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DEUXIEME PARTIE

La production et l'amélioration des cuirs et peaux


Chapitre 2: Elevage

De bonnes pratiques d'élevage sont essentielles pour garantir la qualité des produits tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Une analyse de ces pratiques a été effectuée dans quatre pays africains représentatifs, à savoir le Sénégal, le Soudan, la Tanzanie et le Zimbabwe, par Jabbar et al. (2002) et Leach (2002). Le présent chapitre examine les questions de politique générale, de développement et de commerce qui sont issues de ces études.

Questions relatives au développement

Pratiques d'élevage: En Tanzanie, au Soudan et au Sénégal, la plupart des animaux proviennent de races locales élevées par des bergers nomades et semi-nomades qui appliquent des systèmes pastoraux, un faible pourcentage étant élevé par de petits exploitants pratiquant des systèmes mixtes agriculture-élevage. Le Zimbabwe seulement possède un vigoureux secteur commercial qui se spécialise en bétail exotique de haute qualité, parallèlement à un secteur communautaire de petits exploitants qui élèvent du bétail local et de petits ruminants. De ce fait, mis à part ce secteur commercial au Zimbabwe, la qualité des cuirs et des peaux des animaux de ces pays est généralement faible en raison de la mauvaise nutrition, de la mise à la réforme des animaux à un âge avancé et des dommages causés par le marquage, les égratignures, les coups de corne et les morsures de tiques.

Des stratégies de développement de l'élevage à long terme seront nécessaires pour améliorer la nutrition et la gestion des maladies et pour promouvoir la sensibilisation aux avantages de la mise à la réforme des animaux à un âge optimal et aux graves dommages que cause le marquage à des parties précieuses du cuir. Le marquage est normalement pratiqué pour établir l'identité ethnique et pour protéger les animaux contre le vol. Un programme de vulgarisation d'une grande envergure pourrait être nécessaire pour convaincre les agriculteurs à abandonner cette pratique ou à marquer des parties moins intéressantes de la peau comme les oreilles.

Les défauts présents sur les cuirs et peaux bruts sont importants aux fins de la commercialisation intérieure aussi bien que de l'exportation car ils subsistent durant toutes les opérations de tannage, et influencent donc négativement la production et la commercialisation des matériels semi-transformés.

Compétence et main-d'oeuvre: Dans de nombreux pays, la main-d'oeuvre disponible est insuffisante tant au plan de la quantité que de la qualité. Une croissance persistante à long terme du secteur du cuir imposera la formation de personnel spécialisé en matière d'élevage et de gestion du bétail, et pour une meilleure compréhension de l'influence de ces activités sur la qualité des cuirs et peaux. Une formation sera également nécessaire à d'autres stades de la chaîne d'approvisionnement. La plupart des pays ont établi des centres de formation dont certain enseignent quelques simples techniques, alors que d'autres ont adopté une approche intégrée couvrant les différents stades de la chaîne du cuir y compris l'élevage.

Cependant, en Afrique subsaharienne, seuls quelques pays comme l'Ethiopie et le Zimbabwe ont des troupeaux suffisamment nombreux et une industrie assez intégrée des cuirs et des peaux pour assurer l'économie d'échelle qui permettrait aux centres de formation d'opérer correctement. Dans la plupart des autres pays, les centres existants sont largement sous-utilisés ou ne le sont pas du tout. Le COMESA gère un institut de formation régional à Addis-Abeba qui pourrait fournir une assistance et un soutien aux instituts nationaux d'autres pays.

Questions commerciales

Libéralisation des marchés: Avec la libéralisation des marchés et l'élimination des restrictions sur les opérations de change qui en sont la conséquence, le commerce des cuirs et peaux est devenu un pourvoyeur de devises. Les commerçants se sont aperçus de la valeur des cuirs et peaux en tant que produits. Un climat compétitif s'instaure à mesure que sont exportés des produits de qualité plus élevée qui concurrenceront les marchés mondiaux. Il est important que les avantages de ces efforts remontent la filière jusqu'aux agriculteurs pour qu'ils soient incités à améliorer la qualité de leurs cuirs et peaux.

