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CHAPITRE 6
POLITIQUES DE GESTION DE L'EAU EN AGRICULTURE1 (Cont.)

6.5.4 Systèmes de tarification de L'irrigation

La mesure dans laquelle la tarification de L'irrigation atteindra les objectifs énumérés ci-dessus, en particulier i) à iii), dépend non seulement du prix, mais aussi, dans une certaine mesure, de la nature du système de tarification utilisé. Yacov Tsur et Ariel Dinar décrivent huit méthodes de tarification de l'eau d'irrigation: au volume, selon le produit, selon les intrants, à la superficie, à échelons, à deux composantes, d'après les gains de capital, et par un marché de l'eau96. La tarification au volume s'applique par unité d'eau utilisée, la tarification selon le produit s'applique à L'unité de produit agricole obtenu, la tarification selon les intrants s'applique par unité d'intrant complémentaire tel que l'engrais, par exemple, et la tarification à la superficie s'applique par hectare irrigué. La tarification à échelons est une tarification au volume dont le taux augmente au-dessus d'un seuil de volume. Les tarifs à deux composantes facturent au volume, en plus de frais fixes d'accès à L'irrigation.

Certaines méthodes sont des variantes d'une autre. Par exemple, la tarification à échelons et celle à deux composantes sont des sortes de tarification au volume. Il existe également d'autres variantes. En Inde, la tarification à la superficie diffère parfois selon les cultures, les saisons, ou la méthode d'irrigation (crue, billons ou sillons) et les redevances sont dues, que l'eau soit utilisée ou non97.

Au début des années 1970 et à nouveau en 1980, la Commission internationale des irrigations et du drainage (CIID) a mené une enquête internationale par questionnaire sur l'usage de l'eau d'irrigation et les pratiques de tarification. La zone échantillon couvrait 8,9 millions d'hectares, avec des conditions représentatives de 12,2 millions d'hectares. Ce dernier chiffre équivaut à environ 5% du total de la superficie irriguée mondiale. M. G. Bos et W. Wolters ont analysé ces données et trouvé que la tarification à la superficie, la méthode la plus facile à gérer, était utilisée dans plus de 60% des projets de l'échantillon. La tarification au volume était utilisée dans 25% des projets, et les autres combinaient en général tarification à la superficie et au volume.98

Tsur et Dinar ont effectué l'analyse conceptuelle des systèmes de tarification en présence, sous l'angle de l'efficacité économique. Ils font l'hypothèse que l'efficacité est atteinte lorsque le prix de l'eau est égal au coût marginal de sa fourniture, en dépit du rappel de Sampath (cité plus haut) que, compte tenu des conditions réelles des réseaux d'irrigation, la théorie générale de l'optimum de second rang montre que cette condition ne garantit pas l'efficacité économique. Ils concluent que la tarification au volume est la plus efficace si elle ne coûte rien à mettre en œuvre, mais que si son coût (principalement, les frais de collecte d'informations sur la consommation) atteint ou dépasse 10% du produit de la vente de l'eau, la tarification à la superficie devient préférable99. Ils soulignent que les marchés de l'eau peuvent être efficaces au sens où ils l'entendent, surtout parce que le coût du recueil des informations est internalisé par les utilisateurs, et à condition que le coût des institutions et des infrastructures physiques nécessaires à ces marchés ait déjà été encouru.

Dans une autre étude théorique, Rhodes et Sampath ont également établi que la tarification au volume est plus efficace que la tarification à la superficie, laquelle vaut toujours mieux que de lier le prix de l'eau à des conditions indirectes telles que le produit des cultures ou la consommation d'intrants complémentaires100.

Bos et Wolters n'ont pas constaté de relation empirique entre le type de tarification de L'irrigation et l'efficacité, probablement parce que, dans l'ensemble de l'échantillon, les montants facturés étaient faibles par rapport au revenu net des exploitations. Ils ont cependant découvert que l'augmentation des redevances s'accompagnait d'une amélioration de l'efficacité, quel que soit le type de tarification. En particulier, C'est sur l'efficacité des unités tertiaires que les redevances d'eau ont leur influence la plus forte, et ceci non pas tant par un effet sur le comportement de l'agriculteur, que comme conséquence de l'augmentation des moyens financiers consacrés à l'exploitation et à l'entretien des unités tertiaires, grâce à la hausse de la redevance101.

La FAO estime que la raréfaction croissante de l'eau va entraîner une généralisation des programmes de tarification au volume, parce qu'ils incitent à économiser l'eau, contrairement à la tarification à la surface. Elle recommande également d'envisager la tarification à deux composantes, constituée d'une redevance fixe correspondant au recouvrement des dépenses d'investissement et d'une redevance variable (proche du coût marginal à court terme de la fourniture de l'eau) appliquée aux volumes d'eau utilisés; et elle considère que le marché des droits d'eau constitue l'approche la plus appropriée102.

Mettre en place une tarification au volume ne présente pas de difficultés si la conception technique du système s'y prête. Au Maroc et en Tunisie, l'eau est distribuée aux petits agriculteurs selon leur demande, sous un système de tarif volumétrique. Il a fallu pour ce faire des ouvrages fiables de fonctionnement facile, ainsi que des programmes de remembrement des petites exploitations fragmentées103.

L'administration des redevances volumétriques peut être considérablement simplifiée par la procédure de vente d'eau en vrac à des groupes d'agriculteurs, en quantités et à des moments convenus à l'avance. Les agriculteurs sont responsables de la répartition entre eux et de la collecte des montants requis pour payer les livraisons. En général, ce type de groupes réunit les irrigants d'une commande tertiaire du périmètre. Le projet d'irrigation de Majalgaon dans l'état du Maharashtra en Inde constitue un exemple de cette pratique:

Dans le cadre du nouveau concept, l'eau sera vendue en vrac aux associations d'utilisateurs, dont chacune dessert environ 300 à 400 ha. Les AUE auront des quotas annuels et seront responsables de la distribution de l'eau et de l'entretien des canaux et rigoles. Elles passeront commande du volume d'eau requis pour chaque tour d'irrigation. La répartition interne de l'eau se fera principalement par rotation et sera proportionnelle à la superficie de l'exploitation, mais D'autres dispositions, telles que l'achat et la vente d'eau, seront possibles104.
D'autres exemples allant dans le même sens ont été cités:
… la vente d'eau en gros au volume par les agences de l'eau aux AUE, qui collectent les redevances auprès de leur membres (dont une partie va au fonctionnement de l'organisation) s'est montrée prometteuse dans des projets pilotes, tels que Mohini et Mula en Inde… 105

Les redevances à l'hectare sont critiquées, car elles n'incitent pas à limiter la consommation d'eau en proportion de la dépense consentie. Elles sont toutefois simples à administrer, et assurent aux fournisseurs des recettes adéquates. Le coût élevé de l'installation et du relevé de compteurs semble expliquer au premier chef que l'on s'en tienne souvent au système du tarif par hectare. L'argument convainc lorsque l'eau est abondante, les coûts de distribution faibles, et lorsque l'on peut douter des effets dissuasifs de l'application d'une tarification au volume. Mais dans les autres cas, les gestionnaires se mettent à pratiquer une tarification volumétrique pour répondre au problème de rareté de l'eau, et au coût élevé de la mobilisation de nouvelles ressources hydriques. (FAO, 1993, p. 272).

A la lumière de ces expériences, il paraît probable que l'orientation future des prix de L'irrigation se caractérisera par une augmentation des redevances, une tarification au volume, la vente en vrac à des AUE et, pour un nombre faible mais croissant de systèmes, par des marchés de l'eau. Le changement des pratiques de tarification sera peut-être lent, mais on peut s'attendre à ce qu'il s'accélère dans les régions où l'eau se raréfie.

