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3. GESTION DES RESSOUCES GENETIQUES FORESTIERES

Le terme «gestion» est conçu comme étant la combinaison de la conservation et de la valorisation dans le Plan national stratégique pour Madagascar. C’est ainsi que toutes les activités de gestion des ressources génétiques forestières sont classées dans l’une ou l’autre de ces deux aspects (annexe 6).

3.1. Conservation

Suivant les prescriptions de la Convention internationale sur la diversité biologique, les activités de conservation sont réparties en deux catégories: in situ et ex situ.

3.1.1. Conservation in situ

Elle a essentiellement lieu au niveau de l’écosystème dans les aires protégées (annexes 3 et 4). Néanmoins, certaines actions de conservation pour des ressources particulières existent.

Aires protégées

La législation malgache définit six types de statuts de sites d’intérêt biologique mais trois seulement sont reconnus comme disposant d’un statut d’aires protégées: les réserves naturelles intégrales, les réserves spéciales et les parcs nationaux. Ces aires protégées1 ont pour vocations la conservation de la faune et de la flore originelles, l’éducation et la recréation, les travaux de recherche, l’exercice des cultes traditionnels, la promotion de l’écotourisme et l’exercice des droits d’usage des populations riveraines. En l’an 2002, 46 aires protégées ont été délimitées à Madagascar dont 18 parcs nationaux, 5 réserves naturelles intégrales, 23 réserves spéciales (ANGAP, 2002).

Toutes les essences autochtones figurées dans la liste des espèces prioritaires du plan national stratégique font partie d’un programme de conservation «in situ» au sein des aires protégées. A ce propos, le type d’action concerne particulièrement la préservation des régénérations naturelles. L’Association nationale pour la gestion des aires protégées (ANGAP) détient ainsi une base de données sur ces espèces régulièrement suivies dans leurs actions de suivi écologique.

En outre, l’ANGAP, par le biais d’une méthodologie scientifique de processus de conservation basée sur la méthodologie internationale de World Commission of Protected Areas (WCPA), identifie des ressources cibles exposées à des risques et menaces.

Cas de quelques espèces particulières

D’autres actions de conservation in situ sont exercées dans certaines forêts dans le cadre de la recherche-développement. Il s’agit, par exemple, d’essais d’enrichissement des forêts naturelles à Tampolo (sur le littoral Est) par le département «forêts» de l’Ecole supérieure agronomique, à Ambavatapia (dans la forêt sclérophylle de Tapia dans le Sud des haut-plateaux) par le Service d’appui à la gestion de l’environnement (SAGE) et à Mahatsara (Foulpointe) par le Département de recherches forestières et piscicoles (DRFP). Des essais sylvicoles sont également menés par le DRFP sur 58 espèces autochtones (dont la plupart figure parmi les espèces prioritaires) à Ranomafana (forêt humide de moyenne altitude dans la partie sud des hautes terres).

D’autres organismes non impliqués directement dans la gestion de ressources forestières réalisent également des actions de conservation, comme à Marovoay où des paysans de la localité ont effectué des essais de régénérations de Raphia (Raphia farinifera). Leurs essais consistent à traiter les régénérations naturelles, à transplanter certains sauvageons et à faire une plantation par semis direct en pot dans les vallées raphiaires.

3.1.2. Conservation ex situ

Les travaux de multiplication «ex situ» des ressources forestières sont nombreux à Madagascar. Ils concernent à la fois des espèces ligneuses et des espèces non ligneuses.

Banque de semences

En terme de matériels forestiers de reproduction (semences, plants ou parties de plantes), la création du Silo national des graines forestières en 1986 à Madagascar a permis de développer des actions de conservation ex situ des ressources génétiques forestières. Le SNGF a pour mission principale de fournir des semences forestières en quantité suffisante et avec une qualité (physiologique et génétique) irréprochable tout en assurant des mesures strictes de conservation. Le SNGF entreprend ainsi une action de conservation à deux facettes: conservation à court et à moyen termes pour approvisionner les reboiseurs et conservation à long terme pour certaines espèces particulières.