Menace à la valeur ajoutée locale: Toutefois, la suppression des contrôles sur les opérations de change, parallèlement à un certain nombre d'autres facteurs liés au marché, a encouragé les entreprises à commercialiser plutôt qu'à fabriquer, à exporter des cuirs et peaux bruts plutôt qu'à les transformer pour les valoriser. Parmi d'autres facteurs qui menacent la valeur ajoutée locale figurent les suivants:

Mesures de protection: Face à cette menace à la valeur ajoutée locale, le Soudan et la Tanzanie ont frappé d'un droit de douane de 15 et 2% respectivement les exportations de cuirs bruts, afin de promouvoir la transformation locale du cuir, alors que l'Ethiopie a interdit totalement l'exportation de cuirs et peaux bruts. D'autres pays africains suivent actuellement cette tendance.

Répercussions sur la chaîne d'approvisionnement du cuir: Ce statut de produit récemment acquis par les cuirs et peaux (alors qu'ils étaient considérés jadis comme un sous-produit de l'industrie de la viande) a exercé son impact sur tous les stades de la chaîne. Les tanneries et les industries productrices de cuir doivent concurrencer maintenant les exportations de cuirs et peaux bruts. Ce fait non seulement exige une gestion plus efficace des composantes de la chaîne du cuir, mais aussi la disponibilité accrue de capital à des taux d'intérêt inférieurs pour réaliser des investissements comme fonds de roulement. Cependant, les taux d'intérêt des banques locales restent élevés, 20% étant le taux normal, chiffre qui décourage l'investissement et freine le développement ultérieur.

Questions de politique générale

Interdictions et droits frappant les exportations: L'imposition ou non d'interdictions ou de droits sur l'exportation des cuirs et peaux bruts peut être déterminée par des facteurs tels que la taille et la structure de l'industrie des cuirs et peaux et du rythme de la libéralisation de l'économie, et elle est souvent décidée pour répondre aux demandes du secteur de la transformation.

Les avantages que peut apporter l'imposition d'un droit à l'exportation dépend en partie de la manière dont le secteur de la transformation réagit et se comporte. Par ailleurs, un droit à l'exportation des cuirs bruts pourrait être anti-économique, et protéger des transformateurs inefficaces, contractant le marché au point où les cuirs et peaux transformés sont ceux qui ne peuvent être vendus bruts. L'exportation de produits transformés pourrait être réduite ultérieurement si les pays importateurs frappent ces importations d'impôts, les rendant par là même moins compétitifs. La surveillance des effets des interdictions ou des droits frappant les exportations permettra d'introduire les modifications nécessaires dans les mesures appliquées.

Système d'achat des cuirs et peaux: Le marché international paie pour avoir des cuirs et peaux de meilleure qualité, mais on ne note guère de signes prouvant que les pays africains, lorsqu'ils fabriquent des produits de meilleure qualité, bénéficient de prix plus élevés sur le marché mondial. Même lorsqu'ils en profitent, les avantages supplémentaires ne sont pas transmis le long de la chaîne jusqu'aux éleveurs ou aux personnes participant directement à la manutention des cuirs et peaux. Si les agriculteurs, les bouchers, les collecteurs et les responsables de la manutention des cuirs et peaux ne tirent pas des avantages économiques de leurs activités, on ne peut guère s'attendre qu'ils déploient des efforts pour améliorer la qualité. Le goulet d'étranglement dans ce processus de transmission des avantages de prix plus attractifs paraît être la structure et les mécanismes fonctionnels des systèmes nationaux et internationaux de commercialisation des cuirs et peaux.

