FAO/SMIAR - Rapport sur l' Afrique No.3, décembre 2000 - page 4

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PREMIERE PARTIE: VUE D'ENSEMBLE


A l'approche de la fin de l'an 2000, de graves difficultés d'approvisionnements alimentaires subsistent dans plusieurs pays de l'Afrique subsaharienne, du fait de la persistance de la sécheresse ainsi que de troubles intérieurs dans certaines régions. Le nombre de personnes victimes de fortes pénuries alimentaires dans la sous-région est passé de 19 millions en 1999 à environ 28 millions en 2000. La situation est particulièrement préoccupante en Afrique de l'Est, où 20 millions de personnes, subissant actuellement les effets de sérieuses pénuries alimentaires, auront besoin d'une aide alimentaire continue pendant une grande partie de l'an 2001. En Afrique australe, la situation alimentaire, déjà précaire, risque de s'aggraver en Angola, en raison de la recrudescence de l'insécurité qui a prévalu à l'époque critique des semis. Dans la région des Grands Lacs, la situation humanitaire est sombre en République démocratique du Congo où le nombre de personnes déplacées à l'intérieur du pays est actuellement estimé à 2 millions. En raison des combats et de l'insécurité générale régnant dans le pays, les organisations humanitaires n'ont pas accès à cette population. Dans les autres pays du continent, les troubles intérieurs continuent à avoir un effet négatif sur la production vivrière au Burundi, en Sierra Leone et au Soudan.



DE GRAVES DIFFICULTÉS D'APPROVISIONNEMENTS ALIMENTAIRES SUBSISTENT EN AFRIQUE DE L'EST

La situation alimentaire en Afrique de l'Est demeure précaire, compte tenu des effets à long terme de la sécheresse et/ou de troubles intérieurs. Environ 20 millions de personnes ont actuellement besoin de secours alimentaires d'urgence et l'on s'attend à des pénuries alimentaires pendant une grande partie de l'an 2001. La situation est particulièrement préoccupante en Érythrée, en Éthiopie, au Kenya et au Soudan, où des importations céréalières substantielles, sous forme d'aide alimentaire essentiellement, sont nécessaires pour lutter contre la famine. L'intervention généreuse et en temps utile des donateurs a permis d'éviter le désastre jusqu'à présent mais la crise alimentaire est loin d'être terminée dans la sous-région. En outre, la récente interdiction d'importer du bétail en provenance de l'Afrique de l'Est, décidée par les pays riverains de la péninsule arabe en raison de la fièvre de la vallée du Rift, réduira les recettes à l'exportation, diminuant encore la capacité d'importation commerciale, déjà faible, de ces pays.

En ce qui concerne la campagne secondaire en cours, des précipitations ont été signalées dans la plupart des régions frappées par la sécheresse en Éthiopie et en Somalie et, dans une moindre mesure, dans les zones les plus touchées du Kenya. Selon les prévisions actuelles, les pluies devraient continuer à s'améliorer en Éthiopie et en Somalie d'octobre à décembre 2000. Toutefois, la pluviométrie devrait être inférieure à la moyenne jusqu'à la fin de l'année dans de vastes régions de l'Érythrée, du Kenya, de la Tanzanie et de Djibouti.

En Érythrée, la situation alimentaire d'environ 1,5 million de personnes déplacées par la guerre et de près de 340 000 personnes victimes de la sécheresse est très préoccupante. En dépit de précipitations bénéfiques en septembre et octobre dans certaines régions, en particulier à Debub et à Gash Barka, les perspectives de récoltes des céréales et des légumineuses de la campagne principale 2000 sont peu encourageantes, compte tenu essentiellement des centaines de milliers d'agriculteurs déplacés par la guerre avec l'Éthiopie voisine. Les provinces administratives (Zobas) de Gash Barka et Debub - les principales zones céréalières du pays qui assurent normalement plus de 70% pour cent de la production - ont été au centre des récents affrontements et risquent d'engranger de faibles récoltes, voire aucune, en 2000.

