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Stratégies de communication et de diffusion de l'information en matière de foresterie: nouveaux partenaires, nouvelles priorités et technologies


S.A. Dembner and J. Anderson

Stephen A. Dembner est coordonnateur des publications et de l'information et rédacteur en chef d'Unasylva au Département des forêts de la FAO, à Rome. Jon Anderson est chargé de la vulgarisation à la Division des ressources forestières de la FAO, à Rome.

Note: Cet article s'inspire d'un document écrit par les auteurs pour le XXe Congrès mondial de l'IUFRO qui s'est tenu à Tampere (Finlande) en août 1995.

Les besoins et les possibilités en matière de stratégies de communication et de diffusion d'informations forestières se modifient, compte tenu des modalités nouvelles du débat mondial sur la foresterie, avec en particulier l'émergence de nouveaux partenaires, de nouvelles priorités et de nouvelles technologies de communication. Analyse de la situation et évolution de l'action de la FAO.

Les changements que connaît le monde de la foresterie, notamment le souci croissant d'un aménagement durable et plus diversifié des écosystèmes forestiers, qui porte à la fois sur les produits ligneux et non ligneux et sur les autres avantages que l'on peut tirer de la forêt, lui posent de nouvelles exigences et multiplient les parties intéressées à l'aménagement forestier. C'est d'ailleurs ce que montrent les priorités touchant la foresterie qui se sont dégagées de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), ou Sommet de la planète Terre, qui a eu lieu en 1992. La conscience nouvelle de l'importance, pour un aménagement durable des forêts, du rôle de multiples partenaires - population locale, organisations non gouvernementales (ONG), secteur privé et pouvoirs publics - incite à élargir la diffusion des informations relatives à la foresterie et à instaurer une communication souple fondée sur le dialogue, le retour d'informations et la flexibilité. Dans le même temps, les technologies évoluent, offrant pour l'échange des informations en matière de foresterie des outils nouveaux, de portée plus vaste, souvent plus rapides et plus efficaces par rapport à leur coût. La vidéo, les multimédias, l'édition électronique et les réseaux offrent des possibilités extrêmement intéressantes. Les nouveaux besoins d'information impliquent des stratégies de communication appropriées, c'est-à-dire un continuum message/média.

La FAO a 50 ans d'expérience dans la production et la diffusion d'informations concernant la foresterie, à la fois dans le cadre de son Programme ordinaire au Siège et à travers ses projets de terrain. Jusqu'à une date récente, compte tenu de la demande qui s'exerçait sur le secteur forestier, le programme FAO de publications et d'informations sur la foresterie était consacré à la fourniture d'informations techniques, à l'analyse statistique et à l'analyse des politiques,ainsi qu'à l'organisation et au compte rendu de réunions techniques à divers niveaux. Le support essentiel en était le document, dont les principaux destinataires étaient les fonctionnaires spécialistes de la forêt et les responsables des ressources naturelles. Aujourd'hui, la FAO (essentiellement mais non exclusivement dans le cadre de son Département des forêts) élabore de nouvelles stratégies et modifie son approche des publications et de l'information (recueil et diffusion) afin de mieux l'adapter aux demandes qui s'exercent sur la foresterie mondiale.

RAPPEL HISTORIQUE ET ACTIVITÉS PRÉSENTES

Le premier rapport adressé aux gouvernements des Nations Unies par la Commission intérimaire des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (ONU, 1944) affirmait notamment:

"La nécessité de faire plus largement connaître les données utiles sur la nutrition, d'une part, et sur la consommation et la production d'aliments, d'autre part, est si importante et si indispensable au progrès qu'il faut donner le même poids à la diffusion des connaissances [c'est nous qui soulignons] qu'à la recherche. [...] Il est important, dès le départ, de mettre en place un programme de publications". Autrement dit, les fondateurs de la FAO étaient déjà parfaitement conscients du fait que la communication était tout aussi importante et tout aussi nécessaire que la production des connaissances.