La prévision d'une croissance des prix (réels) de l'irrigation reste sujette à quatre conditions importantes. Tout d'abord, quel que soit le système de tarification de l'eau, il ne faut jamais oublier que la fourniture fiable de l'eau est une condition sine qua non de l'augmentation de son prix. Si la conception et/ou la gestion existantes d'un système ne garantissent pas cette fiabilité, il faudra les modifier avant d'augmenter les prix de L'irrigation.

On a déjà mentionné cette importance du facteur fiabilité, mais elle est telle qu'en son absence les agriculteurs peuvent même renâcler à se consacrer aux tâches d'exploitation et d'entretien:

… l'exécution des tâches d'exploitation et d'entretien par les agriculteurs en aval de la rigole tertiaire dépend fortement de la qualité de service que l'organisme d'irrigation fournit à la rigole, autrement dit de sa fiabilité à assurer les approvisionnements en eau qui leur ont été alloués… Un approvisionnement en eau irrégulier, signe du manque d'efficacité de l'organisme, sape la confiance des agriculteurs et affaiblit leur volonté de mener les activités d'exploitation et d'entretien106.

Gérer localement les revenus de la facturation de l'eau constitue quasiment toujours une condition sine qua non de l'amélioration de la fiabilité des approvisionnements en eau d'irrigation. L'un des principaux défauts des systèmes centralisés de gestion de L'irrigation est que les redevances sont déposées dans le Trésor National, tandis que le financement des activités d'exploitation et d'entretien demeure insuffisant.

C'est pourquoi toute stratégie de recouvrement des coûts, que ce soit par le prix de l'eau, ou par le travail contribué par les usagers, est inexorablement liée à la question de l'efficacité du système d'irrigation, en termes à la fois de gestion et de qualité de conception.

Deuxièmement, alors que, dans certaines circonstances, il est possible de fixer les prix administrés à un niveau suffisamment élevé pour atteindre L'objectif budgétaire de recouvrement des dépenses, il n'est pas réaliste de s'attendre à ce que ces prix puissent atteindre le niveau encore plus élevé du coût d'opportunité de l'eau. Les raisons de cette difficulté sont expliquées par Mateen Thobani:

En augmentant le prix de l'eau pour l'utilisateur afin de tenir compte de sa rareté réelle ou de son coût d'opportunité (C'est-à-dire le prix que l'utilisateur marginal est prêt à payer), les autorités espèrent inciter les utilisateurs à économiser l'eau, ce qui permettrait d'affecter les ressources à des usages à plus forte valeur… En théorie, si l'eau d'irrigation à proximité d'une ville pouvait être facturée au prix qu'une Compagnie des eaux serait prête à payer pour l'eau non traitée (avec ajustement pour les frais de transport), certains agriculteurs abandonneraient la culture et D'autres passeraient à une irrigation plus efficace ou pratiqueraient des cultures moins exigeantes en eau. La hausse des prix libérerait de l'eau qui pourrait être transférée à la Compagnie des eaux aux fins de traitement et de vente. Elle produirait aussi des ressources fiscales susceptibles de servir à améliorer les performances et l'entretien de l'infrastructure existante ou à investir dans une nouvelle infrastructure.
Cependant, de graves problèmes pratiques et politiques ont empêché les gouvernements de tarifer l'eau à son coût d'opportunité. Même si les pouvoirs publics trouvaient une méthode peu coûteuse de mesurer et de contrôler le débit de l'eau, la mesure de son coût d'opportunité demeurerait difficile parce qu'il varie en fonction du lieu, de la régularité, de la saison, de l'usage et de la qualité de l'eau…
Les problèmes politiques sont encore plus insurmontables. Il est politiquement difficile de facturer à un agriculteur l'eau d'une rivière qui dessert une ville (et qui présente donc un coût d'opportunité plus élevé) à un prix supérieur à celui appliqué à un agriculteur utilisant l'eau d'une rivière sans rapport avec la ville. De la même manière, il est difficile de facturer un tarif moindre à une profitable société hydroélectrique, qu'on ne le fait aux agriculteurs pauvres [bien que, probablement, la première renvoie la quasi totalité de l'eau à la rivière]. En général, de puissants groupes de pression d'agriculteurs contraignent les politiciens à maintenir les prix de l'eau très en dessous de leur coût d'opportunité.
Un autre problème soulevé par la tarification de l'eau d'irrigation à son coût d'opportunité est que le prix de la terre comprend déjà la valeur des droits d'eau. Dans les régions à faible pluviométrie, les terres irriguées pourront se vendre dix fois le prix de celles non irriguées, parce que leur propriétaire pourra compter sur la disponibilité d'eau à bas prix. Si le prix de l'eau augmente par la suite pour tenir compte de son coût d'opportunité, la valeur des terres irriguées rejoindra celle des terres non irriguées, ce qui se traduira par une perte effective en capital pour l'agriculteur. Bien que les actions gouvernementales modifient fréquemment la valeur des actifs privés, le simple ordre de grandeur de la perte en question, le nombre de personnes concernées et les aspects socialement perturbateurs (en termes de chômage agricole) d'une telle politique rendent très improbable qu'une tarification au coût d'opportunité puisse être introduite dans un délai raisonnable.
Un problème spécifique à la tarification de l'eau est celui des «écoulements restitués». Lorsqu'un agriculteur arrose ses cultures, les végétaux n'absorbent pas toute l'eau. Selon l'efficacité de L'irrigation, une proportion importante de l'eau - l'écoulement restitué – s'infiltre dans le sol. Cette eau peut pénétrer dans un aquifère souterrain et être pompée par un autre utilisateur ou elle peut même rejoindre la rivière et être dirigée vers un canal. Si l'eau était facturée au volume reçu plutôt qu'au volume véritablement consommé, les agriculteurs pratiquant une irrigation inefficace (et donc aidant sans le vouloir les utilisateurs aval) paieraient un prix trop élevé107.

En principe, on peut traiter le problème des écoulements restitués en facturant l'eau en fonction de sa consommation [nette] (voir la sous-section 6-5-6 ci-dessous), mais du fait des autres objections, il serait difficile, dans la plupart des cas, de fixer des prix administrés à des niveaux approchant les coûts d'opportunité. Seuls les marchés de l'eau permettent d'appliquer une telle politique. Le plafond pratique des prix administrés correspondra probablement au recouvrement des dépenses d'exploitation et d'entretien plus, dans certains cas, d'une partie des dépenses d'investissement. Cette conclusion confirme le bien-fondé de l'objectif de facturation de l'eau posé par Daniel Bromley, et mentionné plus haut, à savoir, améliorer la gestion de l'eau ou la gestion collective d'un bien public.

En troisième lieu, les considérations de genre peuvent freiner le relèvement des tarifs d'irrigation, parce que les femmes rurales ont généralement plus de difficultés que les hommes à faire face à des dépenses monétaires. C'est sous un autre aspect la préoccupation d'équité évoquée plus haut en matière de tarification de l'eau d'irrigation. Comme le disent Chancellor et al., en s'appuyant sur des expériences en Zambie, au Zimbabwe et en Afrique du Sud:

Malgré les avantages que l'on en attend, le climat actuel ‘l'usager doit payer’ risque d'accentuer la disparité entre irrigants hommes et femmes… il est difficile pour les femmes de s'assurer de l'argent et d'en garder le contrôle. Payer l'eau peut donc devenir un problème pour les femmes chefs de ménage, surtout quand elles le sont de facto et ont le moins de pouvoir sur l'argent de la famille. Un système qui les priverait de l'accès à l'eau les engagerait dans une spirale de destitution de leurs moyens d'existence108.