Les précipitations ont également été mal réparties dans l'ensemble du pays au cours de la campagne principale et la situation a été aggravée par des pluies inhabituelles pour la saison début novembre, ce qui risque de nuire aux récoltes. Etant donné que la prochaine récolte ne devrait se dérouler qu'en novembre/décembre 2001, ces régions, ainsi que d'autres, seront tributaires de secours alimentaires d'urgence tout au long de l'an prochain.

En Éthiopie, les pluies bénéfiques qui sont tombées en septembre et octobre dans plusieurs régions ont aidé les cultures à parvenir à maturité dans les principales zones de production céréalière du centre, du nord et de l'ouest. La persistance de la sécheresse a toutefois compromis la production céréalière dans l'est et le sud. Les récoltes belg de la campagne secondaire 2000, rentrées en juin, ont été également mauvaises, du fait de la sécheresse.

La situation des approvisionnements alimentaires demeure très précaire et quelque 10,2 millions de personnes sont tributaires d'une aide alimentaire. La mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des approvisionnements alimentaires qui s'est rendue dans le pays du 12 novembre au 13 décembre termine actuellement l'estimation de la production céréalière de la campagne principale "meher" et les besoins d'aide alimentaire pour 2001.

Au Kenya, les perspectives de céréales de la campagne des "courtes pluies" 2000/01 dans les zones à régime bimodal des provinces de l'Est, du Centre et de l'Ouest, dont la récolte se déroulera en février/mars, sont incertaines, en dépit de récentes pluies bénéfiques. Les récoltes des céréales de la campagne principale des "longues pluies" sont terminées dans les principales zones de production de la vallée du Rift. Les récoltes de la campagne principale, qui assurent 80 pour cent de la production vivrière totale en temps normal, ont été mauvaises dans l'ensemble, du fait principalement d'une forte sécheresse. En conséquence, le pays devra importer environ 1,4 million de tonnes de céréales pour la campagne de commercialisation 2000/01 (octobre-septembre) afin de couvrir les besoins de consommation normaux.

La grave pénurie d'eau et de pâturages a entraîné de lourdes pertes de bétail, en particulier dans le nord et l'est du pays. Près de 3,3 millions de personnes, des éleveurs pratiquant le pastoralisme pour la plupart, ont besoin de secours alimentaires d'urgence. Compte tenu des sources de devises limitées dont dispose le pays, une aide internationale substantielle est nécessaire pour faire face à la situation.

En Somalie, les récoltes de la campagne principale "gu", récemment terminée, sont satisfaisantes. La production céréalière, estimée à 212 000 tonnes, dépasse d'environ 22 pour cent la moyenne d'après-guerre (1993-1999). Des précipitations généralisées en avril/mai et de bonnes pluies "hagay" début juillet ont été bénéfiques à la croissance des cultures. L'amélioration de la sécurité a également encouragé certains ménages à regagner leur exploitation et a facilité les travaux agricoles. On s'attend cependant à de mauvaises récoltes dans certaines poches des régions de Gedo, Juba inférieur et moyen, en raison de pluies irrégulières et insuffisantes.

En dépit d'une légère amélioration de la situation des approvisionnements alimentaires dans le sud de la Somalie, on signale une progression du taux de grave malnutrition résultant de la perte de certains moyens d'existence à la suite de sécheresses répétées et des effets à plus long terme d'années d'insécurité et de manque d'investissements dans l'économie. Ailleurs, dans le nord-ouest de la Somalie (Somaliland), la situation alimentaire est précaire dans les régions agro-pastorales de Togdheer, Awdal et Sanag, où des précipitations inférieures à la moyenne ont eu de graves retombées sur les récoltes et le bétail. Les mécanismes de survie traditionnels étant pour ainsi dire complètement épuisés, les populations et le bétail migrent, selon les rapports, vers l'Ethiopie et d'autres régions.