La première publication de la FAO concernant l'analyse statistique et les perspectives en matière de foresterie, intitulée Forestry and forest products: world situation 1937-1946 (FAO, 1946), a été pré-sentée en 1946, et le premier numéro d'Unasylva, revue internationale trimestrielle publiée par la FAO sur la foresterie et l'industrie forestière, est paru en juillet 1947. Au fil des années, le nombre et la diversité des publications relatives à la foresterie ont beaucoup augmenté, en fonction du programme de l'Organisation. Cependant, pratiquement toutes ces activités, qui ont continué de s'adresser à la communauté des spécialistes de la foresterie, étaient à base de médias imprimés diffusés par des circuits officiels ou institutionnels.

La première publication de la FAO sur l'analyse statistique et les perspectives forestières

Une des publications les plus récentes de la FAO sur l'évaluation des ressources forestières

Activités menées actuellement au Siège

Aujourd'hui, les activités de communication et d'information qui se déroulent au Siège en matière de foresterie se répartissent en cinq grandes catégories: fourniture de données et d'analyses statistiques; production et diffusion de publications techniques; production et diffusion de périodiques; organisation et compte rendu de réunions; exposés publics faits par les fonctionnaires du Siège, en général lors de réunions.

La collecte, l'analyse et la diffusion de données statistiques a toujours représenté une part essentielle du travail de la FAO dans le domaine de la foresterie. L'Annuaire FAO des produits forestiers en est à sa 47e édition annuelle, et de nombreuses publications sont éditées dans le domaine de l'analyse statistique et des perspectives; à titre d'exemple, on peut citer l'Evaluation des ressources forestières 1990 - Synthèse mondiale (FAO, 1995a), et la 6e édition de l'Etude des tendances et perspectives du bois en Europe, qui sera terminée au début de 1996. Un Centre mondial d'information agricole (WAICENT) a récemment été mis en place; il fournit des données statistiques (FAOSTAT), notamment en matière de foresterie, ainsi que des informations sous forme de textes (FAOINFO) en ligne, sur disque souple et sur CD-ROM.

La foresterie fait partie des domaines couverts par le Centre mondial d'information agricole (WAICENT)

La rédaction et la publication de monographies techniques font partie des activités permanentes du Département des forêts. Cela va d'analyses des techniques modernes publiées dans diverses langues dans la série bien connue des études FAO sur les forêts (qui comptent aujourd'hui près de 130 ouvrages) - par exemple Foresterie et sécurité alimentaire (FAO, 1993) et Biotechnology in forest tree improvement (FAO, 1994a) - à des documents de travail visant à susciter de nouveaux débats, notamment des publications diverses telles que Potential of urban forestry in developing countries: a concept paper (FAO, 1994d).

Le programme Arbres, forêts et communautés rurales (FTPP) est l'élément moteur des activités de la FAO visant à mettre au point des approches et des méthodologies participatives; il utilise toute une gamme de médias, allant de bandes dessinées et de cassettes vidéo à des guides et des manuels. Il aide aussi à la mise au point de techniques et de systèmes de communication locale et à l'élaboration d'outils pour l'analyse des systèmes de communication. Depuis le début des années 90, le Programme a mis en place et entretient un réseau mondial qui relie aujourd'hui plus de 5 000 personnes et institutions.

La contribution des bureaux régionaux et nationaux de la FAO au programme de diffusion d'informations forestières mérite aussi d'être citée. Le Bureau régional pour l'Asie et le Pacifique, par exemple, édite chaque année en moyenne huit à dix publications sur la foresterie, ainsi que l'important périodique intitulé Tigerpaper.

Unasylva, périodique principal de la FAO sur la foresterie, est publié trimestriellement en anglais, français et espagnol; sa diffusion totale atteint environ 10 000 exemplaires. Chaque numéro est consacré à un thème donné. D'autres périodiques plus spécialisés ont été lancés, par exemple le bulletin Ressources génétiques forestières, le Forest Harvesting Bulletin et le Non-wood News. Ces publications sont destinées à des spécialistes.

