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RÉSUMÉ


1. Le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) a adopté le Programme détaillé pour le développement de l'agriculture africaine (PDDAA) dans le but de remédier à court terme à la crise du secteur agricole. À cette fin, le Programme vise à stimuler l'avantage concurrentiel de ce secteur qui, sans cela, ne saurait être exploité, et à générer une croissance économique basée sur l'amélioration de la productivité et de l'efficacité. Afin d'attribuer au mieux les ressources limitées dont dispose le PDDAA, il faut identifier les produits agricoles dotés d'un avantage concurrentiel, les développer et les commercialiser sans imposer des efforts démesurés à l'Afrique ou à d'autres pays. Les investissements doivent être conditionnés par une forte probabilité de succès commercial, des prévisions de rendement positif et une bonne viabilité économique.

2. Compte tenu de l'importance croissante d'un système économique et commercial intégré à l'échelle mondiale et régionale, les pays et les sous-régions d'Afrique doivent promouvoir ensemble les avantages comparatifs de chacun. Sur cette base, les objectifs de la présente étude sont les suivants:

3. Pour bénéficier d'économies d'échelle et pour atteindre une masse critique permettant d'augmenter la productivité et les revenus au niveau tant national que régional, on a identifié des produits agricoles potentiellement compétitifs dans les principales sous-régions agro-écologiques (au nombre de cinq). Ces sous-régions correspondent à peu près aux territoires des groupements économiques régionaux existant en Afrique.

4. La présente étude s'appuie sur les connaissances techniques et la longue expérience de la FAO en Afrique. Les données chronologiques relatives à l'utilisation des terres, à l'élevage, à la production et à la productivité, au commerce et aux prix à la production, qui ont été recueillies par la FAO de 1996 à 2000 par pays, ont servi à déterminer les critères de sélection des produits agricoles potentiellement compétitifs. Les notions d'avantage comparatif et de compétitivité ont servi de base à l'analyse du potentiel d'exportation et de création de revenus de chaque produit.

5. Le choix des produits agricoles ou d'élevage potentiellement compétitifs à l'échelle sous-régionale a été établi sur le critère production/potentiel commercial. Ce choix reflète non seulement l'importance de chaque produit dans la structure de production, mais aussi son potentiel commercial. L'importance relative de chaque type de produit agricole ou d'élevage dans la production totale de la sous-région exprimée en valeurs unitaires du commerce mondial (plus de cinq pour cent) a servi d'indicateur de sélection. Les produit agricoles ou d'élevage potentiellement compétitifs représentant moins de cinq pour cent de la production totale d'une sous-région, mais plus de cinq pour cent du montant total du commerce d'un pays, ont été désignés comme des produits agricoles et d'élevage potentiellement compétitifs 'spécifiques à un pays'. La comparaison entre la structure de production actuelle, au niveau tant national que sous-régional, avec celle qui résulterait de l'application du critère production/potentiel commercial a parfois donné des résultats surprenants. On reconnaît toutefois que les priorités de choix d'investissement pour un produit peuvent s'appuyer sur d'autres facteurs comme, par exemple, une forte et longue dépendance à l'égard des importations - ce qui est le cas du riz en Afrique occidentale.

6. A défaut de données chronologiques accessibles et/ou complètes pour les produits forestiers et halieutiques par catégorie, les richesses naturelles de la forêt et de la pêche (par sous-région et par pays) ont été utilisées pour sélectionner les produits. On s'est basé sur la part de chaque sous-région et de chaque pays en superficie de forêts et de zones boisées par rapport au total de l'Afrique pour définir les sous-régions et les pays potentiellement compétitifs où il s'avérerait utile de développer les secteurs de la forêt et de la conservation de la faune et de la flore sauvages. On s'est servi de la superficie de zone économique exclusive (ZEE) d'une sous-région ou d'un pays comme indicateur supplétif pour évaluer le potentiel de développement de la pêche en mer.

