Page précédente Table des matières Page suivante


Dix ans d'activités forestières de la FAO

MARCEL LELOUP

Directeur, Division des Forêts


Objectifs
Inventaires et statistiques
Politique forestière
L'action internationale - Les commissions forestières régionales
Autres actions internationales
Actions nationales - Assistance technique directe
Information - Réunion et diffusion de renseignements
Organisation et méthodes de travail
Conclusions


Objectifs

Fournir à un monde en expansion les produits forestiers utiles, dans les quantités et qualités désirables, pour assurer sa subsistance et son bien-être: tel a été en termes très généraux l'objectif que nous avait tracé la première session de la Conférence de la FAO qui s'est tenue à Québec en 1945.

Le domaine ainsi dévolu aux activités de la Division des Forêts est considérable. Il n'englobe pas seulement la production du bois brut, qu'il s'agit d'augmenter sans compromettre l'avenir des forêts; il s'étend aussi aux exploitations forestières et aux industries de transformation primaire du bois, le développement et l'amélioration de l'équipement nécessaire devant aller de pair avec un accroissement du volume de matière première disponible. Il comprend également la distribution des produits forestiers, le développement et l'amélioration des méthodes commerciales devant permettre au consommateur d'utiliser économiquement les produits de la forêt et des industries forestières, tout en assurant aux producteurs et aux travailleurs une rémunération équitable.

D'autre part, l'un des bénéfices essentiels que l'homme tire des forêts est la protection de ses champs, la régularisation du régime des fleuves et des torrents. Elle est le principal moyen de lutter contre l'érosion par le vent et par l'eau. Elle sert enfin à l'embellissement des paysages et à l'amélioration des conditions sanitaires. Il convient de ne pas perdre de vue ces considérations et même de leur donner une place essentielle dans le cadre général de l'action de la FAO.

Une évaluation très approximative des ressources forestières existantes et de la possibilité d'en créer de nouvelles - évaluation à laquelle il fut procédé dès 1946 montre que ces objectifs ne sont pas utopiques. Cependant, bien que la forêt occupe une proportion importante des terres du globe, ils sont loin d'être aussi aisés à atteindre que cette abondance de ressources pourrait le laisser supposer.

Ces forêts sont, en effet, très irrégulièrement réparties. Le transport du bois des zones où elles se trouvent en abondance, généralement peu peuplées et mal pourvues de voles de communication, aux zones très peuplées où le besoin s'en fait le plus sentir, est souvent un problème économiquement insoluble. La concentration de la population du globe aux points les plus favorisés de celui-ci, soit par les conditions climatiques, soit par la fertilité du sol, a parfois favorisé le développement d'une sylviculture intensive, mais elle a plus souvent conduit à la destruction massive des forêts qui existaient dans ces régions. L'insuffisance de la forêt en ces endroits n'a pas seulement des conséquences économiques; elle entraîne aussi la dégradation du sol et l'irrégularité du régime des eaux. Malgré l'importance des superficies occupées par la forêt sur l'ensemble du globe, d'autres forêts doivent alors bien souvent être créées ailleurs, pour remplacer celles qui ont été inconsidérément détruites.

Tenant compte de ces faits, la Division des Forêts ne tarda pas à voir que son programme d'action générale devait se concentrer sur quatre objectifs techniques essentiels. Ces quatre objectifs étaient et restent toujours:

a) L'augmentation du rendement des forêts actuellement utilisées. Même dans les pays les plus avancés du point de vue forestier, il est admis qu'une telle augmentation est possible, soit en appliquant aux forêts de saines méthodes d'aménagement, soit en y utilisant plus largement les techniques que la recherche forestière a mises, met et mettra encore au point dans l'avenir.

b) La réduction des déchets. Il faut entendre par là non seulement les déchets provenant de la transformation primaire du bois, mais aussi les déchets de l'exploitation, y compris les arbres abandonnés sur les coupes parce qu'il n'existe pas actuellement pour eux d'utilisation économique. Dans ce domaine aussi des progrès considérables peuvent être réalisés.

c) L'ouverture des forets vierges. La mise en exploitation de nouvelles forêts se poursuit presque automatiquement lorsque, comme au Canada, ou en U.R.S.S., ces forêts sont susceptibles de fournir des bois de haute valeur économique, des résineux notamment. Elle est beaucoup plus difficile dans les régions tropicales, où se trouve une grande masse de forêts, parce qu'elle implique tout d'abord la valorisation des bois qui s'y trouvent, puis l'installation d'industries capables de des transformer et souvent, enfin, le développement d'une véritable colonisation humaine sur les superficies intéressées.

d) La plantation de nouvelles forets. En dehors de toute considération économique, la constitution ou la reconstitution de forêts sur des surfaces dangereusement soumises à l'érosion est une nécessité. Mais, localement pour certaines communautés, à l'échelle nationale pour de nombreux pays, et, comme l'ont montré des études effectuées par la Division des Forêts au cours de ces dix années, régionalement pour certains continents, la plantation de nouvelles forêts est indispensable pour faire face au développement prévisible des besoins en bois.

En principe, les techniques à mettre en œuvre pour augmenter le rendement des forêts existantes, pour diminuer le volume des déchets, pour ouvrir des forêts vierges ou pour planter de nouvelles forêts étaient déjà connues il y a dix ans. Elles se sont, depuis lors, améliorées et diversifiées. Cependant, de grandes difficultés, d'ordre non pas forestier, mais politique, économique ou social, empêchent bien souvent de les mettre en œuvre. Pour ne prendre que les exemples les plus simples, l'ouverture des forêts vierges exige l'investissement de capitaux importants qui font défaut fréquemment dans les pays peu développés; la plantation de nouvelles forêts se heurte souvent à la compétition d'autres utilisations du sol, pour l'agriculture ou le pâturage.

FIGURE 3. La restauration des forets constitue l'un des objectifs de la FAO. Vue générale d'une vieille foret de cèdres dans l'Atlas marocain.

Photo, M. Laidet

Ces difficultés ne peuvent être surmontées que par l'établissement dans chaque pays, dans chaque région et dans l'ensemble du monde, d'un programme de développement équilibré, dans lequel la forêt et les industries forestières auront une juste place. Ce programme forestier, établi dans le cadre de ce programme général de développement et harmonisé avec lui, n'est autre que la politique forestière du pays, de la région ou du monde. C'est pourquoi la Division des Forêts a, dès le début, si vivement insisté sur la nécessité d'une politique forestière à chacun de ces échelons.

En dehors des obstacles extra-forestiers qu'on vient de mentionner, la mise en œuvre de ces politiques forestières et même leur formulation se heurte encore à d'autres difficultés. Elles proviennent de ce que certaines techniques forestières sont encore insuffisamment développées, certains problèmes forestiers insuffisamment résolus. Dans bien des cas, les obstacles extra-forestiers pourraient être surmontés si ces techniques étaient améliorées, si des solutions plus souples ou plus complètes étaient trouvées à ces problèmes.

En vue des progrès à réaliser, la Division a arrêté un programme d'action en 15 points. Formulé en 1951, il reste toujours valable. Ces points, correspondent eux 15 lignes d'activité de la Division, peuvent être schématiquement décrits de la façon suivante:

1. Politique forestière

Conseiller les gouvernements dans la formulation et la mise en œuvre d'une politique forestière nationale correspondant à l'importance économique relative des forêts pour chaque pays, cette politique visant à la fois la conservation et l'utilisation correcte des peuplements forestiers et le développement rationnel des industries forestières dont ils sont solidaires.

Coordonner les politiques forestières nationales sur le plan international, par l'action des commissions régionales forestières et de la Conférence de la FAO.

2. Inventaires forestiers

Conseiller et aider les gouvernements à établir les plans de leurs inventaires forestiers nationaux et à les mettre en œuvre de façon à en obtenir des résultats plus précis et internationalement comparables.

Collecter les statistiques ainsi obtenues pour la préparation et la publication d'estimations régionales et mondiales, pour servir de base à la coordination des politiques forestières nationales sur le plan international.

3. Economie forestière et statistiques

Estimations-types des coûts des opérations forestières et rassemblement des données correspondantes, permettant de comparer les différentes méthodes de conduire économiquement ces opérations, et de calculer le prix de revient des divers produits forestiers.

Rassemblement, compilation et dissémination régulière des statistiques sur la forêt et les produits forestiers en vue de procurer aux gouvernements des données à jour, compréhensives et objectives. Amélioration des statistiques nationales par l'introduction de méthodes plus sûres de rassemblement.

4. Education

Conseiller et aider les gouvernements à répandre dans le public l'idée de l'importance, dans l'économie nationale, de la forêt et de la sylviculture.

Procurer les facilités nécessaires pour l'éducation des techniciens du bois et de la forêt, pour la formation du personnel forestier subalterne, des travailleurs de la forêt et des industries.

5. Conservation de l'eau et du sol

Obtenir une reconnaissance générale du rôle essentiel joué par les forêts et les pâturages pour la régularisation du régime des eaux et pour la conservation du sol.

Conseiller les gouvernements pour établir une politique d'utilisation rationnelle des sols, notamment des terrains boisés et des terrains de parcours constituant la plus grande partie des bassins de réception.

6. Conservation et amélioration des terrains de parcours forestiers

Conseiller et aider les gouvernements en vue de l'adoption d'une politique rationnelle d'utilisation et de conservation des vastes étendues qui, tout en servant de terrains de parcours naturels pour le bétail, jouent un rôle éminent, mais trop souvent perdu de vue, pour la protection des sols agricoles et la régularisation du régime des eaux.

Coordonner étroitement une telle politique avec la politique forestière.

7. Sylviculture et aménagement

Conseiller et aider les gouvernements dans l'application de méthodes sylvicoles appropriées à toutes les forêts, jouant un rôle de protection ou de production, ou assurant quelque autre importante fonction.

Promouvoir la recherche forestière: étudier et diffuser les techniques assurant une augmentation de l'accroissement dans les forêts et l'amélioration de la qualité des produits forestiers.

8. Boisement et reboisement

Encourager la recherche et aider les gouvernements à assurer l'extension des forêts aux terres nues ou dépouillées, conformément aux buts définis dans chaque cas par les politiques forestières nationales.

Améliorer et diffuser les techniques modernes visant à la création ou à la restauration de forêts par plantations ou semis artificiels, ces techniques devant être convenablement adaptées aux différentes conditions de sols et de climats.

9. Protection des forets

Aider les gouvernements dans la recherche des méthodes techniques et administratives destinées à lutter contre le feu, les insectes et les maladies.

Encourager la conclusion d'accords internationaux pour la lutte contre la propagation de ces fléaux.

10. Equipement

Promouvoir l'utilisation du matériel moderne indispensable pour une exploitation économique et rationnelle des ressources forestières et la transformation industrielle de leurs produits.

Rassembler les informations fournies par les fabricants d'équipement, les analyser et les publier sous forme de catalogues. Encourager ces fabricants à produire des outils et machines répondant exactement aux besoins de la foresterie.

Améliorer les conditions de travail forestier.

11. Modernisation et intégration des industries forestières

Encourager dans tous les pays une transformation graduelle de l'utilisation des forêts en une intégration convenablement planifiée des industries forestières avec la forêt; cette intégration implique l'aménagement des terrains boisés sur la base du rendement soutenu de façon que la forêt puisse alimenter d'une façon continue un groupement optimum d'industries en produits forestiers de qualités et quantités déterminées.

Améliorer et moderniser les industries existantes en assurant un rendement accru de toutes les opérations.

12. Utilisation chimique du bois

Promouvoir la recherche dans le domaine de la chimie du bois.

FIGURE 4. Le bon entretien des bois faisant partie des exploitations agricoles est aussi l'un des objectifs de la FAO. Peuplement de feuillus récemment éclairci dans l'Ontario (Canada).

FIGURE 5. Forêt de sapins sur les pentes de l'Himalaya (Inde). Pendant la guerre, ce bois a été largement utilisé pour la construction d'avions.

Photo: F.R.I., Dehra Dun

Conseiller et aider les gouvernements dans l'établissement d'industries nouvelles, l'application des techniques modernes et l'amélioration générale de l'utilisation chimique des produits forestiers, cette utilisation constituant la seule possibilité d'exploitation économique des forêts mélangées, ou des bois de qualité inférieure et des résidus des opérations d'exploitation et de transformation mécanique.

13. Utilisation mécanique et standardisation

Rechercher une utilisation plus rationnelle des bois.

Faciliter les échanges commerciaux des produits forestiers, notamment par l'uniformisation des contrats d'exportation.

Obtenir un accord général sur la standardisation en matière de terminologie, mesures, dimensions, qualités et essais de bois commerciaux et de tous produits forestiers primaires.

14. Politiques de production et de distribution

Contrôler d'une façon permanente la situation courante de la production et du commerce des produits forestiers primaires et agir sur le plan international afin d'ajuster au mieux les disponibilités à la demande.

15. Stimulation de la consommation

Agir sur le plan national et international pour élever la consommation des produits forestiers à un niveau permettant d'assurer aux habitants de toutes les parties du monde des logements convenables et un niveau de vie général suffisant.

La plupart des activités décrites ci-dessus en termes généraux intéressent tous les pays et sont valables pour l'ensemble du monde. Mais la Division des Forêts a, dès le début, reconnu que l'importance et l'urgence de s'attacher à certaines lignes d'action différaient considérablement suivant les régions. Il y a certes aussi des différences de pays à pays. Mais la similarité des conditions de sol, de climat, de civilisation permet de diviser le monde en un certain nombre de régions où peuvent se définir des politiques forestières également similaires. En choisissant convenablement les lignes d'action sur lesquelles on insistera dans chaque région, on peut donc espérer les aider, ainsi que les pays qui en font partie, non seulement à établir ou à améliorer, mais à mettre en œuvre avec succès, leurs politiques forestières.

En Europe, le trait le plus marquant de la situation forestière est que ce continent doit, avec des ressources strictement limitées et déjà exploitées de façon relativement intensive, faire face à des besoins en bois rapidement croissants. Une meilleure organisation de la petite propriété forestière, très développée dans cette partie du monde, l'application de méthodes de sylviculture plus intensives encore, la plantation de nouvelles forêts, la réduction des déchets et le développement des échanges infra et inter-continentaux devraient permettre de faire face à cette situation.

Elle est un peu analogue en Amérique du Nord. Cependant, cette région possède encore d'importantes ressources intactes. D'un autre côté, l'expansion économique y est extrêmement rapide. Aussi une exploitation rationnelle assurant le renouvellement de ces ressources constituerait-elle la base essentielle de la politique forestière à suivre.

Au Proche-Orient et en Afrique du Nord, c'est l'établissement de nouvelles forêts, destinées tant à la satisfaction des besoins en bois qu'à la protection du sol et des eaux, qui doit constituer le but principal de la politique forestière. Ce but est difficile à atteindre tant en raison des conditions climatiques que des conditions sociales.

En Extrême-Orient apparaît un déséquilibre marqué entre les zones de production forestière et les zones de peuplement où se trouvent concentrés des besoins en bois. Une grande partie des forêts pose en outre des problèmes qui sont communs à beaucoup de forêts tropicales, du fait de leur manque d'homogénéité, de l'importance de l'agriculture nomade, etc.

En Amérique latine comme en Afrique centrale, enfin, le plus grave problème, avec des modalités différentes cependant entre ces deux régions, est celui de l'ouverture et de la mise en exploitation rationnelle des forêts vierges tropicales. Toutefois, de grands progrès restent à faire pour la sylviculture tropicale.

C'est pour tenir compte de la variété des conditions dont on vient de tracer une esquisse, et de la diversité des méthodes à appliquer pour y répondre que la Division des Forêts a adopté une approche régionale aux problèmes de la foresterie mondiale.

Les organismes essentiels de cette approche sont les commissions forestières régionales, qui existent actuellement dans toutes les régions sauf l'Amérique du Nord, l'Afrique, l'Est européen et la partie nord de l'Extrême-Orient. Elles se placent sur le plan de la politique forestière, tandis que des groupes de travail dépendant d'elles, des comités et commissions techniques, facilitent leurs travaux sur le plan technique.

Les missions d'assistance technique sont leur prolongement à l'échelle nationale.

La Conférence de la FAO coordonne leur action à l'échelle mondiale.

Inventaires et statistiques

Inventaires forestiers

La formulation d'une politique forestière nécessite la connaissance des ressources forestières. Ces données sont fournies par des inventaires forestiers qui doivent indiquer l'étendue des surfaces boisées, les conditions de propriété, la composition des peuplements, ainsi que des estimations du volume sur pied, de l'accroissement et des pertes annuelles. Dans un certain nombre de pays ces données apparaissent dans les différents plans d'aménagement, mais il est exceptionnel, surtout pour les pays où la propriété forestière privée est importante, que l'ensemble des informations contenues dans ces plans puissent constituer un inventaire national, même limité aux massifs accessibles ou que l'on peut se proposer de mettre en valeur dans un proche avenir.

Pour obtenir ces inventaires nationaux on fait appel à de nouvelles méthodes mises au point dans des pays tels que les pays Scandinaves, des Pays-Bas et l'Amérique du Nord; elles permettent d'effectuer des inventaires pour de grandes superficies forestières sur la base de photographies aériennes. Ces possibilités ont profondément modifié le problème des inventaires forestiers au point qu'il est permis d'affirmer qu'aucun autre progrès semblable n'a pu être réalisé au cours des quinze dernières années dans la science forestière exception faite, peut-être, de la chimie du bois. Ces méthodes modernes sont parvenues à un très haut degré de précision. Les inventaires nationaux effectués en Suède, en Finlande, en Norvège, en Grande-Bretagne sont basés sur une combinaison des méthodes traditionnelles et de la photogrammétrie. D'autres pays ont commencé ou entreprennent des inventaires nationaux basés sur ces méthodes: les Pays-Bas, la France, l'Italie, la Thaïlande, le Mexique (pour partie) et le Brésil (Amazone).

La Division des Forêts s'est assignée deux tâches: se tenir au courant des nouveaux développements techniques et disséminer ensuite le résultat des expériences faites dans les pays les plus avancés. Une étude intitulée Préparation d'un inventaire forestier national a été publiée en 1950 à l'intention de ceux qui devaient établir pour la première fois des inventaires forestiers sur une grande échelle. Une deuxième édition qui tiendra compte des plus récents progrès paraîtra sous peu. En outre, des articles, publiés dans Unasylva et traitant de problèmes particuliers, ont indiqué les progrès réalisés dans les différents pays.

Les progrès techniques ont été obtenus principalement et même parfois exclusivement dans l'inventaire des peuplements de conifères de l'hémisphère septentrional. Les méthodes d'interprétation, surtout du point de vue statistique, ne peuvent pas être appliquées telles quelles aux régions tropicales. De nouvelles méthodes ont souvent dû être élaborées afin de pouvoir procéder rapidement et sans trop de frais à l'inventaire des forêts tropicales. Grâce au Progamme élargi d'assistance technique, il a été possible d'envoyer des experts en matière d'inventaire forestier dans les pays tropicaux et il est fort encourageant de constater que les problèmes, résolus pour des forêts pures de conifères à classe d'âge uniforme, peuvent l'être également pour des forêts mélangées denses et non équines. Des résultats satisfaisants ont été obtenus dans les forêts de teck et de diptérocarpes, ainsi que dans les forêts vierges tropicales du bassin de l'Amazone où un expert aidé de deux jeunes techniciens a pu dresser l'inventaire de 2 millions d'hectares en deux ans.

De plus en plus, les pays des régions tropicales et subtropicales se rendent compte qu'ils ne seront en mesure de développer leurs ressources forestières qu'après un relevé systématique de ces richesses naturelles; toutefois, le manque de techniciens dans ce domaine spécialisé constitue une entrave sérieuse aux progrès réalisables. Certes la FAO a déjà mis à la disposition de ces pays un certain nombre de bourses pour que des techniciens puissent se familiariser à l'étranger avec les nouvelles méthodes; cela ne représente cependant qu'un début et l'on prévoit de mettre sur pied des cours spécialisés d'enseignement en cette matière. On espère que le premier Centre d'enseignement pour inventaires forestiers, comprenant des cours d'une durée de six mois, sera inauguré sous peu en Indonésie.

Statistiques

La Division des Forêts a commencé son activité à un moment où les services statistiques d'un grand nombre de pays étaient désorganisés: beaucoup de recueils statistiques avaient cessé de paraître depuis des années. La première tâche était donc de rassembler et de présenter toutes les données disponibles sur la situation forestière mondiale afin d'en dégager les grands problèmes dont aurait à s'occuper la FAO. Un rapport qui résumait cette situation fut présenté à la deuxième session de la Conférence qui s'est tenue à Copenhague en 1946. La conclusion de ce rapport était que les statistiques disponibles variaient de pays à pays et n'étaient pas satisfaisantes, en tant que conception, portée, contenu et précision. Elles n'étaient pas assez complètes pour être utilisées à des fins aussi importantes que l'établissement de politiques forestières ou l'enregistrement des tendances du développement forestier.

Le travail de la Sous-Division de l'économie de la Division des Forêts se concentra sur ces deux aspects du problème: d'un côté rassembler, comparer, réunir en tableaux et interpréter les statistiques courantes et disponibles de la production forestière et des produits forestiers, ceci afin de disposer de toutes les données nécessaires pour analyser la situation mondiale et ses tendances de l'autre côté, améliorer les méthodes statistiques employées les différents pays, afin d'en augmenter la portée, la précision, l'actualité et la comparabilité du point de vue international. En pratique, il est malaisé de tenir une séparation rigide entre les deux aspects de ce travail et des chevauchements sont inévitables.