Depuis septembre 2000, le SNGF entreprend des collaborations avec le Royal Botanic Garden (Royaume-Uni) dans le cadre du projet Millenium Seed Bank (MSB). Le projet a pour objet de mener des recherches sur la conservation à long terme de graines orthodoxes. Une collecte de graines d’espèces forestières dans la région aride et semi-aride du Sud est effectuée dans le cadre du projet. Les échantillons de graines sont répartis en deux lots: le premier envoyé au MSB et le second gardé au SNGF. L’envoi au MSB fait l’objet d’un accord de transfert de matériel.

Multiplication

D’autres formes de conservation ex situ sont connues à Madagascar par le biais de différentes formes de multiplication d’espèces forestières notamment en pépinière et/ou en serre (par semis, greffage ou bouturage) et en laboratoire (par semis ou culture in vitro).

L’Office national pour l’environnement (ONE), le SAGE, l’Institut de recherche et de développement (IRD) et le Projet de structuration des filières horticoles (PSFH) collaborent avec le Département de biologie et écologie végétale de la Faculté des sciences de l’Université d’Antananarivo dans une action sur des espèces endémiques menacées (Orchidées, Pachypodium, Adansonia) et des espèces exotiques par l’utilisation de la biotechnologie de la vitropropagation. L’objectif de ces multiplications en laboratoire est de mettre à la disposition des opérateurs horticoles des matériels végétaux en assurant une réduction des pressions dans les forêts. Des résultats significatifs ont été enregistrés pour ces différentes espèces.

Parc botanique

Le parc botanique et zoologique de Tsimbazaza a été créé afin d’être une sorte de collection vivante d’espèces floristiques et faunistiques. Ainsi, quelques échantillons d’espèces figurant sur la liste des espèces prioritaires du plan national y sont représentés, comme Ocotea cymosa, Phyllarthron madagascariensis et Dalbergia sp. Le critère du choix adopté par le parc pour la conservation «ex situ» était basé auparavant essentiellement sur l’endémicité des espèces.

Arboreta et parcelles conservatoires

Les arboreta ont été installés dans plusieurs stations forestières réparties à travers toute l’île vers le début de la dernière décennie, notamment avec des espèces exotiques à croissance rapide pour observer leur potentialité en matière de reboisement. La mise en place des parcelles conservatoires s’intègre quant à elle dans les programmes d’amélioration. Elles sont destinées à conserver l’ensemble du patrimoine génétique pour une espèce donnée. Les espèces exotiques de reboisement (Pinus et Eucalyptus), Khaya madagascariensis et l’anacarde, ont été installées dans différentes localités de Madagascar par le Département de la recherche forestière du FOFIFA (Centre national de recherche agronomique appliquée au développement rural) en collaboration avec d’autres partenaires.

3.2. Amélioration génétique et programme de reboisement

3.2.1. Amélioration génétique

En 1969, face aux besoins considérables occasionnés par l’installation des grands périmètres de reboisement industriel, initiée par l’Etat dans la Haute Matsiatra, le Haut Mangoro et le Vakinankaratra, le Service des graines forestières fut créé au sein de la Direction des eaux et forêts. Parallèlement, élaborer un programme de sélection et d’amélioration est devenu une nécessité majeure afin de disposer de sujets de grande vigueur, de bonne forme susceptibles de donner un bois de bonne qualité. Ce programme a été préparé et mis au point par Dr Al. Nanson en collaboration avec M. Al. Rakotomanampison au début des années 70, avec l’appui de la FAO. La stratégie générale d’amélioration se résume à la sélection de peuplements à graines (à travers les différents périmètres de reboisement), à l’étude des provenances (comparaison de provenances locales avec des provenances introduites), à la sélection d’arbres «plus» et à la création de vergers à graines.

Les travaux d’amélioration génétique réalisés à Madagascar (annexe 8) concernent en grande partie les espèces introduites de reboisement. Il s’agit de Pinus kesyia, Pinus elliottii, Pinus patula, Pinus caribea, Pinus oocarpa, Eucalyptus robusta et Eucalyptus grandis.