Film vidéo produit par le Programme de foresterie communautaire de la FAO

La FAO coordonne deux systèmes coopératifs internationaux d'information qui englobent la foresterie: le Système international d'information sur les sciences et la technologie (AGRIS) et le Système d'information sur les recherches agronomiques en cours (CARIS). AGRIS regroupe les informations bibliographiques relatives aux ouvrages publiés dans le monde entier sur l'agriculture, et CARIS les informations relatives aux recherches agricoles en cours dans les pays en développement ou concernant ces pays. La base de données d'AGRIS contient 260 000 références relatives à la foresterie qui ont été introduites dans le système entre 1975 et 1994. Un CD-ROM sur la foresterie et l'agroforesterie dans AGRIS est en cours de production pour diffusion aux centres participants et aux institutions de recherche forestière.

L'un des rôles de la FAO étant de servir de forum de libre discussion, les réunions constituent un élément fondamental du travail du Département des forêts. Elles comprennent notamment les sessions biennales du Comité des forêts, organisme technique qui traite spécifiquement des forêts au plus haut niveau de l'Organisation; les comités permanents chargés de sujets techniques spécialisés (par exemple, la Commission internationale du peuplier ou le Comité consultatif de la pâte et du papier); et des réunions ad hoc sur des aspects techniques ou politiques particuliers (par exemple, une consultation d'experts sur l'harmonisation des critères et indicateurs de l'aménagement durable des forêts). Une importante documentation technique est établie avant et après la réunion et diffusée parmi les pays membres et sur demande. Par ailleurs, d'importantes réunions régionales et locales sont régulièrement organisées par les bureaux régionaux de la FAO.

Dans le cadre de leurs fonctions, les fonctionnaires de la FAO représentent régulièrement l'Organisation aux réunions sur les forêts à tous les niveaux, depuis des réunions à l'échelon mondial, comme le Congrès forestier mondial (coparrainé par la FAO) et le Congrès mondial de l'IUFRO, jusqu'aux ateliers et séminaires techniques et ceux organisés au niveau des communautés. Les exposés faits par les fonctionnaires de la FAO à ces réunions représentent une part importante de l'ensemble des activités de communication et de diffusion d'informations.

Activités menées actuellement sur le terrain

La communication et la diffusion de l'information constituent une part importante du programme de terrain de la FAO en matière de foresterie; elles peuvent se classer en trois grandes catégories. La première est celle des activités d'information liées au cycle des projets: formulation; documents de terrain et rapports techniques; lettres et comptes rendus finals; rapports d'évaluation. Ce système est essentiellement à base de rapports et de documents et, à l'exception des rapports techniques, il s'adresse à un nombre de destinataires relativement restreint: les différents gouvernements des pays membres de la FAO.

La deuxième catégorie, peut-être la plus importante, comprend les projets eux-mêmes, qui comportent de plus en plus souvent une composante "communication" ou vulgarisation. Cette composante peut consister à produire bulletins, brochures d'information, cassettes vidéo et diapositives destinés directement aux bénéficiaires des projets et à un public toujours plus large, permettant ainsi aux projets de terrain d'avoir un impact plus étendu. Elle sert aussi à sensibiliser davantage les acteurs nationaux et même internationaux à l'importance de l'effort accompli. La composante "communication" comporte de plus en plus souvent des méthodes permettant d'améliorer la "réception" des informations émanant d'autres partenaires.

Le développement des composantes "communication" (vulgarisation comprise) dans le programme de terrain de la FAO en matière de foresterie a coïncidé, dans une certaine mesure, avec l'évolution du concept de foresterie pour le développement rural, notamment vers la foresterie communautaire et sociale et les approches participatives. Un autre facteur important a été la conscience accrue des avantages d'un contrôle local sur les décisions d'aménagement des ressources naturelles. On est passé d'une démarche purement pédagogique à la reconnaissance de l'importance du dialogue et de la participation. Les actions réussies de développement durable de la foresterie se fondent en effet sur la participation; or, celle-ci implique un échange.