7. On s'est efforcé d'estimer à la fois la compétitivité des coûts et celles des technologies des produits agricoles. Des données complètes de coût et de production n'étant pas disponibles, on s'est servi du prix à la production comme indicateur supplétif pour établir la compétitivité des coûts pour une production au niveau technologique actuel. Le prix à la production est un indicateur supplétif approprié puisqu'il correspond au revenu officiel des agriculteurs par unité de production et qu'il intègre les coûts de production sous-jacents. En ce qui concerne les produits agricoles d'exportation, les prix internationaux (en prix FAB à l'exportation) servent de référence aux gouvernements pour stimuler la production intérieure et les exportations. L'écart entre le prix à la production et les prix internationaux reflète à un moment donné les conséquences de multiples facteurs nationaux qui se répercutent sur l'agriculture et induisent une divergence entre les prix à la production et les prix mondiaux à l'exportation. En raison de l'absence de données historiques et plus récentes sur les prix à la production des produits alimentaires dans les bases de données statistiques de la FAO (FAOSTAT), l'analyse de l'écart des prix ne concerne que la période comprise entre 1991 et 1995.

8. Le processus de sélection a permis d'identifier des produits agricoles potentiellement compétitifs au niveau des différentes sous-régions, dont le détail figure ci-après. Comme l'on pouvait s'y attendre, les produits agricoles d'exportation traditionnels propres à une sous-région ont un solide potentiel concurrentiel (le café en Afrique orientale, le cacao et l'igname dans les pays côtiers de l'Afrique occidentale, et les arachides en Afrique centrale et dans la zone sahélienne de l'Afrique occidentale). Les olives et le blé en Afrique du Nord, le raisin, le maïs, la canne à sucre, les légumes et le tabac en Afrique australe, le millet, le sorgho et les arachides dans la zone sahélienne de l'Afrique occidentale ont été considérés comme des produits potentiellement compétitifs.

9. La sélection des produits agricoles potentiellement compétitifs ne reflète pas la superficie du couvert végétal qu'ils occupent aujourd'hui dans les sous-régions (l'étendue du couvert végétal traduisant une 'aptitude naturelle' des espèces), et en est parfois très loin. Ainsi:

10. Les produits agricoles qui jouent un rôle significatif dans l'économie et le commerce au niveau national (mais pas au niveau sous-régional) ont été sélectionnés comme des produits potentiellement compétitifs spécifiques à un pays. Ces produits, détaillés ci-après, devraient retenir toute l'attention des gouvernements nationaux:

11. Les animaux d'élevage potentiellement compétitifs à l'échelle sous-régionale ont été choisis en fonction de l'importance relative d'un type de bétail donné dans la production totale d'une sous-région (exprimée en valeur unitaire des exportations mondiales). Tous les types de bétail ont un avantage comparatif, à divers degrés, dans l'ensemble des sous-régions. Ils justifient donc des investissements qui seront réalisés dans le cadre du Programme détaillé pour le développement de l'agriculture africaine du NEPAD. Les animaux d'élevage potentiellement compétitifs spécifiques à un pays et qui occupent une place importante dans la production nationale (exprimée en valeur unitaire des exportations mondiales) sont les suivants: les ovins (Lesotho, Namibie, Afrique du Sud, Zambie, Cameroun, République démocratique du Congo, République du Congo, Guinée équatoriale et Gabon); la volaille (Guinée équatoriale, Sao Tomé-et-Principe, Gabon, Liberia, Maurice et Zambie); les porcs (Côte d'Ivoire, Guinée-Bissau, Seychelles et Liberia). Compte tenu de la prépondérance de l'élevage dans le Sahel, dans les terres arides du sud-ouest de l'Afrique, sur les hautes terres de l'Éthiopie et en Afrique orientale, il convient de continuer à appliquer les mesures prises pour améliorer les pratiques d'élevage et développer le marché des produits d'origine animale.

12. Les sous-régions potentiellement compétitives qui devraient accorder une haute priorité aux investissements prévus dans le cadre du PDDAA du NEPAD pour développer le secteur forestier sont l'Afrique orientale, les pays côtiers de l'Afrique occidentale, l'Afrique centrale (à l'exclusion du Tchad) et l'Afrique australe. Le couvert forestier et boisé de presque tous ces pays représente plus de cinq pour cent du couvert forestier de leur sous-région: il faudrait donc exploiter plus largement cet avantage comparatif naturel. On peut toutefois mentionner le cas singulier de l'Afrique du Sud qui est le premier exportateur de produits forestiers de haute valeur en Afrique, produits issus, pour l'essentiel, de plantations forestières. Ce cas remet en question la notion d'avantage comparatif fondé sur la richesse en ressources naturelles.