La quatrième condition à l'augmentation des prix de l'eau dans l'agriculture est que la politique des prix de L'irrigation doit également s'inscrire dans le contexte de la politique globale de prix du secteur, laquelle résulte principalement de la politique macroéconomique (voir le chapitre 4). Des mesures incitatives inadaptées en matière de prix à la production formeront un obstacle insurmontable à l'augmentation des prix de L'irrigation. Ce point était tellement flagrant dans les projets du Sud-est asiatique étudiés par Rice, qu'il a recommandé:

Renoncement au recouvrement des coûts. Les agriculteurs qui ont initialement accepté les conditions de ces programmes en sont maintenant fortement pénalisés, en raison de l'effondrement des prix internationaux et locaux du riz. Leurs pertes se manifestent dans des surplus du consommateur beaucoup plus importants que n'en produirait même le recouvrement intégral du capital et des coûts d'exploitation et d'entretien. Imposer le recouvrement des coûts à ces producteurs de paddy a plus de chance de les pousser à abandonner l'agriculture qu'à se diversifier…109

En bref, la politique de prix de L'irrigation, ainsi que les stratégies à long terme de développement de l'eau, doivent être élaborées dans un contexte holistique.

6.5.5 Marchés des droits d'eau: introduction

Les marchés des droits d'eau, ou régimes de droits d'eau cessibles, ont suscité un très grand intérêt ces dernières années dans la littérature consacrée à la gestion de l'eau et au développement économique, en dépit du fait que, jusqu'à très récemment, il n'existait de marchés formalisés des droits d'eau que dans très peu d'endroits, et principalement dans l'ouest des Etats-Unis d'Amérique110, en Espagne, au Brésil, en Australie, au Mexique et au Chili. Leur intérêt vient surtout du fait qu'ils sont potentiellement à même d'encourager l'utilisation efficace d'une ressource de plus en plus rare. La présente section examine la nature des marchés des droits d'eau, les problèmes qu'ils soulèvent, leurs avantages et les conditions minimum à leur adoption.

Quelques praticiens n'expriment cependant qu'un enthousiasme modéré pour les marchés des droits d'eau. Ainsi, de l'avis du Bureau régional de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord:

… les mécanismes de marché sont particulièrement problématiques concernant l'eau… Il ne fait aucun doute que des marchés de l'eau locaux fonctionnent souvent avec succès. Mais il est irréaliste d'attendre d'eux la réallocation générale entre les secteurs ou des améliorations de la qualité de l'eau, au moins dans un avenir prévisible… Par ailleurs, l'eau renouvelable est une ressource fugitive et variable, associée à toutes sortes d'externalités à divers niveaux. Elle est donc par nature difficile à gérer, s'intègre à des structures institutionnelles complexes et ne peut pas être répartie et réglementée uniquement - ou même de manière importante - par le marché. C'est pourquoi les gouvernements doivent inévitablement: (1) élaborer le cadre politique, législatif et réglementaire de la gestion de l'offre et de la demande d'eau et (2) assurer la fourniture de services d'eau, principalement en construisant les projets de grande envergure… dont les impératifs d'économies d'échelle ou les externalités sociales excluent l'offre privée111.

Les partisans des marchés des droits d'eau font valoir qu'ils existent, même sans sanction officielle, dans de nombreux endroits. Des exemples de vente informelle d'eau agricole au Bangladesh, au Yémen et au Tamil Nadu (Inde) ont déjà été mentionnés. On peut également citer d'autres expériences. Rosegrant et Binswanger font référence à d'importants marchés de l'eau en Inde et au Pakistan:

Shah (1991112) estime que jusqu'à la moitié de la surface brute irriguée par forages en Inde appartient à des acheteurs d'eau; Meinzen-Dick (1992113) et Chaudhry (1990114) documentent le développement rapide des marchés de l'eau souterraine au Pakistan. Le commerce de l'eau de surface se généralise également. Une étude récente au Pakistan a reconnu d'actifs marchés de l'eau (commerce ou achat d'eau) dans 70% des cours d'eau étudiés (Pakistan Water and Power Development Authority)115.

Dans un autre contexte, Thobani souligne que des droits d'eau informels existaient au Mexique avant le vote de la Loi sur l'eau de 1992, qui mit en place un régime de droits codifiés, et que des droits «semi-formels» existent depuis longtemps au Brésil et ailleurs116. La tendance à la formalisation des droits d'eau à mesure que la ressource se raréfie est à rapprocher de la formalisation croissante des titres de propriété foncière, à mesure que la pression des populations sur les terres augmente (voir le chapitre 5). «Lorsque l'eau est abondante par rapport à la demande, la législation concernant son utilisation est le plus souvent simple, et n'est pas appliquée très systématiquement. En revanche, lorsque l'eau est rare, des systèmes institutionnels plus élaborés se font jour»117.

Autoriser le commerce informel de l'eau, au lieu de mettre en place un cadre légal et institutionnel des marchés de l'eau, présente des inconvénients:

Dans certains cas, ces échanges [informels] n'ont pas donné de bons résultats et ont entraîné une allocation de l'eau économiquement inefficace. Dans certaines régions du sud de l'Asie, les agriculteurs riches, propriétaires de puits profonds, appliquent à leurs voisins moins fortunés un prix de l'eau élevé. De ce fait, la production agricole est moindre que si l'eau était facturée à son prix d'opportunité, et l'inégalité des revenus en est renforcée. La possibilité de vendre une ressource aussi précieuse augmente également l'exploitation de l'eau souterraine, ce qui risque d'appauvrir les aquifères souterrains… Par ailleurs, parce que ces transactions sont illégales, il est difficile de… protéger les aquifères.

La situation est encore compliquée par le fait que ces marchés illégaux risquent de permettre aux utilisateurs amont de vendre davantage qu'ils ne consomment (parce qu'ils peuvent vendre le composant écoulement restitué de leur droit d'eau), en violation des droits des tiers. En outre, l'acheteur ne bénéficie pas de la sécurité d'un contrat exécutoire. Les transactions sont donc limitées à des ventes ponctuelles ou pour une seule saison, souvent entre voisins; les transactions à plus long terme sont inexistantes, ce qui prive les investisseurs potentiels ou les compagnies d'eau [d'un] accès à l'eau garanti à long terme… les marchés informels ne… fournissent pas d'incitations ou de moyens suffisants pour déboucher sur la création d'une nouvelle infrastructure (M. Thobani, 1997, pages 165–166).

Les marchés de l'eau fonctionnent sur la base: de droits d'utilisation reconnus et enregistrés juridiquement, distincts des titres de propriété foncière; d'une infrastructure permettant la réallocation de l'eau; de dispositions réglementaires visant à protéger l'intérêt public et celui des tiers; d'institutions pour le respect des contrats et la résolution des litiges; ainsi que de règles de répartition des déficits et des excédents d'eau. Comme dans le cas D'autres mécanismes d'allocation, il faut désigner à qui revient la responsabilité de l'exploitation et de l'entretien de l'infrastructure de l'eau.

Le système peut être défini de manière à ce que seuls les groupes d'irrigants puissent vendre l'eau à des intérêts non-agricoles, tout en autorisant leurs membres à pratiquer entre eux le commerce des droits. Ou bien encore, les individus peuvent être libres d'effectuer n'importe quel type de transaction. Les droits d'eau peuvent être cédés à long terme, ou même de manière définitive, mais aussi être «loués» à court terme. Dans tous les cas, leur prix est librement négocié entre acheteurs et vendeurs. Au Mexique, les droits d'eau peuvent prendre la forme de concessions d'une durée maximum de trente ans. Cette période est suffisamment longue pour encourager les investissements par l'utilisateur, par exemple, dans des structures de transport de l'eau (sur l'exploitation et en dehors), dans le nivelage des terres, dans des ouvrages de drainage et dans la plantation d'arbres fruitiers à forte valeur mais croissance lente.

Cependant, les marchés des droits d'eau ne fonctionnent pas comme la plupart des autres marchés. Les conditions de concurrence - nombreux acheteurs et vendeurs - ne sont, en général, pas remplies et les transactions nécessitent l'approbation de divers groupes, depuis les associations d'usagers de l'eau au Chili et au Mexique jusqu'aux gouvernements des États dans l'Ouest des Etats-Unis d'Amérique. «Dans une mesure déterminée par la législation des États, les transactions relatives aux droits d'eau doivent être approuvées par l'État. En général, cela passe par une demande de transfert adressée au bureau de l'ingénieur de l'État, qui étudie les effets négatifs sur les tiers du transfert proposé. Dans certains États, le transfert est rendu public et tout intéressé est autorisé à le contester à l'occasion de réunions dirigées par l'ingénieur de l'État»118.