Politiques d'investissement et macroéconomiques: Il existe des variations considérables entre les politiques d'investissement et macroéconomiques des pays africains. Dans la plupart des pays, l'agriculture est la base de l'économie, les politiques d'investissement et macroéconomiques étant fondées principalement sur les ressources animales ou végétales. Bien qu'il n'y ait aucun type particulier de promotion de l'investissement pour le secteur du cuir en soi dans les quatre pays objet de l'étude (Jabbar et al. 2002), ce secteur a été généralement identifié comme un secteur prioritaire pour le développement industriel dans la plupart des pays producteurs de cuir africain. C'est un secteur fondé sur les ressources, qui crée des emplois et contribue à la valeur de fabrication ajoutée.

Recommandations

1. Evaluer l'impact de la race et de la nutrition sur la qualité des cuirs et peaux. Les chercheurs devraient porter davantage d'attention à l'évaluation de la quantité, de la qualité et de la valeur des cuirs et peaux, même s'il s'agit de coproduits de la viande et du lait. Dans de nombreux cas, la valeur du cuir ou de la peau peut représenter un important pourcentage de la valeur totale de l'animal. Ces données de la recherche encourageront les agents de vulgarisation à insister pour que les éleveurs prennent davantage soin du cuir et de la peau comme coproduits de valeur.[17]

2. Estimer l'impact des maladies endémiques causant le plus de dommages et mettre au point des mesures de prévention pour éviter des dégâts aux cuirs et peaux.[18] La prédominance de certaines maladies endémiques, comme l'edek des moutons en Ethiopie, compromet la qualité des cuirs et peaux et entraîne des pertes économiques notables. Une analyse épidémiologique et économique détaillée de ces graves maladies devra être entreprise dans certains pays, et il faudra mettre au point et tester des méthodes de prévention appropriées. Les services de vulgarisation vétérinaires fournis aux éleveurs de bétail devraient être améliorés. L'appendice 3 présente un surcroît d'informations sur les problèmes que créent ces maladies, sur leurs causes et sur les solutions éventuelles

3. Promouvoir des programmes parmi les communautés d'éleveurs pour améliorer l'alimentation du bétail, accroître la qualité des pâturages et sensibiliser les éleveurs à l'importance et à la valeur des cuirs et peaux.

4. Promouvoir la production commerciale d'aliments pour animaux.

5. Faciliter l'accès au micro-financement pour les micro-entreprises participant au commerce des cuirs et peaux.

6. Promouvoir une approche mieux orientée vers le marché de l'élevage parmi les producteurs de bétail.

7. Effectuer une analyse détaillée de la structure et de la performance du système de commercialisation des cuirs et peaux aux niveaux national et international, et formuler une stratégie visant à fournir des incitations pour une production axée sur le marché. Le système actuel n'offre pas d'incitations liées aux prix aux agriculteurs ou à d'autres pour améliorer les pratiques d'élevage et de manutention. Les mesures suivantes sont recommandées:

a. L'analyse devrait être réalisée dans le cadre des politiques de mondialisation et de libéralisation économique des gouvernements nationaux, et devrait évaluer dans quelle mesure les processus de mondialisation et de libéralisation influencent la structure et la performance des secteurs de la production et de la commercialisation des cuirs et peaux.

b. Des organisations comme le COMESA et la CEDEAO devraient demander à l'OMC d'entreprendre une analyse sur la manière d'harmoniser différentes politiques macroéconomiques, comme celles relatives aux taxes, aux tarifs, aux subventions et au commerce, et sur l'effet potentiel de l'harmonisation sur le développement du secteur et sur le commerce des cuirs et peaux.

c. Il faudrait préparer des projets pilotes incorporant les conclusions des analyses proposées pour tester et évaluer différentes solutions visant à surmonter les goulets d'étranglement dans l'industrie, à réduire les différences entre les politiques nationales et à promouvoir le développement du commerce général et intrarégional.