Un des obstacles majeurs à la comparabilité des statistiques tenait au manque de clarté des termes employés. Des définitions peu précises, tels que, par exemple, «coupe annuelle» ou «accroissement annuel», causaient des divergences tellement grandes dans les chiffres que les mêmes données pouvaient servir d'arguments pour des conclusions diamétralement opposées. Deux conférences internationales sur les statistiques forestières, convoquées à Washington et à Rome en 1947, ont apporté quelque clarté dans les définitions les plus importantes et fixé les facteurs de conversion communément employés. Depuis lors, le travail a été poursuivi par des groupes de travail statistiques constitués d'experts de l'Europe et de l'Amérique du Nord dont les recommandations sont portées à la connaissance de tous par les publications statistiques de la Division des Forêts. Afin de rendre applicable aux forêts tropicales certains termes et définitions forestières, on a recours dans une mesure croissante aux statisticiens de ces régions; l'expérience montre toutefois que des définitions applicables au monde entier pour des termes aussi simples que «forêts» ou «coupes annuelles» sont extrêmement difficiles à établir.

L'amélioration des statistiques, de même que l'introduction de nouvelles séries statistiques, si nécessaires pour l'élaboration d'une politique forestière, représentent un travail continu exigeant beaucoup de patience; des améliorations ont été obtenues dans beaucoup de pays par l'introduction du système d'inventaires par placettes, tant pour le calcul des coupes non enregistrées et celui de la production des sciages, que pour la connaissance de la composition des massifs.

Le Programme élargi d'assistance technique est appelé à jouer un rôle important, puisqu'il rend possible l'organisation dans différentes parties du monde de projets pilotes d'inventaires par placettes, et qu'il permet, par l'envoi d'experts, l'allocation de bourses pour la formation de techniciens, etc., d'assister les gouvernements en vue d'améliorer leurs services de statistiques. L'introduction de la Classification type pour le commerce international dans beaucoup de payes permet maintenant une comparaison internationale des données sur le commerce en produits forestiers.

Une lacune importante dans l'organisation de la statistique apparaît néanmoins à l'égard de la consommation du bois et de ses produits. Peu de gouvernements établissent des statistiques systématiques sur la consommation du bois rond selon l'utilisation finale: par exemple, la quantité de sciages employés pour le bâtiment, les constructions industrielles, les transports, l'emballage et les industries du bois, les besoins des populations rurales. Cette lacune rend difficiles les prévisions à long terme et, par suite, l'exploitation forestière est trop souvent basée sur une spéculation entraînant la dévastation des massifs. Un premier essai a été fait dans cette voie en 1950 et les années suivantes par la compilation de statistiques sur l'utilisation finale, afin de déterminer les tendances de la consommation européenne de bois pour les dix prochaines années. Depuis lors, beaucoup de pays européens ont introduit des statistiques partant des utilisations finales de toutes ou de quelques-unes des catégories de bois rond. Un travail analogue est en préparation pour l'Extrême-Orient. Tous les pays se rendent de plus en plus compte de l'importance de ce genre de statistiques pour l'économie forestière et elles ont été incorporées dans le «Programme minimum à long terme pour les forêts et les produits forestiers» établi par la Division à la lumière de dix ans d'expérience dans le domaine des statistiques internationales et qui sera discuté dans un proche avenir par les commissions forestières des différentes régions.

FIGURE 6. Méthodes d'autrefois. L'animal n'a pas perdu sa place dans le travail en forêt, comme en témoigne cette scène ou des éléphants entassent des grumes de teck, dans une foret du nord de la Thaïlande.

Photo: S. Bunnag

L'autre aspect est la collection et la dissémination de statistiques forestières, auquel servent les questionnaires statistiques envoyés aux gouvernements membres; les données qui en résultent sont incorporées dans des tableaux et publiées périodiquement. Le seul fait d'avoir à remplir ces questionnaires, préparés par des experts hautement qualifiés, a obligé les pays, ainsi qu'on a pu le constater, à améliorer leurs services statistiques nationaux. La publication des données est faite dans l'Annuaire statistique des produits forestiers, qui contient les données les plus récentes sur les coupes dans les plus importantes catégories de bois rond, leur utilisation, la production et le commerce international des sciages, des traverses, du contreplaque, de la pâte à papier, du carton et des panneaux de fibres et l'indication de la consommation par personne de certains produits du bois. Il est intéressant de noter que le dixième volume de cet annuaire vient de paraître, chiffre qui n'a été atteint par aucun autre annuaire statistique des Nations Unies. Une comparaison du premier volume avec le dernier montre le progrès effectué dans les statistiques forestières nationales et internationales pendant cette période: tandis que dans les premières années quelque 80 pays seulement pouvaient répondre au questionnaire servant à préparer l'Annuaire, le dernier volume comprend les réponses de 130 pays, représentant 90 à 95 pour cent de la production et du commerce mondial des produits forestiers.

Une enquête similaire, mais plus détaillée, concernant la production, le commerce, les stocks et les prix du bois à pâte, du bois de mine et des sciages résineux est faite trimestriellement pour l'Europe et l'Amérique du Nord; les données rassemblées sont publiées dans l'annexe statistique du Bulletin du bois pour l'Europe, publié en collaboration avec la Commission économique pour l'Europe (CEE) et dont on envisage de modifier la présentation pour permettre une dissémination plus rapide des statistiques et des rapports sur la situation des marchés.

Un autre questionnaire demande aux gouvernements membres, tous les cinq ans, des informations disponibles sur les ressources forestières, les superficies boisées, la classification des forêts exploitées, le matériel sur pied, l'accroissement brut, l'accroissement net, les possibilités, les coupes et les quantités enlevées. Une première enquête avait été faite en 1947; elle a été renouvelée en 1953, et les résultats ont été publiés dans le rapport Les ressources forestières mondiales. Ce volume de statistiques contient les données les plus complètes relatives à la superficie boisée du monde qui aient été publiées jusqu'à présent.

Dans le domaine des statistiques forestières le travail des dernières dix années est encourageant: il fait apparaître qu'un progrès a été obtenu sous ce rapport dans les différents pays; mais il montre également qu'il reste beaucoup à faire pour que nous disposions de données précises sur lesquelles baser une utilisation toujours plus rationnelle des ressources forestières du globe.

Service d'information

La documentation très complète recueillie en vue des publications statistiques et des rapports analytiques de la Division des Forêts, permet de fournir des informations à un nombre toujours croissant de correspondants qui nous adressent les demandes les plus variées. C'est un véritable service d'information que la Division a pu ainsi organiser.

Rapports sur les marchés et les produits: Etudes spéciales

C'est également sur la base de ces informations, que seule la FAO peut recueillir sur une base régionale ou mondiale, que sont établis pour l'avenir immédiat des rapports sur les marchés, tandis que des études spéciales s'occupent des prévisions à long terme.

FIGURE 7. Méthodes d'aujourd'hui. Débardage mécanique dans un peuplement de feuillus aux Etats-Unis. Ce pays est celui où l'on trouve la plus grande variété d'équipement motorisé pour le travail en foret.

Photo: Hyster Company, Portland, Oregon

Le développement de la production, le commerce international, la consommation et les prix de la plupart des produits forestiers sont en continuelles fluctuations; il est donc naturel que les politiques de production, de distribution et de prix, de même que les problèmes de commercialisation de certaines catégories de bois rond, de sciages, de contre-plaqués, de pâte et de papier soient passés en revue périodiquement dans les rapports sur les produits paraissant dans Unasylva. Ces rapports constituent souvent le point de départ d'efforts dans le domaine international, visant à éviter une disparité à court terme entre l'offre et la demande ou visant à encourager la production et à éliminer les entraves du commerce. Dans le cadre plus limité de l'Europe, les marchés des produits forestiers des treize principaux pays exportateurs ou importateurs, ainsi que le marché européen en général est passé en revue dans la publication conjointe de la FAO et de la CEE, Bulletin du bois pour l'Europe. Un tour d'horizon très sommaire de la production forestière mondiale est toujours incorporé dans le rapport annuel de la FAO, La situation mondiale de l'alimentation et de l'agriculture. Quoiqu'il soit difficile de se rendre compte si la rapide dissémination de ces données a contribué à la stabilisation du marché international des produits forestiers, il est quand même à retenir que ces publications sont très souvent reproduites en tout ou en partie dans les périodiques les plus importants, et les prévisions à court terme se sont avérées exactes dans la plupart des cas.

Cependant, une vraie planification sera très malaisée tant que des prévisions de coupes n'existeront pas. Afin de combler cette lacune, la Commission européenne des forêts a depuis quelques années discuté des prévisions de coupes à court terme, avec le résultat que les prévisions relatives au développement des industries forestières dans un proche avenir ont été grandement facilitées. Les développements tant économiques que sociaux: auxquels nous assistons dans le monde conduiront certainement à une augmentation de la consommation du bois rond et de ses produits: il est tout naturel que la Division des Forêts se soit préoccupée d'estimer d'un côté les besoins futurs en produits forestiers, compte tenu des développements économiques prévisibles, de l'augmentation des populations et de l'amélioration du niveau de vie, et, d'un autre côté, les possibilités qu'a la production mondiale de pourvoir, sur la base du rendement soutenu, à ces besoins croissants. Le premier essai d'un tour d'horizon mondial fut effectué en 1946 par le rapport World Situation for Forestry and Forest Products, 1937 - 1946, préparé pour la deuxième session de la Conférence de la FAO (Copenhague, 1946). Depuis lors, l'étude des problèmes à long terme nous a conduit à porter nos efforts dans les deux voies suivantes: d'une part, l'analyse des tendances générales de la production forestière de toute une région, et, d'autre part, des études spéciales sur certains produits déterminés.

La première étude générale fut publiée en 1953 en collaboration avec la CEE sous le titre: Consommation production et commerce du bois en Europe. Il en sera question à propos des travaux du Comité du bois de la CEE. On veut seulement remarquer ici que, méthodologique l'étude ouvrait de nouvelles possibilités, car les besoins futurs en bois ronds étaient calculés sur la base des usages définitifs et non, selon la tradition, à partir des diverses catégories de bois ronds. Une étude semblable est actuellement en cours pour l'Asie et le Pacifique. Les autres régions seront ensuite examinées et l'ensemble des résultats ainsi obtenus fournira les bases d'une évaluation mondiale des besoins et des ressources en bois ronds. La portée de ces études dépasse évidemment les moyens de la Division des Forêts et il est donc encourageant de noter la coopération que nous apportent les commissions économiques régionales des Nations Unies qui coopèrent activement à ces travaux.

La deuxième activité dans ce domaine des études à long terme est celle portant sur certains produits déterminés. C'est dans ce cadre que rentre l'étude préparée en coopération avec l'UNESCO, la CEE et la Commission économique pour l'Amérique latine (ECLA), et publiée en 1954 sous le titre Les ressources de pète et de papier dans le monde - Etat présent et perspectives, ainsi que l'étude Pulp and Paper Prospects in Latin America, dont des conclusions sont basées sur les délibérations d'une réunion d'experts qui a eu lieu à Buenos Aires en 1954. Une étude du même genre est envisagée dans un proche avenir pour l'Asie et le Pacifique.

Au cours des dernières dix années, une diminution continue de la quantité consommée par habitant de certaines catégories de bois (sciages résineux, bois de mine) a pu être constatée en Europe. Cette tendance a été tellement marquée au cours des dernières années que les forestiers et les industriels craignent de perdre de nombreux marchés traditionnels. Une étude est en cours de préparation démontrant jusqu'à quel point d'autres produits en bois, tels que le contre-plaqué ou des panneaux de fibres, ou même des matériaux autres que le bois, se sont substitués aux sciages.

Politique forestière

On a dit précédemment ce qu'est une politique forestière: elle consiste pour chaque pays, pour chaque région et pour le monde, à définir la place que la forêt, les industries primaires et les autres activités qui s'y attachent, doivent occuper dans le cadre physique, économique et social de ce pays, de cette région et du monde.

Le cadre physique varie peu. Les conditions économiques et sociales, au contraire, se modifient, chaque pays cherchant à améliorer les conditions de vie de sa population. La politique forestière doit donc être, elle aussi, en évolution constante. Cette création est d'autant plus difficile que le but à atteindre ne peut être conçu que comme but lointain, puisque l'action sur la forêt ne peut généralement donner des résultats qu'à longue échéance.

D'autre part, ces conditions physiques, aussi bien qu'économiques et sociales, varient d'un pays à l'autre, et plus encore, comme on l'a vu, d'une région à l'autre.

Les politiques forestières nationales et régionales doivent donc varier dans le temps et dans l'espace. La politique forestière mondiale variera aussi dans le temps.

Il est cependant incontestable qu'il existe des principes de politique forestière, limitant, encadrant le choix possible de chaque pays, de chaque région et du monde. Ceci s'explique par le fait que la forêt possède un caractère permanent: celui de ressource naturelle renouvelable, et rend des services non moins permanents, indispensables à la vie sur la terre, à savoir: protection des sols et des eaux d'une part, production de bois d'autre part, pour ne pas parler de services plus accessoires.

FIGURE 8. L'économie de la Finlande dépend pour 80 pour cent de la production forestière du pays. D'ailleurs un forestier bien connu, Aimo Kaarlo Cajander, est devenu premier Ministre de Finlande et Eino Saari, un viel ami de la Division des Forêts de la FAO, est actuellement Ministre des affaires sociales.

Photo: Mannelin, Malmi

Le premier principe de politique forestière, c'est que tout pays, même le plus déshérité du point de vue des conditions de la croissance des bois, doit avoir une politique forestière.

On peut dire, sans aucune exagération, que, il y a dix ans, les gouvernements de très nombreux pays n'avaient aucune idée de cette nécessité. De là vient l'obstination de la Division des Forêts, dès ses débuts, à la faire pleinement reconnaître. L'une de ses premières publications fut une étude intitulée Politique, législation et administration forestières, qui visait essentiellement à ce résultat. Mais elle fut grandement aidée par le troisième Congrès forestier mondial qui se réunit en 1949 à Helsinki. Les techniciens de tous les pays réunis à ce Congrès estimèrent en effet que la reconnaissance de «principes de politique forestière» était un élément indispensable au développement de leur action et ils invitèrent la FAO à les formuler en s'entourant des conseils et des avis de toutes les personnalités forestières auxquelles elle pouvait faire appel.

La rédaction du texte de ces principes donna lieu à de longues discussions. Il fut soumis successivement à toutes les commissions forestières régionales existant à l'époque. Puis il fut examiné dans ses détails au Siège même de la FAO. Il fut enfin présenté à la sixième session de la Conférence de la FAO en 1951 et approuvé par elle à l'unanimité. Il n'est que juste de rappeler ici les noms des quatre forestiers qui furent les plus actifs au cours de ces débats et dont l'influence personnelle et les sages avis permirent de lever tous les obstacles: Lyle Watts, alors Chef du Service forestier des Etats-Unis, O. J. Sangar du Royaume-Uni, qui présidait à cette époque la Commission européenne des forêts, le Professeur Eino Saari, de Finlande, qui avait organisé et présidé le troisième Congrès forestier mondial, et M. D. Chaturvedi, alors Inspecteur général des forêts de l'Inde.

On pouvait sans doute, au moment où elle fut faite, s'interroger sur l'intérêt qui s'attachait à une telle déclaration. Depuis lors, il est apparu nettement qu'elle constituait une arme de base pour les techniciens forestiers qui, dans chaque pays, rappellent inlassablement à leur gouvernement la nécessité d'une politique forestière basée sur des principes sains. Dix ans après la création de la FAO et cinq ans après cette déclaration, on peut dire que, s'il existe encore des pays qui hésitent à s'engager dans une politique forestière rationnelle, il n'en est plus qui n'ait conscience de la nécessité et de l'importance de cette politique. Des pays comme l'Egypte ou l'Islande n'ont pas été les derniers à l'admettre pleinement et à prendre des actions en conséquence.

Quels sont donc ces «principes» de politique forestière ? Le document qui les énonce est divisé en deux parties. Il distingue les «principes régissant l'élaboration d'une politique forestière» et les «principes régissant l'application d'une politique forestière».

Il n'est peut-être pas inutile de les passer en revue, car on fera ainsi mieux comprendre les raisons pour lesquelles la FAO a choisi les quinze lignes spécifiques d'action auxquelles il a été fait allusion ci-dessus.

Principes régissant l'élaboration d'une politique forestière

UTILISATION DU SOL

Le premier des «principes régissant l'élaboration d'une politique forestière» est que chaque pays détermine les superficies à réserver de façon permanente à la forêt sur son territoire. Il spécifie que ce choix doit tenir compte des conditions économiques et sociales du pays et «de l'étroite interdépendance existant entre toutes les formes de l'utilisation du sol».

Ce choix est souvent très malaisé. Si, dans les zones presque inhabitées, sur les terrains les plus ingrats ou les plus accidentés, il n'y a guère de doute que de larges superficies doivent être réservées à la forêt, une concurrence intense entre la forêt et les autres utilisations du sol se révèle dès que des noyaux de population dense s'installent sur ces zones. Ces populations doivent assurer leur nourriture et celle de leur bétail. Elles peuvent disposer de ressources suffisantes en travail et en argent pour mettre en valeur des terrains même médiocrement productifs dans leur état naturel. Il n'est même pas nécessaire, en certains cas, que la population soit dense ou stable. Les modes de vie pastoraux sont peut-être ceux qui provoquent la concurrence la plus intense entre la forêt d'une part et le pâturage d'autre part. Les intérêts locaux des habitants peuvent aussi se trouver en conflit avec l'intérêt plus large du pays dans son ensemble.

Existe-t-il des critères permettant d'aider les pays dans cette détermination ? La Division des Forêts s'est penchée sur ce problème. Elle a suscité des discussions sur ce sujet dans différents organismes, notamment à la Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes, à la Commission latino-américaine des forêts et à la Commission européenne des forêts ou dans les groupes de travail de ces commissions ainsi qu'au quatrième Congrès forestier mondial. Elle a entrepris des études sur l'agriculture nomade, les politiques de boisement et de reboisement, le pâturage en forêt, qui touchent de plus ou moins près à ce problème. Elle entretient sur ce sujet, avec la Division de l'Agriculture, une collaboration permanente.

Il ne semble pas que des critères existent, bien que certains pays aient adopté, théoriquement du moins, celui de la pente limite. Mais il existe assurément des méthodes permettant de déterminer - compte tenu des conditions physiques, économiques et sociales, et de leur évolution prévisible dans le futur - l'utilisation du sol à laquelle il convient de tendre. C'est à l'application de ces méthodes que la FAO invite les pays, tout en cherchant à promouvoir et à diffuser les connaissances de base sur lesquelles ces méthodes doivent être basées.

Parmi ces connaissances, celle de l'influence que la forêt exerce sur la conservation des sols, le débit de l'eau, la protection contre le vent, la température de l'air et du sol, la fonte des neiges, etc., est particulièrement importante pour le forestier. S'il peut, en effet, réclamer à bon droit une place pour la forêt naturelle ou à créer, c'est bien lorsque celle-ci exerce une irremplaçable action de protection sur les autres ressources naturelles indispensables à l'agriculture, à l'industrie et à la vie même de l'homme: le sol et l'eau.

La connaissance des influences forestières, et de leurs modifications sous l'effet des diverses sortes d'utilisation de la forêt (coupes) ou du sol forestier (pâturage) est malheureusement encore incomplète. Le point où elles sont parvenues en sera fait dans un proche avenir par une publication sur ce sujet.

Mais il faut appliquer déjà ce que l'on sait et c'est à quoi la Division des Forêts s'applique, notamment en diffusant, en étroite coopération avec la Division de l'Agriculture, les techniques de l'aménagement des bassins de réception et de l'aménagement des terrains de parcours.

L'aménagement des bassins de réception présente, en effet, une importance particulière, car l'approvisionnement en eau des villes, des industries, des réservoirs alimentant les usines hydro-électriques et les canaux d'irrigation dépend essentiellement de l'utilisation correcte des eaux qui se trouvent dans les bassins de réception, fluviaux et torrentiels. Du point de vue forestier, le problème est traité par des groupes de travail de la Commission européenne des forêts et de la Commission des forêts pour l'Asie et le Pacifique. Un centre d'étude sera prochainement organisé sur ce sujet, entre forestiers et agriculteurs, en Extrême Orient.

Quant au problème du pâturage et des terrains de parcours, il n'est pas nécessaire d'insister sur son influence sur la forêt. Particulièrement aigu au Proche Orient, c'est dans le cadre de la Commission des forêts pour le Proche Orient qu'on cherche surtout à l'attaquer. Mais il n'est pas inutile de rappeler que, en 1954, la Division des Forêts a rassemblé à Rome des techniciens de tous les pays qui ont élaboré des principes de «politique des terrains de parcours forestiers», approuvés plus tard par les commissions forestières régionales. C'est là un exemple où les «principes de politique forestière» ont pu être approfondis et détaillés sur un point particulier, d'importance majeure pour de nombreux pays.

AMÉNAGEMENT FORESTIER

FIGURE 9. Souvent la foret est utilisée non seulement pour la production du bois, mais aussi pour le pacage du bétail. Troupeau de Hereford au pacage dans un peuplement de pins, dans le sud des Etats-Unis.

Photo: U.S. Forest Service

Le second principe régissant l'élaboration d'une politique forestière vise l'aménagement des forêts et de leur production «en vue d'en tirer pour un temps illimité et pour le plus grand nombre possible de nationaux (du pays) les bénéfices maximums qu'elles peuvent fournir».

La diffusion des techniques d'aménagement a donc été, au cours de ces dix années, l'une des principales préoccupations de la Division. Il faut entendre ici aménagement au sens large, englobant à la fois la protection des forêts contre le feu, les insectes et les maladies, les méthodes de plantation et d'organisation de peuplements artificiels ou d'arbres hors forêt, aussi bien que les méthodes de traitement des forêts naturelles, les considérations économiques qui permettent d'orienter la production ligneuse dans le sens le plus favorable, tant en quantité qu'en qualité.