Au Soudan, une mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des approvisionnements alimentaires, qui vient juste de terminer son étude sur le terrain, a noté que les pluies tardives et irrégulières ont considérablement compromis la production végétale 2000. En dépit du résultat satisfaisant qu'il est prévu d'enregistrer pour les cultures irriguées, suite au relèvement généralisé de ce secteur, l'agriculture pluviale, qui assure l'essentiel de la production céréalière, a été gravement touchée. De graves pénuries alimentaires sont déjà apparues dans plusieurs districts, le prix des aliments ayant plus de doublé par rapport à la moyenne à la même époque de l'année. Une mission antérieure FAO/PAM dans le sud du Soudan avait prévu un déficit de production céréalière, notamment dans les régions de Bahr el Ghazal septentrional, de Bahr el Jebel, d'Équatoria occidental, de Jonglei et de Juba. Un léger excédent de production a toutefois été enregistré dans les Etats d'Équatoria occidental, de Lakes et de Bahr el Ghazal occidental.

En Tanzanie, la production céréalière de la campagne 2000, de maïs principalement, est estimée à environ 3,5 millions de tonnes, soit près de 20 pour cent de moins que la moyenne des cinq dernières années. La baisse est imputable à la sécheresse qui a prévalu dans plusieurs régions. Selon les prévisions actuelles, les besoins d'importations céréalières devraient donc s'établir à 690 000 tonnes. Cependant, la situation des approvisionnements alimentaires s'est améliorée grâce aux importations substantielles de maïs qui ont permis de faire fortement baisser les prix alimentaires. En dépit d'une réduction des pâturages, le bétail est en bonne santé. Les semis des céréales de la campagne principale 2001 dans les régions à régime unimodal du centre et du sud, ainsi que ceux de la campagne des courtes pluies ("vuli") 2000/01 dans les zones à régime bimodal du nord sont en cours. Les précipitations en général inférieures à la moyenne en octobre ont provoqué un déficit hydrique, notamment pour les cultures semées plus tôt. Environ 800 000 personnes, identifiées comme étant en situation d'insécurité alimentaire, ont besoin d'une aide alimentaire, en particulier dans les régions de Dodoma, Mara, Shinyanga, Singida, Tabora, Tanga et Mwanza méridional, qui ont toutes engrangé une mauvaise récolte trois fois de suite.

En Ouganda, les perspectives des cultures vivrières de la seconde campagne 2000, qui seront récoltées à partir de janvier prochain, sont meilleures, grâce aux récentes pluies favorables. La situation des approvisionnements alimentaires est satisfaisante. Elle est toutefois encore précaire dans le nord-est, du fait essentiellement de la mauvaise récolte de l'an dernier et d'une perte de bétail suite à des attaques armées. Dans l'ensemble, 1,2 million de personnes, victimes des intempéries et de troubles intérieurs, ont besoin d'une aide alimentaire.



LA SITUATION ALIMENTAIRE EST ENCORE PRÉCAIRE DANS LA RÉGION DES GRANDS LACS

En République démocratique du Congo, la persistance du conflit continue à perturber toutes les activités économiques et les travaux agricoles. La situation alimentaire est extrêmement tendue, en particulier dans l'est du pays, plus particulièrement touché par des combats continus et par une insécurité généralisée. Le nombre de personnes déplacées à l'intérieur du pays et réfugiées dans les pays voisins s'accroît rapidement. Rien que dans la seconde moitié de novembre, on a signalé que 10 000 personnes ont traversé la frontière pour se rendre la province de Luapula, au nord de la Zambie voisine. On s'attend à ce qu'un nombre beaucoup plus important de personnes quittent la province de Shaba, au sud-est, où les altercations entre forces gouvernementales et rebelles se sont intensifiées, pour prendre refuge en Zambie au cours des prochaines semaines.

La mission de la FAO qui s'est récemment rendue dans les provinces sous contrôle gouvernemental de Kinshasa, Bandundu et Bas-Congo a noté que la situation alimentaire et nutritionnelle est extrêmement préoccupante à Kinshasa. L'aide alimentaire ne cible actuellement que les groupes les plus vulnérables tandis que les populations appauvries souffrant de la faim ne peuvent compter que sur leurs propres moyens. Les mécanismes de survie (manger moins, prendre moins de repas et cultiver des légumes dans les jardins urbains) sont pour ainsi dire épuisés. Environ 70 pour cent de la population, estimée actuellement à environ 6 à 7 millions, vit en-dessous du seuil de pauvreté. Une malnutrition chronique touche 18 pour cent des enfants au centre de la ville et plus de 30 pour cent dans les zones périphériques, où se sont installées les personnes déplacées par la guerre.