8. Développer la main-d'oeuvre spécialisée. Les instituts de formation nationaux, là où ils existent, exigeront un niveau élevé d'investissement public, faute d'une économie d'échelle.[19] Pour combler cette lacune et pour d'autres stades de la chaîne, on pourrait renforcer les capacités de planification et d'intégration régionale des institutions existantes, comme l'Institut du cuir et des articles en cuir (LLPI) dont le siège est à Addis-Abeba et géré par le COMESA pour l'Afrique orientale. Cette question sera mieux approfondie plus loin dans ce Plan. La situation en Afrique occidentale est différente. L'Institut nigérien de Zaria, bien qu'apparemment moins performant qu'il ne pourrait l'être à l'heure actuelle, rend des services importants. Les possibilités de revitaliser cet institut pour répondre aux besoins de la région par le biais de la CEDEAO devrait être envisagée sérieusement.

Des activités de recherche et développement (1. et 2.) concernant les effets de l'élevage sur la qualité des cuirs et peaux devraient être entreprises immédiatement. On peut s'attendre à ce qu'elles aient un impact positif sur la production et la qualité dans le moyen terme.

Chapitre 3: Gestion de l'abattoir

La mauvaise qualité des cuirs et peaux africains est un problème réel et non pas simplement une perception du marché. Le présent chapitre traite de questions techniques et de politique générale relatives à l'abattage des animaux et à leur impact sur la qualité des cuirs et peaux et du cuir préparé. Il se fonde principalement sur quatre études de cas réalisées pour la réunion du groupe d'experts (Jabbar et al, 2002). Les pays examinés dans les études de cas, à savoir le Sénégal, le Soudan, la Tanzanie et le Zimbabwe, sont représentatifs de nombreux pays producteurs de cuir du continent. Les commentaires et les recommandations peuvent être considérés, dès lors, comme applicables au plan général.

Questions techniques

Les abattoirs dans les quatre pays visés, comme ailleurs en Afrique, consistent généralement en dalles d'abattage dans les zones rurales et urbaines, abattoirs mécanisés, normalement dans les centres urbains, et autres lieux non spécifiés utilisés par les exploitations et les ménages. Le type d'installation et le type d'élevage pratiqué déterminent largement la qualité des cuirs et peaux produits.

Abattage rural: La majeure partie de l'abattage rural se réalise dans des conditions très défavorables. Les chèvres et les moutons sont abattus principalement sur des dalles dans des exploitations dispersées, alors que dans de nombreux pays le bétail est abattu en des lieux mal équipés situés généralement à proximité de bouchers dans les centres commerciaux, où l'infrastructure consiste parfois en dalles de béton placées sous un arbre, ou en poteaux servant à hisser les carcasses.

L'abattage n'est pas toujours supervisé correctement. Les outils sont rudimentaires et causent des dommages aux cuirs et peaux. Dans de nombreux cas, l'eau courante est absente et les cuirs et peaux ne sont pas lavés. Les mécanismes de soulèvement des carcasses sont souvent indisponibles et toutes les opérations sont entreprises à même le sol. Cependant, la situation générale varie largement d'un pays à un autre et dépend de la capacité et de la disponibilité de services de vulgarisation vétérinaires, ainsi que de la législation, si elle existe, régissant les opérations.

Les augmentations subites d'abattages lors d'événements culturels ou religieux, en particulier de petits animaux dans les exploitations familiales, et l'absence de techniques de conservation et de débouchés commerciaux pour l'écoulement de quantités beaucoup plus grandes que la normale de cuirs et peaux bruts en ces moments-là, déterminent une réduction de la récupération et une baisse de qualité. Les bouchers obtiennent normalement de faibles prix pour les cuirs et les peaux et font, dès lors, moins d'efforts, ou n'en font pas du tout, pour en maintenir la qualité.

Abattoirs mécanisés: Sur les quatre pays objet des études de cas, le Zimbabwe est le seul à posséder des abattoirs mécanisés et des usines de transformation de la viande d'un haut niveau. Ils visent à exporter la viande en Europe et dans d'autres pays développés. Ces abattoirs ont, jusqu'à tout récemment, fourni environ 90% des cuirs du Zimbabwe et ont reçu des animaux venant de fermes commerciales ayant une taux élevé d'exploitation. La réaffectation récente des terres et les bouleversements qui l'ont accompagnée ont accru initialement les quantités d'animaux à abattre et augmenté ainsi la disponibilités de cuirs, mais la situation s'est équilibrée et on s'attend à des disponibilités réduites dans le secteur commercial dans le court et moyen termes.

