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4. RAPPORTS DES SESSIONS TECHNIQUES ET DES GROUPES DE TRAVAIL AD HOC

4.1 Evaluation des ressources

Convocateur :M. J. Lindner
Rapporteur :J. H. Kutkuhn
Documentation :E/1, 8, 23, 24, 27, 29, 38, 39, 41, 50, 67, 69
R/3, 5
RS/1

La session technique a traité de deux grandes questions : Evaluation des ressources et Méthodes d'évaluation.

Elle a examiné, sous la première rubrique, des comptes rendus de connaissances nouvelles sur la situation, l'importance, la répartition et le potentiel des stocks mondiaux de crevettes, et sous la seconde des rapports sur les techniques nouvelles employées en matière de pêche exploratrice et de projections des rendements. Les renseignements fournis dans les documents dont elle était saisie sont récapitulés ci-après (nombre de régions ne sont pas mentionnées car aucune communication ne leur avait été consacrée).

Atlantique Nord - La pêcherie du Groenland, alimentée par Pandalus borealis, n'est pas encore pleinement exploitée. On attribue les fluctuations de production aux fortes sautes thermiques du milieu. La pression de pêche s'exerçant sur les crevettes de taille non marchande pourrait être atténuée par des mesures visant à encourager les opérations en eaux plus profondes, où dominent les individus de plus grande taille. Selon une opinion, la production annuelle ne dépassera probablement pas à l'avenir 6 000 tonnes.

Atlantique Central - D'après les résultats de campagnes de prospection effectuées au large de la côte sud-est de Cuba, les prises de Penaeus duorarum et de P. schmitti sont moindres dans les zones non exploitées que dans celles qui font l'objet d'une pêche intensive. Bien que la possibilité d'un développement notable de la pêcherie paraisse insignifiante, on a entrepris la construction de nouveaux navires d'un type spécial.

Au terme d'un débat sur l'essor rapide que connaît en Floride la pêche côtière des appâts, qui s'exerce aux dépens de P. duorarum de petite taille, l'hypothèse a été avancée que de grands prélèvements de petites crevettes pourraient entraîner une diminution des effectifs parvenant sur les fonds de pêche traditionnels du large.

Atlantique Sud - On attribue davantage à des fluctuations naturelles de l'abondance qu'à une surexploitation la baisse de rendement de la pêcherie vénézuélienne ne de Penaeus schmitti et de P. duorarum en 1966. On se préoccupe beaucoup des répercussions qu'aura sans doute sur les ressources la construction d'ouvrages envisagée au débouché du lac de Maracaibo pour prévenir l'entrée de l'eau de mer et remédier au problème de l'envasement. La crainte a été exprimée que les barrages n'empêchent la migration des jeunes vers les “pouponnières”.

Il se peut qu'au nord-est du Brésil les eaux ne soient pas très riches en crevettes, quoique l'on ait décelé de bonnes concentrations de Penaeus aztecus au large du Brésil septentrional (entre 1 et 3° de lat. N et 48 et 49° de long. 0), à des profondeurs variant entre 36 et 73 mètres. De denses rassemblements de la Squille parfois appelée “oigale de mer” (Squilla lijdingi) fournissent une utile indication de la présence de crevettes d'importance commerciale.

Une enquête sur les ressources en crevettes - principalement Penaeidae - de l'Atlantique Est, de l'Espagne au Sénégal, a révélé que les rendements avaient notablement augmenté ces dernières 25 années. Dans cette région, les captures se sont dans l'ensemble stabilisées, quoique l'on soupçonne une surexploitation du plateau continental de l'Espagne et des Baléares. Un accroissement des prises est possible si l'on s'attache davantage à la pêche des espèces d'eaux profondes (de 200 à 1 000 mètres).

Pacifique Nord - Bonnes perspectives d'une augmentation des prises de Pandalus et de Pandalopsis en Colombie britannique. On s'attend à ce que la production passe de 750 à 1 200 tonnes durant les dix prochaines années.

Pacifique Central - La Galathée (Pleuroncodes planipes) offre dans le Pacifique Centre-Est un excellent potentiel, de l'ordre de 30 000 à 300 000 tonnes par an - mais des doutes ont été émis sur la valeur de ces chiffres et sur la manière dont les projections avaient été obtenues. A la suite du débat sur ce point, l'opinion a été exprimée qu'il convenait d'établir des normes pour l'évaluation du potentiel des ressources à partir des données disponibles, compte tenu d'éléments tels que niveau acceptable de production par unité d'effort, tailles diverses des navires fournissant les données sur l'abondance, etc.