La troisième catégorie qui a son importance consiste à financer l'intervention à des réunions portant sur des sujets techniques et politiques de participants à des projets et d'experts des pays.

Globalement, le programme de terrain relatif à la foresterie introduit progressivement dans tous les projets (avec l'aide fondamentale de l'Unité de la communication au service du développement) une approche plus systématique des stratégies de communication. Une récente publication de la FAO affirme d'ailleurs que cette approche doit être systématique. "La communication est vraiment efficace lorsqu'elle se situe au cœur des stratégies qui permettent la définition des priorités du développement, la conception des programmes, leur planification, leur mise en œuvre, leur évaluation." (FAO, 1994b).

LES TRANSFORMATIONS DU CONTEXTE

De nouveaux partenaires

On a assisté à une quasi-explosion du nombre et des types de partenaires intéressés par les forêts et la foresterie. Comme l'a d'ailleurs répété avec force le Sommet sur la planète Terre, les discussions sur les forêts et la foresterie ne peuvent plus se limiter aux trois partenaires traditionnels: ministères des forêts, organismes intergouvernementaux et spécialistes de la foresterie.

L'attention croissante accordée à la foresterie depuis une vingtaine d'années a suscité (ou peut-être traduit) une prise de conscience des divers liens intersectoriels qui existent entre la foresterie et le développement socio-économique en général. Mais ce phénomène est une lame à double tranchant: le secteur se trouve aujourd'hui sous les projecteurs, mais les forestiers, qui naguère se plaignaient de ne pas réussir à attirer l'attention du public ou des hauts responsables, risquent aujourd'hui paradoxalement d'être débordés et marginalisés dans le processus de décision. L'autorité en matière de foresterie est de plus en plus souvent confiée à d'autres secteurs, essentiellement aux ministères de l'environnement à l'échelon national et aux ministères des affaires étrangères dans les débats internationaux, ce qui implique des messages et des tactiques de communication totalement différents.

On a aussi assisté à des changements radicaux à l'échelon intergouvernemental. Même si la FAO reste la seule organisation dont le mandat étendu et complet couvre l'ensemble des forêts, il existe aujourd'hui plus de dix organisations intergouvernementales, trois banques régionales de développement, de nombreux organismes d'aide bilatérale et ONG qui ont des rôles légitimes et importants à jouer dans la foresterie mondiale.

Mais ce qui est peut-être le plus important, c'est qu'on commence à reconnaître les droits légitimes, les responsabilités et les aptitudes des populations locales et d'autres groupes tels que les gestionnaires et les usagers des forêts, et à prendre conscience de la nécessité qui en découle de les faire participer à la prise de décisions à tous les niveaux en matière de foresterie. L'aménagement participatif qui fait intervenir sur un pied d'égalité les populations locales et les professionnels de la foresterie (qu'ils appartiennent au secteur public ou au secteur privé) est en train de supplanter lentement mais sûrement les approches hiérarchiques traditionnelles. A mesure que les populations locales s'organisent et qu'elles se font mieux entendre, elles deviennent des partenaires à part entière lorsqu'il s'agit de traiter les questions de foresterie, ce qui a des implications profondes pour toute politique ou stratégie de communication et de diffusion de l'information.

Le "mouvement écologique" des années 60 et 70 a abouti à la constitution ou au renforcement d'une nouvelle vague d'ONG qui s'intéressent aux ressources naturelles. Aujourd'hui, les ONG qui s'occupent de problèmes de foresterie sont extrêmement nombreuses et diverses; elles doivent être reconnues comme des partenaires dans le débat sur le développement et la conservation des forêts. Il faut donc mettre au point des stratégies de communication visant à les informer et à les faire intervenir en tant que partenaires actifs.