Au Mexique, les marchés des droits d'eau sont naissants mais se développent: «Depuis 1995, date à laquelle l'effort massif d'enregistrement des droits d'eau a commencé sérieusement, la Commission nationale de l'eau a approuvé 517 transferts de droits d'eau, soit, au total, un volume annuel cédé d'environ 160 millions de mètres cubes. L'usage total annuel de l'eau au Mexique étant estimé à plus de 200 milliards de mètres cubes, le montant des cessions approuvées à ce jour demeure faible. Cependant, la satisfaction de la demande en eau par le biais des marchés rend moins nécessaire la construction d'une coûteuse infrastructure visant à augmenter l'offre et conduit à une allocation plus rationnelle et plus viable économiquement des ressources en eau». (Karin E. Kemper et Douglas Olson, Water Pricing: The Dynamics of Institutional Change in Mexico and Ceará, Brazil, ch. 16 dans A. Dinar, éd., 2000, p. 352.)

Bien que le concept de droits d'eau officiellement négociables soit relativement nouveau, les droits d'eau eux-mêmes sont une institution bien établie dans la plupart des régions du monde: «Il faut souligner que les droits d'usufruit de l'eau existent déjà dans la plupart des pays en développement, soit implicitement (du fait de la coutume), soit explicitement (par l'entremise d'un ensemble de lois et de réglementations). La mise en place de droits de propriété cessibles est une question de réforme ou de modification des régimes de droits d'eau existants»119. L'infrastructure de réallocation de l'eau entre vendeurs et acheteurs n'a pas nécessairement à être extensive; si l'importance des quantités échangées le permet, l'acheteur peut investir dans de nouvelles installations de transport. Ce sera le cas s'il s'agit d'une municipalité ou d'un gros industriel. La plupart du temps, les transactions ont lieu au sein d'un même bassin versant: par exemple, un vendeur amont accepte de cesser de divertir une quantité définie d'eau de la rivière et la laisse à la disposition d'un acheteur aval pour qu'il la prélève. De nombreuses transactions ont lieu entre agriculteurs appartenant à un même périmètre irrigué. Dans ce cas, l'infrastructure d'irrigation doit être souple; par exemple, elle nécessitera des vannes plutôt que des partiteurs de débit proportionnels.

Les principaux arguments en faveur de la mise en place de régimes de droits d'eau négociables ont été résumés par Thobani:

Parce qu'ils peuvent être vendus, les droits d'eau sont valorisés et incitent à économiser l'eau, ainsi qu'à la réallouer à des usages à plus forte valeur. En ce sens, on obtient le même résultat qu'avec une tarification au coût d'opportunité. Les droits d'eau négociables autorisent également la ‘location’ de l'eau (pour une saison, par exemple) et les ventes ponctuelles; de fait, ils facilitent même ce type de transactions. Enfin, si les droits d'eau initiaux sont alloués gratuitement aux utilisateurs ou aux détenteurs existants de ces droits, les droits d'eau négociables peuvent permettre de contourner les problèmes politiques liés à l'augmentation du prix de l'eau et à la fixation de redevances non uniformes. Les gouvernements sont à même de contrôler les opérations et d'appliquer plus efficacement les lois et réglementations visant à empêcher les abus de pouvoir monopolistique, à assurer que les ventes n'ont pas d'effet négatif sur la disponibilité de l'eau pour les tiers (C'est-à-dire à traiter les problèmes d'écoulement restitué) et à protéger l'environnement120.

Pour concrétiser ces avantages, il faut traiter plusieurs problèmes, dont la satisfaction du souci d'équité, dès la mise en place d'un marché des droits d'eau. Les principaux d'entre eux sont passés en revue dans la sous-section suivante.

6.5.6 Problèmes soulevés par les marchés des droits d'eau

6.5.6.1 Types de droits d'eau

Dans l'Ouest des Etats-Unis d'Amérique, les droits d'eau suivent la doctrine de l'antériorité de l'appropriation ou premier arrivé, premier ayant droit, qui est codifiée dans les lois des États de cette région. Le premier droit d'eau d'une source donnée est établi par l'usage et correspond aux quantités annuelles prélevées par l'utilisateur initial. L'usage doit être “véritable” et conforme à des critères établis. Le fait de ne pas l'exercer “véritablement” pendant une période définie peut entraîner sa perte. D'autres droits, dénommés “droits mineurs”, peuvent également exister, mais en cas de sécheresse, les droits les plus anciens (“majeurs”) reçoivent l'eau en priorité121. Les droits d'eau informels des pays en développement tendent eux aussi à être de ce type.

Le régime de droits d'eau des marchés formalisés du Mexique et du Chili diffère du système de l'appropriation. Appelé régime des droits proportionnels, il confère des droits sur une certaine proportion du flot d'une rivière ou autre source d'eau. Ainsi, en cas d'année plus sèche ou plus humide que la normale, les diminutions ou augmentations des allocations d'eau sont dans la même proportion pour tous les détenteurs de droits. Cette modalité d'ajustement des quantités est stipulée officiellement au Chili, et laissée à la discrétion de la Commission nationale de l'eau au Mexique. Certains ont avancé que ce régime facilite la création des marchés parce que les utilisateurs sont davantage assurés de recevoir de l'eau122. Cependant, certains marchés fonctionnent aussi dans un cadre de droits d'appropriation. Dans ce cas, le prix est fonction de l'antériorité du droit (C'est-à-dire le degré de certitude d'obtenir de l'eau). Le principal avantage des droits proportionnels est précisément qu'ils répartissent plus équitablement le fardeau des années sèches.

Tout comme les droits fonciers collectifs ont leur place dans les économies qui reconnaissent les marchés fonciers (voir le chapitre 5), les droits d'eau collectifs ont un rôle à jouer:

Certains ont avancé que la mise en place de droits de propriété négociables dans le cas de l'eau est, d'une certaine manière, antagonique aux valeurs communautaires traditionnelles, et défavorable à une gestion collective de l'eau… Il est cependant possible d'attribuer des droits de propriétés négociables à des groupes communaux ou à des associations d'usagers de l'eau, aussi bien qu'à des individus. L'allocation de droits de propriété traditionnels à des groupes communaux devrait en fait renforcer le contrôle de ces groupes sur les ressources en eau, et assurer un meilleur accès à l'eau que ne le font souvent les groupes d'usagers de l'eau existants. L'allocation de droits de propriété négociables de l'eau à des groupes communaux peut s'avérer plus efficace que leur allocation à des individus, dans les cas où l'internalisation de la négociation au sein du groupe abaisse les coûts d'information, d'établissement des contrats et d'exécution par rapport à ceux résultant de transactions bilatérales entre individus123.

Quelle que soit la forme des droits d'eau, les marchés de l'eau nécessitent un mécanisme pour attribuer et enregistrer ces droits, tout comme pour des titres fonciers. Leur durée doit également être enregistrée. Thobani recommande:

La meilleure manière de soutenir la législation [en matière de marchés de l'eau] consiste à allouer des droits aux utilisateurs, gratuitement, en fonction de leur usage historique. Bien que cette approche puisse entraîner un gain “tombé du ciel” pour certains agriculteurs, elle reconnaît que le prix des terres tient déjà compte de l'accès à l'eau à bas prix et que le gouvernement ne recouvrera probablement pas directement ses dépenses d'investissement dans l'infrastructure. Parce que cette procédure favorise aussi les utilisateurs qui prélèvent davantage que leur part équitable d'eau, il peut valoir la peine d'essayer de rectifier certains des torts les plus flagrants. Cependant, si le gouvernement en profite pour corriger toutes les erreurs de ce type ou confisquer tous les droits obtenus illégalement, il est fort probable que la législation échouera et que les injustices se poursuivront… Les droits d'eau nouveaux et non alloués doivent être vendus par enchères publiques et de manière transparente124.