En consultant la liste des publications forestières de la FAO, on constatera que le plus grand nombre traitent de ces questions. Elles ont été préparées soit par le personnel de la Division des Forêts elle-même soit, sous sa supervision, par des techniciens de renom mondial.

On peut signaler plus particulièrement deux séries qui, du point de vue pratique, revêtent une grande importance. La première est le Manuel mondial de plantations forestières. Les volumes qui la composent s'efforcent de diffuser les techniques éprouvées se rapportant soit à certaines phases des opérations de boisement (la récolte et la conservation des graines), soit à l'utilisation de certaines essences pour la constitution de plantations artificielles (l'eucalyptus), soit à la création de ces plantations sous des conditions climatiques particulières (en zones arides). La seconde série, constituée par le Catalogue de graines forestières, rend de grands services aux reboiseurs désireux de se procurer des graines avec les garanties que leur assure le certificat de qualité et d'origine adopté par la Conférence de la FAO en 1951.

Mais on ne s'attend pas à ce que ces publications suffisent pour susciter l'intérêt des pays. Suivant les cas, d'autres méthodes d'action sont élaborées. Tantôt les commissions régionales sont saisies, tantôt des voyages d'étude sont organisés (protection contre le feu, eucalyptus), tantôt des commissions spéciales sont créées (teck), ou des conférences spécialement convoquées, soit à l'échelle régionale (peuplier), soit à l'échelle mondiale (eucalyptus).

On peut mentionner ici que, sans négliger les politiques des autres régions, l'intérêt de la Division tend à se concentrer de plus en plus sur deux problèmes: celui de la sylviculture tropicale, dont la solution permettrait la mise en valeur des grandes ressources forestières mondiales encore peu exploitées, et celui des zones arides et semi-arides, en vue de la reconstitution de la forêt sous des formes adaptées tant aux conditions physiques qu'aux conditions économiques de ces zones. Les problèmes de la sylviculture tropicale ont été longuement étudiés par le quatrième Congrès forestier mondial, qui s'est tenu à Dehra Dun en décembre 1954, et une importante publication est en préparation sur ce sujet. Ceux des régions arides ont déjà fait l'objet de publications. Un récent voyage d'étude en U.R.S.S. leur a été plus spécialement consacré. La Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes s'en est préoccupée. Enfin, on compte reprendre la question d'un point de vue élargi en collaboration avec l'UNESCO, car la collaboration avec les autres institutions spécialisées des Nations Unies est un mode d'action qui peut donner d'intéressants résultats.

Le second «principe» de politique forestière implique, si l'on veut tirer le plus grand profit possible de la production ligneuse des forêts, le développement d'industries modernes, convenablement équipées, et l'adoption de méthodes d'exploitation et de transformation rationnelles, exercées par un personnel ouvrier et de maîtrise travaillant dans des conditions optimums. L'écoulement des produits ainsi manufacturés doit ensuite être assuré par une organisation appropriée des marchés intérieur et extérieur.

FIGURE 10. La lutte contre les incendies de forets a été le sujet d'une des premières publications de la FAO. Un voyage d'étude très intéressant a été organisé aux Etats-Unis en 1951, conjointement par la FAO, le service forestier américain et les autorités du Plan Marshall.

Sur tous ces points, la Division des Forêts a agi pour aider et coordonner les efforts des pays. Pour l'Europe, un organe essentiel de la surveillance du marché international est le Comité du bois de la CEE, dont il sera parlé par la suite. Des groupes de travail pour la standardisation ont été créés au sein des Commissions forestières pour l'Asie et le Pacifique et l'Amérique latine. Les Comités de la technologie mécanique du bois et de la chimie du bois sont les organismes techniques dont les avis permettent, dans le domaine des industries de transformation, d'orienter l'action de la Division des Forêts. Un Comité mixte FAO/CEE, divisé en de nombreux sous groupes spécialisés, étudie des techniques d'exploitation et la formation des ouvriers forestiers.

Cependant, les efforts de la Division se concentrent actuellement sur le développement des industries de la pâte et des panneaux. Une action de grande envergure se développe en Amérique latine pour pousser à l'établissement d'usines de pâte. Une importante conférence de la pâte a été réunie en 1955 à Buenos Aires; une conférence mondiale des panneaux s'est tenue en janvier 1957 à Genève.

RECHERCHES ET STATISTIQUES

Le troisième «principe» de politique forestière invite les pays à développer leur connaissance de tous les facteurs qui entrent en considération pour la détermination de cette politique.

Cela implique l'organisation de la recherche forestière. Dans ce domaine, la Division a prêché d'exemple. Sans doute n'a-t-elle aucun moyen d'effectuer elle-même des recherches. Mais son action est triple. Tout d'abord elle suscite et conseille l'organisation de nouvelles stations de recherche. Elle a notamment prix l'initiative de l'organisation d'une station de recherche régionale pour l'Amérique latine, et d'une autre pour le Proche Orient. En second lieu, elle cherche à orienter la recherche sur les problèmes qui lui paraissent présenter le plus d'urgence, soit à l'échelle régionale, soit à l'échelle mondiale. De là son étroite coopération avec l'Union internationale des organisations de recherche forestière. Enfin, elle a organisé, au sein des commissions forestières régionales, des comités de la recherche qui permettent de coordonner les recherches dans les diverses régions. Un autre effort dans cette voie est la publication d'un répertoire des stations de recherche (Research in Forestry and Forest Products, 1953, 324 p.) comportant l'indication de leur programme de travail.

Une égale importance est donnée aux recherches forestières proprement dites et aux recherches sur les produits forestiers, ces derniers présentant notamment un intérêt tout particulier pour le développement des ressources forestières tropicales.

L'organisation de séries de statistique forestière n'est pas moins nécessaire que l'organisation de la recherche. On a vu que la FAO avait développé un vaste programme de statistiques mondiales, et comment elle cherchait à encourager le développement des statistiques forestières nationales.

EDUCATION DU PUBLIC

C'est à l'éducation du public que se réfère le quatrième «principe régissant l'élaboration d'une politique forestière».

Tous les pays semblent avoir compris que l'appui de l'opinion publique est indispensable au succès et même à l'élaboration d'une politique forestière. La preuve en est que, sous l'impulsion de la FAO, la plu part de ceux qui ne l'avaient pas encore fait, ont organisé des Fêtes de l'arbre annuelles ou des cérémonies similaires. La Division a publié plusieurs brochures, destinées surtout, conformément à la recommandation du quatrième Congrès forestier mondial, à toucher les enfants d'âge scolaire. Ces brochures ont fait l'objet, de la part de nombreux pays, de demandes se chiffrant à des milliers d'exemplaires. La Division entretient une action de diffusion des divers moyens de propagande: affiches, films, etc., et la Commission des forêts pour l'Asie et le Pacifique possède un Groupe de travail qui étudie les meilleures méthodes de propagande pour cette région.

Principes régissant l'application d'une politique forestière

LÉGISLATION FORESTIÈRE

Le premier des «principes régissant l'application d'une politique forestière» reconnaît la nécessité d'une législation forestière bien adaptée aux buts de la politique forestière ainsi qu'aux institutions et aux normes de chaque pays.

De réels progrès ont été obtenus dans cette vole. La Division y a contribué en diffusant les législations passées par les pays et en signalant les dispositions les plus intéressantes pour d'autres pays; elle publie des études sur des questions spéciales, telles que celle sur les associations et les coopératives forestières, parue dans un récent numéro d'Unasylva (Vol. 10, N° 2, 1956). Elle soumet aux commissions régionales ou à des réunions spéciales des problèmes particulièrement importants, tels que la réglementation des droits d'usage au Proche-Orient.

ADMINISTRATION

Ni la législation forestière, ni les techniques spécialisées qu'implique la gestion rationnelle des forêts ne sauraient être appliquées s'il n'existe pas une administration jouissant, au sein de chaque pays, d'un statut nettement défini et composée de fonctionna ires répondant à un certain standard d'éducation, générale et professionnelle.

C'est là le second des «principes régissant, l'application d'une politique forestière». La Division suit donc de près le développement des administrations forestières et conseille, dans la mesure de ses moyens, les pays qui le désirent sur ce sujet délicat. C'est un point sur lequel de grands progrès sont encore à réaliser. Presque tous les pays ont maintenant un service chargé des problèmes forestiers, mais, dans bien des cas, ce service est encore à l'état d'embryon. Or, c'est à l'importance de ce service et à son statut qu'on peut mesurer l'intérêt que chaque gouvernement attache à ses forêts et à sa politique forestière.

EDUCATION FORESTIÈRE

Le dernier principe, enfin, attire l'attention ion sur la nécessité, pour les gouvernements, d'assurer la formation professionnelle du personnel technique forestier de tous les grades et de toutes les disciplines. Ce personnel est nécessaire non seulement pour fournir les cadres des administrations forestières, mais aussi pour permettre aux propriétaires forestiers et aux industries du bois de recruter les ingénieurs, les techniciens, les gardes dont ils ont besoin.

La Division des Forêts a apporté le plus grand concours possible à la formation de ce personnel. Dans certains pays, comme en Colombie, elle a conseillé l'ouverture de nouvelles écoles. Elle en a aidé d'autres à les organiser, comme au Chili et au Libéra. Ailleurs, comme en Inde et à Chypre, elle s'est assurée le concours des écoles existantes pour la formation d'élèves provenant de pays où des écoles semblables n'existent pas. Elle aide aussi, en Amérique latine, par exemple, diverses organisations qui entretiennent des cours temporaires. Elle a enfin procuré de nombreuses bourses d'études pour assurer la formation complète de forestiers de niveau universitaire, comme en Ethiopie et au Liban.

Elle a publié, il y a déjà plusieurs années, un répertoire des écoles forestières (Directory of Forestry Schools - édition anglaise seulement), qui doit être prochainement révisé et complété. Elle dispose, pour la conseiller dans son action, d'un groupe d'experts de l'enseignement, composé de hautes personnalités, spécialisées dans ce domaine, et représentant les diverses régions.

L'action internationale - Les commissions forestières régionales

Les commissions forestières régionales sont les organismes principaux sur lesquels la Division a basé son action internationale. On a vu les raisons qui l'ont poussée à cette approche régionale des problèmes forestiers du monde. On veut ici rappeler quel est leur rôle, comment ces commissions régionales ont été créées, comment elles ont rempli leurs fonctions jusqu'à ce jour, quels sont les problèmes qu'elles ont à résoudre et quelles sont les perspectives qui s'ouvrent devant elles.

Rôle des commissions forestières

Les commissions forestières ont pour tâche essentielle de déterminer, dans le cadre des «principes de politique forestière», la politique forestière applicable à la région intéressée.

Elles sont composées de représentants des gouvernements de la région. Il est demandé à tous les pays, à l'occasion de chaque réunion de la Commission, de rapporter à celle-ci, suivant un plan préalablement établi, les modifications apportées à la politique forestière nationale depuis sa dernière réunion, les progrès réalisés dans sa mise en œuvre, soit par l'amélioration des législations, de la constitution de l'administration, du développement des industries forestières ou des marchés, soit grâce à des progrès techniques dans la pratique de la sylviculture, dans la modernisation de l'équipement ou des méthodes de travail dans les industries d'exploitation ou de transformation, etc. Le rapport doit également renfermer des indications sur le volume des exploitations effectuées au cours des dernières années, et sur le volume prévu pour les années suivantes.

De l'analyse de ces rapports, chaque gouvernement peut tirer des enseignements pour l'élaboration et la mise en œuvre de sa propre politique forestière. Mais le rôle de la Commission est:

a) de faire une synthèse de ces rapports montrant l'évolution actuelle de la politique forestière pour l'ensemble de la région;

b) de vérifier, compte tenu des informations qu'elle possède sur les tendances de l'utilisation des sols d'une part, et de la consommation du bois d'autre part, que l'évolution actuelle de la politique forestière est bien en harmonie avec ces tendances et qu'une place convenable est réservée à la forêt dans les plans de développement de l'économie régionale;

c) de présenter des recommandations aux gouvernements de la région en vue:

(i) d'adapter, ou de rectifier, les politiques forestières des pays, compte tenu des résultats de la vérification ci-dessus;

(ii) d'assurer la coordination de ces politiques entre les pays dans le cadre de la politique forestière régionale;

d) d'examiner et de définir les principaux obstacles qui s'opposent à la mise en œuvre, dans les pays et dans la région, de la politique forestière recommandée;

e) de présenter des recommandations aux gouvernements pour leur permettre de surmonter ces obstacles, ou bien, si cela n'est pas possible dans l'état actuel des connaissances forestières, de suggérer la formation d'organes techniques qui étudieraient les problèmes en cause et rendraient compte à la Commission du résultat de leurs travaux.

Création et fonctionnement des commissions régionales

Toutes les commissions forestières régionales existant actuellement ont été créées à la suite d'une conférence régionale que la FAO a pris l'initiative d'organiser avec l'aide de l'un des pays de la région.

Ces conférences régionales ont passé en revue les principaux problèmes forestiers de la région, éventuellement indiqué la façon dont ils semblaient pouvoir être résolus et, en conclusion de leurs délibérations, ont sollicité de la Conférence de la FAO l'organisation d'une commission régionale.

Les commissions élisent elles-mêmes leur bureau, et se réunissent, en principe, tous les deux ans, soit au Siège du bureau régional de la FAO, soit dans l'un des pays membres de la région intéressée.

Le secrétariat de la Commission est assuré par la Division des Forêts. Son rôle est non seulement de préparer les réunions, mais, dans l'intervalle de celle-ci, de maintenir les contacts entre pays de la région et d'exécuter les travaux que la Commission lui a confiés, travaux qui consistent généralement dans le rassemblement d'informations dont la Commission a besoin pour la poursuite de son œuvre.

La Division assure aussi le secrétariat des organismes techniques que les commissions ont estimé nécessaire de créer, qu'il s'agisse de sous-commissions, de comités ou de groupes de travail. Certains de ceux-ci, comme l'importante Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes, dont il sera spécialement question ci-après, sont rattachés à plusieurs commissions régionales; d'autres fonctionnent conjointement avec une organisation indépendante de la FAO.

LES ORGANISMES FORESTIERS DE LA FAO

Travaux des commissions régionales

Les commissions régionales ont, dans l'ensemble, bien répondu au rôle qu'on attendait d'elles, ainsi qu'on le verra plus loin en passant en revue leurs travaux. La présentation des rapports nationaux à chacune des séances des commissions est devenue une habitude consacrée. Ils sont, en général, soigneusement établis par les pays, et sont quelquefois même si complets que leur consultation permettra, dans l'avenir, de suivre l'histoire de la foresterie dans certains pays au cours des dernières années, de façon très détaillée. Devant l'intérêt présenté par ces rapports en 1951, la Commission européenne des forêts a d'ailleurs demandé à la Division d'en assurer la publication pour cette année-là, et ils ont fait l'objet d'une publication spéciale intitulée Politique nationale forestière en Europe.

Dans leur action tendant à définir les politiques forestières régionales devant servir de guides et de cadres aux pays pour définir leurs politiques forestières nationales, les commissions régionales se sont heurtées à certaines difficultés.

Une politique forestière régionale, et moins encore une politique forestière nationale, ne peut pas et ne doit pas être la simple réaffirmation, pour la région ou pour le pays, des grands principes approuvés par la Conférence de la FAO en 1951. La foresterie étant une entreprise à la fois agricole, industrielle et commerciale, une véritable politique forestière ne peut être définie qu'en se plaçant à trois points de vue. Plus exactement, elle doit fournir la réponse à trois questions essentielles:

a) Quelle place y a-t-il lieu de donner à la forêt dans l'utilisation des sols, et à quels buts, de protection ou de production, y a-t-il lieu de consacrer les superficies qui doivent être maintenues ou revenir à la forêt?

b) Quelle place y a-t-il lieu de donner aux industries forestières, quelles sont les industries dont il y a lieu de favoriser le développement et quelle sorte de matière première sera nécessaire à leur alimentation?

c) Quels sont les besoins en bois, tant pour la consommation rurale - qui est et restera sans doute toujours d'une très grande importance - que pour la satisfaction des besoins des industries utilisatrices et du commerce? En dehors de la production nationale, quelles sont les possibilités qui s'offrent pour la satisfaction de ces besoins i

A toutes ces questions, il y a naturellement lieu de répondre en tenant compte du développement de l'économie générale de chaque pays, de chaque région et du monde. Il y a lieu surtout de chercher à prévoir quel sera ce développement tant à court qu'à moyen et long terme. En effet, il est possible, en agissant sur certains facteurs, de faire face à un développement à court terme déterminé, mais les possibilités sont restreintes. A moyen terme, la gamme des facteurs sur lesquels on peut agir est déjà beaucoup plus grande. A long terme, un vaste choix de mesures s'offrent en général, qui ne présentent pas de risques pour la forêt.

Une bonne politique forestière doit donc être surtout une politique à long terme. Sans doute le développement économique est-il de moins en moins prévisible à mesure qu'on passe du court terme au long terme. C'est une difficulté inévitable de la politique forestière. Elle doit être surmontée en envisageant, pour le développement de l'économie générale, des hypothèses diverses, et en imaginant les moyens de faire face à l'une ou à l'autre par une action appropriée sur l'un ou l'autre des nombreux facteurs dont on dispose à long terme.

Pour répondre aux trois questions qu'on a posées ci-dessus, il est clair qu'il faut avoir, pour chaque pays ou chaque région, une connaissance précise de la situation actuelle aussi bien que des tendances possibles dans les trois domaines de l'utilisation des sols, du développement industriel, et de la balance entre les besoins en bois et les possibilités de les satisfaire. Or, à l'échelle régionale, et bien souvent même à l'échelle nationale, cette triple connaissance n'existait pas il y a dix ans.

Il en est résulté qu'en cherchant à définir leurs politiques régionales, les commissions forestières se sont appuyées sur des données partielles, ou même sur de simples impressions. Pour la plupart des régions, les problèmes et les tendances de l'utilisation des sols sont mieux connus que les deux autres éléments de la poli tique forestière. Du moins est-il relativement aisé, lorsque l'association entre l'homme et la nature a donné naissance à un paysage relativement stable, de voir quelles sont les déficiences de ce paysage, dans quel sens il paraît devoir évoluer, et d'en déduire la place que la forêt doit y occuper. Dans certaines régions, il y a donc une tendance à définir la politique forestière en fonction de la seule considération de l'utilisation des sols, supposée assez bien connue. C'est évidemment une conception insuffisante.

Pour permettre aux commissions régionales de remplir complètement leurs fonctions, des études détaillées, portant sur les trois points ci-dessus rappelés, étaient à entreprendre. La Division des Forêts s'y est attachée au cours de ces dernières années. Il y a deux ans, la première étude de ce genre a été faite pour l'Europe et elle a permis à la Commission européenne des forêts de faire, comme on la verra ci-après, une série de recommandations qui peuvent être considérées comme une véritable politique forestière régionale. Pour les autres régions, des études du même genre sont en cours ou seront entreprises prochainement. Il y a tout lieu de penser qu'elles donneront alors aux autres commissions les éléments qui leur manquent actuellement pour préciser leurs politiques.

Dès maintenant, il ne fait pas de doute, cependant, que les commissions régionales ont déjà produit un travail utile. Grâce à l'expérience de leurs membres, elles ont senti, plus par intuition peut-être qu'en se basant sur de véritables certitudes, les points faibles des politiques forestières de chaque région et les obstacles qui s'opposent à la mise en œuvre de saines politiques. Elles ont donc fait d'utiles recommandations, que les gouvernements ont suivies dans la mesure où ils le pouvaient. Elles ont constitué des organismes techniques qui ont fait des travaux intéressants. Enfin, les échanges de vues et les prises de contact entre les responsables des politiques forestières des divers pays de la région ont eu incontestablement d'heureux résultats.

La Commission européenne des forêts - Le Comité du bois CEE/FAO

La distribution inégale des forêts parmi les pays européens a donné lieu, depuis le début du siècle, à d'importants échanges internationaux de produits forestiers. La moitié environ de la production de sciages résineux des pays situés au nord et à l'est de l'Europe est exportée annuellement pour couvrir environ la moitié des besoins de consommation des pays situés à l'ouest du continent et autour de la Méditerranée. Ceci explique pourquoi le commerce européen des sciages constitue presque les deux tiers du commerce mondial et également pourquoi le commerce européen du bois a retenu depuis longtemps l'attention internationale.

La situation forestière de l'Europe, après la seconde guerre mondiale, apparaissait très difficile: les forêts semblaient y avoir été surexploitées depuis longtemps; un grand nombre d'établissements industriels avaient souffert de la guerre ou ne possédaient plus qu'un équipement usé ou démodé. En regard de ce tableau, les besoins en bois pour la reconstruction, pour l'entretien, négligé pendant la guerre, des bâtiments urbains et ruraux, pour le développement de nouvelles industries, etc., apparaissent énormes. Or, en 1946, les importations européennes de sciages résineux ne s'élevaient qu'à 2 millions de standards, c'est-à-dire à moins de la moitié de leur niveau d'avant-guerre, à un moment où la reconstruction créait une demande particulièrement intense pour cet important matériau de construction.

Afin d'éviter une critique de bois dans cette région, la Division des Forêts dut commencer son action régionale en Europe; une de ses premières actions, suivant une recommandation de la deuxième session de la Conférence de la FAO (Copenhague, 1946) fut de convoquer une Conférence internationale du bois de construction, qui se tint en avril-mai 1947 à Marianské-Lázne (Tchécoslovaquie).