Alors que la production vivrière est suffisante dans les zones rurales aux alentours de Kinshasa et que l'existence de stocks considérables de manioc, de maïs et d'huile de palme a été signalée dans d'autres provinces, plusieurs autres facteurs limitent les approvisionnements alimentaires à Kinshasa, parmi lesquels : le très mauvais état de l'infrastructure routière ; le harcèlement des livreurs, des commerçants et des fermiers par la police et les militaires; la rupture des approvisionnements alimentaires en provenance des provinces Équateur et Est du fait de la guerre en cours; la pénurie de carburant, du fait du manque de devises étrangères; enfin, la surévaluation du taux de change qui encourage le traitement des opérations commerciales sur le marché parallèle.

Afin de favoriser le plus efficacement possible le rétablissement du flux normal des marchandises vers la capitale, la mission a recommandé au gouvernement de mettre en application les directives prises contre le harcèlement policier et militaire et contre les prélèvements illégaux aux points de contrôle routier, ports et marchés. Elle a également conseillé aux donateurs d'aider le gouvernement à réparer de toute urgence les segments les plus importants des routes principales menant à Kinshasa. La mission a enfin préconisé à la communauté internationale d'inciter le gouvernement et les forces rebelles à établir des couloirs humanitaires qui permettraient de rétablir le commerce des vivres et d'autres produits entre Kinshasa et les provinces occidentale et septentrionale.

Au Rwanda, un temps exceptionnellement sec de la mi-mai à la mi octobre, notamment dans le sud et à l'est du pays, a entraîné une baisse considérable des rendements des denrées de base principales (bananes et manioc) ainsi que d'autres cultures de rapport. Les districts les plus touchés sont ceux des préfectures de Butare, Gitarama, Kaibungo et Umutara ainsi que la région de Bugesera dans la préfecture de Kigali Rurale. Des pertes de bétail résultant du mauvais état des pâturages et de la pénurie d'eau ont également été signalées, en particulier dans la préfecture d'Umutura qui aurait perdu un quart du cheptel bovin total.

Ces régions connaissent de graves difficultés alimentaires. Les prix des denrées de base ont considérablement augmenté depuis septembre tandis que le cours du bétail a accusé une forte baisse sous l'effet des ventes à perte. Dans la préfecture d'Umutara, de grands mouvements de population en direction de la Tanzanie voisine ou d'autres préfectures ont été enregistrés. Selon une récente mission locale composée du gouvernement et d'organisations internationales, 267 000 personnes, soit 22 pour cent de la population des zones sinistrées, auraient besoin d'une aide alimentaire jusqu'à fin janvier 2001. Un soutien destiné à assurer la relance des activités agricoles est nécessaire pour permettre aux personnes affectées de rétablir leur capacité productive. Ce soutien devrait porter sur la distribution de semences de haricots et de boutures de manioc, la reconstitution du cheptel et l'octroi de médicaments à usage vétérinaire. Le gouvernement a lancé un appel à la communauté internationale pour fournir une aide alimentaire et un appui au relèvement de l'agriculture.

Au Burundi, la situation alimentaire, très tendue suite à une succession de mauvaises récoltes, a été aggravée par le manque de précipitations pendant plus de cinq moins, de fin avril à mi octobre. Des pluies abondantes en octobre ont temporairement remédié à la sécheresse mais sont arrivées trop tard pour éviter une baisse des rendements des cultures pérennes et une diminution des superficies ensemencées en céréales et légumineuses pour la première campagne 2001, qui seront récoltées à partir de janvier. De graves pénuries de semences seront également préjudiciables aux semis.

La situation alimentaire est critique dans les provinces septentrionales de Kirundo, Ngozi et Myinga, plus particulièrement touchées. On signale que l'assiduité scolaire a nettement diminué en raison des pénuries alimentaires. Une aide alimentaire internationale bénéficie à 700 000 personnes, dont celles ayant engrangé une mauvaise récolte, les personnes déplacées et les populations les plus vulnérables. L'insécurité continue toutefois à perturber les distributions.