Au Soudan, la plupart des cuirs et peaux viennent aussi des abattoirs. A Dakar, le pourcentage est de 45% et en Tanzanie il est inférieur à 10%. Certains des abattoirs dans les quatre pays sont des construction de vieille date mais, bien que l'entretien soit généralement inadéquat, ils assurent quand même un abattage hygiénique et sont équipés de salles de réfrigération.

Les abattoirs dans tous les quatre pays sont normalement situés dans les villes où le haut niveau de consommation de viande et les exigences d'hygiène vétérinaire imposent la concentration de l'abattage dans des abattoirs centralisés. Au Zimbabwe, l'emplacement de ces installations est partiellement dicté par la répartition des fermes commerciales, qui sont la principale source de bétail abattu. Les municipalités ou les gouvernements détiennent la plupart des abattoirs, mais la participation privée à leur propriété s'accroît dans tous les quatre pays, bien qu'il n'ait pas été possible d'en établir la mesure.

La méthode utilisée pour récupérer les peaux dans les abattoirs consiste souvent dans l'arrachage au lieu de l'écorchement à l'aide d'un couteau qui est pratiqué dans les autres pays. Au Sénégal les deux méthodes sont appliquées: l'arrachage et l'écorchement à l'aide de couteaux et de machines dans les abattoirs. Les différentes méthodes influencent directement la qualité des peaux brutes obtenues. Il y a moins de coupures avec l'arrachage car les peaux sont simplement enlevées de la carcasse. Ces peaux obtiennent un prix plus élevé. Cependant, cette méthode ne peut être appliquée aux bovins en raison de leur taille. Ils doivent être écorchés avec des couteaux.

Abattoirs non réglementés: Malheureusement, le coût élevé de la gestion de ces grandes installations a fait qu'au fil des ans l'abattage est passé à de petits abattoirs non réglementés. Le nombre de ces abattoirs va en s'accroissant, notamment en Tanzanie, au Zimbabwe et au Sénégal, en raison de la faiblesse de la législation et des capacités limitées de surveillance disponibles dans de nombreuses villes. Dans la plupart des cas, de mauvaises techniques d'écorchement, le manque de compétence et l'absence d'arracheurs de peaux dans ces abattoirs favorisent la production de cuirs et peaux de faible qualité. La manutention des matières premières après l'abattage accentue le problème de la qualité.

Facteurs influençant la qualité des cuirs et peaux: Le tableau 3.1 montre l'importance relative des différents facteurs qui influencent la qualité des cuirs et peaux. Les défauts apparaissant après l'abattage sont estimés être aussi graves que ceux causés dans l'abattoir. Une meilleure gestion, plus de compétences et des informations sur de meilleures pratiques permettraient d'éviter ces défauts.

Tableau 3.1 Importance relative des différents facteurs influençant la qualité des cuirs et peaux dans les quatre pays objet de l'étude de cas

Pays et produit

Degré d'importance du problème par principale catégorie

Défauts dus aux pratiques d'élevage, marquage par exemple

Défauts dus aux pratiques d'abattage, coupures durant l'écorchement, par exemple

Défauts postérieurs à l'abattage, putréfaction, par exemple

Tanzanie

Cuirs

****

****

****

Peaux

*

****

****

Soudan

Cuirs

****

****

****

Peaux

**

**

**

Sénégal

Cuirs

****

****

****

Peaux

S/o

***

***

Zimbabwe

Cuirs

*

*

*

Peaux

*

*

*

Note: **** très élevé, *** élevé, ** modéré, * faible, s/o - information non disponible Source: Jabbar et al.