13. Des sous-régions côtières potentiellement compétitives ont été également sélectionnées pour développer le secteur de la pêche en mer. En raison du manque de statistiques détaillées, notamment sur les résultats économiques actuels du sous-secteur de l'aquaculture, l'analyse ne porte que sur la pêche en mer et sur son potentiel de développement. Pour cela, le potentiel sous-régional de développement du secteur de la pêche en mer a été établi pour chaque sous-région sur la base de la superficie de la zone économique exclusive (ZEE) et de sa part dans le total africain. Cette superficie varie considérablement d'une sous-région à l'autre puisqu'elle est de 720 miles carrés en Afrique centrale (5,5 pour cent), mais de 5,8 millions de miles carrés en Afrique australe (44 pour cent du total de l'Afrique). Toutes les parts supérieures à cinq pour cent de la ZEE totale ont été désignées pour bénéficier des investissements qui pourront être consentis dans le cadre du PDDAA. La contribution des pays à la production marine totale de la sous-région n'est en général pas proportionnée à leur superficie de ZEE dans le total sous-régional.

14. Les observations empiriques relatives aux écarts entre la productivité sous-régionale d'une part, et la productivité mondiale et des pays dominant les marchés d'autre part semblent indiquer que la grande majorité des produits agricoles (dont les fruits, les légumes, le manioc, le maïs, le millet, les olives, le riz, le raisin, les arachides, le coton-graine et le blé) ne sont pas compétitifs sur le plan technologique. Seuls le café, le cacao, la canne à sucre, le tabac et l'igname sont des produits sous-régionaux compétitifs au niveau mondial de par leur productivité. Il faut donc adopter deux stratégies distinctes d'investissements selon la productivité réelle des terres des pays: (1) investissements conséquents dans les technologies de production et/ou (2) investissements conséquents dans les technologies de valeur ajoutée. Il serait également important de rallier un soutien politique pour encourager les échanges entre les sous-régions de l'Afrique, notamment pour les denrées de base. À cette fin, une analyse approfondie de la structure des flux du commerce au sein de l'Afrique (entre pays et entre sous-régions) se révélerait très utile pour identifier les produits agricoles que les pays africains pourraient échanger plus facilement et/ou à moindre frais. Il conviendrait en outre de mettre en place et de renforcer des politiques, des mécanismes et des institutions ad hoc au niveau régional pour stimuler le flux des échanges sous-régionaux et régionaux.

15. Les observations empiriques ayant trait à l'analyse de l'écart entre prix internationaux et prix à la production confirment le fait que les producteurs africains, dans la majorité des cas, sont très mal rétribués par rapport à leurs concurrents et aux cours mondiaux en vigueur. Les producteurs africains de cacao, de café (sauf au Liberia), d'arachides (à l'exception du Gabon), de maïs (hormis la Namibie, l'Afrique du Sud, le Kenya, la Somalie et l'Éthiopie), d'olives, de riz (en dehors de la Gambie et du Liberia) et de tournesol n'ont reçu qu'une faible fraction des prix internationaux. Les producteurs de manioc (dans tous les pays côtiers de l'Afrique occidentale, sauf au Liberia et au Nigeria) ont également été 'ponctionnés' à divers degrés. Leurs concurrents, qui ont obtenu un prix légèrement inférieur aux cours internationaux, ont, pour la plupart, réalisé un profit beaucoup plus grand, du fait surtout d'une productivité plus élevée et d'économies d'échelle plus importantes dans les domaines de la production, de la commercialisation et du commerce. Le niveau de 'ponction' varie toutefois considérablement entre produits et entre pays.

16. En réalité, la productivité et l'efficacité des producteurs ne sont pas les seuls facteurs de compétitivité. L'analyse des obstacles à la croissance durable de la production agricole et au dynamisme des échanges montre que le faible niveau de compétitivité des pays africains (en dépit de la richesse de leurs ressources naturelles) résulte, pour l'essentiel, de la précarité des conditions économiques, sociales et politiques. Les conditions dans lesquelles les agriculteurs africains exercent leurs activités productives et commerciales se caractérisent principalement par:

17. Compte tenu de la diversité des sous-régions de l'Afrique sur le plan de la richesse en ressources, du niveau de développement économique et social, des défis, des contraintes et des perspectives, il est impossible de recommander une approche homogène pour accroître la compétitivité du secteur agricole. Si l'on veut améliorer la productivité et l'efficacité du secteur agricole, il est donc indispensable de mettre en exergue les principales ressources dont dispose chaque sous-région et d'identifier les problèmes spécifiques liés à la terre et à l'eau qui freinent leur développement. Ces principaux problèmes sont récapitulés ci-après.