Cette dernière recommandation constitue un autre parallèle avec les politiques de ressources foncières. Le chapitre 5 recommande les enchères de titres ou de baux pour les zones agricoles nouvellement ouvertes sur les terres de l'État.

6.5.6.2 Écoulements restitués et droits des tiers

On peut définir les droits d'eau comme droits de dérivation totale, droits avec consommation ou droits sans consommation. L'irrigation produit toujours des écoulements restitués à la source d'eau (qui, dans certains cas, est un système combiné aquifère - eau de surface). La consommation correspond au volume d'eau qui n'est pas restitué. Les droits d'utilisation sans consommation servent surtout à la génération d'électricité hydroélectrique.

Dans le cas de L'irrigation, où les agriculteurs ont droit à des prélèvements d'eau bruts spécifiés, il est essentiel de définir si les droits cessibles sont bruts ou nets des écoulements restitués. Autrement dit, s'il s'agit de droits de dérivation totale ou de consommation seulement. Pour des agriculteurs d'une même zone, qui cultivent principalement les mêmes cultures avec le même type de technologie d'irrigation sur l'exploitation, il importera peut-être peu d'acheter des droits bruts ou nets, dans la mesure où toutes les transactions sont traitées de la même manière. Néanmoins, si une municipalité ou une autre entité achète les droits d'eau des agriculteurs et prélève celle-ci sur le périmètre irrigué, les écoulements restitués risquent de disparaître ou de diminuer brutalement. Cela peut entraîner une moindre disponibilité de l'eau pour les utilisateurs aval, d'où la préoccupation d'une répercussion des cessions d'eau sur les tiers, évoquées plus haut dans l'encadré relatif aux marchés informels des droits d'eau.

La proportion de l'eau d'irrigation correspondant à la consommation est difficile à mesurer avec précision, car elle dépend de la nature des sols de l'exploitation (y compris leur pente), du type de cultures, de la technique d'irrigation et des facteurs climatiques. Par conséquent, la distinction entre droits de dérivation totale et droits de consommation, dans le but de protéger l'accès à l'eau des tiers, semblerait poser un obstacle insurmontable à la création de marchés des droits d'eau. Néanmoins, des solutions pragmatiques ont été mises en œuvre. L'une d'entre elles consiste à laisser les droits relatifs aux écoulements restitués en possession des organismes d'irrigation (en général, le district d'irrigation local ou une AUE). Rosegrant et Binswanger ont expliqué cette approche en ces termes:

Dans la plupart des États occidentaux des États-Unis d'Amérique, les droits d'eau sont en termes de consommation, avec protection du droit des tiers aux écoulements restitués… Ce système protège les droits existants aux écoulements restitués, mais majore de manière importante les coûts de transaction du commerce de l'eau, en raison de la difficulté à mesurer la consommation et les écoulements restitués. En pratique, les agriculteurs doivent souvent apporter la preuve de la mise en jachère des terres pour pouvoir vendre leurs droits de consommation d'eau. Dans le Northern Colorado Water Conservancy District (NCWCD), cependant, les droits sont proportionnels au débit, et les droits aux écoulements restitués sont détenus par le district. Les écoulements restitués sont mis à la disposition des utilisateurs gratuitement, mais ils ne font l'objet d'aucun droit. Aucune action ne peut donc être intentée contre une modification des schémas d'écoulement restitués qu'entraîneraient les transactions. En n'accordant pas aux tiers de droits aux écoulements restitués, le NCWCD a grandement réduit les coûts de transactions, ce qui s'est traduit par un marché de l'eau très actif… Le Chili et le Mexique ont suivi le modèle du NCWCD en définissant des droits proportionnels au débit du cours d'eau ou du canal. Les droits aux écoulements restitués n'existent pas. Au Chili, les écoulements restitués peuvent être utilisés dans les zones avoisinantes par ceux qui les reçoivent, sans besoin d'établir un droit d'utilisation. L'usage de cette eau, cependant, dépend du débit des cours d'eau principaux et de l'intensité de l'utilisation par les détenteurs de droits. En l'absence d'obligation de fournir des écoulements restitués, ceux-ci ne sont donc pas permanents… Si l'on peut attribuer équitablement les droits d'eau initiaux… des droits proportionnels sans droits aux écoulements restitués devraient faciliter une allocation efficace, sans compromettre l'équité125.

Une seconde solution pratique consiste à restreindre les cessions d'eau à d'autres secteurs que l'agriculture lorsque leurs conséquences sur les écoulements restitués pourraient être importantes et poser problème:

Au Chili, deux grands bassins fluviaux ont fait l'objet d'un renforcement de la protection des écoulements restitués: celui de l'Aconcagua, une région où l'on trouve une forte proportion de cultures à forte valeur, et celui de l'Elqui, une rivière petite mais importante parce qu'elle arrose une zone désertique… L'Association des usagers de l'eau de l'Elqui a traité ce problème en limitant, dans la partie amont, les transactions aux agriculteurs entre eux (pour conserver tous les écoulements restitués du bassin), les transactions entre agriculteurs et urbains n'étant autorisées que dans la partie aval126.

En D'autres termes, les municipalités ne peuvent utiliser que l'eau dont l'essentiel des écoulements restitués irait dans la mer. Une autre protection de cette nature est assurée au Mexique et au Chili par des lois requérant l'approbation de l'AUE locale à chaque transaction et qui interdisent à la fois des cessions qui porteraient dommage à l'agriculture irriguée, et le paiement de compensations aux tiers qui seraient affectés par des transactions127. Il est possible de faire appel auprès de la Commission nationale de l'eau au Mexique et de l'Autorité nationale de l'eau au Chili, ainsi qu'en justice finalement. Cependant, la formulation floue de la clause de protection laisse une considérable liberté de manœuvre aux services de l'eau et soulève le risque d'une politisation de son application.

Cette seconde solution, à savoir n'autoriser le commerce intersectoriel de l'eau que dans la partie aval des cours d'eau, peut être appliquée en même temps que la première. Une troisième solution consiste à élaborer et appliquer des règles empiriques, standardisées ou basées sur des moyennes, s'appuyant sur une relation arithmétique entre le volume total d'eau dérivé et les écoulements restitués:

Le Nouveau Mexique fait appel à des procédures plus simples et moins onéreuses que la Californie. Le Bureau de l'Ingénieur d'État détermine les quantités d'eau cessibles à l'aide de formules standard, ainsi que de données historiques et secondaires. L'utilisation de quantités cessibles standard pour certaines régions, certains sols et certains climats abaisse les coûts de transaction liés au recours à des experts en hydrologie et en ingénierie, fait gagner du temps au personnel des services de l'eau et crée davantage de certitude quant au processus de cession… Une procédure encore plus simple consisterait à créer une hypothèse homogène de consommation et d'écoulements restitués, qui évite d'avoir à déterminer la consommation au cas par cas. Dans le Wyoming, le texte officiel autorisant les cessions d'eau temporaires suppose que 50% de l'eau dérivée correspondent aux écoulements restitués, le solde étant estimé représenter la quantité négociable. Bien qu'il soit toujours possible de contester une telle hypothèse, il est improbable qu'elle le soit s'il s'agit d'une estimation raisonnable. Si l'on peut difficilement envisager qu'une même estimation soit acceptable pour l'ensemble d'un État, du fait des différences de conditions agro-climatiques, il demeure possible d'émettre des estimations régionales… Une approche combinant les méthodes de l'Elqui et du Nouveau Mexique mériterait d'être évaluée en pratique dans les bassins fluviaux où les écoulements restitués sont importants…. l'essentiel est que les coûts de transaction demeurent faibles, et que les estimations d'écoulements restitués n'excèdent pas leur maximum effectif, afin de conserver l'incitation à économiser l'eau et d'augmenter les gains produits par des transferts d'eau négociés sur un marché fonctionnel128.