LA SITUATION ALIMENTAIRE RISQUE DE SE DÉTERIORER EN ANGOLA DU FAIT DE LA RECRUDESCENCE DE L'INSÉCURITÉ

En Angola, la poursuite des combats entre les forces gouvernementales et rebelles en octobre et novembre, qui ont particulièrement touché le nord, a entraîné de nouvelles vagues de personnes déplacées à l'intérieur du pays et de réfugiés vers les pays voisins. Le nombre de personnes déplacées, déjà estimé à 2,5 millions fin juin, augmente sous l'effet de la recrudescence de l'insécurité dans les provinces de Kwanza Norte, Moxico, Bie et Malange.

Les déplacements de population se sont produits à l'époque des semis des céréales de la campagne 2000/01. En dépit des pluies en général satisfaisantes depuis le début de la campagne en octobre, un grand nombre de cultivateurs ont abandonné leur exploitation pour rechercher des lieux plus sûrs. En conséquence, les emblavures et la production vivrière risquent de diminuer pour la troisième année consécutive, aggravant la précarité de la situation des approvisionnements. Le pays continuera donc à être fortement tributaire d'une aide alimentaire pour couvrir ses besoins.

Les difficultés de distribution des secours liées à l'insécurité et le manque de contributions d'aide alimentaire par rapport aux besoins ont exacerbé la situation alimentaire du grand nombre de personnes déplacées. Selon les rapports, cette population souffre de malnutrition, notamment dans la ville de Kuito où 8 740 personnes déplacées sont venues chercher refuge au mois d'octobre. Des annonces d'aide alimentaire supplémentaires sont nécessaires de toute urgence pour éviter de diminuer davantage le nombre de bénéficiaires. La communauté internationale distribue des semences et des intrants agricoles aux personnes déplacées ayant accès à la terre afin qu'elles puissent procéder aux semis de la campagne 2001.

Dans les autres pays de l'Afrique australe, en Zimbabwe, grâce à la bonne récolte de maïs de 2000, la situation des approvisionnements alimentaires devrait continuer à être satisfaisante. Toutefois, la dévaluation constante de la monnaie nationale, les pénuries de carburant et d'électricité, l'inflation élevée et l'augmentation du chômage compromettent l'accès d'un grand nombre de citadins à la nourriture. Les prix des denrées de base, dont le pain, la semoule de maïs, le sucre et l'huile, ont fortement augmenté le mois dernier, notamment à Harare et dans d'autres villes.

En dépit des pluies favorables dont a bénéficié la majeure partie des zones de production, les semis de maïs de la campagne 2001, dont la récolte se déroulera à partir de mai prochain, devraient nettement régresser en raison de la très forte augmentation des prix des intrants agricoles, des difficultés de crédit pour les exploitations commerciales que le gouvernement prévoit de réinstaller sur de nouvelles terres ainsi que du manque d'intrants et de services techniques dont ces exploitations disposent. La production devrait donc fléchir. La production de blé de la campagne 2000, récemment engrangé et entièrement produit par le secteur commercial, aurait diminué d'un quart environ par rapport à l'an dernier. Malgré d'importants stocks de report, le blé risque de manquer plus tard dans l'année, en raison de la forte pénurie de devises étrangères. La baisse de la production de maïs en 2001 pourrait aggraver la situation.

Outre l'augmentation du nombre de citadins touchés par la pauvreté, la situation alimentaire des agriculteurs qui ont engrangé une récolte réduite, dont quelque 220 000 personnes victimes du cyclone Elyne et d'environ 205 000 familles de travailleurs agricoles qui perdront leurs revenus du fait de la nouvelle affectation des terres, est inquiétante.