En partie par intérêt et en partie à la suite des campagnes de sensibilisation du public, le secteur privé et l'industrie étendent rapidement leur rôle à la conservation et à l'aménagement des forêts et ne se limitent plus à leur exploitation et à leur rentabilisation. Dans de nombreuses régions, la démocratisation, la décentralisation et la libéralisation des marchés ont permis la multiplication et le développement d'organisations locales, de propriétaires privés, de gestionnaires et d'usagers industriels. En Lituanie, par exemple, où à la fin des années 80 il n'y avait encore qu'un seul propriétaire forestier - l'Etat - au début de 1995 on estimait le nombre de propriétaires à 22 500, qui détenaient en moyenne de 6 à 7 ha de forêt.

En conséquence, il est probablement inutile de chercher des "dénominateurs communs" pour la communication avec les nombreuses parties prenantes de la foresterie mondiale. Chacun a ses besoins et ses intérêts propres, ses caractéristiques culturelles ou organisationnelles, etc. Il est évident qu'un dialogue avec un groupe local s'intéressant à une zone forestière donnée au Brésil ne se présentera pas de la même façon qu'une réunion des directeurs d'institutions de recherche forestière ou que le Comité des forêts de la FAO. Pour être crédible et pour faciliter la constitution des partenariats et la mobilisation des participations nécessaires, toute stratégie de communication et de diffusion de l'information doit être complète et multidimensionnelle et, tout en restant souple, elle doit être poursuivie de manière rigoureuse.

Nouvelles priorités, messages nouveaux

Même si les forestiers reconnaissent dans ce que l'on considère aujourd'hui comme "nouveaux" des thèmes qui leur sont familiers et s'ils peuvent montrer qu'ils dépendent la plupart du temps de traditions connues, à certains égards la teneur ou du moins les aspects essentiels du dialogue sur la foresterie sont sans aucun doute en pleine évolution. Ce changement de ton et même d'orientation du "nouveau" dialogue, est peut-être affirmé de la façon la plus claire et la plus complète dans Action 21. Quelques-uns des "nouveaux" mots clés qui reviennent le plus fréquemment sont la durabilité, la diversité (biologique et culturelle), l'intégration et la participation. Le but de cet article n'est pas d'interroger sur la validité ou la légitimité de ces concepts, mais de constater que le vocabulaire évolue et de voir en quoi cela pourrait influer sur une stratégie de communication.

La voix des populations locales se fait entendre de plus fort dans le dialogue sur le développement forestier

Outre ces "nouveaux" thèmes, la communication elle-même a acquis de l'importance et de la visibilité. Action 21 contient aussi des éléments concernant directement la stratégie de communication (c'est-à-dire la forme du dialogue), en particulier au chapitre 36, "Promotion de l'éducation, de la sensibilisation du public et de la formation", et au chapitre 40, "L'information pour la prise de décisions". Le chapitre 36 encourage une stratégie multimédia, affirmant que le système des Nations Unies devrait "établir des liens de coopération avec les médias, comme avec les secteurs du spectacle et de la publicité. [...] Cette coopération serait en outre susceptible d'accroître la participation active du public au débat sur l'environnement." Le chapitre 40, quant à lui, met l'accent sur la production d'informations sous des formes utilisables et sur l'exploitation des "informations traditionnelles".

La nature et les caractéristiques du "nouveau" dialogue sur la foresterie suggèrent des stratégies de communication et des approches qui soient multidisciplinaires, prennent en compte les aspects sociaux de la foresterie, se préoccupent davantage de la spécificité des situations, traitent toutes les parties prenantes comme des partenaires égaux, encouragent le souci de la forme et du contenu des informations concernant la foresterie et reconnaissent l'importance de la communication.

Evolution des technologies de communication et de diffusion de l'information

L'univers des technologies de la communication et de l'information évolue si rapidement qu'il est difficile d'en donner une définition et plus encore une analyse complète, ce qui sortirait d'ailleurs du cadre du présent article. On peut néanmoins formuler quelques observations générales, dont certaines ne sont peut-être pas évidentes dès le premier abord.