Pour illustrer ce dernier point, supposons que, dans une région donnée, l'on puisse réduire les écoulements restitués à 30% des dérivations totales grâce à des mesures d'économie d'eau dans L'irrigation, mais que l'estimation utilisée dans la réglementation s'appuie sur les écoulements restitués maximum observés, soit 50%. L'acheteur d'eau qui obtient les droits à 50 unités de consommation obtient en fait les droits à 100 unités de dérivation totale. Mais avec de bonnes pratiques d'économie d'eau, ces droits pourraient être convertis en 70 unités de consommation, ce qui élargirait la capacité à irriguer qui y est associée.

Thobani recommande aussi d'utiliser une estimation moyenne de l'écoulement restitué:

En raison des difficultés techniques posées par le calcul au cas par cas de l'écoulement restitué, cette approche risque de ne pas convenir aux pays en développement. On peut néanmoins calculer le volume moyen d'eau consommé par une culture ou une activité donnée. Lorsque les écoulements restitués posent problème, ce volume pourrait être publié et devenir la quantité plafond que les propriétaires sont autorisés à vendre aux acheteurs… Cette procédure fonctionnerait à la fois pour les eaux de surface et les eaux souterraines. En dépit de ses faiblesses, ce système constituerait une nette amélioration par rapport à l'interdiction de toutes cessions ou à l'absence de contrôles, qui caractérisent les marchés de l'eau informels129.

Ces exemples et recommandations montrent clairement, à la fois qu'il existe des solutions réalisables au problème des écoulements restitués et que les solutions les mieux adaptées varient d'un cas à l'autre.

6.5.6.3 Transferts d'eau intersectoriels

Comme le montre l'exemple de la gestion de l'Elqui mentionné ci-dessus, la crainte existe que la création de marchés de l'eau soit préjudiciable à l'agriculture en incitant à vendre les droits d'eau à des usagers non agricoles, dont la productivité par unité d'eau est en général plus élevée et qui ont donc les moyens d'acheter l'eau plus cher. Le Mexique et le Chili ont mis en place des garde-fous institutionnels contre cette possibilité, sous la forme d'une obligation d'approbation préalable des ventes à différents niveaux, comme expliqué ci-dessus. Ces garde-fous semblent efficaces. «Les irrigants chiliens sont en général satisfaits de la codification de leurs droits d'eau traditionnels. Et les droits d'eau constituant un actif corporel, non soumis actuellement à une taxe de propriété, les irrigants bénéficient des avantages d'un droit de propriété, même quand le marché de ces droits est inactif»130.

Au Chili, les avantages des transferts d'eau intersectoriels sont allés au delà de l'indemnisation financière des agriculteurs:

Par exemple, la ville de La Serena a pu acheter 28% de ses droits d'eau à des agriculteurs du voisinage, ce qui a permis au gouvernement de retarder la construction d'un barrage. De la même manière, la ville d'Arica, dans le nord aride, a pu répondre aux besoins de ses résidents en louant de l'eau souterraine à des agriculteurs… Les changements de structure des marchés de l'eau créent de nouvelles opportunités de conservation. Lorsque la société municipale des eaux de Santiago, EMOS, a été avertie qu'elle ne pourrait plus recevoir de nouveaux droits d'eau gratuits, elle a commencé par acheter des droits d'eau supplémentaires. Quand les vendeurs potentiels en ont demandé un prix trop élevé, elle a préféré remettre en état sa structure de canalisations vieillissante pour réduire les fuites d'eau. (M. Thobani, 1997, pages 168–169)

Il a été démontré que l'existence de marchés de l'eau encourage un déplacement de l'agriculture vers des cultures à plus forte valeur. Lorsque c'est effectivement le cas, l'écart de productivité de l'eau entre les secteurs ne s'avère pas toujours aussi important qu'on l'aurait supposé:

L'un des résultats les plus intéressants de cette analyse est la relative modestie des gains économiques du commerce [de l'eau] intersectoriel dans la vallée de l'Elqui. Certes, la valeur de l'eau municipale est élevée, mais la valeur de l'eau pour les exploitations agricoles rentables demeure également élevée… Si ces exploitations sont rentables, les gains économiques [C'est-à-dire pour la société] de la réallocation sont faibles, alors même que le gain financier pour le vendeur est important131.

L'expérience chilienne et D'autres permettront peut-être d'apaiser les doutes du Bureau de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (cités plus haut) concernant la validité des marchés de l'eau comme mécanismes de réallocation intersectorielle de cette ressource. Il semblerait que des marchés de l'eau convenablement conçus et mis en œuvre puissent constituer des filières utiles à des réallocations de ce type, pourvu qu'il existe des mécanismes institutionnels adéquats de supervision des transactions. En général, C'est la bassin versant, et non le secteur, qui délimite le cadre dans lequel peuvent se dérouler les transactions relatives à l'eau, sauf si le secteur public a indépendamment pris la décision (onéreuse) d'investir dans une infrastructure de transfert entre bassins.

Cependant, en Espagne, on a réussi à transférer 4 m3/s du district d'irrigation du delta de l'Ebre à la région industrielle de Tarragone, une ville située à 80 km et sur un autre bassin versant. Les redevances payées par les utilisateurs industriels de l'eau sont investies dans l'amélioration du réseau d'irrigation du delta de l'Ebre. Au Pérou, il existe des transferts d'eau depuis le bassin de l'Amazone jusqu'à la région côtière aride, par des tunnels creusés sous les Andes. Jusqu'à maintenant, ces transferts n'ont pas été motivés par le marché, mais il a été suggéré que les redevances d'eau collectées dans la zone côtière pourraient financer des projets de développement dans la région andine plus pauvre.

6.5.6.4 Problème des coûts de transaction

L'une des principales préoccupations soulevées par les marchés des droits d'eau est que les transactions pourraient s'y avérer trop lourdes, C'est-à-dire que le coût en serait trop élevé. Clairement, il faut accepter un compromis entre les coûts de transaction et la protection des droits des tiers: plus les mécanismes d'examen et d'approbation des transactions visant à protéger les autres individus et l'environnement sont élaborés, plus les coûts de transaction sont élevés. Tout le monde convient que le marché de l'eau n'est pas aussi actif en Californie que dans D'autres États de l'ouest des Etats-Unis d'Amérique en raison du poids que la protection des droits des tiers et de l'environnement fait peser sur les procédures du marché de l'eau132. Au Mexique et au Chili, où les procédures sont moins lourdes, le marché des droits d'eau est plus actif.

Quel que soit le système, la réallocation de l'eau engendre un «coût de transaction» (voir encadré en page suivante), qui comprend les mesures à prendre pour éviter les conflits et compenser les parties lésées en cas de conséquences préjudiciables pour les tiers. Ce chapitre a déjà cité des exemples d'agriculteurs allant jusqu'à endommager l'infrastructure d'irrigation lorsqu'ils ont le sentiment que leurs droits d'eau n'ont pas été respectés par les allocations administratives. Il n'est pas clair que les coûts de transaction, au sens large, soient nécessairement plus élevés sur les marchés de droits d'eau que dans le cadre des systèmes d'allocation administrative de l'eau.

«Il existe des coûts de transactions quel que soit le procédé de réallocation de l'eau. Ils comprennent: le coût de l'identification des opportunités rentables de transfert de l'eau; le coût de négociation ou de décision administrative du transfert d'eau; le coût de surveillance des éventuelles conséquences pour les tiers, et D'autres externalités; le coût de l'infrastructure de transport et du contrôle des transferts d'eau; et le coût d'infrastructure et institutionnel du contrôle, de la compensation ou de l'élimination des éventuelles conséquences pour les tiers et autres externalités possibles». (M. W. Rosegrant et H. P. Binswanger, 1994, p. 1617)

Hearne et Easter ont fourni peut-être la seule estimation empirique à ce jour du coût des transactions commerciales de l'eau, pour deux vallées chiliennes. Voici quels sont ces coûts, exprimés en part du prix de la transaction133:

Acheteurs, vallée de l'Elqui 0,21
Vendeurs, vallée de l'Elqui  0,02
Acheteurs, vallée du Limari 0,05
Vendeurs, vallée du Limari  0,02

Dans la vallée du Limari, les transactions sont plus fréquentes du fait d'un système bien développé d'infrastructure d'irrigation et d'AUE bien organisées134.

