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Chapitre 3: Un canevas pour des programmes d'éducation nutritionnelle

Le document de travail no. 2 a fourni un canevas pour des programmes d'éducation nutritionnelle; dans la première partie on a discuté des éléments d'un programme d'éducation nutritionnelle et dans la deuxième partie on s'est intéressé au processus de planification et de mise en oeuvre: Mme B. Smith a présenté la première partie et Mme S. Smitasiri la deuxième.

Première partie: Eléments d'un programme

Les programmes d'éducation nutritionnelle devraient être basés sur une analyse de quatre éléments majeurs intégrés: les problèmes de nutrition, les groupes cibles, la localisation et les méthodes. Ces éléments sont influencés par la nature et la disponibilité des approvisionnements en aliments, et les conditions d'accès de la population à ces aliments. Ils doivent en outre, être liés à l'évaluation, à la formation et à la gestion (voir annexe 4).

Les problèmes nutritionnels

Le point de départ de ce canevas se situe dans l'identification des problèmes nutritionnels spécifiques à des sous-groupes des populations, en utilisant les données sur: les ingesta alimentaires et l'état nutritionnel fournies par le système national régulier de suivi et de surveillance; les indicateurs de santé environnementaux et psychosociaux; et la perception qu'ont les groupes de leurs possibilités.

L'utilisation des indicateurs de santé aussi bien que des indicateurs épidémiologiques pour les sous-groupes de population doit conduire au développement de programmes pour l'amélioration de la santé et la diminution du risque. L'identification des groupes à risque garantit aussi que le principe d'équité devient partie intégrante du processus.

Groupes cibles

Groupes cibles primaires: l'évaluation des problèmes nutritionnels de sous-groupes de population doit conduire à l'identification de sous-groupes primaires. En utilisant le cycle de la vie comme approche, on a un moyen de s'assurer que les besoins de développement sont pris en compte alors que les besoins de la population toute entière sont appréciés. On a suggéré que la première étape couvre la période prénatale et la naissance, qui correspondent à la période de la grossesse et à celle de la vie du nourrisson. La deuxième étape couvrirait l'enfance, suivie de l'adolescence, période où les besoins sociaux et les besoins de développement sont différents. L'âge adulte et la famille pourront aussi être différentiés des dernières périodes de la vie.

Dans le souci de prendre en compte les inégalités en termes de bénéfices nutritionnels, les sous-groupes ayant des besoins spéciaux devront être identifiés et pris en charge. Ces groupes pourront être des communautés ethniques spécifiques, de nouveaux immigrants, des citadins, des chômeurs et des groupes de statut socio-économique faible, des personnes handicapées ou des hommes et des femmes désavantagés et présentant un risque particulier.

Groupes cibles secondaires: les personnes qui seront responsables des groupes primaires ou qui seront chargés de les atteindre devront aussi être identifiées. Il pourra s'agir d'agents de santé, d'enseignants, d'agents de vulgarisation agricole, de journalistes, de travailleurs sociaux, de volontaires villageois ou d'autres.

Groupes cibles tertiaires: Ce sont toutes les personnes susceptibles de faciliter ou de soutenir les initiatives en éducation nutritionnelle. Peuvent en faire partie les décideurs à tous les niveaux, tels les hommes politiques ou les administrateurs. Ce groupe pourra comprendre des personnes influentes comme les leaders religieux ou ceux de la communauté.

Lieux d'interventions: les lieux où l'on réalisera l'éducation nutritionnelle peuvent être: les centres des soins de santé primaires, les communautés locales et les villages, les écoles et les crèches, les lieux de travail, les organisations sociales, les groupes culturels et sportifs, et les sites commerciaux (par exemple les vendeurs de rue, les marchés, les cafétérias et les boutiques). Ces lieux devront être identifiés pour assurer le meilleur accès aux groupes cibles. Ils devraient avoir la capacité potentielle de modifier leur organisation pour répondre aux problèmes nutritionnels. L'utilisation de sites clés qui ne sont pas traditionnellement considérés comme des domaines où mettre en oeuvre des programmes d'éducation nutritionnelle devrait permettre d'atteindre les sous-groupes là où ils travaillent, vivent et jouent. Cela permettrait de cibler l'audience de manière précise, de resserrer les liens entre les disciplines, les secteurs et les organisations, et de susciter une plus grande implication des communautés dans les questions de nutrition.