Questions de politique générale

Un programme intégré en Tanzanie présenté au tableau 3.2, qui avait été préparé mais non encore exécuté, montre les efforts multiples qu'un pays riche en ressources animales, qui reconnaît le caractère intégré des problèmes qui influencent son secteur du cuir, peut déployer pour améliorer la compétitivité tout au long de la chaîne d'approvisionnement, et pour participer à des conditions acceptable à la chaîne mondiale. Le programme a été conçu au début de 2002 par une équipe de travail multiorganisations formée de différentes parties intéressées pour revitaliser toute la chaîne d'approvisionnement du cuir. Son objectif principal était de faire la liste de tous les problèmes inhérents à la chaîne, d'identifier les relations cause-effet à chaque stade, et de recommander la prise de mesures concrètes afin d'éliminer les causes, améliorant ainsi l'ensemble la chaîne d'approvisionnement. Il met en évidence la nature complexe d'une telle revitalisation.

La troisième colonne du tableau 3.2 donne la liste des mesures à prendre. La plupart influenceront directement ou indirectement la qualité des cuirs et peaux et la capacité de tannage du secteur. Ensemble, ces mesures représentent un programme intégré de développement dont la mise en oeuvre exige la coordination des intervenants dans la chaîne d'approvisionnement du cuir, la coopération des secteurs public et privé, la fourniture d'une assistance technique internationale et la négociation d'accords commerciaux bilatéraux.

C'est un exemple du type de programme intégré auquel, on l'espère, le présent Plan mènera. C'est également l'exemple d'un programme de développement intégré national visant l'amélioration de la chaîne d'approvisionnement. Il est inclus dans ce chapitre car la qualité des cuirs et peaux est le premier élément à améliorer suivant le programme.

Recommandations

1. Dispenser une formation à un large éventail d'individus en zone urbaine et rurale en matière d'abattage et d'écorchement, de techniques de conservation et de classement et de normes. Les programmes de formation devront établir des liens entre les responsables des diverses sections de la chaîne moyennant des cours de formation des vulgarisateurs. Ils devront:

a. Traiter les différents stades et niveaux de technologie relatifs à la production de cuirs et peaux.

b. Dispenser une formation à la mise en oeuvre des normes qui ont été ou seront élaborées pour différentes catégories de cuirs et peaux.

c. Dispenser une formation à l'application du classement suivant les différents aspects de la qualité - en établissant les catégories en fonction des conditions d'abattage et des méthodes de récupération et de manutention des cuirs et peaux.

2. Introduire des changements dans les installations et les pratiques d'abattage:

a. Mettre en vigueur la législation visant à promouvoir l'abattage centralisé, notamment dans les centres urbains où se concentrent les activités d'abattage.

b. Promouvoir la gestion et l'utilisation améliorées des abattoirs existants.

c. Créer de nouveaux abattoirs dans les villes et les petites agglomérations.

d. Améliorer et perfectionner les installations et les outils d'abattage, y compris, dans la mesure du possible, l'établissement de machines servant à l'arrachage.

e. Les acheteurs (tanneurs et commerçants) devraient offrir aux producteurs des incitations liées aux prix pour améliorer la qualité des cuirs et peaux.

f. Les municipalités et les conseils qui gèrent les abattoirs devraient imposer des droits adaptés aux services rendus.

3. Mettre en oeuvre des programmes d'amélioration des cuirs et peaux, notamment pour perfectionner le système de classement aux points de d'approvisionnement, et appliquer une meilleure différenciation des prix. Ces programmes sont réalisés dans certains pays d'Afrique orientale et pourraient l'être aussi dans d'autres pays avec un programme et une portée élargis.[20]

4. Etablir un indice de qualité de l'abattoir pour tous les pays africains afin de différencier leur qualité.[21] Les commerçants qui vendent des cuirs et peaux bruts, les tanneurs et les industries internationales du cuir devraient appliquer cet indice au matériel sortant d'un abattoir particulier. Il devrait aussi encourager les abattoirs à se concurrencer au plan de la qualité.