Après d'assez longues négociations préliminaires, cette conférence donna lieu à des débats parfois très serrés, mais toujours d'une haute qualité technique. Les recommandations de cette conférence tendaient à formuler à la fois un programme immédiat pour améliorer l'approvisionnement des pays déficitaires en sciages résineux, et un programme à long terme destiné à couvrir de manière rationnelle les besoins croissants du continent européen en bois et produits forestiers. Elle demandait en conséquence:

a) à la FAO de créer une Commission forestière européenne pour préparer cette politique forestière à long terme et traiter de tous les problèmes sylvicoles que poserait la réalisation d'une telle politique;

b) à la Commission économique pour l'Europe, nouvellement constituée, de créer, en collaboration avec la FAO, un Comité du bois chargé plus spécialement des problèmes d'approvisionnement à court terme et surtout d'assurer, par des contacts aussi fréquents que désirables, une entente entre représentants de pays importateurs et exportateurs de cette région européenne caractérisée par l'intensité de ses échanges commerciaux de bois.

LA COMMISSION EUROPÉENNE DES FORÊTS

Cette Commission, qui fut la première en date, a dès le début reconnu les principaux obstacles qui gênent le développement des politiques forestières de la région. Ces obstacles sont de deux natures: les uns se rapportent à certaines zones de la région, où existent des conditions physiques et sociales particulières, à savoir la zone méditerranéenne et les zones montagnardes; les autres sont sensiblement identiques pour toute la région.

Pour traiter plus spécialement des problèmes relatifs à la zone méditerranéenne, la Commission a créé une Sous-Commission des problèmes méditerranéens: on verra plus loin quel a été son rôle et comment il tend à se développer.

Quant aux principaux problèmes forestiers de la montagne, la Commission en a confié l'étude à un Groupe de travail dit «de la correction des torrents et de la lutte contre les avalanches». Ce groupe se réunit tous les deux ans et informe ses membres des progrès réalisés, dans le domaine qui les intéresse, grâce à des voyages d'étude organisés dans les divers pays montagneux de la région. Il a mis à son programme l'étude de quatre questions particulièrement importantes: la lutte contre les avalanches, le contrôle de la sédimentation des grands réservoirs hydro-électriques, les méthodes modernes de construction et d'entretien des ouvrages de correction des torrents, et l'utilisation et la conservation des sols en haute montagne.

Les problèmes relatifs aux questions intéressant l'ensemble de la région sont traités par la Commission elle-même et par son important Groupe de travail «du boisement et reboisement». C'est ainsi que cette Commission a pris des mesures pour suivre et, autant que possible, prévoir l'évolution des exploitations annuelles dans les forêts, pour faciliter aux pays intéressés la lutte contre le feu, contre les attaques d'insectes et contre les épidémies, pour permettre l'échange entre pays de films d'éducation ou de propagande.

Le Groupe de travail du boisement et reboisement suit les progrès de l'afforestation et de la reforestation dans les divers pays européens, étudie les techniques de plantation artificielle et présente des recommandations pour le développement des politiques nationales de reboisement.

C'est en 1951 que fut entreprise, conjointement par la FAO et la Commission économique pour l'Europe l'étude qui fut publiée en 1953 sous le titre Consommation production et commerce du bois en Europe. Cette étude visait à prévoir quels seraient, pour ce continent, les besoins en bois en 1960 et ultérieurement, compte tenu du développement économique prévisible de la région, ou plutôt de diverses hypothèses faites sur ce développement.

Elle permit, comme on l'a dit, à la Commission d'établir les grandes lignes d'une politique forestière régionale.

Cette étude ne tenait compte que dans une faible mesure des problèmes de l'utilisation des sols. Cette abstention paraissait être justifiée par le fait que, pour l'ensemble de l'Europe, les surfaces occupées par la forêt et les autres utilisations du sol sont relativement stables. Cependant, l'étude a finalement montré que la satisfaction des besoins en bois exigerait un grand effort de reboisement. Le problème est de trouver les terres susceptibles d'être reboisées sans entrer en concurrence avec l'agriculture ou l'élevage. Le rôle du Groupe de travail du boisement et reboisement s'en est trouvé considérablement accru, ainsi que celui de la Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes, qui a été amenée à entreprendre d'importants travaux en liaison directe avec ce problème.

Un autre obstacle qui gêne le développement de la production de bois dans les pays européens est l'importance que représente dans ces pays la forêt privée, et surtout la «petite forêt». Ce problème a également fait l'objet d'une étude approfondie de la part de la Commission européenne des forêts, par la voie d'une enquête menée auprès des pays membres. Cette enquête a fait ressortir les diverses mesures qui peuvent être prises pour pallier les inconvénients de cette situation.

LE COMITÉ DU BOIS CEE/FAO

Il s'est réuni pour la première fois à Genève, quelques mois après la Conférence de Marianské-Lázne, et a continué depuis à tenir des réunions annuelles, et même plus fréquentes au début de son activité.

Pour se faire une idée de ses activités, il est utile d'y distinguer trois phases.

FIGURE 11. La conférence internationale du bois de construction tenue en 1947 a Marianské-Lázne (Marienbad), a été la premières conférence forestière régionale organisée par la FAO. Jan Masaryk, Ministre des affaires étrangères de Tchécoslovaquie, inaugurant les travaux.

Photo: FAO

Au lendemain de son établissement, le Comité dut se pencher exclusivement sur la possibilité d'un meilleur approvisionnement des pays déficitaires et, à cette fin, d'imposer aux pays importateurs un rationnement de leurs achats. En même temps, il devait encourager une expansion de la production européenne des sciages: le Comité fut ainsi appelé à collaborer avec la Banque internationale pour la reconstruction et le développement pour l'octroi de crédits à certains pays exportateurs d'Europe orientale, destinés à leur permettre d'acheter en dollars l'équipement dont ils avaient besoin pour intensifier l'exploitation de leurs forêts. Des crédits dépassant 10 millions de dollars furent attribués à la Finlande et à la Yougoslavie, et c'est un des rares exemples d'un crédit de la Banque internationale attribué en vertu d'une recommandation d'une autre organisation internationale. Ces crédits ont contribué à la reprise rapide de la production européenne des sciages: deux ans après la Conférence de Marianské-Lázne, la production de sciages résineux des pays exportateurs de l'est et du nord de l'Europe a été supérieure de 20 pour cent aux chiffres de 1947. Cette expansion de la production fut complétée par une série d'autres mesures, notamment des économies sévères imposées aux consommateurs des pays excédentaires, l'expansion de la production dans les pays déficitaires et une forte augmentation des fournitures en provenance de l'Amérique du Nord, de sorte que les importations européennes et des pays du bassin méditerranéen ont pu être augmentées de 70 pour cent entre 1946 et 1950. C'est ainsi que toute pénurie de bois pendant les premières années de reconstruction a pu être évitée.

Le Comité du bois entra alors dans sa deuxième phase: l'attention principale des délégués et du secrétariat s'est alors concentrée sur l'étude des tendances à long terme de la production et de la consommation en Europe, dont il a déjà été question ci-dessus. L'étude précisée a en effet révélé que l'accroissement des besoins européens en sciages et en bois à pâte était sensiblement plus fort qu'on l'avait soupçonné. Il résultait des calculs de l'étude que les besoin européens en bois à pâte allaient augmenter, pendant la période de 1950 à 1960, de 40 à plus de 60 millions de mètres cubes et que seule une politique forestière «dynamique» semblait en mesure d'assurer aux usines de pâte et papier l'approvisionnement indispensable en matières premières.

Au moment de la publication de l'étude, cette conclusion parut tellement surprenante que la réaction générale des experts fut de considérer les estimations présentées par la FAO et la CEE comme fortement exagérées. Depuis, les faits ont confirmé de manière frappante les prévisions de l'étude et, en 1955, la consommation européenne de pâte de bois avait déjà atteint la limite inférieure des estimations s'appliquant à l'année 1960. Il est à peu près certain qu'à la fin de la période envisagée la consommation européenne de bois de pâte aura atteint, et probablement dépassé, les prévisions maximums de l'étude, ce qui démontre bien l'utilité d'une telle entreprise. Il est en effet à espérer que l'étude aura contribué à stimuler la production de bois de pâte dans tous les pays européens et qu'un accroissement de la production de papier, en conformité avec les besoins de l'Europe et d'autres régions, pourra être assuré.

En ce qui concerne les sciages, les conclusions de l'étude font ressortir que l'évolution des techniques de construction, ainsi que le prix relativement élevé du bois par rapport à d'autres matériaux de construction, mettent un frein à l'expansion de la demande. Toutefois, l'expansion de l'activité industrielle, et tout particulièrement de la construction d'habitations en Europe, est telle que la consommation européenne de sciages est actuellement un peu plus élevée qu'en 1950 et qu'elle semble avoir tendance à s'accroître davantage. La production européenne de grumes de sciage étant nettement insuffisante pour couvrir l'ensemble des besoins, l'étude arriva à la conclusion que, soit des importations fortement accrues en provenance d'Amérique du Nord, soit une reprise des exportations de sciages de l'U.R.S.S., étaient indispensables pour assurer l'équilibre européen entre les besoin, en bois sciés et les approvisionnements.

C'est avec la publication de l'étude que nous entrons dans la troisième phase de l'activité du Comité du bois. Elle est caractérisée avant tout par la participation de l'U.R.S.S. et des autres pays d'Europe orientale aux travaux du Comité. La reprise des exportations de sciages russes, recommandée par l'étude, a pu ainsi être effectuée depuis 1953 à un rythme tel que, d'une part, la couverture des besoins accrus a pu être assurée et que, d'autre part, toute fluctuation excessive des prix a pu être évitée, malgré l'apparition sur le marché d'un gros fournisseur comme la Russie. L'action stabilisatrice des contacts établis au sein du Comité du bois a été particulièrement frappante au cours de l'année 1956, lorsque l'on a assisté à une réduction assez sensible de la demande d'importation. En effet, malgré la contraction dans le volume des transactions, le niveau des prix n'a subi qu'une baisse de 10 pour cent environ, fait d'autant plus remarquable qu'une situation semblable, dix ans après la fin de la première guerre mondiale, a provoqué une crise du bois qui, jusqu'à ce jour, n'a pas été oubliée.

Le Comité du bois est devenu une institution européenne dont l'autorité est généralement reconnue. Ses réunions annuelles rassemblent des délégués qui, malgré les intérêts divergents qu'ils sont appelés à représenter, ont établi entre eux des liens de coopération et de confiance. Le tour d'horizon entrepris chaque année pour déterminer l'offre et la demande de bois européen pour l'année suivante donne des résultats appréciés.

Travaillant en contact régulier avec la Commission européenne des forêts de la FAO, il s'intéresse à un nombre croissant de problèmes portant de façon directe et indirecte sur le commerce européen des sciages, des bois de mine, des bois de pâte et d'autres produits forestiers, tels que les techniques d'abattage et d'exploitation, l'établissement d'un système uniforme et plus complet de statistiques européennes, de contrats de vente standardisés, etc.

Le Comité est devenu ainsi un exemple souvent cité de la bonne coopération entre différentes institutions des Nations Unies et des avantages administratifs et techniques qui peuvent en résulter. Car, si le Comité du bois est officiellement un organe de la Commission économique pour l'Europe des Nations Unies, un accord conclu dès 1947 entre le Directeur général de la FAO et le Secrétaire exécutif de la CEE établit des garanties spéciales pour que toutes les actions du Comité soient en harmonie avec la politique forestière de la FAO. A cet effet, le Secrétariat du Comité du bois à Genève est constitué de fonctionnaires de la Division des Forêts de la FAO et de fonctionnaires de la CEE. Et c'est ainsi que le danger de double emploi a été éliminé par une coopération vraiment exemplaire.

La Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes

La Commission européenne des forêts reconnut en 1948 la nécessité urgente d'entreprendre des études sur la conservation des sols, le reboisement et l'amélioration des forêts existant dans le bassin méditerranéen. Elle décida de constituer une Sous-Commission des questions forestières méditerranéennes, en précisant que cette Sous-Commission ne devait pas borner ses études aux questions techniques, mais aborder tous les problèmes en tenant compte des situations agricoles, économiques et administratives, et poser ainsi les bases d'une politique forestière dans le bassin méditerranéen.

Après la constitution de la Commission des for forêts pour le Proche-Orient, la Sous-Commission des questions forestières méditerranéennes fut transformée par la Conférence de la FAO, en 1953, en une Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes, commune aux deux Commissions régionales. Cette Sous-Commission peut en outre inviter d'autres Etats Membres à participer activement à ses travaux à propos de problèmes techniques analogues.

La Sous-Commission ainsi constituée reprenait, sur une base intergouvernementale et élargie, TE>S activités de l'ancienne Ligue forestière méditerranéenne, Silva Mediterranea, constituée en 1922 à la suite d'un vœu exprimé par le onzième Congrès international d'agriculture et de sylviculture réuni a Madrid. Cette Ligue se proposait d'étudier toutes les questions forestières concernant le bassin méditerranéen ainsi que les moyens de propagande qui permettraient de développer la «conscience forestière». Elle cessa pratiquement ses activités vers 1936.

La Sous-Commission a tenu des réunions à Rome (1948), Alger (1950), Istanbul (1952), Athènes (1954) et Nice (1956), et toutes les sessions ont été accompagnées de voyages d'étude. De telles réunions ont servi à orienter utilement la politique forestière des pays méditerranéens et à étudier certaines questions techniques. Elles ont également permis d'établir des contacts personnels entre les chefs des services forestiers et les experts, et de développer le sens de la forêt auprès des gouvernements et du public des pays où se tenaient les réunions.

L'orientation à donner à la politique forestière résulte des discussions qui ont lieu au début de chaque session sur l'utilisation des sols. Une telle orientation repose:

a) sur la reconnaissance des fonctions de production et de protection de la forêt et sur l'importance primordiale à accorder aux fonctions de protection;

b) sur la nécessité de créer de nouvelles forêts en limitant toutefois les boisements aux terrains à vocation nettement forestière;

c) sur l'influence sur l'amélioration des forêts de mesures coordonnées prises pour augmenter la productivité agricole, pastorale et industrielle;

d) sur la nécessité d'une limitation de la vaine pâture et d'un changement qualificatif de la composition du troupeau, avec compensation libérale au début et transformation éventuelle des systèmes de vie de larges groupes, de population;

e) sur les possibilités de restauration des sols par des méthodes autres que les boisements, pouvant jouer un rôle comparable à celui de la forêt pour la conservation des sols et la régularisation du régime des eaux et assurer une utilisation intensive du sol avec élévation correspondante du niveau de vie;

f) sur l'importance des cultures d'arbres hors forêt, aussi bien pour la production de bois et la protection de l'agriculture que pour la stabilité des petites exploitations agricoles.

Cependant, une telle orientation devrait être encore précisée et, lors de sa dernière session en 1956, la Sous-Commission a pris des décisions particulièrement importantes.

Elle a tout d'abord approuvé le rapport du Groupe de travail régional ad hoc constitué d'experts de la Grèce, de l'Italie, de la Turquie et de la Yougoslavie, qui attirait l'attention de la Commission économique pour l'Europe sur un certain nombre de projets concrets établis dans le cadre des politiques nationales et dont la réalisation pouvait être facilitée par une aide extérieure. Ce Groupe de travail régional ad hoc avait été constitué à la suite des études sur le développement de l'Europe méridionale faites par la CEE et de la constitution d'un groupe d'experts chargés d'étudier le développement économique de l'Europe méridionale.

La Sous-Commission a ensuite décidé d'inviter le Directeur général de la FAO et le Secrétaire exécutif de la CEE à organiser et à entreprendre une étude fondamentale englobant tous les pays méditerranéens, pour définir une politique forestière plus énergique et plus suivie, considérée comme le facteur prépondérant d'un développement économique et social du bassin méditerranéen. Le plan de l'étude et les moyens à mettre en œuvre sont actuellement discutés par les secrétariats de la FAO et de la CEE.

En dehors des débats de politique générale, la Sous-Commission a étudié directement des questions techniques, et notamment le traitement et l'aménagement des forêts méditerranéennes, mais le plus souvent a renvoyé l'étude de telles questions à des groupes de travail dont certains ont réalisé de très intéressants travaux.

C'est ainsi que l'un d'eux a mis au point une carte délimitant les contrées eu-méditerranéennes et les contrées de transition, et qui sera publiée prochainement. Ce Groupe de travail, qui a recommandé aux pays l'établissement de cartes écologiques selon les critères de leur choix, essaiera d'établir, en liaison avec l'UNESCO, une carte écologique d'ensemble du bassin méditerranéen sur la base de certains critères.

Le Groupe de travail du chêne-liège a été constitué à Alger en 1950 et, en dehors des sessions ordinaires de la Sous-Commission où il s'est réuni, a tenu deux sessions spéciales, au Portugal en 1951 et en Espagne en 1955, avec voyages d'étude. Le Groupe de travail s'est attaché à connaître les ressources en liège par des inventaires des peuplements de chêne-liège et à connaître la consommation par des statistiques de production, et des inventaires ou enquêtes en ont résulté dans les pays producteurs. Le Groupe de travail s'est également préoccupé d'examiner les techniques de pépinière et de plantation, la conduite des peuplements, l'évolution des sols dans les suberaies et l'utilisation des produits. Il s'est préoccupé également des problèmes qui se posent à l'amélioration de la suberaie, et notamment la vaine pâture et la structure agraire.

Enfin, ce Groupe de travail s'est préoccupé d'examiner les perspectives du marché et a souligné que, malgré les substitutions possibles, le liège, produit noble, conserverait ses débouchés. Des perspectives sont d'ailleurs ouvertes du côté de l'utilisation chimique.

Le Groupe de travail des eucalyptus, constitué en 1954, et dont l'activité est basée sur la constitution d'équipes nationales dans les pays membres, a joué un rôle important dans le développement de l'action entreprise par la Division en faveur de cette essence, et qui sera décrite plus loin.

La Commission latino-américaine des forêts

C'est en application des recommandations de la Conférence latino-américaine convoquée en avril 1948 à Térésopolis (Brésil) que fut créée la Commission latino-américaine des forêts.

L'existence dans cette partie du monde de vastes ressources forestières encore à peu près intactes, la possibilité d'utiliser certaines ressources déjà exploitables à des exportations tout aussi profitables aux pays de l'Amérique latine qu'aux pays importateurs, avaient conduit à attribuer à cette région la seconde priorité.

L'expérience a montré que c'est pourtant celle où des résultats substantiels seront les plus longs à atteindre. Rares étaient, en effet, il y a huit ans, les pays disposant d'un véritable service forestier. Ils sont encore peu nombreux aujourd'hui. Plus rares encore étaient les pays ayant une politique forestière. On se bornait, en général, à des efforts très dispersés et très limités, visant au reboisement des zones particulièrement menacées, soit par la pénurie de bois, soit par l'érosion.

La création de la Commission a eu certes un heureux effet en montrant aux gouvernements la nécessité d'une politique forestière et en indiquant les moyens à employer pour en établir une. Elle a facilité les contacts entre les rares techniciens de l'Amérique latine. Quelques organismes de travail ont été créés par la Commission, mais sans grand succès, par suite du nombre insuffisant et du manque de temps des forestiers qui peuvent y coopérer. Ils servent cependant à attirer l'attention sur les problèmes les plus urgents. Les grandes lignes d'une politique forestière se précisant lentement pour la plupart des pays, on est encore loin de pouvoir définir une politique forestière régionale.

On ne doit pas s'en étonner outre mesure. Les bases mêmes d'une telle politique manquent encore. Une étude de la situation actuelle de la production, de la consommation et du marché du bois ainsi que de leurs tendances pour l'avenir est indispensable. Mais elle ne saurait suffire. Une grande partie des terres de l'Amérique latine sont encore soumises à une utilisation purement extensive. En bien des points, les systèmes d'agriculture nomade règnent encore, même lorsque le sol est consacré à des productions de type industriel, exigeant des techniques très évoluées, comme la production du café. De nombreuses terres sont encore à coloniser par l'homme. Bref, il n'existe pas, comme dans la plupart des autres parties du monde, une séparation déjà relativement nette entre les divers modes d'utilisation du sol. La limite est mouvante et sa fixation dépendra de l'évolution économique de chaque pays. Les tendances de l'utilisation du sol et de la place qu'y occupera la forêt doivent donc ici faire l'objet d'une étude détaillée si l'on veut construire une politique forestière régionale.

Des études de ce genre, économiques d'une part, d'utilisation du sol d'autre part, vont être prochainement entreprises, et elles devraient constituer, pour les prochaines années, l'activité principale de la Commission forestière.

Il faut cependant signaler que des pays tels que le Brésil, le Chili, l'Equateur, le Guatemala et le Honduras ont profité tant des discussions au sein de la Commission que de l'assistance qui leur a été donnée pour améliorer leur législation forestière à la lumière des recommandations faites. De même, des progrès ont été réalisés dans l'organisation des services forestiers: certains pays ont augmenté le personnel qualifié de ce service et lui ont alloué des sommes plus importantes pour son travail.

La nécessité de la recherche forestière n'a pas échappé à la Commission et ses principaux efforts ont été orientés, au cours de ces dernières années, vers la création d'un centre de recherche forestière régionale. Ces efforts ont abouti récemment et, grâce à la coopération du Venezuela, un tel Centre s'est constitué à Mérida, auprès de l'une des principales écoles forestières du continent. Un comité de la recherche a été également créé au sein de la Commission.

Il est clair que, si la définition d'une politique forestière n'apparaît pas aux gouvernements de la région comme une nécessité aussi urgente qu'elle devrait l'être, par contre le développement des industries forestières ne saurait, dans des pays dont le développement économique est parfois très rapide et très brillant, prendre un retard excessif. De ce point de vue, l'avenir est plus prometteur. D'importantes industries modernes du bois sont en voie d'établissement ou projetées dans de nombreux pays.