Au Mozambique, de fortes pluies et des vents violents au cours de la troisième décade de novembre ont provoqué des inondations, en particulier dans les provinces méridionales, provoquant des pertes humaines et isolant des milliers de personnes dans les zones aux alentours des districts de Xai-Xai et Chibuto. Ces districts avaient été particulièrement touchés par des inondations dévastatrices plus tôt dans l'année. Bien que les inondations soient localisées, les perspectives de récoltes de la campagne 2000/01 sont préoccupantes dans les provinces du sud; les sols sont saturés dans plusieurs endroits et ne pourront supporter un nouvel excès de pluie. La situation doit donc être étroitement surveillée.

En dépit de graves inondations dans le sud et le centre, une bonne récolte céréalière, de maïs essentiellement, a été rentrée en 2000. En conséquence, la situation des approvisionnements alimentaires demeure satisfaisante. Les prix sont stables et inférieurs à ce qu'ils étaient il y a un an. La situation des approvisionnements s'est améliorée dans les provinces touchées par les inondations grâce à la bonne production de la campagne secondaire, à la réparation des routes et aux distributions d'aide alimentaire. Toutefois, environ 172 000 personnes en état d'insécurité alimentaire, y compris celles les plus affectées par les inondations, auront besoin d'une aide alimentaire jusqu'à la prochaine récolte.

En Afrique du Sud, les fortes pluies qui sont tombées fin novembre dans l'est de la province de KwaZulu-Natal, très touchée par de fortes inondations plus tôt dans l'année, ont provoqué des inondations et entraîné le déplacement de milliers de personnes. Les inondations ont désorganisé les travaux agricoles. Grâce à la récolte exceptionnelle de maïs de la campagne 2000, la situation des approvisionnements alimentaires est satisfaisante. Bien que les premières perspectives de maïs de la campagne 2001 soient médiocres en raison de la réduction prévue des emblavures, l'importance des stocks de report devrait garantir des approvisionnements suffisants pour la campagne de commercialisation 2000/01 (mai/avril).

Au Swaziland, la situation des approvisionnements alimentaires est difficile, compte tenu de la forte baisse de la production céréalière consécutive à de mauvaises conditions météorologiques. La production de maïs a diminué de plus d'un tiers par rapport à l'an dernier et les besoins d'importations ont considérablement augmenté. En dépit de la capacité d'importations commerciales du pays, les importations pour la campagne de commercialisation 2000/01 (mai/avril) sont faibles jusqu'à présent. Par ailleurs, environ 14 000 personnes, dont les récoltes ont été perdues, ont été identifiées comme ayant besoin d'urgence d'une aide alimentaire jusqu'à la prochaine récolte.

Dans les autres pays de l'Afrique australe, en dépit d'importantes inondations dans certaines régions, la situation des approvisionnements alimentaires est satisfaisante grâce à la production céréalière exceptionnelle de cette année. La production a nettement augmenté en Afrique du Sud, au Zimbabwe, en Zambie, en Namibie et au Botswana tandis qu'elle est identique au niveau record de l'an dernier au Malawi.



LA PRODUCTION DEVRAIT FLÉCHIR DANS LE SAHEL ET LE TCHAD DEVRAIT CONNAÎTRE DES DIFFICULTÉS D'APPROVISIONNEMENTS

En dépit des conditions de végétation favorables dans l'ensemble au cours de la première partie de la saison des pluies, l'insuffisance des pluies ou des vagues de sécheresse prolongées qui ont sévi plus tardivement, à partir de la mi-août, dans plusieurs pays du Sahel se sont traduites par une baisse marquée de la production en 2000 par rapport au niveau record de 1999. Les précipitations ont en général commencé à temps, et ont été généralisées et assez abondantes en juin et juillet. En l'absence de longues périodes de sécheresse, seuls quelques resemis ont dû être effectués dans des zones localisées. Toutefois, en août, les pluies ont nettement diminué au Burkina Faso, au Niger et au Tchad, et ont continué à être limitées en septembre. Les attaques de déprédateurs sont restées en général limitées. Les pluies ont permis aux pâturages de se régénérer et de reconstituer les réserves d'eau, mais les herbages se sont asséchés plus tôt que d'habitude en raison de la diminution des pluies en septembre/octobre, sauf dans l'ouest.