Méthodes; Une série de méthodes (par exemple, méthode face à face, utilisation des mass média, méthodes participatives) demande à être examinée dans l'élaboration, le développement, la mise en oeuvre et l'évaluation du programme, pour provoquer le changement chez les individus et dans les organisations, en même temps que des changements dans l'environnement économique et général du programme. Finalement, ces quatre éléments du programme devront toujours être soutenus par la formation, la gestion et l'évaluation.

Deuxième partie: Le processus de mise en oeuvre

Le processus de mise en oeuvre est traité dans la deuxième partie de ce document. Il commence avec le fait d'évidence que le plus gros obstacle au succès est l'incapacité d'appliquer efficacement le savoir technique ou de combiner les éléments du programme en un ensemble cohérent et intégré. On propose un processus en trois phases. (Voir Annexe 5).

Première phase. La décision

A cette phase, les planificateurs de programmes sont invités à considérer soigneusement si l'éducation nutritionnelle est la meilleure approche pour résoudre un problème. L'éducation nutritionnelle est une option politique valable quand les aliments disponibles ne procurent pas un bénéfice optimum. Si cela est le cas, plusieurs questions se posent: Peut-on faire de l'éducation nutritionnelle? Existe-t-il des ressources financières et matérielles suffisantes? Y-a-t'il suffisamment de personnes compétentes pour gérer le programme? Durant cette phase initiale on doit insister sur l'importance du plaidoyer. On ne peut pas être sûr que les décideurs vont apprécier facilement la valeur de l'éducation nutritionnelle et les bénéfices attendus d'un programme doivent être mis en avant pour obtenir l'aide appropriée.

Deuxième phase. Le développement

Les trois étapes dans cette phase sont l'évaluation initiale, l'analyse et l'action créatrice. Il faut recueillir des données pour identifier les déterminants du problème nutritionnel et fournir une information sur le contexte. L'analyse de ces données permet une meilleure compréhension du groupe cible, sa relation à ses approvisionnements alimentaires et les facteurs qui influencent son comportement. Ceci doit conduire à des décisions sur les méthodes et les lieux d'intervention. L'étape d'action créatrice comprend planification et mise en oeuvre à partir de l'analyse. Cette étape peut être enrichie par l'intervention d'une équipe multidisciplinaire et la participation du groupe cible. La planification doit non seulement concerner les stratégies éducationnelles et de soutien, mais aussi l'évaluation et le suivi, la formation, la gestion du programme et la clarification des rôles. Un aspect souvent négligé de la planification est la définition d'une stratégie de communication dans le programme pour faciliter le travail d'équipe et communiquer avec les groupes cibles, le public et les décideurs durant la mise en oeuvre du programme. La question de la pérennité du programme doit aussi être prise en compte lors de la planification.

Troisième phase. La dissémination

En général, les programmes nationaux ou à grande échelle ne sont mis en oeuvre qu'après un programme pilote. Pour qu'un tel programme soit élargi avec succès, cette étape doit être franchie grâce à deux éléments interactifs: la gestion, et le suivi et l'évaluation. Voici certains des problèmes de gestion: le contrôle de qualité des éléments du programme qui ont été efficaces à la phase pilote; la formation d'un nombre suffisant de personnes pour pouvoir reproduire le programme pilote à grande échelle; et la reconnaissance du style de leadership permettant interaction et rétroinformation (feed-back). La sélection des collaborateurs est un point crucial. Finalement, il est important de rendre publics les succès du programme de façon à ce que les bénéfices de l'éducation nutritionnelle soient reconnus et que des travaux futurs reçoivent un soutien.

Discussion:

L'éducation nutritionnelle est généralement sous-financée et une des préoccupations majeures des experts a été de trouver les moyens de motiver les décideurs pour qu'ils lui accordent un soutien accru. Une difficulté réside dans la compétition entre les nombreuses demandes pour de maigres ressources. Un autre problème réside dans le fait qu'il est difficile de prouver que l'éducation nutritionnelle est un moyen efficace de résoudre les problèmes nutritionnels avant que les allocations budgétaires ne soient décidées. Les experts s'accordent pour dire que les agences internationales pourraient jouer un rôle important de plaidoyer de ce point de vue.