Par la voie de l'assistance technique, par les enquêtes qu'elle a faites dès sa création sur ce sujet, par les réunions qu'elle a suscitées sur le plan régional comme sur le plan mondial, la Division des Forêts cherche à orienter ce développement industriel vers l'établissement d'usines de pâte ou d'industries intégrées dans lesquelles la production de la pâte joue un rôle important.

La nécessité de ce développement des industries du bois nous permet d'espérer que les gouvernements de la région seront ainsi amenés à concevoir de saines politiques forestières, et à fournir les moyens de les mettre en œuvre. Si industrie et politique forestière ne progressaient pas ensemble, les plus grands dangers pourraient en résulter pour la région.

La Commission des forêts pour l'Asie et le Pacifique

La Commission des forêts pour l'Asie et le Pacifique a été créée à la suite des recommandations d'une conférence organisée en mars - avril 1949 à Mysore (Inde).

Cette Commission a, dès le début, assumé son véritable rôle: la formulation d'une politique forestière régionale. Lorsque le projet de «principes de politique forestière» lui fut soumis pour avis, elle saisit cette occasion pour formuler un texte plus détaillé et visant plus spécialement les problèmes de l'Extrême-Orient.

Il n'y a là rien d'extraordinaire. La plupart des pays de la région sont depuis longtemps avertis de l'importance d'une politique forestière. L'Inde a été sans doute le premier pays du monde à formuler effectivement la sienne. Le Japon développe depuis longtemps une sylviculture très intensive. La Nouvelle-Zélande et l'Australie, qui sont attachées à la région, ont également des politiques forestières dont la mise en œuvre se poursuit avec opiniâtreté depuis la fin du siècle dernier.

Il y a lieu d'observer que, si l'on exclut les trois derniers pays cités, les politiques forestières de la plupart des autres sont basées essentiellement sur des considérations d'utilisation des sols. Il ne saurait qu'en être de même, à l'heure actuelle, pour une politique régionale. L'un des éléments de celle-ci manque encore, à savoir la détermination des besoins en bois, leurs tendances et la recherche de l'équilibre entre la production et la satisfaction de ces besoins. Une telle étude est essentielle pour cette région et est actuellement en cours d'exécution.

Cela ne signifie pas que le problème des, rapports entre la forêt et les autres utilisations du sol soit entièrement résolu dans cette région. Si la politique à suivre est fixée, sa mise en œuvre se heurte à de grands obstacles: l'agriculture nomade se pratique encore dans de nombreuses zones; le pâturage en forêt constitue, pour l'Inde surtout, une question des plus ardues. Enfin, il est certain qu'avec le développement industriel et le progrès des techniques agricoles, le plan général de l'utilisation des sols variera lentement, et que la politique forestière doit être prête à s'adapter à ces variations.

La Commission se donne progressivement les organismes de travail qui lui sont nécessaires. Elle a créé, dès le début, un groupe de travail chargé d'étudier les problèmes de la standardisation des produits forestiers destinés au commerce intérieur ou extérieur. Ce groupe, toujours actif, a déjà obtenu d'intéressants résultats concernant: la nomenclature des noms commerciaux, la règle de classement des sciages résineux et des bois ronds, des sciages de teck et autres feuillus, Les dimensions et les méthodes d'essai.

Plus récemment, la Commission, consciente de l'importance économique du teck, a formé une Sous-Commission du teck qui a tenu sa première session en février 1956; elle a fait ressortir la nécessité de former des chercheurs particulièrement en ce qui concerne la grandeur optimum des parcelles et les observations à y faire: un centre de perfectionnement a été organisé auquel plusieurs pays de la région ont participé.

Elle a constitué, plus récemment encore, un Groupe de travail de l'aménagement des bassins de réception, dont l'activité paraît également devoir se développer de façon très heureuse.

Alors que de nombreux projets sont en voile ou projetés dans la région, un Comité de la recherche a été aussi constitué, qui cherchera à coordonner, dans la mesure désirable, les travaux des organismes de recherche forestière existant dans la région.

Parmi les autres questions dont s'est occupée la Commission, citons:

a) la production de bois de chauffage et les possibilités d'utilisation rationnelle de ce combustible, d'un intérêt primordial pour certains pays et en particulier pour l'Inde;

b) les cultures itinérantes pour lesquelles des études ont été entreprises tant dans cette région que dans d'autres à climat tropical; des informations sont actuellement rassemblées et doivent permettre l'élaboration de recommandations appropriées aux conditions économiques et sociales;

c) les échanges de semences forestières sélectionnées;

d) l'éducation du public;

e) la production de traverses, de poteaux et, en collaboration avec la Commission économique pour l'Asie et l'Extrême-Orient, les problèmes du logement.

FIGURE 12. La première conférence forestière régionale pour l'Asie et la région du Pacifique, troisième de la série de ces conférences organisées par la FAO, s'est tenue à Mysore (Inde) en 1949. La conférence est inaugurée par le Ministre indien de l'alimentation et de l'agriculture, ayant à son coté le maharajah de Mysore.

Photo Bureau d'information pour la presse du gouvernement indien

En résumé, le travail de la Commission des forêts pour l'Asie et le Pacifique se développe de façon très heureuse et donnera certainement plus de satisfaction encore lorsque l'étude, d'ordre surtout économique, qu'on a mentionnée ci-dessus, lui aura donné une autre base sur laquelle s'appuyer.

La Commission des forêts pour le Proche-Orient

L'entreprise d'intéresser aux problèmes forestiers - si vitaux qu'ils soient pour eux - les pays d'une région où la forêt est depuis si longtemps et si traditionnellement négligée, pouvait paraître utopique.

Cependant, après une patiente action, qui a comporté en particulier de nombreux voyages dans ces pays des représentants de la Division des Forêts, une Conférence régionale forestière pouvait être réunie en décembre 1952 à Amman (Jordanie). Examinant les divers aspects des problèmes forestiers, elle mit en lumière les difficultés rencontrées par les services fores tiers locaux et dégagea quelques grands principes d'action en matière de choix d'une politique forestière de reboisement, de propagande, d'aménagement des terrains de parcours et d'utilisation des produits ligneux; la formation du personnel technique, trop peu nombreux, et l'exécution d'un programme commun de recherches retinrent particulièrement son attention. Elle recommanda à son tour la constitution d'une Commission des forêts pour le Proche Orient.

Celle-ci n'a tenu encore qu'une seule réunion, en 1955. Les pays de la région y manifestèrent un grand intérêt, souligné par la présence de représentants qualifiés de huit Etats. Les exposés sur la situation forestière firent apparaître que des progrès importants avaient été réalisés depuis la conférence d'Amman. La discussion porta principalement sur la politique forestière et l'aménagement du pâturage en forêt, ainsi que sur les modalités de mise en œuvre d'une école forestière régionale pour la formation de brigadiers forestiers, et d'un centre régional de recherches forestières.

S'il est encore trop tôt pour juger de l'orientation que prendra la Commission, elle semble avoir pris un excellent départ. C'est qu'une politique régionale forestière saine, malgré les très grands obstacles qui s'opposent à sa mise en œuvre, est ici relativement facile à définir. Cette politique, en effet, doit surtout viser à l'établissement de relations satisfaisantes entre la forêt et les autres formes d'utilisation du sol. Sa définition, l'instant du moins, n'exige que de façon secondaire une base économique. Cela ne veut pas dire qu'une étude du même genre que celles qui sont ou seront faites pour les autres régions soit inutile. Elle est du reste prévue au programme de la Division des Forêts.

Mais si l'on veut aller au plus pressé, il est évident qu'il faut, d'une part, chercher à assurer la conservation des dernières forêts existantes et, d'autre part, pourvoir à la satisfaction des besoins en bois les plus urgents en développant des plantations et surtout des plantations d'essences à croissance rapide, telles que le peuplier et l'eucalyptus.

La rareté des terres se prêtant à une agriculture intensive oblige à une coordination très étroite des plantations avec l'agriculture: ces plantations se feront plutôt en conciliant les utilités de production de la forêt avec ses utilités de protection, c'est-à-dire sous forme de rideaux-abris ou de peuplements destinés à la fixation des sables, ou encore sous forme de plantations d'arbres irriguées, le long des canaux ou en petits boqueteaux occupant les terrains les moins riches. D'autre part, une politique doit être mise sur pied pour permettre la coexistence de la forêt et d'un pâturage dont les formes extensives et itinérantes subsisteront sans doute longtemps encore.

Les techniciens de la région, encore peu nombreux, ont déjà pris pleine conscience de la nécessité d'une politique forestière de ce genre, et la réaction de leurs gouvernements est assez satisfaisante.

Consciente de l'importance de la culture du peuplier dans cette région du Proche-Orient, la FAO organisa en avril 1954 une conférence régionale du peuplier qui donna aux techniciens régionaux la possibilité d'un contact avec les experts européens et de discuter avec eux des problèmes de l'espacement des sujets dans les plantations et des méthodes modernes de sélection permettant un accroissement en volume et en qualité.

Grâce à la coopération de la Syrie, les deux projets concernant l'école technique et le centre régional de recherches sont actuellement en voie de réalisation.

La Commission a également créé un Comité de la recherche forestière et un Groupe de travail du pâturage en forêt. A sa prochaine session, elle examinera spécialement les problèmes des droits d'usage forestier, qui constituent l'une des principales difficultés s'opposant au développement des politiques forestières dans la région.

Autres actions internationales

Dans certains domaines particuliers intéressant les forêts ou la production du bois, il existe des commissions internationales permanentes, dont les travaux nous intéressent directement en raison de leurs implications sur les politiques forestières. C'est pourquoi la Division des Forêts a jugé utile de recommander et de faciliter leur création. Tel est le cas, par exemple, pour la Commission internationale du peuplier ainsi que pour la Commission internationale du châtaignier. La Division en assure le secrétariat: elle profite de ce fait du travail d'experts hautement qualifiés et, en donnant aux résultats de leurs travaux toute la diffusion nécessaire, rend ainsi les commissions forestières régionales très attentives aux profits qu'elles peuvent en tirer.

De même, la Division, après entente avec l'Union internationale des instituts de recherche forestière, assure le secrétariat de celle-ci. Cette institution, qui permet des contacts permanents entre les spécialistes de la recherche, dans les domaines si variés de la sylviculture, a conservé son entière indépendance. Ses contacts fréquents avec notre Division nous permettent cependant d'encourager, dans la mesure de nos moyens, la coopération entre chercheurs et de recueillir, dans le même temps, le bénéfice de leurs avis sur les problèmes intéressant les commissions régionales ou l'assistance technique.

Lorsque des problèmes techniques ne peuvent être traités par les organismes dont il a déjà été question, la FAO est amenée à organiser des conférences spéciales sur des sujets intéressant particulièrement les Etats Membres. Il en a été ainsi pour la technologie mécanique du bois, la chimie du bois, les problèmes de la pâte et du papier, les terrains de parcours forestiers, les eucalyptus. Nous pensons qu'il peut être utile de donner ici certaines précisions sur ces activités dont le but est, non seulement d'aboutir à des recommandations techniques élaborées par des experts éminents, mais aussi de promouvoir l'échange d'informations entre techniciens et d'obtenir leur accord sur certaines questions controversées.

La Commission internationale du peuplier

La Commission internationale du peuplier a été créée à Paris, sous l'égide de la FAO, en 1947, à la suite d'un congrès international organisé par le gouvernement français.

Les pays qui sont actuellement membres de la Commission internationale sont les suivants: Allemagne (République fédérale), Argentine, Autriche, Belgique, Egypte, Espagne, France, Irak, Iran, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Syrie et Turquie. Le Pakistan et la Yougoslavie ont demandé à y adhérer. Les pays suivants ont participé aux sessions de la Commission ou entretiennent des relations étroites avec le secrétariat: Canada, Chili, Corée du Sud, Etats-Unis d'Amérique, Finlande, Israël, Japon, Pologne, Tchécoslovaquie et Uruguay.

La Commission jouit à l'intérieur de la FAO d'une certaine autonomie: elle a ses statuts et son règlement intérieur propres. Elle a un président et un vice-président, et ses affaires courantes sont suivies par un comité exécutif permanent comprenant neuf membres, outre le président, le vice-président, le représentant du Directeur général de la FAO et le secrétaire.

Depuis sa création, la Commission a tenu des sessions en Italie (1948), en Belgique et aux Pays-Bas (1949), en Suisse (1950), au Royaume-Uni (1951), en Italie (1952), en Allemagne (1953) et en Espagne (1955). Elle tiendra sa neuvième session à Paris en 1957. A l'occasion de certaines de ses sessions, des congrès internationaux ont été organisés, qui ont attiré de nombreux experts des pays membres ou non membres de la Commission internationale. Il a également été organisé, sous l'égide de la FAO et de la Commission internationale, une Conférence régionale du peuplier pour le Proche-Orient qui s'est tenue à Damas (Syrie) en 1953, et en novembre 1956 une Conférence régionale du peuplier pour l'Amérique latine, à Buenos Aires (Argentine).

L'activité de la Commission internationale du peuplier repose non seulement sur les travaux exécutés au cours des sessions, mais également sur les activités des commissions nationales. Chaque Etat Membre de la Commission doit en effet constituer une commission nationale, chargée de mettre en œuvre les recommandations de la Commission internationale et de porter à la connaissance de celle-ci les problèmes à étudier. Ces commissions nationales sont particulièrement actives et, en dehors de leurs réunions périodiques, organisent des congrès nationaux ou régionaux avec voyages d'étude et discussions sur le terrain. De telles réunions ont été tenues en Italie, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en Turquie, etc.

Lors de ses sessions, la Commission a examiné les problèmes soulevés par le peuplier, depuis la production jusqu'à la consommation. A chaque session, une nombreuse documentation est échangée et des contacts utiles sont établis entre les experts.

L'expérience acquise au cours des dix premières années d'activité a été rassemblée par le Comité exécutif permanent, dans un ouvrage intitulé Les peupliers dans la production du bois et l'utilisation des terres, dont les éditions en français, anglais et espagnol seront présentées à la prochaine session, qui se tiendra à Paris en mai 1957.

Les travaux de la Commission peuvent être brièvement résumés comme suit:

IDENTIFICATION ET NOMENCLATURE

La Commission, dans le cadre des nomenclatures horticole et botanique, a établi une nomenclature pour le genre Populus, et surtout pour la section Aigeiros. Elle a ensuite recommandé aux pays des inventaires au moyen d'une fiche de description normalisée, l'établissement de populetums et l'institution d'un contrôle variétal, absolument indispensable pour ne répandre et n'introduire que des peupliers d'origine et de qualité reconnues. La Commission s'est enfin constituée en autorité internationale pour l'enregistrement des noms de peupliers.

La Commission, qui a surtout étudié les peupliers noirs, puis a étendu ses études aux peupliers blancs et aux trembles, se propose maintenant d'étudier les saules, sans oublier les sections Tacahamaca et Turanga.

TECHNIQUES DE CULTURE

Au cours des sessions, une nombreuse documentation a été échangée sur les techniques d'établissement de pépinières et les techniques de plantation. Les questions des dispositifs à adopter, de l'espacement, de l'éclaircie, de l'élagage, des engrais, des cultures associées, ont longuement retenu l'attention de la Commission. Elle s'est également préoccupée de comparer les accroissements dans les places choisies et, après avoir recommandé aux pays l'emploi de méthodes statistiques pour leurs essais, s'occupe de normaliser les termes à employer et les mesures à adopter.

INSECTES ET MALADIES

La Commission a préconisé des enquêtes nationales sur les insectes et les maladies et a recommandé certaines règles pour l'échange des boutures entre les pays d'un même continent et entre continents. Actuellement, une enquête est en cours sur Dothichiza populea et l'emploi de méthodes statistiques pour une telle enquête est envisagée.

GÉNÉTIQUE ET SÉLECTION

Cette question n'a pas fait l'objet de recommandations spéciales, mais a été suivie au cours de chaque session.

FIGURE 13. Peupliers de 13 ans dans une plantation expérimentale de Casale Monferrato (Italie).

Photo: Istituto Sperimentale per la Pioppicultura

EXPLOITATION ET UTILISATION

En utilisant une fiche d'essai (caractéristiques physiques, chimiques et mécaniques), la Commission, en liaison avec les groupes d'experts de la technologie du bois de la FAO, a facilité les échanges de renseignements sur les propriétés des différents clones cultivés. La fiche établie, concernant les mesures à faire sur le terrain immédiatement après l'abattage, permettra aux pays qui ne disposent; de laboratoires de technologie ou d'analyse chimique d'envoyer leurs bois à l'extérieur pour les essais mécaniques et chimiques. La Commission se préoccupe également de relier les résultats des essais industriels aux clones employés et aux conditions de croissance par l'intermédiaire des essais de laboratoire. Les essais de laboratoire s'étant révélés insuffisants, la Commission a mis à l'étude des essais semi-industriels qui répondraient à la préoccupation précisée.

En ce qui concerne les études sur les maladies et sur l'exploitation et l'utilisation, la Commission a constitué deux groupes de travail qui se réunissent au cours des sessions.

FIGURE 14. Dans bien des pays, les plantations d'alignement le long des canaux et des routes constituent une réserve intéressante de bois. Alignement de Populus deltoides (missouriensis) aux Pays-Bas.

Photo: G. Houtzagers

La Commission internationale du châtaignier

En 1950 fut organisée en France, en liaison avec la FAO, une «Semaine internationale du châtaignier». A l'issue de la réunion, où furent discutés les problèmes soulevés par la culture du châtaignier, un Groupe d'experts fut constitué et un programme de travail tracé.

Ce Groupe de travail tint une réunion en Italie et en Suisse en 1951 et recommanda la constitution d'une commission internationale, semblable à la Commission internationale du peuplier. Cette recommandation fut approuvée par la Conférence de la FAO à sa session de 1951 et, après consultation des Etats intéressés par le Directeur général de la FAO, la Commission internationale du châtaignier fut constituée en 1952.

La Commission a tenu une session en Espagne et au Portugal en 1953 et une autre en Italie en 1955.

Après avoir étudié la situation des maladies et les moyens de lutte, la répartition et la constitution des châtaigneraies, les conditions écologiques des stations, la conservation des châtaignes, l'utilisation des produits de la châtaigneraie, la Commission s'est orientée, au cours de sa dernière session, vers l'étude des aspects économiques et sociaux. En effet, elle a constaté que la crise principale dont souffrait la culture de la châtaigne était due à des transformations dans l'économie rurale et qu'il convenait de reconsidérer l'affectation des terres jusqu'à présent occupées par la châtaigneraie. La Commission a ainsi tracé les grandes liges de la nouvelle politique à suivre.

Recherches forestières

L'histoire de la coopération internationale en foresterie commence en 1893 avec la création de l'Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO), due à l'initiative des forestiers scandinaves et allemands. Quelques congrès furent organisés jusqu'en 1910. Puis, en 1929, à Stockholm, l'Union fut réorganisée; elle comprenait alors des membres venant de 21 pays.

La création du Centre international de sylviculture et du Comité international du bois, qui tous ¿toux s'intéressèrent aux recherches forestières, amenèrent un certain nombre de conflits de compétence.

La seconde guerre mondiale provoqua une certaine désorganisation de l'Union. La commission intérimaire préparant le plan de travail futur de la FAO, recommanda l'absorption de l'Union par la nouvelle organisation, décision qui fut ratifiée par la première session de la Conférence de la FAO à Québec. Après avoir étudié cette question délicate, le Directeur de la Division des Forêts ne crut pas devoir donner suite à cette recommandation et proposa simplement une collaboration intime entre l'Union reconstituée et la Division elle-même. C'est au congrès de l'Union, en 1948, à Zurich, qu'une entente, qui fut ensuite approuvée par la Conférence de la FAO, intervint. D'après cet accord, l'Union conserva son autonomie; son secrétariat est assuré par la Division des Forêts qui peut, en contrepartie, demander à l'Union d'initier certains projets de recherches nécessaires au travail forestier de la FAO.

Cet accord, signé en 1949 entre le Président de l'Union et le Directeur général de la FAO, est encore actuellement en vigueur. Grâce à lui, l'Union a pu augmenter le nombre de ses membres, qui est passé de 59 organismes (représentant 28 pays) en 1949 à 154 organismes (représentant 50 pays) en 1956.

Cette collaboration a permis un contact plus étroit et un échange meilleur d'informations entre chercheurs et institutions.

Un Comité de bibliographie mixte FAO/IUFRO a été créé en 1949 sous la présidence indépendante, du professeur Saari. Son premier travail fut d'établir, sur les plans qui lui furent présentés par le Commonwealth Forestry Bureau d'Oxford, un nouveau système de classification, destiné à remplacer celui de Flury, un peu désuet. Cette classification décimale, dite d'Oxford, a reçu l'approbation unanime des milieux intéressés et est mise progressivement en application. Le Comité a en outre entrepris, comme il sera indiqué plus loin, l'établissement d'une terminologie forestière multilingue.

Par notre assistance technique, des pays tels que l'Autriche, la Birmanie, le Chili, le Mexique et la Yougoslavie se sont vu aidés dans l'organisation et la planification de leurs institutions de recherches, ainsi que dans l'équipement de celles-ci. Par l'organisation de comités de recherches régionaux, par l'établissement de centres régionaux de documentation et de recherches, tels que ceux du Proche-Orient et d'Amérique latine, nous espérons développer l'esprit de recherche, la liaison et l'échange d'informations, grâce à une collaboration qui permettra d'éliminer tout double emploi et d'assurer une utilisation plus rationnelle des fonds encore très limités disponibles pour ces buts, surtout dans les régions sous-développées.