Selon plusieurs missions FAO/CILSS d'évaluation des récoltes qui se sont appuyées sur les services statistiques nationaux, la production céréalière totale de la campagne 2000 des neuf pays membres de la CILSS a été estimée à 9,5 millions de tonnes, soit 16 pour cent de moins qu'en 1999 et 2 pour cent de moins que la moyenne des cinq dernières années. La production devrait être inférieure à la moyenne au Burkina Faso et au Tchad. Elle devrait avoisiner la moyenne au Mali, en Mauritanie et au Niger, et être supérieure à la moyenne à Cap-Vert, en Guinée-Bissau, en Gambie (où elle atteint un record) et au Sénégal. La production a enregistré une forte hausse par rapport à 1999 en Gambie et en Guinée-Bissau alors qu'elle a considérablement baissé par rapport au niveau exceptionnel de 1999 au Burkina Faso, au Cap-Vert, au Mali, au Niger et au Tchad, et, dans une moindre mesure, en Mauritanie.

Grâce aux récoltes généralement satisfaisantes de 1998 et 1999, les stocks de sécurité au niveau national et à l'échelle des exploitations agricoles ont été reconstitués dans la majorité des pays. Les déficits dus aux mauvaises récoltes engrangées cette année devraient donc être en partie couverts par les stocks ou par des transferts des régions excédentaires vers les zones déficitaires. Toutefois, la situation des approvisionnements risque d'être tendue dans plusieurs régions, notamment dans la zone sahélienne du Tchad où une hausse considérable du prix des céréales a été enregistrée. Une aide extérieure est nécessaire pour fournir des vivres aux populations vulnérables et pour reconstituer le stock de sécurité national dont le niveau était déjà faible avant la dernière récolte.



DES SECOURS ALIMENTAIRES D'URGENCE SONT ENCORE NÉCESSAIRES EN SIERRA LEONE ET AU LIBÉRIA

Au Libéria, les perspectives actuelles laissent prévoir une légère augmentation de la production grâce au lent relèvement du secteur agricole après plusieurs années de guerre civile. A l'exception du comté de Lofa, la paix relative qui s'est installée dans la plupart des régions a favorisé les travaux agricoles. Le riz, principale denrée de base, croît en général de manière satisfaisante et les emblavures devraient avoir augmenté. Une mission FAO/PAM d'évaluation des cultures et des approvisionnements alimentaires s'est rendue sur place fin novembre/début décembre pour estimer la production vivrière 2000 et la situation actuelle des disponibilités. Elle publiera son rapport fin décembre.

Les combats se sont intensifiés en octobre dans le nord du comté de Lofa et un grand nombre de personnes, déplacées par milliers, en particulier dans les villes de Gorlu, Ganglota et Selayae, ont besoin d'une aide humanitaire. La sécurité est encore précaire. On estime qu'environ trois quarts des personnes déplacées sont retournées chez elles et que le quart restant s'est installé sur les lieux de leur migration. Le PAM distribue une aide alimentaire aux rapatriés libériens. Le HCR apporte également des secours aux réfugiés de la Sierra Leone regroupés dans les camps du comté de Grand Cape Mount.

En Sierra Leone, la production devrait être faible, les emblavures ayant été inférieures à celles de l'an dernier en raison de la recrudescence des troubles intérieurs début mai, à l'époque critique des semis. Du fait de l'insécurité, la distribution d'intrants et les interventions de secours ont été interrompues ou gravement désorganisées, dans le nord en particulier. La sécurité s'est améliorée depuis juin/juillet mais la situation est encore tendue et les combats se sont récemment intensifiés le long de la frontière avec la Guinée et le Libéria, ce qui a entraîné de nouvelles vagues de personnes déplacées. Des attaques ont été signalées à Batkanu, au nord-est de Port Loko et dans les villages du nord-est de Yele. L'insécurité interdit aux organisations humanitaires d'accéder aux villages situés le long de la frontière et aux camps de réfugiés en Guinée. Un nouvel accord de cessez-le-feu, en vigueur à partir du 10 novembre, a été récemment conclu entre le gouvernement et le Front uni révolutionnaire. Cet accord devrait permettre à la Mission des Nations Unies en Sierra Leone de se déployer librement dans l'ensemble du pays et de relancer le processus de désarmement prévu dans le cadre de l'accord de Lomé en juillet 1999 mais suspendu en raison de la reprise des combats en mai 2000.