Pacifique Sud - La petite pêcherie de la baie du Requin (Australie occidentale), alimentée par deux espèces de Penaeus, ne devrait pas pouvoir fournir plus de 92 000 tonnes d'ici 1975.

Région indo-pacifique - Les ressources en crevettes de cette importante région ont fait l'objet de deux communications : l'une décrivant le potentiel existant en Inde et l'autre récapitulant les connaissances actuelles sur la répartition des ressources ainsi que sur les méthodes de capture et d'élevage mises en oeuvre dans la région desservie par le Conseil indo-pacifique des pêches. On ne s'est pas efforcé d'estimer la production future, mais, selon l'un des documents, les ressources indiennes ne souffrent pas d'“overfishing”, et leur exploitation peut être rationnellement intensifiée. Il a été suggéré d'adapter à l'élevage des crevettes et des poissons les vastes superficies inutilisées que constituent en Inde les estuaires et autres eaux saumâtres.

4.1.1 Méthodes d'évaluation

Divers avis ont été exprimés quant au type de données qu'exige l'appréciation du potentiel des ressources par la prospection. Selon certains, les renseignements exigés et la marche à suivre, tels qu'ils sont exposés dans une des communications, sont trop raffinés et peu réalistes pour de nombreuses régions. Parfaitement consciente de la différence d'efficacité entre navires de recherche et navires de pêche commerciale, la Conférence a admis en général que si ceux-ci récoltent des quantités plus importantes que ceux-là, c'est parce que les patrons de pêche concentrent leur effort dans les secteurs où les espèces à évaluer semblent plus abondantes. On a insisté sur le grand intérêt, aussi bien pour les pêcheurs que pour les biologistes, de cartes indiquant la nature du fond, l'emplacement des “pouponnières”, etc., pour aider à localiser et à évaluer les ressources en crevettes de régions déterminées.

D'utiles débats ont été suscités par la question des progrès réalisés dans la mise au point d'un chalut électrique à crevettes et des problèmes qui doivent encore être résolus, particulièrement du fait des différences de conductibilité entre substrats. Des résultats prometteurs ont été enregistrés, mais on ne juge pas encore l'engin assez perfectionné pour pouvoir être généralement adopté. Il semble que les sédiments calcaires retardent la pénétration du champ électrique, ce qui réduit l'efficacité de l'appareil. Bien que les chaluts électriques ne se trouvent pas encore dans le commerce, on évalue à environ $ E.-U. 500 le coût des éléments nécessaires.

Sans aucun doute, il convient de perfectionner les techniques de pêche. Toutefois, la crainte a été exprimée que la mise en oeuvre d'engins plus efficaces non assortie de mesures de réglementation puisse accélérer le déclin d'importantes pêcheries de crevettes. La Conférence exprime l'espoir qu'il sera possible de concilier des directives adéquates en matière d'aménagement des ressources en crevettes et la pleine utilisation de la capacité des engins de pêche, de manière à éviter les conflits que pourrait provoquer un écart trop grand entre l'efficacité du matériel de pêche et les réglementations halieutiques nécessaires.

L'auteur d'une étude sur la détection des crevettes et les techniques de pêche employées dans les principales zones productrices a insisté sur l'importance que revêt une intensification de la recherche sur le comportement des crevettes en fonction de leur “capturabilité”. Si la localisation de ces animaux aux ultrasons n'a pas progressé à la même cadence que pour les poissons, les Japonais utilisent cependant largement cette méthode, notamment pour le chalutage entre deux eaux de Penaeus orientalis en mer Jaune et en mer de Chine orientale. Le repérage des crevettes à l'écho-sondeur requiert deux types d'appareil : un dispositif à haute fréquence pour localiser avec précision les populations benthiques et bathypélagiques, et un à fréquence moyenne pour déceler les organismes intéressants de plus grande taille - ou bien un sondeur à grande puissance à deux gammes de fréquences. Certains participants ont exprimé des doutes quant à la possibilité d'obtenir effectivement sur les échogrammes l'indication de concentrations de crevettes d'intérêt commercial.

Les participants ont examiné la possibilité de mettre au point des techniques électroniques capables de différencier entre les émissions bio-acoustiques des crevettes sur le fond. On a reconnu qu'il n'existait pas encore un matériel possédant une telle sensibilité.