Le Silo national des graines forestières (SNGF), suite à une relance des actions en faveur de l’arbre et à une préoccupation des fournitures de graines de reboisement villageois fut inauguré en 1986 (pour remplacer le service antérieur). L’institution était alors rattachée au service de la reforestation et des stations forestières de la Direction des eaux et forêts (DEF).

Avec l’appui de la Coopération helvétique, le SNGF a collaboré avec le Département des recherches forestières pour redynamiser le Programme d’amélioration génétique en y intégrant également Khaya madagascariensis (une espèce autochtone qui montre une aptitude spectaculaire en matière de conservation ex situ). Cette espèce, bien qu’originaire d’une zone limoneuse et rupicole caractérisée par un microclimat du type tropical humide, s’adapte sur les terrains ferralitiques des hauts-plateaux.

En outre, par le biais de l’appui de la Communauté européenne et du Cirad-Forêt (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), d’autres activités dans le programme d’amélioration génétique ont été développées pour renforcer les dispositifs d’approvisionnement en graines de qualité pour les reboiseurs notamment villageois. Les principales espèces concernées appartiennent aux genres Eucalyptus et Acacia.

3.2.2. Offre de semences

Les offres du Silo national concernent différentes catégories d’espèces: agroforestières et embroussaillement, autochtones, eucalyptus, feuillues de grande production, pins et résineux, ornementales. Le volume annuel de l’offre s’estime à environ 7 tonnes par an réparties approximativement entre 50 pour cent de stock antérieur et 50 pour cent de nouvelles récoltes. Une faible quantité de graines à la demande de certains opérateurs est importée par le silo national.

3.2.3. Demande de semences

Au niveau national, les utilisateurs de graines, tels qu’observés au SNGF, évoluent. Au début de la création du SNGF (1986-1990), 90 pour cent des clients étaient représentés par l’administration forestière et d’autres services publics. Par la suite (1991-1995), les projets bilatéraux et les organisations non gouvernementales (ONG) ont été les plus demandeurs de semences forestières. Actuellement, les privés et les particuliers constituent les clients potentiels du SNGF (plus de 60% de la clientèle en 2001).

Les espèces les plus massivement demandées correspondent à celles utilisées en agroforesterie et en embroussaillement. Puis viennent les espèces exotiques (genres Eucalyptus et Pinus) pour le reboisement de terrains dénudés. Une certaine réticence du public à utiliser les espèces autochtones est observée étant donné leurs croissances relatives faibles et leurs exigences écologiques particulières. Néanmoins, quelques espèces, telles que Khaya madagascariensis et Terminalia mantaly, commencent à être connues par les planteurs (environ 50 kg de graines cédées en 2001).

De ce constat, l’idée au niveau du SNGF de lancer le programme sur les ressources phytogénétiques forestières est née en vue de sensibiliser les différentes institutions et l’ensemble du public sur les ressources forestières autochtones, non pas obligatoirement dans des activités de reboisement mais plutôt dans un processus de gestion durable.

Sur le plan international, quelques pays d’Afrique, d’Europe, des Etats-Unis d’Amérique et de l’Océan indien, sont les principaux acheteurs de graines de Madagascar. Les principales espèces demandées correspondent à celles utilisables en ornementation.

1 Certains massifs sont considérés comme des forêts classées, et sont exemptés de toute forme d’exploitation. Leur gestion est soit directement assurée par l’administration forestière, soit confiée à certaines ONG internationales ou nationales pour exécuter des travaux de recherche et d’enrichissement sur certaines espèces particulières (par exemple, des recherches sur la conduite de régénération naturelle et d’enrichissement avec Prunus africana sont menées dans la forêt classée d’Ankeniheny par l’Association Miray en collaboration avec WWF et Conservation internationale [CI]). Il s’agit donc dans les forêts classées d’appliquer des méthodes de conservation in situ des ressources génétiques.

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