5. Encourager et appuyer la formation d'organisations comme ESALIA dans d'autres régions d'Afrique pour entreprendre des tâches semblables. Les associations de producteurs, les gouvernements nationaux et les organisations internationales devraient, après une évaluation attentive des avantages et coûts potentiels à long terme, appuyer un tel investissement par des projets d'assistance technique.

6. Diminuer les pertes au niveau des abattoirs. En l'absence de solutions évidentes, il semble que diverses mesures devraient être prises: évaluer l'envergure des pertes; analyser les facteurs inhérents aux opérations complexes de récupération et de manutention de très grandes quantités de cuirs et peaux qui sont produits en un temps limité, et établir des programmes concertés pour réduire les pertes.

7. Eliminer les défauts:

a. Les mesures conçues pour atténuer ou éliminer les défauts sur les cuirs et peaux devraient s'adresser à deux groupes: les individus qui causent les défauts et les organisations qui pourraient les influencer. Ces organisations comprennent, pour le stade préalable à l'abattage, les associations d'agriculteurs, les écoles agricoles, les associations de commerçants et vétérinaires et, pour les stades durant et après l'abattage, des associations de commerçants en bétail, des conseils urbains et municipaux, les responsables de la santé publique, et les associations de transformateurs de la viande et de tanneurs.

b. Les détails des actions correctives qui devront être entreprises pour éliminer ou réduire les défauts dépendront des conditions du pays en jeu et de l'objectif et de la portée du programme. Une solution à grande échelle consisterait dans le lancement d'une campagne d'initiatives sur l'ensemble du territoire et à long terme qui toucherait tous les stades de la chaîne d'approvisionnement du cuir. Une autre solution à échelle réduite pourrait consister à traiter un seul aspect, comme les dommages causés aux cuirs et peaux par les maladies de la peau (voir l'appendice 2). Dans les deux cas, il est important de définir clairement les objectifs et d'établir fermement les procédures de suivi et de contrôle.

c. En théorie, indépendamment de l'envergure des interventions, il conviendrait d'adopter une perspective à long terme en vue de maintenir les améliorations réalisées. Les matières premières d'origine africaine ont depuis longtemps la réputation d'avoir des défauts et il faudra beaucoup de temps et des efforts persistants pour la changer.[22]

Tableau 3.2 Programme intégré visant à revitaliser le secteur du cuir en Tanzanie: le plan d'action recommandé par une équipe de travail locale.

Problème

Causes

Mesures à prendre (éléments du programme)

Ressources nécessaires

Calendrier

1. Mauvaise qualité des cuirs et peaux.

Mauvaises pratiques d'élevage et maladies.
Marquage inadapté.
Manque d'abattoirs et d'outils appropriés.
Mauvaises pratiques et faibles compétences en matière d'abattage
Mauvaises techniques d'entreposage et de conservation.

Améliorer les services de vulgarisation et la lutte contre les maladies.
Améliorer les services de vulgarisation et la mise en vigueur de la loi.
Améliorer les abattoirs conformément à la loi.
Promouvoir/améliorer les abattoirs.
Imposer une taxe à l'exportation pour l'établissement d'un fonds de développement du cuir.

Personnel
Crédits
Outils

Court terme
Long terme


Manque de connaissances et de compétences en matière de classement.
Loi relative aux cuirs et peaux surannée.

Assurer la création de capacités et la formation.
Assurer l'éducation et la mise en vigueur de la loi appropriée.
Réviser les lois existantes.



2. Faible capacité d'utilisation des tanneries.

Techniques obsolètes et usure du matériel.
Tarifs élevés frappant les intrants importés
Manque d'investisseurs engagés.

Fournir une assistance technique et réadapter les fabriques.
Réviser les tarifs sur les intrants importés.
Passer soigneusement en revue les investisseurs et analyser leurs conditions.
Imposer une taxe à l'exportation pour l'établissement d'un fonds de développement du cuir.

Personnel
Crédits
Equipement et outils

Court terme
Moyen terme
Long terme


Manque de fonds de roulement.

Sensibiliser les gens à l'usage des prêts bancaires disponibles, par exemple le crédit à l'exportation.