En général, ce ne sont pas des coûts élevés et, plus important encore, ils peuvent de toute évidence être abaissés par le développement d'une infrastructure physique et institutionnelle adéquate. Du point de vue de la politique, il est possible de reformuler le problème du coût des transactions. Parce que toute réallocation importante de l'eau implique des coûts de transactions, la question la plus élémentaire est de savoir si la politique de l'eau doit autoriser une allocation souple de cette ressource de base. Compte tenu de la raréfaction de l'eau, des avantages pour les agriculteurs des marchés des droits d'eau par rapport à l'augmentation administrative du prix de l'eau et des autres considérations présentées dans ce chapitre, il semble clair que la réponse à cette question doive être positive. Pour décider de mettre ou non en place des marchés des droits d'eau, il faut alors savoir si leurs exigences de base peuvent être satisfaites, comme nous le verrons plus loin dans cette section.

6.5.6.5 Rôle des associations d'usagers de l'eau dans les marchés des droits d'eau

L'existence d'associations d'usagers de l'eau fortes et bien informées constitue L'une des conditions préalables à la réussite des marchés des droits d'eau. Leur rôle dans l'approbation et la supervision des transactions et même (au Chili) dans la propriété des réseaux d'irrigation, a été noté plus haut (section 6.5.3). Hearne et Easter ont conclu leur étude empirique des marchés de l'eau chiliens en soulignant que les AUE jouent le rôle important de faciliter la réallocation de l'eau par le biais du marché, surtout dans la vallée du Limari où les échanges sont actifs, et dans celle de l'Elqui, où l'on observe des échanges intersectoriels135.

Les AUE jouent également un rôle clé dans la résolution des conflits entre usagers de l'eau. Plus ce type de conflit peut être résolu localement grâce à la médiation des associations, plus les coûts globaux de gestion de l'eau sont faibles. Les associations d'utilisateurs d'eau sont également chargées de l'exploitation et de l'entretien des systèmes, ainsi que de leur financement. Cette responsabilité couvre la collecte de la contribution financière de leurs adhérents. De ce fait, le prix des droits d'eau établi sur les marchés ne correspond pas au coût d'opportunité total, mais au coût d'opportunité net des dépenses d'E&E. Si l'acheteur n'est pas membre d'une AUE, il doit couvrir les dépenses d'exploitation et d'entretien du nouvel usage de l'eau, ainsi que les coûts de transaction.

6.5.6.6 Marchés des droits d'eau et protection de l'environnement

Il est logique de se préoccuper des effets environnementaux des marchés des droits d'eau, du fait que les valeurs de marché ignorent largement les externalités environnementales. Néanmoins, il est possible d'intégrer des mesures de sauvegarde de l'environnement aux codes de l'eau autorisant les marchés des droits d'eau. Au Mexique, une loi sur l'eau a institué de façon explicite des normes de protection de l'environnement s'appliquant aux utilisateurs de l'eau. La qualité des déversements des usages non agricoles est spécifiée dans la réglementation des droits d'eau, et la Commission nationale de l'eau peut imposer des restrictions sur l'usage de l'eau en cas de sévère pénurie, de dommages aux écosystèmes, ou de surexploitation des aquifères136.

En principe, la protection de l'environnement en matière d'usage de l'eau ne devrait pas être plus difficile sous un régime de droits d'eau cessibles que sous un régime d'allocation administrative, à condition qu'ait été établi le cadre législatif approprié:

… l'existence de droits d'eau détenus par des particuliers ne réduit pas nécessairement la possibilité d'une gestion environnementale adéquate des cours d'eau. Il faut mettre en place et faire appliquer une réglementation sur la qualité de l'eau, quel que soit le système d'allocation de l'eau137.

Au Chili, les dispositions du code de l'eau relatives à l'environnement sont plus faibles qu'au Mexique, bien qu'il exige des services nationaux de l'eau qu'ils étudient les effets sur l'environnement et les tiers des grands projets d'infrastructure hydraulique avant de les autoriser. Les autres aspects de la protection de l'environnement concernant l'eau relèvent du code de l'environnement.

L'expérience des effets environnementaux des marchés de l'eau dans les pays en développement est trop brève pour permettre de juger si les diverses mesures de protection fonctionnent. Néanmoins, le cas de la Californie illustre la question. Comme on l'a vu, cet État a imposé des restrictions relativement sévères au commerce des droits d'eau, afin de protéger l'environnement et les droits des tiers. En dépit de cette orientation de politique, de nombreux groupes environnementaux en Californie ont vu les marchés des droits d'eau comme un moyen de répondre à la croissance de la demande d'eau tout en évitant de construire de nouvelles infrastructures, qu'ils considèrent comme plus nuisibles à l'environnement que les transferts d'eau138.

L'expérience californienne semble suggérer que, non seulement la protection de l'environnement peut être aussi bonne dans le cadre de marchés des droits d'eau que dans celui de l'allocation administrée, mais en fait qu'elle y est potentiellement supérieure. Bien évidemment, en pratique, le résultat dépendra, non seulement du cadre législatif, mais aussi du niveau d'engagement à protéger l'environnement des autorités nationales et régionales, et de la force du pouvoir judiciaire. Ces remarques valent pour tous les systèmes d'allocation de l'eau.

6.5.6.7 Équité et marchés des droits d'eau

Tout comme les marchés fonciers ont suscité des craintes de concentration des terres entre les mains de quelques uns, les marchés des droits d'eau ont fait craindre une concentration semi-monopolistique du contrôle de l'eau. Si ces préoccupations méritent analyse, il faut reconnaître d'emblée que les marchés de l'eau présentent une différence fondamentale avec les marchés fonciers, à savoir un contrôle collectif (AUE) beaucoup plus important sur les transactions. Cette caractéristique ne doit pas totalement occulter les préoccupations, mais elle rend beaucoup plus improbable le fait que les ventes de droits d'eau se traduisent par leur concentration entre quelques mains. En outre, il faut garder à l'esprit que l'émission des droits d'eau initiaux, si elle est effectuée de manière équitable et gratuitement, comme le conseillent les chercheurs cités dans ce chapitre, dote les familles pauvres d'un capital précieux. Même si elles finissent par décider de les vendre, elles se trouveront en meilleure position qu'avant la création des droits cessibles.

Thobani a argué que les marchés des droits d'eau aideront à réduire la pauvreté pour plusieurs raisons:

L'existence de droits d'eau sûrs et négociables réduit la pauvreté de plusieurs manières. Tout d'abord, ils permettent de redéployer des ressources rares à des fins plus productives, ce qui augmente la production et l'emploi. Tel a été le cas, par exemple, lorsque les agriculteurs chiliens ou mexicains ont vendu leurs droits d'eau à des agriculteurs plus productifs ou à des villes. Deuxièmement, les droits d'eau négociables encouragent de nouveaux investissements dans des activités nécessitant de grandes quantités d'eau. Investir dans une exploitation d'arbres fruitiers sera probablement plus attractif si l'investisseur sait que l'eau ne sera pas transférée à une ville voisine en périodes de rareté et qu'il pourra acheter de l'eau à des agriculteurs en période de pénurie. Au Mexique, des investisseurs ont bâti une usine d'embouteillage après avoir négocié les droits d'eau d'un agriculteur. Non seulement ce dernier en a tiré un profit financier, mais cet investissement a généré des emplois supplémentaires…
Troisièmement, parce qu'ils donnent à des groupes d'utilisateurs le pouvoir d'intervenir dans l'émission ou la cession des droits d'eau, des droits sûrs et négociables contribuent à protéger les pauvres. Lorsque les droits d'eau sont accordés gratuitement par les pouvoirs publics, ce sont généralement les individus riches et influents politiquement qui y ont le plus facilement accès, souvent au détriment des pauvres. Quatrièmement, le fait qu'ils soient sûrs et négociables augmente la valeur de ces droits, qui constituent souvent le bien le plus précieux des agriculteurs pauvres. Au Mexique, de nombreux petits agriculteurs ont apprécié de pouvoir vendre leurs droits d'eau tout en demeurant sur leurs terres.
En outre, en facilitant l'accès des villes à l'eau, ce type de marché bénéficie aux plus pauvres, un segment de la population urbaine très probablement exclu du service en canalisations. Au Chili, la quasi totalité des zones urbaines est desservie par des canalisations… Enfin, parce que le transfert de l'eau à des usages à forte valeur ne confisque pas d'eau aux utilisateurs moins productifs (agriculteurs) et ne nécessite pas la construction d'une nouvelle infrastructure, il constitue une alternative moins onéreuse et plus équitable qu'une augmentation importante du prix de l'eau, par exemple139.