4.1.2 Recommandation

La Conférence

Recommande que la FAO crée un Groupe de travail chargé d'étudier la mise au point d'une méthodologie et de normes pour l'évaluation des ressources en crustacés, en s'attachant particulièrement aux points suivants :

  1. Détermination d'un niveau acceptable de production future par unité d'effort de pêche national ;

  2. Interétalonnage des diverses expressions de l'effort de pêche ;

  3. Inventaire des ressources mondiales en crevettes, préparé en évaluant les types d'habitat les plus susceptibles de renfermer divers groupes de crevettes, et en établissant ensuite des projections de l'abondance au moyen d'un indice approprié.

4.2 Cycle biologique

Convocateur :K.F.W. Tiews
Rapporteur :J.J. Ewald
Documentation :E/6, 10, 13, 16, 17, 20, 22, 28, 30, 36, 37, 38, 40, 43, 47, 50, 52, 53, 62, 64, 65, 66, 68
R/1
SS/1 à 11
INF/2

Taxonomie et répartition - Plusieurs études synoptiques relatives aux espèces et comptes rendus d'expériences fournissent des données sur la taxonomie et la répartition des plus importantes espèces, des genres Crangon, Pandalus, Penaeus, Metapenaeus et Macrobrachium, faisant l'objet d'exploitation, certains communications ne traitant que des aspects des divers stades (larves, postlarves, adultes) touchant la morphologie et l'identification. Le document INF/2 indique la répartition mondiale des crevettes d'intérêt commercial.

De sérieuses lacunes sont apparues dans les connaissances sur la distribution des Pandalides, et des différences d'opinion ont été exprimées quant à la taxonomie des Penaeus duorarum pêchés en Afrique de l'Ouest et des Metapenaeus affinis d'Inde. La nécessité de recherches plus poussée sur a) la taxonomie des crevettes d'intérêt commercial ; b) la taxonomie et l'identification des larves et des premiers stades postlarvaires, a déterminé la création de deux groupes de travail ad hoc chargés de s'occuper des problèmes en question.

Développement, transport et survie des larves - Le nombre de stades larvaires libres durant le cycle biologique peut présenter d'énormes différences d'une espèce à l'autre, allant de O chez Sclerocrangon boreas par exemple, à 15 chez certains Penaeus. Pour une espèce donnée, ce nombre peut varier dans le cas d'élevage expérimental à diverses températures. Pandalus montagui passe par ll stades zoé à 10°C, et seulement 5 à 18°C. Etant donné les répercussions que cela peut avoir sur la durée de la vie planctonique et, partant, sur la répartition de l'espèce, des études plus approfondies sont nécessaires.

La répartition des larves jouant un rôle important dans l'évaluation des stocks en cours de reproduction, la Conférence juge qu'il faudrait accorder une plus grande place aux études sur les larves, et préciser les avantages que pourrait fournir une collaboration internationale plus étroite dans l'exécution de ces travaux, notamment en matière d'engins et de méthodologie.

On ne dispose d'aucune donnée quantitative sur la survie des larves de la plupart des espèces, et c'est à peine si l'on aidentifié certains facteurs affectant le taux de survie - tels que prédation, présence de nourriture, brusques modifications des conditions hydrographiques, mue. Il faut d'urgence entreprendre des recherches sur les besoins alimentaires aux différents stades larvaires, la disponibilité en organismes servant de nourriture, et la résistance des larves aux modifications du milieu. L'utilité de telles études a été démontrée en Floride méridionale, où l'on a calculé que la production annuelle des premiers stades protozoé de Penaeus duorarum était de l'ordre de 87 × 1011, avec un taux de survie journalier de 84 pour cent, ce qui donne dans les 85 × 108 postlarves pour alimenter les “pouponnières des zones côtières.

In vitro, la mortalité larvaire varie, et dépend du taux de charge initial et de la quantité de nourriture disponible. La plupart des expériences ont permis d'estimer le taux de survie, entre le stade nauplius I et la première postlarve, à environ 50 pour cent. Il est évident qu'il serait bon de normaliser les techniques de collecte des larves pour ce qui est tant des régions que des groupes d'espèces.

Ecologie des juvéniles - On connait mieux l'écologie des stades juvéniles dans le cas des crevettes d'eaux peu profondes que dans celui des crevettes des grands fonds. Les postlarves de Crangon crangon sont benthiques, leur répartition estivale étant analogue à celle des adultes, tandis que celles des Penaeidae sont pélagiques. Dans l'une des communications est émise l'hypothèse que les écarts de la salinité ne semblent pas influer sur l'abondance des stades postlarvaires de Penaeidae, tandis qu'il n'en va pas de même de la température.