Manque de cuirs de bonne qualité.

Introduire des plans, des fonds de contrats de marchandises, etc. comme au point 1) ci-dessus.




Manque de compétences industrielles.

Se procurer des crédits à investir dans le secteur du cuir et encourager le processus d'industrialisation (ONUDI).




Manque d'incitations.

Etablir un fonds de développement du cuir.



3. Manque de capital.

Coût élevé du financement.
Manque de connaissances en matière de gestion des financements.

Fournir des incitations pour attirer les investisseurs adaptés.
Sensibiliser la communauté à la gestion du financement (formation).
Encourager les partenariats.

Personnel technique
Crédits

Court terme
Moyen terme
Long terme

4. Concurrence entre les produits locaux et les produits importés.

Libéralisation du commerce.
Faible qualité du cuir fini
Faible capacité d'utilisation des tanneries.

Réviser les tarifs pour les articles en cuir importés.
Fournir des incitations aux producteurs locaux comme pour le problème (2).
Etablir des usines de teinture du cuir.

Personnel
Crédits

Court terme
Moyen terme
Long Terme

5. Faiblesse de la LAT.

Leadership inefficace
Manque de ressources financières
Manque de membres engagés.

Réviser la constitution de la LAT, effectuer de nouvelles élections.
Améliorer les ressources financières.
Entreprendre un programme de sensibilisation à l'intention de la LAT.
Etablir un fonds de développement du cuir.

Personnel
Crédits
Outils

Court terme
Moyen terme

6. Absence de personnel technique.

Mauvais fonctionnement du TILT.

Manque de crédits.

Revitaliser le TILT pour la valorisation des ressources humaines.
Le TILT comme centre de production et de formation.
Mettre en oeuvre le rapport Kiruthi/Calabro.
Mobiliser des crédits pour la valorisation des ressources humaines.

Personnel
Crédits
Equipement

Moyen terme
Long terme

7. Manque de coordination dans la formulation des politiques.

Divers ministères participant à ce secteur.

Etablir un mécanisme de coordination.
Encourager la participation des parties prenantes.

Réunions

Long terme

(LAT: Leather Association of Tanzania, TILT: Tanzanian Institute for Leather Technology)


[16] Des prix plus élevés que ceux que les tanneurs locaux de Tanzanie, par exemple, peuvent payer.
[17] Aux Etats-Unis, un prix est donné pour le cuir qui est distinct du prix de la viande. Les agriculteurs qui vendent sur ce marché connaissent le prix du cuir et peuvent choisir le commerçant qui achetera le leur.
[18] L'appendice 1 contient des informations à ce sujet.
[19] Les capacités nationales d’absorption de la main-d’oeuvre spécialisée sont limitées.
[20] ESALIA, par exemple, a élaboré deux projets parrainés par le Fonds commun qui pourraient servir de modèle à d'autre pays. Un projet pilote dans des pays choisis sur l'utilisation correcte de plusieurs techniques apparentées, comme la formation en matière de classement, accompagnées d'un manuel de classement (produit dans le cadre du Programme sur le cuir de l'ONUDI), de meilleures méthodes d'écorchement renforcées par la fourniture de meilleurs outils, et la délivrance de certificats de qualité aux abattoirs sur la base d'un indice de performance. Un projet de plus vaste envergure fondé sur les mêmes principes et outils aide la Tanzanie, l'Ethiopie, le Kenya et la Zambie à améliorer leurs systèmes de classement des cuirs et peaux et de tarification en collaboration avec les associations nationales du cuir.
[21] Mis au point par ESALIA. Cette organisation a également élaboré un jeu de normes de classement fondé sur les directives ONUDI/FAO et produit une estampille de certification de la qualité qu'elle a enregistrée et qui servira d'outil de commercialisation pour les tanneurs qui se conforment aux directives de classement pour la différenciation des cuirs et peaux en fonction de la qualité.
[22] L’appendice 3 (Leach 2002) classe certains des défauts qui se manifestent tout au long de la chaîne d’abattage.

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