Les Congrès forestiers mondiaux

Deux Congrès forestiers mondiaux s'étaient tenus avant la création de la FAO, l'un à Rome en 1926 et l'autre à Budapest en 1936. Ces Congrès avaient joué un rôle fort utile en établissant des échanges de vues et des contacts entre des techniciens de la forêt et des produits forestiers de tous les pays. Il est apparu que la Division des Forêts pouvait en tirer aussi un bénéfice considérable; c'est pourquoi elle a apporté son appui complet aux organisateurs des deux derniers et entend continuer à le faire pour les suivants.

Par les Commissions forestières régionales, leurs groupes de travail, l'assistance technique et même, jusqu'à un certain point, par les conférences techniques qu'elle convoque elle-même, c'est toujours avec des représentants officiels des gouvernements que les fonctionnaires de la Division des Forêts se trouvent en contact. Sans doute, il est des cas où les participants aux réunions de ces organismes y agissent seulement en qualité d'experts, mais du fait même qu'ils sont officiellement désignés par leurs gouvernements, ils se trouvent plus ou moins liés par les points de vue de ces derniers. Du reste, le programme de chacune de ces réunions est limité à des domaines relativement étroits.

Les Congrès, au contraire, entièrement organisés par le pays qui veut bien leur servir d'hôte, sont ouverts à tous les techniciens de la forêt et des produits forestiers. Ils leur offrent l'occasion d'un contact direct et leur assurent une large audience pour l'expression d'opinions personnelles absolument indépendantes. La convergence de ces opinions permet à la FAO d'orienter son action future et de l'engager sur des voles dont le développement des sciences et des techniques garantit la sécurité.

Le rôle de ces larges réunions a été fort bien défini par le dernier Congrès. Il consiste essentiellement «à assurer un rassemblement et une confrontation des expériences et des connaissances en matière forestière qui permettront de guider utilement le choix des méthodes à employer pour la mise en œuvre des politiques forestières».

Si la FAO a donné son appui aux deux derniers Congrès forestiers mondiaux, elle s'est aussi dans une certaine mesure efforcée d'orienter leurs discussions sur les sujets qui, compte tenu des circonstances du moment, pouvaient avoir la plus grande influence sur le développement ultérieur de la foresterie mondiale.

C'est ainsi que le troisième Congrès, qui s'est tenu à Helsinki en 1949, a surtout examiné quelles méthodes pourraient donner le maximum d'efficacité à une action mondiale en faveur de la forêt. C'est ainsi qu'il fut demandé à la FAO d'assurer la préparation des «Principes de politique forestière» auxquels on s'est déjà référé et que fut lancée l'idée d'une terminologie forestière multilingue destinée à faciliter aux techniciens la compréhension mutuelle des problèmes qu'ils sont appelés à traiter sur le plan international. Il s'agit là d'un vaste travail de longue haleine, entrepris conjointement avec l'IUFRO, et qui se trouve en bonne voie, grâce au concours dévoué du Commonwealth Forestry Bureau.

Le thème du quatrième Congrès, qui s'est tenu à Dehra Dun (Inde) en 1954, était l'étude du rôle de la forêt et des industries forestières dans l'utilisation des sols et l'économie générale des pays. Le cas des forêts tropicales y a été particulièrement examiné, car le grand problème qui se pose aux forestiers et aux techniciens des produits forestiers est précisément d'incorporer ces forêts, si peu productives jusqu'à ce jour, dans le développement des économies nationales. Les recommandations du Congrès ont permis à la Division des Forêts de concentrer plus particulièrement son action pour les prochaines années, avec l'assentiment de la Conférence de la FAO, sur certains problèmes tels que l'aménagement des bassins de réception, la mise en valeur des forêts vierges ou peu exploitées et le développement de l'utilisation des essences tropicales.

Cependant, l'orientation qu'il convenait de donner aux discussions du Congrès résultait plutôt, jusqu'à ce jour, d'une entente entre le pays organisateur et la FAO. Cette dernière a accueilli avec grande satisfaction la décision prise par le dernier Congrès de confier à un comité international, comprenant les représentants de 13 pays et de la FAO, la préparation des futurs congrès et le choix des grandes lignes de discussion. C'est ainsi que sera organisé le cinquième Congrès, qui doit se réunir en 1960 et dont les préparatifs sont déjà en cours.

Les plantations d'essences à croissance rapide - Les eucalyptus

Dès son origine, la Division des Forêts de la FAO, consciente des besoins croissants en bois et des problèmes posés par la conservation des sols, s'est préoccupée du rôle que pouvaient jouer les essences à croissance rapide dans une politique forestière moderne.

En cette matière, notre travail s'effectue principalement en coopération avec les commissions forestières régionales et leurs groupes de reboisement. Nos efforts portent avant tout sur l'emploi de semences et plants de qualité, sur les hybrides résultant du sélectionnement ou du croisement. Nous avons entrepris une série de publications sur les différents aspects du travail de pépinières et de plantations.

Mais parmi les essences employées, et mis à part les peupliers dont nous avons déjà parlé, l'une d'entre elles a particulièrement retenu notre attention. Il s'agit de l'eucalyptus, dont les nombreuses espèces adaptées à des conditions écologiques différentes, ou présentant de grandes facultés d'acclimatation, et les produits très variés qu'elles peuvent fournir, les préparaient à occuper une place de choix parmi les essences recherchées pour le reboisement. Les introductions tentées un peu partout depuis le siècle dernier et les résultats déjà obtenus sont pour tous une garantie de succès.

Les eucalyptus peuvent intervenir dans une certaine mesure dans le cadre de la conservation traditionnelle des forêts existantes; mais leur rôle primordial sera d'être utilisés dès qu'il s'agit de reconstituer des forêts trop dégradées où les méthodes sylvicoles sont insuffisantes, ou d'étendre les forêts sur des terrains dénudés, notamment dans les zones semi-arides et subtropicales.

Un autre aspect intéressant de l'emploi des eucalyptus pour la mise en valeur des zones semi-arides est la possibilité de les cultiver sous des formes diverses au milieu de cultures et d'augmenter les rendements de celle-ci. A la production agricole augmentée par l'effet de la protection des arbres, s'ajoute une production appréciable de bois qui contribue à l'équilibre des exploitations agricoles et à leur amélioration par les investissements que permettent les revenus supplémentaires.

Les programmes d'utilisation devaient également retenir l'attention; les grandes adaptabilités et plasticités des eucalyptus ont quelquefois pu faire croire aux utilisateurs qu'ils pouvaient toujours exiger l'espèce qui convenait le mieux aux buts qu'ils visaient. La fourniture de bois dans les qualités demandées par l'industrie est évidemment un devoir du producteur, mais l'expérience acquise montre maintenant que des limites sont quand même imposées à l'emploi de certaines espèces et que l'utilisateur doit essayer, dans certains cas, d'employer les produits qui lui sont offerts. Des recherches doivent être alors entreprises et de nouvelles techniques mises au point.

La culture et la connaissance des eucalyptus sont donc d'une grande importance. Dans la mise en œuvre de programmes de boisement ou de reboisement, les eucalyptus peuvent apporter des solutions valables aux objectifs envisagés, qu'ils soient d'ordre physique, économique ou social. La culture des eucalyptus apparaît comme un fait important dans le développement des politiques forestières modernes et c'est la raison pour laquelle leur étude a été entreprise par la Division des Forêts sur le plan international, parallèlement aux études déjà mentionnées au Groupe de travail des eucalyptus de la Sous-Commission de coordination des questions forestières méditerranéennes.

Tout d'abord un voyage d'étude, organisé dans le cadre du programme de l'assistance technique, a permis aux participants d'étudier sur place en Australie les eucalyptus dans leur habitat d'origine. Ce voyage d'étude fut un succès, grâce à la bienveillance et à l'expérience des services forestiers australiens, et de nombreux enseignements en ont été tirés.

Un article publié ensuite dans Unasylva (Vol. 10 No 3, 1956) posa le problème des eucalyptus et montra le rôle qu'ils pouvaient jouer dans les boisements. L'étude intitulée Les eucalyptus dans les reboisements, où sont rassemblées les connaissances actuelles sur cette espèce, est parue en trois langues. Cet ouvrage, pour lequel une large diffusion est prévue, fournira aux gouvernements et aux experts une documentation de base facile à consulter.

Ce fut enfin à Rome, en octobre 1956, dans le cadre d'une conférence mondiale, l'examen de l'ensemble des problèmes posés par les eucalyptus, de la production à l'utilisation: 90 spécialistes, venus de 26 pays intéressés, discutèrent des questions d'introduction de nouvelles espèces dans des conditions données, de l'aménagement des peuplements artificiels ainsi constitués, de la meilleure utilisation de leurs produits. Un agrément y a été obtenu pour établir un programme d'activité en commun, notamment dans le domaine des recherches, en vue de coordonner celles-ci et de permettre une dissémination rapide des résultats obtenus.

FIGURE 15. Libye. Les eucalyptus sont souvent plantés pour leur développement rapide. A droite, quelques Eucalyptus gomphocephala de 20 ans. A gauche, un Eucalyptus rostrata.

Voyages d'étude et centres d'entraînement

Les voyages d'étude et les centres d'entraînement constituent également une autre forme d'action internationale permettant d'étudier certains problèmes précis et d'amener les techniciens à être informés et a se familiariser avec les méthodes mises au point dans des pays plus développés.

Le budget spécial de l'assistance technique nous a permis d'en organiser un certain nombre: les plus intéressants furent les suivants:

Un voyage d'étude ayant pour objet la lutte contre les incendies de forêts eut lieu aux Etats-Unis en 1951 en collaboration avec l'Economic Cooperation Administration et réunit pendant cinq semaines 35 forestiers de 23 pays. Le programme comprenait l'observation sur place des méthodes de prévention contre le feu, la recherche sur le comportement des incendies en forêt les méthodes de prédiction et mesures du danger d'incendie, la planification des systèmes de contrôle, l'organisation de la lutte contre le feu, les modèles et l'emploi de l'équipement nécessaire et la formation du personnel spécialisé.

Pendant six mois, 40 techniciens provenant de 11 pays asiatiques participèrent aux Philippines au centre d'étude et de démonstration pour opérations mécaniques d'abattage, de débardage et de transport du bois; dans le même temps, ils furent instruits des aspects culturaux de ce travail dans des conditions tropicales.

Un voyage d'étude en Tchécoslovaquie a permis à 20 pays d'envoyer, en juillet 1956, 35 sylviculteurs pour observer les résultats de la recherche et leur application dans l'aménagement des peuplements résineux (monoculture) et des peuplements mélangés (résineux et feuillus). L'attention des participants fut attirée sur l'importance de la sélection des espèces, compte tenu des conditions de sol et de climat, dans les travaux de reboisement entrepris sur de vastes étendues.

Au cours de l'été 1956, un Centre d'information avec voyage d'étude en U.R.S.S. fut aussi organisé en collaboration avec le gouvernement soviétique, auquel prirent part une vingtaine de forestiers. Ils appartenaient à 12 pays où le développement et l'utilisation des plantations et des forêts pour la lutte contre l'érosion et la protection des cultures agricoles est à la fois nécessaire et particulièrement difficile en raison des conditions climatiques, économiques et sociales qui y règnent. Ils purent examiner, non seulement les techniques développées à cet effet par les forestiers soviétiques, mais aussi se faire une idée d'ensemble de la politique forestière développée par l'U.R.S.S., notamment en vue d'une étroite liaison entre la forêt et l'agriculture dans l'utilisation des sols, et de l'organisation des services chargés de mettre en œuvre cette politique.

Ces voyages, ces centres d'entraînement ou d'information permettent aux forestiers qui y prennent part d'en retirer des informations techniques précieuses; ils ont sous les yeux des exemples qu'il leur appartient de discuter avec les experts qui les ont réalisés et cela doit leur permettre, par la suite, de les adapter à leurs pays respectifs.

FIGURE 16. Au cours du voyage d'étude organisé en Tchécoslovaquie en 1956, des étudiants écoutent les explications que leur donne un des organisateurs du voyage.

Photo: Leibundgut

Elimination du gaspillage - Meilleure utilisation

Dans le domaine de l'exploitation forestière une attention spéciale a été vouée à l'échelle internationale à de nombreux problèmes: la réduction du gaspillage; la rationalisation de la production par la modernisation et la mécanisation; l'amélioration de la qualité des produits livrés au consommateur, grâce aux progrès technologiques de la conservation du bois et à la normalisation des produits forestiers par le classement. Dans ce secteur la Division des Forêts a bénéficié de l'assistance de deux groupes de travail: l'un pour la chimie du bois, l'autre pour la technologie mécanique du bois.

Une bonne exploitation, une industrie de transformation rationnelle nécessitent des équipements appropriés: la Division s'est donc particulièrement occupée de réunir une documentation abondante sur les différents matériels utilisés. Par ses Notes sur l'équipement, qui sont maintenant largement diffusées, elle attire l'attention des forestiers sur les outils de fabrication récente, spécialement créés pour l'exploitation forestière ou pouvant s'y adapter et permettant une mécanisation plus poussée. Dans le même ordre d'idées, elle a publié un Répertoire général des tracteurs à roues et à chenilles construits dans le monde et des études sur les progrès dans la production du charbon de bois et l'emploi du bois comme carburant pour le chauffage et la cuisine.

Nous avons signalé précédemment le centre technique d'abattage tenu aux Philippines. Un groupe de travail mixte FAO/CEE recherche les améliorations à apporter aux exploitations forestières: il s'occupe avec l'Organisation internationale du travail de la formation des ouvriers forestiers, du rendement et de l'amélioration de la rationalisation des différentes opérations forestières, mais aussi des essais et de l'emploi d'équipement, depuis les outils à main jusqu'aux scies mécaniques, tracteurs, etc.

TECHNOLOGIE MÉCANIQUE ET CHIMIE DU BOIS

Dans le domaine de la technologie mécanique, le groupe de travail spécialisé a travaillé dans la voie de l'emploi de machines et outils perfectionnés en vue d'augmenter la production tout en réduisant les déchets au cours des opérations de transformation. Sous l'égide de ce groupe, trois conférences mondiales de technologie mécanique du bois ont eu lieu, dont la dernière à Paris en mai 1954, avec 54 participants venus de 26 pays membres. Les travaux du groupe et de ces conférences ont permis des progrès sensibles particulièrement dans les domaines de la normalisation des essais sur les propriétés mécaniques et physiques du bois, des panneaux de fibres et d'autres produits dérivés du bois, dans celui du classement selon des critères structuraux, dans celui de la normalisation des produits, dans l'amélioration des méthodes de sciage, dans l'imprégnation ignifuge, etc.

Qui parle de déchets et de leur réduction est tout naturellement amené á penser à leur utilisation possible: certains, et principalement ceux résultant de l'abattage, peuvent être utilisés pour la fabrication de pâtes, d'autres peuvent être transformés par l'industrie chimique en produits utilisables, tels que les alcools polyhydriques et les levures de fourrage. Le groupe d'experts de la chimie du bois fut ici d'un grand secours pour notre travail et son orientation.

FIGURE 17. Des étudiants assistent à une démonstration de chargement, effectuée au Centre de perfectionnement pour le débardage que la FAO a organisé aux Philippines.

PANNEAUX DE FIBRES ET PANNEAUX DE COPEAUX

Un résultat très important de la collaboration du Groupe de travail de la chimie du bois et du Groupe de travail de la technologie mécanique a trait à la production de panneaux de fibres isolants et de copeaux fabriqués avec du bois ou des déchets de bois. Ce champ d'utilisation, en rapide développement, offre un des moyens les plus prometteurs pour la production d'une grande variété de produits forestiers à partir soit des essences de qualités inférieures ou qui n'avaient pas été utilisées jusqu'à présent, soit de différents types de déchets de l'abattage et de la production industrielle. Le développement de l'industrie du panneau de fibre constitue en effet l'un des phénomènes les plus frappants de l'évolution récente de l'industrie du bois: ses débuts se placent vers 1925 et sa production, qui n'était avant-guerre que de quelques centaines de milliers de tonnes, s'élève maintenant à 3 millions de tonnes. Cette production est économiquement réalisable avec des unités assez petites, donc avec des investissements relativement faibles. Elle nécessite aussi une formation technique moins développée que des industries plus complexes, telles que celle de la pâte et du papier. Elle serait donc d'un intérêt particulier pour les pays sous-développés, où des matériaux de construction de haute qualité pourraient être fabriqués localement par une industrie basée sur des ressources même peu importantes et de médiocre qualité.

Le travail de la Division des Forêts a été ici en premier lieu d'examiner avec soin la base technique d'une telle utilisation, au cours d'une réunion du Groupe de travail de la chimie du bois qui s'est tenue en Israël en avril 1956. Cette réunion s'est occupée des problèmes chimiques fondamentaux que soulèvent les traitements auxquels le bois est soumis au cours de la fabrication des panneaux.

En janvier 1957, une consultation internationale sur les panneaux durs, les panneaux isolants et les panneaux de copeaux s'est tenue à Genève. Y étaient invités des industriels, des fabricants d'équipement et des spécialistes de la commercialisation et du commerce du monde entier, de même que des spécialistes de la recherche et de l'industrie; ils ont discuté de la situation actuelle de cette évolution intéressante de l'utilisation du bois; ils ont examiné quelles sont les matières premières utilisables pour ces nouvelles industries, les méthodes de fabrication, le coût de production des procédés actuels ou envisagés. Ils ont également défini les besoins futurs de la recherche dans cette industrie en développement rapide et constant. Il n'est pas seulement envisagé de favoriser un échange international d'informations techniques et d'expériences pratiques afin d'augmenter la production, mais aussi de guider une production accrue dans des directions non seulement techniquement mais aussi économiquement justifiées dans l'intérêt de tous les Etats Membres.

Pâtes et papiers

Il ne suffit pas, pour aider les peuples à sortir de la misère, de leur fournir une meilleure nourriture, des vêtements et des logements convenables; il faut aussi penser à lutter contre l'analphabétisme, à donner à tous l'instruction indispensable. Ainsi, dans le monde d'aujourd'hui, le besoin en papier d'impression nécessaire pour l'obtention de cette culture est presque aussi essentiel que le besoin de nourriture, d'habillement et de logement.

Le papier étant presque exclusivement produit à partir de la pâte de bois, la Division des Forêts s'est préoccupée, dès le début de son activité, de ces produits forestiers qui ont même acquis récemment une importance toute particulière dans le programme de travail. Une brève récapitulation de ses efforts dans ce domaine est intéressante à signaler, puisqu'elle fournit en même temps un excellent exemple de collaboration entre les Nations Unies et ses institutions spécialisées.

Dès 1947, l'UNESCO alertait l'opinion publique sur le problème de l'insuffisance de la production et sur les disparités dans la distribution de la pâte et de ses produits. En 1949, la FAO convoqua une Conférence préparatoire sur les problèmes mondiaux de la pâte afin de se rendre compte des besoins et des possibilités de production pour la période 1950 à 1959.

Le problème devint encore plus grave deux ans plus tard à la suite de la montée vertigineuse de la demande de cette matière en 1951. La production de papier journal n'arrivait pas à combler la demande, démesurément augmentée par l'accaparement. Les prix augmentèrent rapidement et, l'un après l'autre, les pays firent part des difficultés qu'ils avaient à subvenir à leurs besoins essentiels, venaient en première ligne naturellement les pays importateurs. L'UNESCO entreprit une campagne pour faire face à cette situation et cette campagne fut appuyée par le Conseil économique et social à sa réunion de septembre 1951. Celui-ci fit appel à tous les institutions et organismes spécialisés compétents des Nations Unies en vue d'entreprendre une action à long terme visant à combler la demande effective et potentielle de tous les pays.

La contribution de la FAO à cette campagne, dans laquelle elle a collaboré étroitement avec l'UNESCO, les Nations Unies et la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, ainsi qu'avec les différentes commissions économiques régionales des Nations Unies, a été:

a) d'envoyer sur leur demande des missions d'enquête dans 24 pays, afin d'établir, en accord avec les autorités locales compétentes, jusqu'à quel point le potentiel de matière première et les autres facteurs de production permettaient une expansion de la production de la pâte et du papier;

b) de convoquer à Rome une consultation des spécialistes du monde et d'en publier les conclusions sous forme d'une étude (Raw Materials for more Paper), incorporant les données les plus récentes sur les possibilités d'emploi de matériaux nouveaux pour la fabrication de la pâte;

c) de publier, en collaboration avec la Commission économique pour l'Amérique latine (ECLA), une enquête régionale intitulée Possibilities for the Development of the Pulp and Paper Industry in Latin America;

d) de publier, en collaboration avec les autres institutions compétentes des Nations Unies, une enquête sur Les ressources de pâte et de papier dans le monde, état présent et perspectives;

e) d'établir une commission consultative pour les essais sur la pâte;

f) de convoquer, conjointement avec ECLA et l'Administration de l'assistance technique des Nations Unies, une Conférence d'experts de la pâte et du papier en Amérique latine (Buenos Aires, octobre 1954) qui examina en détail les perspectives de développement futur de cette région, ainsi que les problèmes techniques et économiques que comporterait ce développement; la publication des comptes rendus et des documents de cette Conférence a rendu accessible une grande quantité de matériel inédit du plus haut intérêt pour l'établissement de telles industries dans les régions sous-développées;

g) de créer, avec les organisations mentionnées sous (f), un organe consultatif dans la région latino-américaine chargé de renseigner les gouvernements et tout intéressé sur les possibilités de réalisation de projets concrets.