Il faut rassembler d'urgence des données sur l'écologie des juvéniles pour pouvoir élucider la dynamique des populations. Si la recherche a fait de grands progrès dans ce domaine, il existe dans maints secteurs des lacunes à combler.

Longévité - Comme l'indiquent diverses communications, ce sont les Penaeus qui paraissent avoir la vie la plus brève (1–2 ans), tandis que les Pandalus vivraient le plus longtemps (3–7 ans). La longévité de C. crangon serait de 3 à 4 ans.

Rassemblement en bancs - On dispose de renseignements sur le comportement grégaire de certaines crevettes démersales de faibles profondeurs, mais on manque absolument de données sur les formes bathypélagiques. Etant donné le grand potentiel commercial de ces espèces, il importe d'effectuer des recherches sur leur comportement en matière de formation de bancs.

Les bancs de crevettes peuvent comprendre soit des individus de toutes tailles et de tous âges - p.ex. dans le cas de Pandalus jordani - soit au contraire des spécimens d'à peu près la même longueur ou le même âge comme Penaeus sp. On trouve fréquemment un seul banc sur les fonds de pêche - ce phénomène a été observé lors de captures de P. jordani - et la pêche d'autres animaux est alors réduite au minimum. Peut-être sous l'influence des facteurs ambiants, le banc évolue constamment des points de vue du volume et de la configuration. Il a été démontré que l'éclairement affecte le rassemblement en bancs de C. crangon.

Migration des adultes - Les crevettes manifestent une grande variété de mouvements migratoires en fonction du stade de maturité, de la reproduction, de l'alimentation et des stimuli du milieu - notamment température, salinité et éclairement.

Pandalus montagui se rapproche du rivage au printemps et s'en éloigne en automne, tandis que C. crangon effectue des migrations d'alimentation et de reproduction. Au début de mars, C. crangon s'approche du rivage pour pénétrer dans les eaux saumâtres riches en nourriture, et de mai à juillet de fortes concentrations de femelles ovigères émigrent vers le large, pour revenir près du littoral après la ponte. En octobre, les crevettes ont gagné les eaux plus profondes et plus salées.

Les jeunes Penaeus setiferus quittent les estuaires où ils ont pénétré à l'état de postlarves et se sont développés dans des eaux de moindre salinité. Il semble que la migration hors des estuaires soit liée à la maturation et à la température. En mer, les mouvements dépendent de la taille, de la localité et de la saison. Dans certaines régions, les crevettes se déplacent parallèlement à la côte sans gagner de plus grandes profondeurs. Dans d'autres secteurs, le seul mouvement bien défini consiste en un va-et-vient par rapport au rivage. La migration la plus longue enregistrée pour cette espèce a été de 667 km, la recapture ayant eu lieu 95 jours après le marquage.

P. schmitti manifeste durant son cycle vital un va-et-vient analogue. Les mouvements locaux seraient dus à la recherche de la nourriture et d'abris, et à des stimuli externes tels que température, éclairement et mouvements de l'eau.

La plupart des Penaeidae du littoral sud-ouest de l'Inde gagnet les eaux plus profondes à partir de février-mars, et sont de retour sur les terrains de pêche des hauts-fonds en septembre. Certains lient le déplacement vers les grands fonds aux “upwellings” (remontées d'eaux profondes) de la mousson. Metapenaeus dobsoni paraît se déplacer en sens inverse. Les deux types de mouvements manifestés par Solenocera indica sont en rapport avec la reproduction et l'influence de la salinité. On associe à l'éclairement la migration verticale journalière de Pandalus borealis et d'autres Pandalides. C'est seulement la nuit que les animaux quittent le fond, leur déplacement durant autant que la période d'obscurité.

En résumé, malgré le peu d'expériences de marquage réalisées sur les crevettes, des résultats remarquables ont été obtenus. Il est vivement recommandé d'intensifier ces opérations si l'on veut mieux connaître les migrations et identifier les populations intéressées. Il a été proposé d'employer des marques magnétiques pour l'étude des déplacements.