Le développement des technologies informatiques et des réseaux électroniques, qu'il s'agisse de liaisons de type téléphonique (notamment la télécopie) ou de liaisons directes entre ordinateurs (par exemple Internet) ou de radio et de télévision (y compris les informations transmises par satellite) a considérablement élargi l'horizon de la communication et l'accès à la "bibliothèque mondiale" consacrée à la foresterie.

Les technologies de production, d'impression et de diffusion assistées par ordinateur ont réduit le coût et surtout les délais de communication par les médias imprimés. L'arrivée d'équipements peu coûteux d'édition électronique de bureau permet la mise au point, l'essai, la modification et la diffusion des informations appropriées à l'échelon de base.

La radio et la télévision peuvent atteindre des destinataires ruraux en leur adressant des messages spécialement conçus pour eux sous une forme attrayante et efficace par rapport à son coût. Des efforts particuliers ont notamment été entrepris en Amazonie brésilienne pour fournir aux communautés indigènes isolées des postes de radio à transistors, qui leur permettent de recevoir des informations dans le domaine de la commercialisation, grâce auxquelles ils peuvent tirer plus d'avantages de la récolte durable des produits forestiers non ligneux.

Dans les milieux universitaires et scientifiques, les possibilités de communication et d'échanges d'informations qu'offrent les moyens électroniques, en particulier Internet ou les autoroutes de l'information, sont extrêmement intéressantes. Les conférences comptant des centaines de participants où l'on discute de sujets précis sont devenues courantes et bien que globalement le secteur forestier à travers le monde exploite encore relativement peu le potentiel d'Internet, l'utilisation de ce réseau se développe rapidement. Le gopher de la FAO et le World Wide Web (page d'accueil) sont depuis peu en ligne et comprennent notamment les données résultant de l'évaluation faite en 1990 des ressources forestières mondiales, une version expérimentale d'Unasylva et des répertoires des institutions de formation et de recherche en foresterie.

Si le monde des communications électroniques offre des possibilités nouvelles extrêmement intéressantes, il n'est pas sans risques - notamment celui de confondre la technologie électronique et son aura d'infaillibilité avec la validité ou l'intérêt du message fourni. Rien ne remplace encore le dialogue personnel direct au moyen d'un message soigneusement conçu et testé, et la tentation d'utiliser les moyens de communication de pointe pour des messages simplistes peut aboutir à une information ou à une communication attrayante et peu coûteuse mais techniquement inutile. A cet égard, un aspect de l'évolution des possibilités de communication et d'information qu'il ne faut pas sous-estimer est le développement des infrastructures matérielles de communication, par exemple les routes et les avions. Ce développement entraîne certes des risques bien connus et bien étudiés pour la foresterie et les forêts (empiétement, surexploitation, etc.), mais aussi des possibilités considérables et souvent sous-évaluées de communication et de diffusion d'informations. Un autre aspect du changement est "l'organisation sociale nécessaire pour permettre aux parties prenantes de faire un usage stratégique des moyens modernes de communication pour demander des services et des informations, et faire des choix avisés" (Richardson, 1995).

Quelles sont les ramifications de la révolution technologique pour une stratégie de communication en matière de foresterie? La réponse à cette question n'est pas évidente. On peut toutefois se hasarder à faire quelques observations et hypothèses générales. A mesure que la technologie devient moins coûteuse et plus accessible aux particuliers (du moins à beaucoup de personnes dans le monde), aussi bien pour fournir que pour recevoir des informations, elle encourage des échanges d'informations et un dialogue moins formels, plus immédiats, plus décentralisés, plus "égalitaires" et moins exclusifs (il devient plus difficile "de protéger" l'information). Ainsi, Richardson (1995) voit dans Internet une "place publique électronique" et affirme: "Internet est extrêmement populaire parce qu'il est peu coûteux à utiliser, qu'il comporte peu de restrictions quant à son contenu et à son usage, et qu'il personnifie une culture qui encourage l'échange, la collaboration et l'assistance mutuelle".

