de pays donateurs prévoient une croissance zéro des niveaux d'APD dans le secteur forestier jusqu'en 1995; ce sont l'Allemagne, la Belgique, les Etats-Unis, l'Irlande la Nouvelle-Zélande. Bien sûr, ces prévisions ont été établies avant que la CNUED n'ait lieu. Pour que la foresterie puisse jouer le rôle primordial que lui a assigné le Programme Action 21, il faudra que l'aide publique au développement dans le secteur forestier s'accroisse beaucoup plus rapidement.

L'aide publique au développement en matière de foresterie est fournie par trois grandes catégories de donateurs: les pays donateurs de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les banques de développement et les institutions des Nations Unies. Parmi les pays donateurs d'aide bilatérale, l'Allemagne et le Japon sont de loin les plus gros bailleurs de fonds. Avec les Etats-Unis, ils ont fourni près de la moitié du montant total de l'aide bilatérale directe octroyée ces dernières années. Viennent ensuite les Pays-Bas, qui acheminent la majeure partie de leurs contributions par la FAO. Le Canada, la France et la Suisse apportent elles aussi une contribution bilatérale importante; les pays scandinaves contribuent généreusement, en partie à titre multilatéral, tout comme l'Italie et la Belgique. L'Australie et la Nouvelle-Zélande soutiennent aussi des programmes forestiers outre-mer, tandis que l'Autriche, l'Espagne, l'Irlande et le Portugal sont d'autres pays fournissant une aide dans le domaine forestier. La CE s'affirme comme donateur important avec 261 millions de dollars d'aide à la foresterie en 1993, contre 20 millions de dollars seulement en 1986 et 45 millions en 1990.

La Banque mondiale est celle qui accorde de loin le plus de crédits bancaires à la foresterie, souvent en participation avec la FAO pour la préparation de projets et parfois l'exécution des activités. Parmi les banques de développement régionales, la plus active dans le domaine de la foresterie est la Banque asiatique de développement (BAsD) suivie par la Banque interaméricaine de développement (BID). La contribution de la Banque africaine de développement est restée modeste jusqu'à présent.

Dans le système des Nations Unies, le PAM est le plus gros donateur d'aide aux pays en développement pour les activités forestières entreprises sur le terrain, avec plus de 120 millions de dollars en 1994. Il fournit des investissements substantiels aux projets forestiers, surtout sous forme de programmes vivres-contre-travail, en particulier dans le domaine du développement rural. Sur un total de 328 projets de développement du PAM en 1990, une centaine étaient axés sur la foresterie ou incluaient des activités forestières. La valeur de ces projets s'élevait à 566 millions de dollars contre 230 millions de dollars à peu près en 1980. Toutefois, le nombre de ces projets a baissé à 86 en 1994, pour une valeur de 517 millions de dollars.

Le PNUD est le principal organisme acheminant les fonds d'assistance technique au sein du système des Nations Unies, et il s'appuie essentiellement sur la FAO pour l'exécution. Cependant, il a connu des difficultés de financement ces dernières années et l'on assiste à une baisse sensible des disponibilités globales de ressources pour la foresterie estimées à 33,5 millions de dollars en 1993.

RÉFLEXIONS
Michel Khouzami

CONCLUSION

Depuis une cinquantaine d'années, les programmes de coopération technique internationale ont joué un rôle important dans l'amélioration du développement forestier national et le renforcement des capacités en vue d'un dialogue de haut niveau dans les diverses instances mondiales, sur les questions forestières, et en particulier à la CNUED. Les programmes de participation populaire lancés par la FAO ont aidé à mobiliser l'intérêt des principaux groupes qui sont concernés par la foresterie: populations rurales, habitants des forêts, secteur privé et organisations non gouvernementales, en vue d'un aménagement efficace des forêts, des arbres et de la faune sauvage. La reconnaissance du contexte socioculturel des activités de coopération en matière forestière est très avancée par rapport à de nombreux autres secteurs. Les investissements dans les activités de verdissage de la planète Terre représentent un objectif viable destiné à assurer la durabilité à venir. Le Programme Action 21 a mis en lumière les moyens qui permettront d'y parvenir et le rôle particulier que la foresterie devra jouer. Le soutien actif des gouvernements et une coopération internationale dynamique en faveur du développement représenteront un atout critique.


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