Parasites - Il n'a pas été décelé de parasites sur C. crangon, tandis que l'on a noté la présence du Bopyride Hemiarthrus abdominalis chez P. montagui et d'un autre Isopode (Bopyridae) non identifié sur Metapenaeus dobsoni. Parmi les huit parasites trouvés sur P. setiferus, seuls les Cnidosporidia peuvent influer sur la qualité, les autres paraissant sans danger pour l'homme. Il semble que la maladie du “point noir” notée chez P. schmitti soit due à une Microsporidie.

Bien qu'il existe des indices d'un accroissement du taux de mortalité dû à des infections parasitaires, notamment en crevetticulture, l'importance de ce facteur n'a pas été estimée à sa juste valeur, et la Conférence propose que la question fasse l'objet de recherches plus approfondies.

Prédateurs - Toutes les espèces de crevettes semblent subir une forte prédation, exercée par un grand nombre d'animaux aquatiques, y compris elles-mêmes. Une meilleure connaissance de la dynamique des populations paraît exiger que l'on élucide la question des taux de prédation. On a calculé sur une période de 10 ans que les stocks de C. crangon du littoral allemand de la mer du Nord subissent par prédation une perte annuelle de l'ordre de 145 milliards d'individus, chiffre de 1,7 à 4,3 plus fort que la mortalité par la pêche.

Il est vivement recommandé d'effectuer des recherches dans ce domaine, du fait de l'importance considérable que revêt l'évaluation de la perte quantitative que subissent les stocks de crevettes du fait de la prédation, considérée comme le premier facteur de mortalité naturelle.

Inversion du sexe - On n'a pas signalé de changement de sexe chez les Penaeidae, mais le phénomène est courant chez de nombreux Pandalides, où le pourcentage d'hermaphrodites protandriques peut varier intraspécifiquement et interspécifiquement. P. montagui peut compter jusqu'à 50 pour cent d'individus femelles de naissance, tandis que chez P. montagui tridens et P. platyceros, on n'en a pas relevé. Il a été démontré que les populations de Pandalides d'Alaska comprennent des femelles de naissance.

L'inversion du sexe n'est pas liée à l'âge, et varie d'une espèce à l'autre. Chez P. montagui, les mâles deviennent femelles à un âge variant entre 1 an et 1 an et demi, chez P. jordani entre 2 et 3 ans, chez P. platyceros à 2 ans et demi ; chez P. borealis, l'époque du changement varie d'une région à l'autre : 2 ans et demi dans les eaux méridionales de Norvège, de 4 à 5 ans au Groenland et dans le golfe d'Alaska, et 5 ans dans les eaux de l'extrême nord de la Norvège.

L'hypothèse récente suivant laquelle C. crangon manifesterait un changement de sexe est contestable, car on n'a pas relevé de stades transitoires dans les caractères sexuels mâles secondaires (première et deuxième paires de pléopodes), et les expériences d'élevage conduites dans des laboratoires allemands n'ont pas non plus confirmé l'inversion de sexe.

4.2.1 Recommandations

La Conférence recommande

4.2.1.1 Que quelques grands établissements disposant du personnel et du matériel appropriés soient choisis pour faire fonction de dépositaires de spécimens et de collections de référence, afin de faciliter l'étude du matériel à l'échelon mondial. On devra s'efforcer d'obtenir le concours d'institutions et organisations s'intéressant à la recherche crevettière.

4.2.1.2 Que la FAO constitue un groupe de travail chargé de préparer une bibliographie sélective sur l'identification des crevettes d'intérêt commercial, ainsi que de revoir, et, le cas échéant, d'amplifier la “List of species of shrimps and prawns of economic value” (“Liste des espèces de crevettes présentant un intérêt économique”), en s'attachant particulièrement à la vérification des aires de répartition, de la nomenclature scientifique et des synonymes, des noms vernaculaires, et de la distribution verticale des espèces énumérées. M. L.B. Holthuis a été proposé pour assumer les fonctions de convocateur.

4.2.1.3 Que des études soient effectuées sur les caractéristiques et le rendement des engins actuellement utilisés pour la collecte quantitative des larves et des postlarves, ainsi que sur la normalisation des méthodes, afin d'assurer la comparabilité des résultats. La question devrait être portée à l'attention du SCOR (Comité scientifique de la recherche océanique), pour examen par ses groupes de travail sur la normalisation des techniques d'étude planctonique.