Barbara van Koppen a observé que la présence de marchés des droits d'eau peut profiter aux familles rurales pauvres en augmentant leur accès aux ressources de L'irrigation, qui leur est parfois refusé par le fonctionnement des structures locales de pouvoir politique:

Les agriculteurs pauvres sont bien servis… dans L'irrigation privée (en tant qu'acheteurs) si des marchés privés et concurrentiels de l'eau se sont développés, comme C'est le cas en Asie méridionale, sur lesquels ils peuvent acheter de l'eau. Ces marchés concurrentiels de l'eau souterraine fournissent de bons services à bas prix à des millions de petits agriculteurs sans avoirs… Implications: les marchés de l'eau, ainsi que ceux de L'irrigation par canaux, peuvent être plus favorables aux pauvres si la technologie, bien qu'à relativement petite échelle, fournit des excédents d'eau que les propriétaires ne peuvent pas utiliser sur leurs propres terres. (B. van Koppen, From Bucket to Basin: Managing River Basins to Alleviate Water Deprivation, Institut international de gestion des ressources en eau, Colombo, Sri Lanka, 2000, pages 10–11.)

96 Yacov Tsur et Ariel Dinar, The Relative Efficiency and Implementation Costs of Alternative Methods of Pricing Irrigation Water, The World Bank Economic Review, vol. 11, № 2, mai 1997, pages 243–262.

97Op. cit., p. 247.

98 M. G. Bos et W. Wolters, Water Charges and Irrigation Efficiencies, Irrigation and Drainage Systems, vol. 4, № 3, août 1990, pages 267–278.

99 Y. Tsur et A. Dinar, 1997, p. 259.

100 G. F. Rhodes et R. K. Sampath, 1988, p. 116.

101 M. G. Bos et W. Wolters, 1990, p. 277.

102 FAO, 1993, pages 272–275.

103 H. Plusquellec, C. Burt et H. W. Wolter, 1994, p. 81.

104Op. cit., p. 72.

105 Ruth Meinzen-Dick, Meyra Mendoza, Loïc Sadoulet, Ghada Abiad-Shields et Ashok Subramanian, Sustainable Water User Associations: Lessons from a Literature Review, dans: A. Subramanian, N. V. Jagannathan et R. Meinzen-Dick, 1997, p. 49.

106 E. B. Rice, 1997, p. 27.

107 Mateen Thobani, Formal Water Markets: Why, When, and How to Introduce Tradable Water Rights, The World Bank Research Observer, vol. 12, № 2, août 1997, pages 163–165.

108 F. Chancellor et al., 1999, p.42.

109 E. B. Rice, 1997, p. 60 [souligné dans l'original].

110 Principalement en Californie et au Nouveau Mexique, avec quelques marchés au Colorado et ailleurs, ainsi que des marchés de transferts d'eau temporaires au Wyoming.

111 Banque mondiale, 1994, pages 21 et 23.

112 T. Shah, Managing Conjunctive Water Use in Canal Commands: Analysis for Mahi Right Bank Canal, Gujarat, dans: R. Meinzen-Dick et M. Svendsen, éd., Future Directions for Indian Irrigation, Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, Washington, D.C., 1991.

113 Ruth Meinzen-Dick, Water Markets in Pakistan: Participation and Productivity, projet de rapport d'étude dans le cadre de la bourse USAID pour le Pakistan № 391-0492-G-00-1791-00 pour le Ministère de l'Agriculture, miméo, Gouvernement du Pakistan et Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, Washington, D.C., 1992.

114 M. J. Chaudhry, The Adoption of Tubewell Technology in Pakistan, The Pakistan Development Review, vol. 29, 1990, pages 291–304.

115 M. W. Rosegrant et H. P. Binswanger, 1994, p. 1616.

116 M. Thobani, 1997, p. 165.

117 FAO, 1993, p. 268.

118 R. G. Cummings et V. Nercissiantz, 1992, pages 748–749. Sont également éclairantes les études de cas sur les droits d'utilisation de l'eau (bien qu'un marché des droits n'y soit pas toujours présent) dans: Bryan Randolph Bruns et Ruth S. Meinzen-Dick, Negotiating Water Rights, Institut international de recherche sur les politiques alimentaires et Intermediate Technology Publications, Londres, 2000.

119 M. W. Rosegrant et H. P. Binswanger, 1994, p. 1615.

120 M. Thobani, 1997, p. 166.

121 On trouvera une présentation éclairante de cette doctrine et des problèmes soulevés par la cession des droits d'eau dans l'Ouest des États-Unis d'Amérique dans le chapitre 4 de: Allen V. Kneese et F. Lee Brown, The Southwest under Stress: National Resource Development Issues in a Regional Setting, Resources for the Future, Inc., The Johns Hopkins University Press, Baltimore, 1981.

122 M. W. Rosegrant, R. Gazmuri S. et S. N. Yadav, 1995, pages 210–211.

123 M. W. Rosegrant et H. P. Binswanger, 1994, p. 1620. La première partie de ce passage se retrouve également dans M. W. Rosegrant, R. Gazmuri S. et S. N. Yadav, 1995, p. 217. Plusieurs passages de la première publication étant répétés sous forme identique, ou quasiment identique dans la seconde, les références ci-après ne concernent dans ce cas que la première.

124 M. Thobani, 1997, pages 173–174.

125 M. W. Rosegrant et H. P. Binswanger, 1994, p. 1619 [souligné par nous].

126 M. W. Rosegrant, R. Gazmuri S. et S. N. Yadav, 1995, p. 213.

127Op. cit., p. 214.

128 M. W. Rosegrant, R. Gazmuri S. et S. N. Yadav, 1995, pages 213–214.

129 M. Thobani, 1997, p. 175.

130 R. R. Hearne et K. W. Easter, 1995, p. 38.

131Ibid.

132 «En Californie, la portion cessible des droits de l'eau acquis par appropriation est limitée à la consommation, avec protection du droit des tiers aux écoulements restitués. Ce système protège les droits antérieurs sur les écoulements restitués mais… augmente de manière importante le coût des transactions sur le marché de l'eau… Le système californien, qui détermine la fraction négociable des droits d'eau appropriés sur la base de la consommation, impose une pesante charge de preuve à l'éventuel vendeur d'eau, qui doit déterminer la quantité d'eau vendable». (Extrait de: M. W. Rosegrant, R. Gazmuri S. et S. N. Yadav, 1995, p. 211.)

133 R. R. Hearne et K. W. Easter, 1995, p. 27.

134Ibid.

135 Op. cit., p. 39.

136 M. W. Rosegrant et H. P. Binswanger, 1994, p. 1620.

137 R. R. Hearne et K. W. Easter, 1995, p. 41.

138 M. W. Rosegrant, R. Gazmuri S. et S. N. Yadav, 1995, p. 215.

139 M. Thobani, 1997, pages 169–170.


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