Les experts ont apprécié l'expérience latino-américaine où les politiciens locaux ont été impliqués dans la promotion de la santé. A travers le programme des "cités saines" devenu celui des "municipalités saines", les politiciens se sont intéressés à montrer ce que leurs municipalités pouvaient réussir.

Il a été suggéré que la FAO et d'autres institutions internationales pourraient influencer les gouvernements pour qu'ils accordent plus d'attention aux questions d'éducation nutritionnelle dans la préparation et la mise en oeuvre de leurs Plans d'action nationaux pour la nutrition dans le cadre du suivi de la CIN.

Les effets de la publicité émanant de l'industrie alimentaire sur l'éducation nutritionnelle ont été discutés. Deux préoccupations sont apparues: les ressources considérables consacrées à la publicité commerciale par l'industrie (y compris les investissements monétaires et en expertise) comparées aux ressources disponibles pour l'éducation nutritionnelle, et l'accent mis par les annonceurs sur un seul aliment ou produit compare là encore, à l'importance accordée au régime alimentaire dans son ensemble par beaucoup de programmes d'éducation nutritionnelle. Bien que reconnaissant les différences existant entre les objectifs, les méthodes et les messages de la publicité commerciale et de l'éducation nutritionnelle, les experts ont été d'accord pour que soient explorées les opportunités de collaborer dans des activités d'éducation nutritionnelle.

Les experts ont insisté sur la nécessité d'une meilleure collaboration avec le gouvernement, les média, l'industrie alimentaire, et d'autres groupes. Ils ont aussi identifié le besoin d'une meilleure coordination et d'une meilleure utilisation des ressources fournies par lés universités dans l'élaboration et la mise en oeuvre d'activités d'éducation nutritionnelle.

On a insisté sur le fait que le succès des activités dépendait d'une évaluation adéquate des besoins en formation, et de la planification de cette formation pour ceux qui seront chargés de mettre en oeuvre programmes et projets. Le développement et le renforcement des approches basées sur le travail en équipe ont été considérées comme importants dans la planification et la réalisation des programmes et des projets. La formation initiale, la formation en cours d'emploi et la formation continue du personnel devraient être assurées dans tous les secteurs concernés. De l'avis des experts, une masse critique de formateurs compétents dans le domaine de la formation à la communication et à l'éducation nutritionnelle est essentielle et cette formation est une priorité.

La question de savoir qui doit planifier, mettre en oeuvre et évaluer les activités d'éducation nutritionnelle a été soulevée. Ces activités doivent être entreprises par un personnel qualifié, compétent en nutrition et expert en communication.

Les conditions suivantes ont été identifiées pour le développement d'une stratégie de communication et d'éducation susceptible de réussir: l'utilisation d'une approche en équipe; le renforcement des compétences et des connaissances des enseignants et des enseignés; et la participation active de la communauté à tous les stades du projet y compris la planification, la mise en oeuvre et l'évaluation.

Les deux cadres ou canevas proposés dans le document ont été considérés comme des aides valables pour une réflexion systématique sur des programmes d'éducation nutritionnelle complets. On a accepté l'idée que tous les grands projets devraient bénéficier de suffisamment de temps pour arriver au meilleur schéma possible. Les éléments suivants d'un programme devraient apporter des améliorations à son élaboration:

· Des objectifs clairs, réalisables et mesurables basés sur une analyse correcte de la situation.

· Une sélection pertinente des groupes cibles primaires, secondaires et tertiaires.

· Une sélection des lieux d'intervention permettant le mieux d'atteindre les groupes cibles.

· Un choix de méthodes correspondant aux groupes cibles et aux localisations.

· Un plan d'évaluation clair comprenant à la fois des éléments pour une évaluation formative (incluant le pré-test des matériels) et sommative.

· Des plans pour la formation des éducateurs et des gestionnaires.

· Une indication sur la manière dont on envisage la pérennité.

· Une stratégie de communication pour le programme lui-même.

· Une estimation réaliste des intrants: temps, matériels, ressources humaines.


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