Ce sont là les points saillants de notre activité dans ce domaine, ils ne représentent toutefois qu'une partie de nos efforts. Il s'agit d'un problème à long terme et seul un effort patient et soutenu portera des fruits. Presque tous les aspects de notre programme forestier concourent directement ou indirectement à sa solution: les informations statistiques et économiques servent à situer le problème dans le cadre général; l'assistance que nous donnons pour l'établissement d'inventaires forestiers révèle les ressources potentielles; la dissémination des informations concernant les essences à croissance rapide et les matières premières de nature non ligneuse fournit les éléments de l'expansion de la production de matières premières pour ces industries; l'échange de renseignements techniques sur les nouveaux procédés de fabrication de la pâte facilite l'élaboration des plans des nouvelles usines. La FAO assiste et conseille continuellement les Etats Membres par l'entremise de missions d'assistance technique qui, pour le moment par exemple, travaillent dans les pays suivants: Honduras, Indonésie, Mexique, Philippines et Viet-Nam. Un potentiel de ressources commence à devenir utilisable grâce au travail de ces dernières années: c'est celui des essences feuillues des forêts tropicales, qui jusqu'à présent n'étaient pas considérées aptes à la production de la pâte et du papier.

Cette action ne peut évidemment avoir d'effets importants qu'à long terme et il est impossible pour l'instant d'en apprécier les résultats. On peut cependant signaler des indices encourageants: tandis que jusqu'en 1950 c'était dans les régions industriellement avancées que la production de la pâte et du papier augmentait le plus rapidement, tout porte à croire que, depuis cinq ans, cette disparité de développement tend à être éliminée. Les pays des régions sous-développées commencent à se rendre compte du rôle que peuvent jouer la pâte et le papier dans l'établissement de programmes économiques bien équilibrés. La poursuite d'une collaboration étroite entre la FAO et les autres institutions spécialisées des Nations Unies constitue à notre avis le moyen le plus efficace pour permettre un développement tel que la pénurie de papier ne puisse entraver le progrès matériel, culturel et éducatif dans les pays sous-développés du monde.

FIGURE 18. Le Canada est un autre grand pays dont l'économie et le développement dépendent en grande partie de ses richesses forestières. Les exportations canadiennes de papier journal représentent 80 pour cent des exportations mondiales. C'est à Montréal que s'est tenue en 1949 la première Conférence de la FAO sur les problèmes de la pâte et du papier.

Photo National Film Board

Habitation

Afin d'atteindre l'un des buts de la FAO, qui est de relever le niveau de vie, il faut aussi pourvoir au logement adéquat des populations du monde. Ce problème est, par certains côtés, du ressort de la foresterie, puisque le bois représente encore souvent une proportion très importante (allant jusqu'à 90 pour cent) des matériaux entrant dans la construction des habitations. Comme la crise du logement est plus aiguë en Asie que dans n'importe quelle autre région du globe, et puisque le logement joue un rôle si important dans la planification économique et sociale des pays de cette région, il est tout naturel que les activités de la Division dans ce domaine visent en premier lieu l'Asie, où elle collabore avec la Commission économique pour l'Asie et l'Extrême-Orient et les Centres régionaux de recherches sur l'habitation qui fonctionnent en Indonésie et en Inde. Les questions principales dont on s'occupe en ce moment concernent les caractéristiques technologiques du bambou et du bois d'œuvre, l'augmentation de la durabilité et l'amélioration des méthodes de préservation, ainsi que l'introduction de nouveaux matériaux de construction, tels que les panneaux de fibres et de copeaux. L'expérience montre que de nombreuses essences non encore utilisées pour le bâtiment peuvent parfaitement remplacer des bois pré cieux tels que le teck et la shorea, et qu'un traitement approprié donne à ces bois une durabilité égale à celle des essences traditionnellement utilisées.

Actions nationales - Assistance technique directe

Tout effort international est entrepris en vue d'obtenir certains résultats qui, le plus souvent, ne peuvent être acquis qu'à l'échelon national, la somme de ces actions particulières ou collectives indiquant la mesure des progrès accomplis dans les différents domaines relevant de la compétence d'une organisation donnée. Or, pendant longtemps, la mise en application des recommandations internationales à l'échelon national s'est heurtée à de tels obstacles que, lorsque la deuxième guerre mondiale a éclaté, on a beaucoup parlé de la faillite de la Société des Nations et des organisations internationales.

En effet, le meilleur rapport technique - ou même politique - ne sert à rien si les gouvernements et les administrations auxquels il est destiné le classent au lieu de faire l'effort nécessaire pour dominer suite à ses conclusions. La plus harmonieuse des conférences internationales n'est qu'une perte de temps si ses recommandations restent lettre morte. Or, c'est bien ce qui arrive surtout dans les pays moins développés s'ils ne possèdent ni les connaissances, ni les techniciens, ni l'équipement nécessaires pour tirer profit des travaux internationaux.

Profitant des leçons d'un passé récent, la période d'après-guerre se signale par l'introduction dans l'action internationale d'une nouvelle méthode et l'on peut réellement parler d'un événement historique dans ce domaine. Il s'agit de l'assistance technique; mais il serait plus exact de parler d'action technique à l'échelon national ou d'assistance directe, car, à bien des égards, une grande partie de l'activité de la FAO, notamment en matière forestière, constitue une assistance technique - au moins indirecte. En effet, les techniciens participant aux différentes réunions internationales sont tenus au courant des progrès accomplis dans la recherche et dans la technique; ils ont ainsi l'occasion de connaître des mesures prises par certains pays pour surmonter, dans des conditions semblables, les difficultés qu'ils rencontrent.

L'expérience a démontré toutefois que cette assistance indirecte - sous forme de réunions ou de publications - ne suffit pas. Elle a besoin d'être complétée par une action plus directe, qui ne doit cependant ni heurter les susceptibilités nationales, ni porter atteinte à la conception de la souveraineté. L'introduction de l'assistance technique directe a permis de surmonter ces difficultés. Il y a lieu de signaler que la notion de «l'assistance technique» se trouve déjà exprimée dans l'Article premier de l'Acte constitutif de la FAO. Toutefois, pendant les premières années, des limitations budgétaires ne permettaient que bien rarement l'application des dispositions audit Article. Ce ne fut qu'après l'énoncé par le président Truman de son programme bilatéral d'assistance technique, connu sous le nom de «Point Quatre», que les Nations Unies et leurs institutions spécialisées - dont la FAO - ont entrepris à leur tour une véritable action d'assistance technique internationale d'une certaine envergure.

A l'heure actuelle, les activités d'assistance technique de la Division des Forêts absorbent annuellement des sommes représentant le double du budget dit «régulier» de celle-ci. Et, alors que ce budget régulier sert à payer les fonctionnaires de la Division, à organiser des réunions internationales et à préparer des publications, les fonds d'assistance technique sont réservés à l'envoi d'experts en missions dans les pays qui en font la demande, à l'attribution de bourses pour la formation de forestiers et d'autres techniciens, à l'installation d'équipements à des fins de démonstration et, enfin, dans certains cas, à l'organisation de tournées d'étude et de séminaires.

C'est ainsi que nous disposons maintenant d'un moyen efficace qui, prenant place entre l'action internationale et l'action nationale, permet de réaliser les recommandations des Commissions forestières régionales et des réunions organisées par la Division, d'introduire dans les pays sous développés des techniques modernes de sylviculture, d'exploitation forestière et de transformation industrielle d'assurer en somme l'application pratique de la politique de la FAO en matière forestière.

En principe, nos missions d'assistance technique peuvent être classées en deux grandes catégories: celles devant s'attaquer aux problèmes forestiers de base et celles plus spécialement chargées d'un projet concret.

L'élaboration d'une politique ou d'une législation, la création d'une administration bien adaptée aux conditions du pays, constituent le fondement de toute action ultérieure. Une politique et une législation ne peuvent être basées que sur des recherches et des inventaires; la création d'une administration efficace exigeant la formation du personnel, il est facile de voir, entre autres, quels sont les problèmes que les experts doivent traiter en premier lieu. Passer avant ce stade à des projets concrets de grande envergure, tels qu'un large développement d'importances industries forestières, serait une erreur fondamentale que les pays eux-mêmes finiraient par reconnaître, car elle risquerait de compromettre la pérennité de leurs ressources forestières.

Pour les pays où ces bases fondamentales existent, l'assistance à des projets concrets aboutit sans danger à des résultats utiles. Il n'est même pas exclu que certains projets concrets puissent être entrepris sans que les conditions optimums de base soient dès maintenant réunies. Evidemment, une forêt ne peut être convenablement aménagée que s'il existe des industries capables d'absorber la matière première qu'elle peut produire.

Des réalisations concrètes limitées, si elles sont assurées du succès, peuvent dans certains cas apporter un soutien appréciable à l'action de base. Mais il s'agir là de cas d'espèces; il faut donc déterminer l'ampleur des projets concrets, compte tenu des connaissances existantes, rechercher l'efficacité, éviter toutes causes d'échec.

FIGURE 19. La FAO se préoccupe des conditions d'existence des travailleurs de la foret. Voici une vue d'un camp spacieux dans l'Olympic National Forest, Washington (Etats-Unis).

Photo U.S. Forest Service

Or, à cet égard, l'assistance technique des Nations Unies souffre d'une faiblesse qu'il y a lieu de signaler. Les règles s'appliquant à cette partie de nos activités exigent que l'assistance technique ne soit fournie que sur la demande des pays qui désirent en bénéficier, et même dans la forme sollicitée par ces pays. Par conséquent, nous ne pouvons guère obtenir l'introduction d'une bonne politique forestière si le pays décide de ne pas demander notre assistance sur ce point, et nous devons souvent fournir l'assistance pour l'amélioration d'une scierie - désirable, mais certainement moins importante que, par exemple, l'organisation d'un inventaire des ressources forestières ou l'établissement d'une bonne administration des forêts.

Certes, les pays ont l'habitude de solliciter nos conseils en rédigeant leurs demandes d'assistance technique. Et nous avons le droit de rejeter des demandes nous paraissant mal orientées. Mais de tels refus sont rares, et parfois inefficaces, car la mission ainsi refusée risque ensuite d'être confiée à d'autres organisations fournissant l'assistance technique à titre bilatéral, c'est-à-dire de nation à nation.

L'expérience des cinq dernières années a révélé également d'autres points faibles de l'assistance technique dus pour la plupart au fait que le budget et le programme de l'assistance technique ne dépendent pas des mêmes organismes et ne suivent pas les mêmes règles que le programme régulier de la FAO. Récemment, un effort a été fait pour rapprocher les deux programmes dans le cadre de chacune des divisions techniques de la FAO et il est à espérer que cette intégration permettra d'adapter l'action de l'assistance technique de plus en plus aux exigences des politiques forestières régionales de la FAO.

En attendant, il y a lieu de retenir que, depuis janvier 1952, la Division des Forêts a envoyé 195 experts dans 47 pays; elle a organisé 19 séminaires pour le perfectionnement du personnel en fonction, elle a fait accorder 124 bourses d'études pour la formation de techniciens qualifiés.

Bien que les effets de ces actions soient toujours très lents à se faire sentir quand il s'agit de forêts, nous avons réussi à obtenir déjà certains résultats encourageants. Il serait trop long de faire ici une analyse de tous nos projets d'assistance; il semble cependant intéressant d'indiquer, pour chaque région, par quelques exemples, quel a été notre travail et les résultats déjà obtenus.

L'Amérique latine

L'Amérique latine, région très riche en possibilités forestières, mais assez pauvre sur le plan organisation et technique, a toujours absorbé une forte proportion de notre assistance technique forestière. En 1956/57, elle recevra des missions, bourses et équipements pour une valeur de 600 000 dollars, représentant 40 pour cent du programme d'assistance technique de la Division des Forêts.

Les projets portaient au début sur les problèmes de base. Au Chili, en Colombie, au Mexique et au Paraguay, notre premier travail a été d'élaborer avec les gouvernements les grandes lignes des politiques forestières à suivre. Nous les avons ensuite aidés à préparer leur législation forestière et conseillé pour leur réorganisation administrative.

Dans ces quatre pays, ces actions générales ont été normalement suivies d'efforts dans des domaines plus précis concernant le développement de l'exploitation de leurs ressources forestières.

Au Mexique, c'est vers l'exploitation rationnelle des peuplements naturels de résineux en vue de la production de pâte que l'on s'est engagé.

En Colombie, un expert se penche sur la situation actuelle des industries forestières et sur les possibilités de leur développement: il s'occupe particulièrement des possibilités économiques d'établissement de fabriques de contre-plaqués et de panneaux de fibre.

Nos missions les plus importantes se trouvent actuellement au Chili et dans le bassin de l'Amazone au Brésil; il est intéressant d'examiner avec plus de détail le travail effectué dans ces pays.

CHILI

Dans ce pays, dont 22 pour cent de la superficie totale est couverte de forêts qui, pour diverses raisons, ne sont pas utilisées d'une façon rationnelle, notre premier objectif fut d'assister le gouvernement dans la définition de sa politique forestière et, l'organisation de son administration forestière, tâches délicates nécessitant temps et patience. Tout en poursuivant ses efforts dans ces deux directions, notre mission d'assistance technique a entrepris certaines réalisations précises.

Dans le domaine de l'éducation, nos experts ont permis la création, dès l'année 1953, d'une école forestière à l'Université de Santiago: pour la première fois des forestiers sont formés dans ce pays, et des bourses d'études sont accordées aux plus méritants pour leur spécialisation dans les universités étrangères appropriées.

Il a été créé à Llancacura, dans la partie sud du Chili, un centre d'entraînement qui consiste en une scierie alimentée par un massif forestier aménagé dans ce but. Dans ce centre, les étudiants de l'école forestière peuvent se familiariser avec les opérations d'exploitation, de débardage et de débitage des grumes. Il est aussi possible aux mêmes étudiants de s'initier dans la forêt aux subtilités de la recherche forestière ainsi qu'aux opérations pratiques de sylviculture et d'aménagement rationnel des forêts. Le directeur de ce centre, la scierie et l'équipement nécessaires sont fournis par l'assistance technique de la FAO.

Des études sont faites conjointement avec des industries privées pour la modernisation de leur opération et aussi avec la Corporación di Fomento pour la création de nouvelles industries de pâte et de papier utilisant les plantations de pins (Pinus radiata).

Un expert a en outre conseillé le gouvernement pour la lutte contre l'envahissement du désert dans la partie nord du Chili et sur les plantations dans les zones arides pour contrôler l'érosion.

BASSIN DE L'AMAZONE

Celui-ci couvre 40 pour cent de la superficie totale du Brésil et représente, avec ses 300 millions d'hectares, le massif forestier tropical le plus important du globe. Le fleuve Amazone coule sur une distance de 2 500 kilomètres, des frontières du Pérou et de la Colombie jusqu'à l'océan Atlantique. Cette forêt gigantesque, qui compte au moins 1 500 espèces d'arbres, est sillonnée de nombreuses rivières et d'affluents qui tous se déversent dans l'Amazone.

Cette région est peu connue et ses richesses naturelles minéraux, forêts, agriculture, pêcheries - à peine entamées. La population de 2 millions d'habitants représente moins de 4 pour cent de la population du Brésil et cependant sa production agricole couvre seulement la moitié des besoins de ses habitants.

Quel beau terrain d'essai pour l'assistance technique des Nations Unies et notamment pour la Division des Forêts de la FAO à qui revient l'honneur d'avoir été le promoteur d'une mise en valeur générale.

Mais il fallait amener le gouvernement à solliciter une demande concrète d'assistance pour cette région, et deux ans furent nécessaires pour l'amener à comprendre la complexité du problème.

Nos efforts ont été couronnés de succès: après avoir vu travailler nos premiers experts, à la lumière des premiers inventaires et études, le gouvernement a créé la surintendance de mise en valeur de l'Amazone en lui assurant un budget annuel équivalant à 3 pour cent du revenu total de la nation. D'autre part, la mission forestière fut complétée, comme nous l'avions d'ailleurs demandé dès le début, par des spécialistes de l'agriculture (2), des pêches (2), des sciences vétérinaires (2), et par deux géologistes désignés par l'UNESCO. Notre mission dépassait même le cadre de la FAO pour devenir une mission conjointe d'institutions spécialisées des Nations Unies et, cependant, rendant hommage à notre initiative, le rôle de chef de mission restait confié au chef du groupe forestier. Elle comprend actuellement 15 experts dont 7 techniciens forestiers. Basé sur le développement des ressources forestières, le plan préparé prévoit le développement simultané des ressources minérales, agricoles et de la pêche et l'implantation de la population nécessaire.

En matière forestière l'on poursuit en première priorité la réalisation de trois projets:

L'inventaire des massifs, essentiel pour toute planification. Trois régions ont été choisies après une minutieuse interprétation des photographies aériennes disponibles. La première, au sud de l'Amazone entre les rivières Tapajos et Xingu: 2 millions d'hectares y ont été inventoriés et les cartes établies. Le travail d'inventaire se poursuit actuellement dans la deuxième, toujours au sud de l'Amazone, entre les rivières Xingu et Tocantins. La troisième région, dans le bassin de la rivière Madeira au sud de Manaos, a été choisie parce que le gouvernement du Brésil est intéressé à y développer des industries de la pâte et du papier.

L'organisation du centre de démonstration de Santarem. La déficience reconnue des méthodes actuelles d'exploitation et de débitage des grumes a conduit la mission à créer ce centre où une scierie complète et les installations accessoires ont été aménagées grâce aux fonds fournis à cet effet par le budget d'assistance technique. Ce centre, qui fonctionne déjà, permettra d'éduquer et d'entraîner techniciens et travailleurs dans les opérations rationnelles d'exploitation et de sciage qui se déroulent tant dans la forêt située au sud de la vallée que dans le centre lui-même.

La création d'un centre de recherches sylvicoles et de produits forestiers à Manaos près de l'Instituto de Pesquisas de Amazonia, en vue d'acquérir une meilleure connaissance des espèces forestières, de leurs exigences écologiques, de leur croissance et de leur traitement sylvicole, et de perfectionner le personnel appelé à conduire ces recherches.

FIGURE 20. Un expert de la FAO séjourne depuis quelque temps en Indonésie, donnant des conseils pour la création de nouvelles industries forestières, qui seront un des éléments du programme de développement national. Des plantations de Pinus merkusii pourront alimenter une industrie de la pâte et du, papier.

Photo: S. Bunnag

Extrême-Orient

En Extrême-Orient, les conditions se présentent d'une façon très différente du fait de l'évolution technique plus poussée de ces pays: ils possèdent des services forestiers organisés et sont avancés dans l'établissement d'une politique forestière. Cependant, pour certains d'entre eux le passage du statut colonial à l'indépendance complète a créé quelques difficultés par suite du départ de nombreux techniciens étrangers occupant des postes d'exécution importants, et a nécessité des actions de caractère général.

Aux Philippines, en Thaïlande et au Viet-Nam, nos experts ont conseillé les gouvernements pour un programme d'action générale et se sont ensuite attaqués à des sujets plus concrets, tels qu'inventaires et plantations industrielles.

Dès 1951, la Birmanie nous a demandé un expert en vue de moderniser ses méthodes d'abattage et de débardage. Soixante tonnes de bois d'essences secondaires furent ensuite «testées», par des laboratoires européens pour déterminer leurs possibilités d'utilisation. Une usine - pilote pour l'imprégnation et le séchage des bois a été construite et fonctionne sous la surveillance d'un expert de la FAO. Deux autres experts ont aidé le service forestier pour l'établissement d'un institut de recherches qui doit comprendre un département pour recherches sylvicoles et un deuxième pour produits forestiers. Douze bourses d'études ont été accordées à des techniciens birmans pour se perfectionner dans leurs spécialités respectives.

En Inde, un expert a visité les zones arides de Rajasthan et a fait des propositions au sujet du choix et de l'établissement de terrains expérimentaux de grande étendue pour des travaux de démonstration de lutte contre l'envahissement du désert, de reboisement et de conservation sol.

En Indonésie, le travail d'assistance porte sur l'extraction mécanisée, l'amélioration des routes forestières, et sur le choix des meilleurs emplacements pour les industries forestières et les ports d'embarquement.

Parmi les projets régionaux, et outre le voyage d'étude de l'eucalyptus et le centre d'exploitation mécanique des Philippines, il faut citer le centre de perfectionnement sur la recherche organisé en Inde et celui de Malaisie pour la classification des bois d'œuvre de qualité.

Proche-Orient

Au Proche-Orient, la situation est très spéciale du fait que les conditions locales sont extrêmement défavorables à toute action; le problème n'est plus le développement de la production dans des zones forestières inutilisées; c'est avant tout la protection ou la restauration des forêts détruites ou attaquées, l'utilisation des sols dans des conditions de climat difficiles, la constitution de ressources rapidement utilisables et adaptées aux conditions spéciales de la région. Le problème est avant tout d'élaborer des politiques forestières tenant compte de ces besoins de protection, de la nécessité d'une utilisation conservatrice des ressources existantes et de la création de nouvelles ressources, spécialement par plantations hors forêts d'essences à croissance rapide.

En Ethiopie, deux experts ont, depuis quatre ans, aidé le gouvernement, à organiser son service forestier, à édifier une législation forestière adéquate et à inventorier ses richesses forestières en vue d'une exploitation plus rationnelle. Un autre expert s'attache actuellement à la formation du personnel subalterne et à la mise en route d'un programme de pépinières et de reboisement.

En Irak, trois experts sont au travail: l'un précise la politique forestière du gouvernement, revise l'organisation administrative du service, et prépare un programme de conservation des sols et de reboisement dans les bassins versants qui alimentent les grands barrages; un autre a procédé à l'inventaire des forêts du nord par l'interprétation de photographies aériennes; le troisième organise l'institut national irakien de recherches forestières et met en route son programme de travail. Conscient de l'importance pour l'économie nationale de la culture des essences à croissance rapide, le gouvernement irakien avait demandé et obtenu, en 1953, l'envoi d'un spécialiste des eucalyptus qui a fait d'utiles recommandations, et d'un spécialiste du peuplier, qui a tracé un programme de plantation et de sélection actuellement en bonne voie d'exécution.