Il faut remarquer que les organisations qui présentent déjà ces caractéristiques semblent être celles qui se sont le plus servies des nouvelles technologies, à savoir les universités et les ONG. Les institutions qui n'adoptent pas ces nouvelles technologies et ces caractéristiques institutionnelles se trouveront probablement lâchées ou même carrément exclues du dialogue.

ÉVOLUTION VERS DE NOUVELLES STRATÉGIES

La FAO est en train de mettre en place des stratégies améliorées de communication et de diffusion de l'information dans le domaine de la foresterie. Ces stratégies devront évidemment s'appuyer sur une analyse affinée des caractéristiques des divers partenaires de la foresterie, des types de dialogue dans lesquels s'engagent les forestiers et des progrès de la technologie de la communication et de l'information.

Au niveau de l'Organisation, le Département des affaires générales et de l'information a entrepris de mettre au point une politique et une stratégie de la communication pour l'ensemble de la FAO. Le Département des forêts y participe activement, en ce qui concerne aussi bien la définition de la politique que celle des éléments de la stratégie propre à la foresterie. Par ailleurs, des groupes spéciaux ont été créés au sein du Département pour formuler des recommandations visant à améliorer la diffusion de l'information et la communication à l'intérieur comme à l'extérieur de l'Organisation. Il n'est pas inutile de noter que les autres divisions et départements de l'Organisation ont également entrepris de mettre au point des stratégies de communication qui impliqueront probablement des chevauchements et des incidences qu'on ne connaît pas encore sur celle du Département des forêts.

Les principes clés de la politique et de la stratégie de communication et d'information seront l'ouverture et la transparence; une volonté de participation, de retour d'informations et d'apports nouveaux; enfin, une souplesse d'ensemble. L'utilité de la communication et de la diffusion d'informations dans le développement global de la foresterie doit être clairement affirmée dans la politique officielle. La communication doit être considérée et définie non seulement comme nécessaire mais aussi comme souhaitable. La participation au processus de communication/information doit être encouragée à tous les niveaux. On commence à inciter les membres du personnel à considérer qu'il est nécessaire de communiquer les résultats de leurs travaux et de ceux du Département. Il faudra leur donner le temps, l'appui technique et les ressources financières nécessaires pour assumer efficacement cette responsabilité.

Dès le départ, on devra prévoir le retour d'informations et l'apport d'informations nouvelles par les destinataires de toutes les activités de communication/information. Des éditions limitées des versions préliminaires de publications importantes sont diffusées pour examen et commentaires par les pairs (c'est le cas notamment de la version préliminaire de FAO model code of forest harvesting practice). Un élément clé d'une bonne stratégie de communication devrait être d'inciter la communauté forestière (y compris les fonctionnaires de la FAO) d'écouter davantage. Les réactions à toutes les grandes publications du Département des forêts sont aujourd'hui demandées par l'intermédiaire de la presse professionnelle. De même, toutes les réunions et toutes les activités de formation et de vulgarisation devraient comporter une évaluation par les participants. Il n'est toutefois pas inutile de souligner qu'il faut du temps et des moyens pour "écouter" aussi bien que pour "parler".

La nécessité d'une approche formelle et planifiée de l'information et de la communication doit être conciliée avec une volonté de souplesse. Comme on l'a vu plus haut, le monde de la foresterie évolue rapidement (qu'il s'agisse des priorités, des partenaires ou des approches), et il faut que les approches de la communication et de l'information aillent de pair avec cette évolution.

CONCLUSION

Il est peut-être utile de souligner que l'élaboration d'une stratégie efficace de communication et d'information n'est pas une panacée et ne résoudra pas tous les problèmes auxquels sont confrontés le développement de la foresterie en général et notamment les organisations internationales qui s'en occupent, parmi lesquelles la FAO. Une meilleure stratégie de communication ne saurait remplacer un travail technique de haut niveau et un service public de qualité. En d'autres termes, il nous faut accroître l'efficacité de notre dialogue tout en continuant de veiller à savoir de quoi nous parlons.

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