18. Les principales contraintes transversales communes à toutes les sous-régions de l'Afrique qui font obstacle la croissance économique des secteurs de la forêt et de la conservation de la faune et de la flore sauvages sont les suivantes: marchés mal établis pour de nombreux produits forestiers et capacité limitée de conversion des ressources en produits exportables à forte valeur;

19. Les principaux problèmes, défis et atouts qui se posent au développement des secteurs de la forêt et de la conservation de la faune et de la flore sauvages dans chaque sous-région sont sommairement présentés ci-après par principales zones agro-écologiques forestières:

20. Dans nombre de pays et de communautés en Afrique, la pêche en mer continue d'être l'une des principales sources de nourriture, d'emplois et de revenus. Les protéines de poisson sont essentielles dans l'alimentation des pays à forte densité de population où le total des apports protéiques peut être insuffisant. Les ressources sous-exploitées, ou modérément exploitées, ne cessent de diminuer sous l'effet de la poussée de la demande. L'incidence de la pêche sur les écosystèmes, sur leur structure et sur leur fonction suscite de plus en plus d'inquiétude. De nos jours, les petits pêcheurs artisanaux sont confrontés à de graves problèmes qui limitent le développement de leurs activités. Au sein des écosystèmes marins de l'Afrique, ils partagent les caractéristiques suivantes: ils sont dispersés géographiquement le long des côtes et sont en grande partie tributaires des écosystèmes proches de chez eux;

21. Deux types d'obstacles s'opposent au développement de la pêche en mer:

22. Pour que le PDDAA puisse accroître la compétitivité des produits agricoles et attirer des investissements au profit de l'agriculture, des domaines d'action prioritaire applicables à l'ensemble des pays africains (ainsi que des actions sous-régionales spécifiques) ont été définis comme suit:

23. Les grands domaines d'intervention qui permettront d'alléger les contraintes liées à l'eau et à la terre pour l'agriculture et l'élevage sont brièvement décrits ci-après:

24. La foresterie, à elle seule, ne s'est pas réellement avérée efficace pour lutter contre la pauvreté. En revanche, elle pourrait être l'une des composantes d'efforts de production plus larges visant à éliminer la pauvreté et à assurer une stabilité environnementale. Il est vital de mettre un frein aux tendances actuelles qui épuisent et dégradent les ressources forestières, notamment en protégeant et en améliorant les bassins versants, en luttant contre la désertification, en prévenant la dégradation des terres et en conservant la diversité biologique. Il est également essentiel que les plans de développement économique portent une attention particulière à la richesse biologique des forêts humides en Afrique. Avec un développement et une promotion commerciale adaptés, les forêts pourraient générer plus de valeur par unité de surface grâce à des «marchés de niche» pour certaines variétés importantes. Il faut identifier et exploiter les possibilités économiques commerciales et locales que représentent les 'produits de niche' tout en veillant à ce que l'exploitation forestière à l'échelle industrielle et les mesures de régénération des forêts soient compatibles avec la protection de la biodiversité. L'exportation de produits forestiers, sous la forme de bois non transformé, peut aussi signifier une exportation des emplois, et donc de la prospérité future. Des recherches ultérieures devraient permettre:

25. Plusieurs moyens peuvent être envisagés pour développer la pêche en mer. Il faut surveiller de près les conséquences des mesures relatives à l'aménagement des pêches sur les résultats économiques des sous-industries de la pêche et analyser précisément les incidences des subventions, des incitations économiques ainsi que des politiques et des mesures fiscales. Il faut également concevoir et déployer des efforts spécifiques pour protéger le secteur de la pêche artisanale. Pour que ces efforts portent leurs fruits, il est indispensable d'associer davantage les communautés au développement de la pêche artisanale (depuis la planification jusqu'aux aspects financiers) et d'améliorer les technologies de manutention et de transformation. Enfin, la résolution des conflits entre flottilles industrielles et artisanales, la consolidation et le renforcement de l'efficacité des organisations régionales de gestion des pêches sont des objectifs importants.


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