En Iran, la FAO a créé, avec la participation financière de la Mission américaine d'opérations à l'étranger, un laboratoire ultra-moderne pour l'étude des bois, de leurs propriétés physiques, de leur séchage et de leur imprégnation. Une équipe de quatre experts continue le travail entrepris par d'autres forestiers de la FAO en matière de politique forestière, d'organisation du service, de modernisation des méthodes de carbonisation, d'amélioration du pâturage en forêt et de recherches forestières, avec attention spéciale à la populiculture.

En Jordanie, une étude phytosociologique complète, matérialisée par l'exécution de cartes de végétation, a été achevée en deux ans. Elle fournira une base solide aux travaux de reboisement projetés et à une utilisation rationnelle de la végétation du pays. Des conseils ont été donnés pour l'introduction d'eucalyptus résistants à la sécheresse.

En Libye, une reconnaissance générale des possibilités forestières a été effectuée en 1951. Les recommandations de ce premier rapport ont été mises en œuvre avec l'aide de deux experts qui se sont succédé depuis 1952, faisant porter leur effort sur l'adoption d'une politique et d'une législation forestière, l'organisation du service, la formation du personnel, la fixation de dunes, les reboisements, la conservation des steppes alfatières, la mise en valeur des forêts.

En Syrie, un premier expert a développé des pépinières et préparé la délimitation et l'aménagement de la forêt de Lattaquié. Cette œuvre sera continuée et menée à bien; dans le même temps un autre expert fera, à l'aide de photographies aériennes, une carte et un inventaire sommaire des zones boisées.

Au Yémen, on a d'abord effectué une reconnaissance sommaire et une appréciation des possibilités forestières; un expert procède à l'introduction d'essences à croissance rapide, conseille le gouvernement; quant aux mesures à prendre pour assurer aux boisements un minimum de protection, et entreprend des plantations sur les terres de la Couronne.

Comme tout progrès dépend de l'efficacité du personnel, la FAO s'est attachée à la formation technique de celui-ci, en particulier en attribuant des bourses d'études pour l'enseignement supérieur et pour le niveau d'enseignement intermédiaire pratique (brigadiers forestiers, forest rangera).

L'Ecole forestière régionale de Lattaquié est en voie d'installation; son directeur a été recruté et est payé par la FAO qui paye aussi une partie du salaire d'un professeur de sylviculture et qui a fourni la totalité du matériel technique et des véhicules. L'enseignement est donné en arabe, ce qui permet un plus vaste champ de recrutement des candidats.

Le Centre de recherches forestières, dont le directeur est rémunéré par la FAO, a commencé a rassembler une documentation ainsi qu'à réunir et analyser les observations faites sur tous les reboisements entrepris dans la région depuis 10 ans.

Le premier d'une série de centres de formation de bûcherons a été ouvert en Iran. Il est dessillé à réduire le gaspillage de matière première, en montrant aux ouvriers comment tirer le meilleur parti d'un arbre.

Le Centre d'études de politique forestière, tenu à Istanbul en septembre 1954, groupait de hauts fonctionnaires forestiers de huits pays qui étudièrent ensemble les multiples difficultés rencontrées dans l'exécution d'une politique forestière saine et rationnelle. L'écho des discussions, les conclusions atteintes se sont fait sentir en maintes occasions, dans l'élaboration des lois forestières de plusieurs pays et dans la conduite des affaires locales.

Europe

En Europe, l'assistance technique a surtout été orientée vers des problèmes particuliers. Etant donné le stade de développement forestier de ces pays, c'est en effet des projets précis qui les intéressent particulièrement.

FIGURE 21. Un expert canadien est allé au Soudan donner des conseils sur les techniques de sciage. Cette photo montre le travail laborieux effectué dans un chantier de sciage de long, dans la province de Bahr-el-Ghazal, pour débiter et manipuler des traverses de chemin de fer.

Photo: V. Hasek

En Autriche, deux membres de la Division des Forêts ont, dès 1949, aidé à établir un plan de développement et de restauration de la forêt et des industries du bois, dont l'économie avait été gravement compromise par la guerre. Grâce à une aide financière internationale, ce plan a pu être entièrement exécuté. Plus tard, un expert en scierie a conseillé la rationalisation et la modernisation des industries des sciages. Depuis, le même technicien a organisé une école de sciage dont l'équipement a été fourni grâce à notre budget d'assistance technique.

En Turquie, l'assistance porte sur l'organisation de la recherche forestière, sur la préparation d'un certain nombre de projets de recherche et sur le choix des zones forestières propices à l'installation de ces projets ainsi qu'à des démonstrations d'aménagement forestier.

Pour bien montrer l'équilibre de notre action dans les deux domaines généraux et spécifiques, il est bon de s'arrêter au cas de la Yougoslavie. L'économie forestière y occupe une place importante. Le tiers de la superficie, soit 8 745 000 hectares, est couverte de forêts qui alimentent des industries forestières nombreuses: ce pays est un des principaux exportateurs de bois de la région européenne. Le gouvernement se préoccupe à juste titre d'établir un programme de conservation, d'aménagement et d'utilisation de ces richesses naturelles.

Notre action a été amorcée dans ce pays grâce à une série de projets concrets: neuf experts y ont été envoyés dès 1952 pour des missions assez courtes pour conseiller les forestiers yougoslaves dans les domaines suivants: conservation des sols, contrôle des torrents et aménagement des bassins de réception, reboisement, politique forestière, amélioration des peuplements forestiers, génétique, recherches en produits forestiers, débardage, industries de sciage, séchage artificiel, industries de placage et de contre-placage, utilisation des déchets pour l'industrie de la pâte et du papier.

Après quatre ans d'une telle assistance le besoin d'une coordination de ces efforts, à première vue dispersés, apparut nécessaire tant aux autorités yougoslaves qu'à nous-mêmes. Elle a été réalisée sur le plan national et sur le plan technique par une réunion qui a eu lieu à Dubrovnik en 1954 et à laquelle ont participé les experts, les autorités forestières nationales et des représentants de la Division des Forêts. Le résultat en a été une mise au point d'un plan de cinq ans de développement de la production forestière ainsi que la coordination des politiques forestières des diverses républiques populaires.

Information - Réunion et diffusion de renseignements

Il s'agit là d'une fonction de base de tout travail international puisqu'elle vise à faire bénéficier les pays membres des informations qui nous parviennent quotidiennement.

Il est difficile de dissocier l'information de l'action: le lecteur qui nous a suivi jusqu'ici connaît déjà de nombreuses publications de la Division des Forêts. Notre but n'est donc pas de les rappeler à nouveau et d'en dresser un catalogue complet (ce qui est fait dans ce même numéro d'UNASYLVA), mais de les classer suivant le but à atteindre.

En premier lieu viennent l'annuaire statistique et les publications périodiques sur les ressources forestières destinés à fournir des informations de base, non seulement aux commissions régionales et à l'assistance technique, mais aussi aux industries nationales et au commerce international.

La seconde catégorie comprend des publications analytiques ayant pour but de rassembler et de diffuser des renseignements utiles pour le développement de la recherche, de l'éducation forestière, du perfectionnement des techniques, de l'évolution des industries du bois. Les plus importantes parues à ce jour sont: Research in Forestry and Forest Products et le Répertoire général des tracteurs à roues et à chenilles construits dans le monde.

On peut rattacher à ce type de publications certaines monographies techniques, les rapports sur les produits, les notes sur l'équipement et surtout la revue Unasylva, dont la publication trimestrelle, à laquelle collaborent d'éminents experts, permet d'entretenir un contact direct entre la Division des Forêts et les techniciens des forêts et des produits forestiers du monde entier. Elle permet notamment aux spécialistes de se tenir au courant des activités de la FAO et des développements en matière de politique forestière, de recherches sur la forêt et ses produits, des tendances des marchés de sciages, de la pâte et d'autres produits forestiers.

La dernière catégorie enfin est la plus importante, non par le nombre des publications effectuées, mais par le résultat qu'on peut en attendre. Ce sont des études de synthèse. L'étude de synthèse est en effet le moyen le plus sûr et le plus rapide de fournir aux commissions régionales, ainsi qu'à tous les techniciens intéressés, le résultat global d'analyses faites, soit par la Division, qui dispose à cet égard de possibilités supérieures à tout autre organisme, soit par des consultants employés par elle. Le travail de recherche original doit certes rester la responsabilité des institutions spéciales, gouvernementales ou privées; mais une organisation internationale comme la nôtre est particulièrement qualifiée pour analyser les développements qui lui sont rapportés. Les conclusions de telles études, si elles n'engagent que le secrétariat de la FAO, sous la haute autorité de son Directeur général, ont cependant suffisamment de poids pour permettre leur examen direct à l'échelon gouvernemental, alors que pour arriver à un résultat concret, les autres méthodes à la disposition de la Division auraient pu nécessiter de longues années d'attente. Au reste, les résultats obtenus par ces études démontrent leur efficacité. Parmi celles déjà parues, on peut citer: Préparation d'un inventaire forestier, Politique, législation et administration forestières, Consommation, production et commerce du bois en Europe - Evolution et perspectives, La lutte contre les incendies de forêts et Forêt et pâturage.

Organisation et méthodes de travail

La Division des Forêts a été créée le 1er mai 1946 par la nomination de son directeur. Sa première tâche fut de recruter et de rassembler ses premiers collaborateurs.

L'organisation de la Division est un travail continu: dans le même temps, il fut nécessaire de mettre sur pied un programme, de déterminer nos méthodes de travail et de développer notre action, tenant compte des recommandations qui nous étaient faites et des ressources mises à notre disposition. Chaque année, il convient de faire les ajustements nécessaires, d'orienter notre travail suivant les directives des organismes dont nous avons parlé, d'améliorer nos méthodes d'action et d'en accroître l'efficacité.

ORGANISME DE LA DIVISION DES FORÊTS

Pour l'instant la Division est composée de 37 techniciens et son organisation est la suivante (voir graphique).

Le directeur et le directeur-adjoint de la Division sont assistés pour la préparation du programme de travail, pour l'établissement du budget, pour l'administration de toutes ses activités forestières, par un service dit de la coordination du programme.

Comme le lecteur a pu s'en rendre compte, chaque activité de la Division comporte en réalité trois aspects étroitement liés: politique, technique et économique. C'est sur la base de ces trois aspects que le travail a été réparti en trois sous-divisions. Il en résulte cependant que, si une sous-division déterminée a la responsabilité primaire de mener à bien certaines activités, celles-ci sont toutes en réalité le fruit du travail de la Division tout entière, sous la direction de son directeur et de son directeur adjoint.

La première sous-division est celle de la «politique forestière». Elle comprend une section des politiques spéciales qui traite de tous les aspects de ces politiques, de la législation, de l'administration et de l'éducation forestières; une deuxième section est chargée des problèmes de la conservation des forêts

La deuxième sous-division s'intitule de la «technologie forestière» et est composée de trois sections: la première, dite de la sylviculture, pour toutes les questions se rapportant au traitement de la forêt, à l'aménagement et aux sciences de base; la seconde, de l'utilisation, chargée de tous les aspects de la technologie du bois et de son utilisation; la troisième est la section de l'équipement forestier, dont la compétence s'étend aux matériels indispensables aux opérations sylvicoles, à l'exploitation forestière et à la conversion du bois en produits manufacturés.

La troisième sous-division, celle de «l'économie forestière», s'occupe des aspects économiques de la sylviculture, de l'aménagement forestier et de l'utilisation des produits forestiers. Elle comprend une section des entreprises forestières et du commerce et une autre, dite des statistiques et des études analytiques, qui est responsable de l'ensemble du matériel des publications statistiques de la Division et des revues des produits forestiers les plus importants.

Comme nous l'avons vu une grande partie du travail pratique de la Division est effectué sur le plan régional: en conséquence, des groupes de travail régionaux des forêts et des produits forestiers ont été organisés en Europe, en Amérique latine, en Extrême-Orient et au Proche-Orient. Outre son rôle de liaison, le groupe régional a la charge de veiller à la mise en application par chaque gouvernement des recommandations formulées par les commissions et par les divers experts de l'assistance technique.

Les régions où il n'est jusqu'à présent détaché aucun membre du personnel sont servies directement par le Siège: il en est ainsi de l'Afrique au sud du Sahara et de l'Amérique du Nord.

Jusqu'en 1956, l'assistance technique était traitée comme une entité administrative distincte bien que du point de vue technique elle ait absorbé naturellement une partie importante du temps du personnel permanent de la Division. En 1956, conformément à une recommandation prise par la Conférence de la FAO, le Directeur général a procédé à l'intégration des deux programmes. En conséquence, la sous division qui s'occupait de l'assistance technique a été dissoute et ses attributions ont été réparties entre le Service de coordination du programme et les trois sous-divisions techniques de la Division.

Administrativement, le problème le plus important auquel la Division ait à faire face est le nombre toujours croissant des tâches qui doivent être assignées à un nombre très limité de fonctionnaires. Cette insuffisance en ressources et en personnel a amené la Division à solliciter tous les concours susceptibles de l'aider dans son travail. On a donc recherché, dans toute la mesure possible, la coopération des experts extérieurs et des autres organisations. Ce système s'est montré très fructueux et a allégé de façon appréciable, dans un grand nombre de domaines, le fardeau du secrétariat.

A l'extérieur, la Division des Forêts s'efforce de coopérer au maximum avec les autres organisations existantes, nationales et internationales: de même, à l'intérieur, elle coopère avec les autres divisions de la FAO dans toute la mesure possible et désirable, à la fois dans les régions et au Siège. Un certain nombre de questions, telles que la conservation des sols et des eaux, exigent naturellement d'être ainsi traitées.

Le Directeur de la Division et son adjoint sont directement responsables envers le Directeur général de la politique de la Division dans son ensemble et de l'exécution des tâches qui lui sont confiées par la Conférence de la FAO.

Conclusions

Nous venons d'indiquer, dans ses grandes lignes, quelle a été notre approche du problème forestier mondial, comment nous avons créé une organisation destinée à remplir les fonctions qui nous avaient été confiées, quelles sont les méthodes que nous avons employées pour résoudre certains problèmes, quelles ont été nos réalisations dans divers domaines de notre compétence.

Pour terminer cet exposé, il nous semble utile d'attirer l'attention du lecteur sur certains points qui nous paraissent importants.

Deux grandes idées ont été à la base de notre action:

A. L'amélioration du rendement des ressources naturelles renouvelables de la terre est en somme le principal objectif de la FAO. Cette amélioration ne peut être fondée que sur l'utilisation rationnelle des sols - et, par voie de conséquence, des eaux dont ils sont la source et le réservoir - c'est-à-dire leur utilisation en vue du rendement maximum compatible avec leur conservation et le maintien de leur fertilité.

Il est reconnu par les techniciens, notamment par ceux ayant à planifier l'utilisation des sols des bassins fluviaux, que, quelle que soit l'utilisation à laquelle ils sont le plus aptes, les sols sont solidaires les uns des autres. Un équilibre entre leurs diverses utilisations est indispensable, non seulement du point de vue économique, mais bien plus encore du point de vue physique. Tirer une production maximum de chaque sol est certes extrêmement important: c'est là le domaine de la recherche, de la technique. Mais la base d'une politique rationnelle se trouve avant tout dans la répartition des terres entre les diverses utilisations possibles.

C'est sur notre initiative que furent discutés au quatrième Congrès forestier mondial (Dehra Dun, décembre 1954), les différents aspects de la conservation de ces ressources naturelles: l'attention de tous les gouvernements a été appelée sur l'étroite liaison indispensable entre l'agriculture, le pâturage et les forêts, et sur la nécessité de tenir compte également des conditions économiques des populations intéressées.

B. Une seconde idée, toujours mise en avant par la Division et unanimement reconnue par les participants au troisième Congrès forestier mondial (Helsinki, juillet 1949), est que les sciences et techniques de la forêt n'ont pas seulement à résoudre en eux-mêmes et pour eux-mêmes de simples problèmes de sylviculture. A la forêt dans son ensemble, et même peut-on dire à chaque forêt prise isolément, est associé un complexe de phénomènes physiques, économiques, industriels et sociaux qui ont avec elle des liens si étroits qu'aucun d'eux ne peut être examiné indépendamment de la forêt et, que, inversement, la forêt ne peut être examinée indépendamment d'eux.

Qu'il s'agisse de problèmes intéressant directement les travailleurs de l'exploitation ou de l'industrie du bois, qu'il s'agisse de problèmes plus vastes intéressant les populations rurales et urbaines et dérivant de l'utilité protectrice de la forêt, qu'il s'agisse de problèmes plus particuliers intéressant la vie économique d'une région ou même d'un simple village, la gestion d'une forêt ne peut être dissociée des problèmes économiques et sociaux qui lui sont associés ou qu'elle conditionne.

L'exemple le plus frappant de l'évolution intervenue dans cet ordre d'idées est qu'il paraît évident maintenant que la forêt ne peut être dissociée des industries qu'elle alimente. Le forestier se doit d'orienter le traitement des massifs forestiers en vue de la satisfaction, dans les meilleures conditions possibles, des besoins des industries. Et, inversement, l'industrie du bois ne peut se désintéresser de la forêt qui assure son approvisionnement: le technicien de cette industrie ne peut ignorer les lois naturelles imposées à la sylviculture et doit adapter ses usines, ou la répartition de celles-ci, aux limitations imposées à la production du matériau bois fourni par la forêt.

En prenant connaissance de l'objectif qui nous avait été tracé, à savoir «fournir à un monde en expansion les produits forestiers nécessaires», une question presque évidente est certainement venue à l'esprit du lecteur avisé: Est-ce possible?

Le dernier inventaire forestier mondial effectué par la FAO répond à cette question: il confirme, en effet, que les forêts mondiales suffiraient théoriquement à alimenter une consommation beaucoup plus forte que la consommation actuelle et aussi à satisfaire plus largement encore les besoins d'une population de plus en plus nombreuse.

Le patrimoine forestier mondial occupe près de 4 milliards d'hectares dont moins d'un tiers est actuellement exploité; d'immenses réserves sont encore inexploitées; 700 millions d'hectares sont actuellement accessibles.

Dans l'ensemble du monde, les abattages ne représentent que la moitié de l'accroissement annuel des forêts actuellement exploitées. Il est vrai que les accroissements et les prélèvements s'équilibrent grosso modo dans les peuplements de résineux, mais l'ensemble des peuplements de feuillus est actuellement sous-exploité en raison des difficultés d'utilisation des produits qu'ils fourrassent.

Il ne faut pas oublier que la forêt aménagée en vue d'une production soutenue est encore l'exception, si l'on tient compte des superficies, et que les méthodes d'abattage ne sont réellement satisfaisantes que dans un petit nombre de pays.

Si les forêts étaient partout raisonnablement aménagées, si les forêts accessibles actuellement improductives étaient mises en exploitation, si toute la production forestière était rationnellement utilisée, on pourrait plus que tripier cette production en respectant les principes du rendement soutenu.

Dans le même temps, dans de nombreux pays, notamment en Europe, de vastes plans de reboisement sont mis en œuvre pour utiliser certains terrains abandonnés par l'agriculture et combler le déficit local de la production de bois.

Il est donc évident que, dans l'ensemble, ce n'est pas un manque de matières premières qui pourrait empêcher la forêt de jouer un rôle important dans une économie mondiale en expansion.

Dans la consommation totale de bois, le facteur le plus décisif est certainement la richesse forestière du pays en cause: des études que nous avons faites, il résulte qu'il n'existe pas de rapport simple entre la demande de bois et le niveau de vie.

Il ne faut pas en conclure, cependant, qu'il n'y ait pas implicitement quelque rapport dans le temps et il est nécessaire d'envisager que la consommation du bois augmentera à mesure que les niveaux de vie s'élèveront.

Le développement futur de la demande de bois et l'évolution de la consommation sous ses diverses formes ne peuvent être déterminés qu'après un examen très sérieux des utilisations actuelles dans les diverses régions: cependant, nos travaux en cette matière nous ont déjà amenés à certaines conclusions, à savoir:

a) la tendance actuelle de l'économie mondiale provoquera une augmentation rapide de la demande de bois industriels

b) cette augmentation sera très prononcée dans les pays peu développés

c) elle sera plus forte dans le secteur de la pâte que pour les autres produits forestiers.

Nous ne pensons pas que l'on puisse entièrement compter, pour satisfaire l'augmentation de ces nous veaux besoins, sur les économies qui pourront être réalisées sur le bois de feu.

Les forestiers doivent donc songer dès maintenant à des plans d'exploitation permettant une augmentation systématique des abattages annuels de bois industriel; ils devront tenir compte des énormes progrès techniques intervenus, ou à intervenir, dans les industries utilisatrices du bois, non seulement dans le domaine de la conversion chimique, mais aussi dans celui de la conversion mécanique.

C'est dans ce sens qu'il faudra modifier l'orientation de la politique forestière (expansion, révolution, etc.).

Ces perspectives doivent permettre d'envisager une mise en exploitation plus rapide des forêts tropicales de feuillus. Mais dans ces régions tropicales, plus que dans toute autre encore, les forestiers devront, tout en développant la production forestière et en l'adaptant aux besoins, tenir compte du rôle protecteur de la forêt et ne pas oublier que dans certains cas il est plus important que la production qu'elle peut donner.

L'action collective que nous avons menée avec l'aide des divers services forestiers commence à porter ses fruits. La lecture de cet exposé en a donné maint exemple. Mais en matière forestière, où les résultats ne sont perceptibles qu'à longue échéance, la continuité dans l'action est plus indispensable que partout ailleurs. Pendant ces dix années qui viennent de s'écouler, il nous a été permis seulement de préciser les problèmes à résoudre, d'ébaucher certaines solutions. Il est important de poursuivre cette action pour le plus grand bien de l'humanité.

FIGURE 22. Marcel Leloup, Directeur, Division des Forets.


Page précédente Début de page Page suivante