La situation des approvisionnements alimentaires s'est dégradée avec la saison des pluies, les problèmes de transport interdisant l'accès à de nombreuses zones. Outre celles déjà recensées, de nouvelles personnes déplacées à l'intérieur du pays ont été enregistrées dans le sud et dans l'ouest, suite à la reprise des combats en mai, et plus récemment en octobre. Environ 500 000 personnes ont été déplacées et accueillies par des communautés locales dans des zones sous contrôle gouvernemental tandis que selon les estimations, 1 million de personnes seraient victimes de la guerre dans les zones aux mains des rebelles. Plus de 400 000 réfugiés de la Sierra Leone se trouvent encore dans les pays voisins de l'Afrique de l'Ouest, notamment en Guinée et au Libéria. En dépit des hostilités, le PAM et des ONG distribuent encore des vivres. Le pays continuera à être tributaire d'une aide alimentaire en 2001.



LE POINT SUR LES ANNONCES ET LES LIVRAISONS D'AIDE ALIMENTAIRE

Les besoins d'importations céréalières dans les pays d'Afrique subsaharienne devraient augmenter en 2000/01, du fait de la faiblesse de la production dans certains pays et de l'accroissement des besoins d'aide alimentaire en Afrique de l'Est. Les estimations les plus récentes du SMIAR concernant la production 2000 et les besoins d'importations et d'aide alimentaire en 2000/01 pour les 24 pays dont la campagne de commercialisation 2000/01 a déjà commencé sont résumées au Tableau 1. Les besoins d'aide alimentaire pour ces pays en 2000/01 sont estimés à 1,86 million de tonnes, soit environ 0,92 million de tonnes de plus que l'an dernier. Les annonces d'aide alimentaire en céréales pour ces 24 pays pour 2000/01, y compris celles reportées de 1999/00, s'élèvent au total à 0,5 million de tonnes, dont 0,2 million de tonnes déjà livrées. Le résultat de la campagne actuelle dans les 24 autres pays permettra d'obtenir des indications plus précises sur l'augmentation des besoins d'importations et d'aide alimentaire pour l'ensemble de l'Afrique subharienne.

Les dernières estimations du SMIAR sur la production 1999 et les besoins d'importations et d'aide alimentaire pour 1999/2000 sont récapitulées au Tableau 2.



DOMAINES D'INTERVENTION PRIORITAIRE

La situation alimentaire en Afrique de l'Est est encore précaire et requiert une action continue pour éviter de plus grandes difficultés et des pertes humaines. La persistance des troubles intérieurs et de l'insécurité dans certaines parties de la région des Grands lacs continue à provoquer des déplacements massifs de population tandis que l'insécurité généralisée en Angola risque d'aggraver la situation alimentaire déjà précaire du pays. Dans ce contexte, l'attention de la communauté internationale est attirée sur les domaines d'intervention prioritaire suivants:

Premièrement, l'Afrique de l'Est, et plus particulièrement l'Érythrée, l'Éthiopie et le Kenya, ont besoin d'une aide alimentaire continue et suffisante tout au long de l'année 2001.

Deuxièmement, les millions de personnes déplacées à l'intérieur des pays touchés par des troubles intérieurs, présents ou passés, requièrent une aide alimentaire jusqu'à ce qu'elles regagnent ou réintègrent leurs communautés.

Troisièmement, compte tenu des indications actuelles qui laissent présager des pénuries alimentaires dans plusieurs régions du Soudan, il est nécessaire de préparer des plans de secours afin de pouvoir fournir une aide alimentaire aux populations affectées en temps voulu.

Quatrièmement, un appui supplémentaire doit être apporté pour assurer le relèvement du secteur agricole dans les pays touchés par les intempéries et/ou les troubles intérieurs.


FAO/SMIAR - décembre 2000

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