4.2.1.4 Que l'attention des chercheurs soit appelée sur la nécessité d'étudier les aspects suivants du cycle biologique des crevettes :

  1. Ecologie des juvéniles ;

  2. Comportement en matière de formation de bancs, particulièrement pour les espèces bathypélagiques ;

  3. Expériences de marquage ;

  4. Infections parasitaires et maladies ;

  5. Evaluation quantitative des pertes subies par les stocks de crevettes par prédation.

4.2.1.5 Que soit coordonnée la recherche pour favoriser la collecte et le dépouillement des données ainsi que la normalisation et l'interétalonnage des méthodes et du matériel, afin de faciliter les échanges de renseignements et de spécialistes entre laboratoires.

La Conférence prie le Directeur général de la FAO de prendre les mesures voulues pour mettre en oeuvre les recommandations ci-dessus, et suggère que le Comité consultatif FAO de la recherche sur les ressources de la mer (CCRRM) soit chargé d'étudier les moyens d'y parvenir.

4.2.2 Groupe de travail ad hoc sur la taxonomie et l'identification des larves et des premiers stades postlarvaires de crevettes1

Convocateur :     S. Dobkin

Recommandations

La Conférence recommande

4.2.2.1 Que le Groupe de travail entreprenne de mettre à jour la “Bibliography of the Larvae of Decapod Crustacea”, de Guerney, dans la mesure où elle intéresse les crevettes, la révision couvrant tous les Natantia, ce qui fournira une base de comparaison entre espèces présentant une importance commerciale dans une même région.

4.2.2.2 Que le Groupe de travail se charge de préparer une liste de spécialistes de la taxonomie et de l'identification des larves et des premières postlarves de crevettes disposés à étudier le matériel qui leur serait adressé.

4.2.2.3 Que certains spécialistes soient priés de préparer les clefs et atlas illustrés régionaux concernant les larves et les premières postlarves de crevettes, la FAO étant invitée à étudier les moyens de financer cette activité.

4.2.2.4 Que le Groupe de travail soit reconduit, sous la direction de la Sous-Division de la biologie et du milieu marins de la Division des ressources et de l'exploitation des pêches de la FAO, jusqu'au terme de la tâche qui lui est actuellement assignée. MM. D.I. Williamson (Royaume-Uni) et D.F. Makarov (U.R.S.S.) devraient être invités à siéger au Groupe de travail.

4.2.2.5 Que les participants à la Conférence soient priés de se mettre en rapport avec les chercheurs de leur pays qui travaillent sur les larves et les premières postlarves de Natantia pour leur demander d'adresser au Convocateur du Groupe de travail des tirés à part et extraits des communications scientifiques qu'ils ont faites à partir de 1962.

4.2.3 Groupe de travail ad hoc sur la Liste des espèces de crevettes présentant un intérêt économique 1

Convocateur :     L.B. Holthuis

Recommandations

4.2.3.1 Le Groupe de travail présente les recommandations suivantes, en vue d'améliorer la “Liste des espèces de crevettes présentant un intérêt économique” (INF/2), de L.B. Holthuis et H. Rosa :

  1. Remplacer le titre par “List of species of shrimps and prawns of commercial value” (“Liste des espèces de crevettes présentant un intérêt commercial”), de façon à mieux préciser l'intention du document.

  2. Ajouter au document une introduction décrivant sa portée et son objectif, et expliquant les divers usages des termes “shrimps” et “prawns” (crevettes), sans toutefois s'efforcer de normaliser leur emploi.

  3. Remplacer les tableaux par de brefs alinéas pour chaque espèce, et le système de codage des zones terrestres et maritimes par une courte description de l'aire de répartition naturelle ; enfin, indiquer à part les régions où se pratique l'élevage des diverses espèces. Le code pourrait toutefois être retenu comme élément supplémentaire aux fins du traitement sur ordinateur.

  4. N'inclure dans la liste que les espèces qui fournissent des apports importants ; s'il est jugé bon d'y faire figurer d'autres espèces, les distinguer par une typographie spéciale.

  5. La nomenclature doit suivre rigoureusement la présente version de l'International Code of Zoological Nomenclature. Les contestations relevant uniquement de la nomenclature seront soumises à la Commission internationale de nomenclature zoologique, tandis que pour les divergences d'opinion concernant la taxonomie, le Groupe de travail choisira la solution qu'il juge préférable, en indiquant toutefois les autres avis exprimés.

  6. Pour chaque espèce, donner les renseignements suivants :

    1. Principaux synonymes ;

    2. Noms communs, avec indication de la langue et de la région où ils sont employés ;

    3. Habitants terrestres et aquatiques (voir iii) ;

    4. Taille maximale, exprimée en longueur totale (y compris rostre et telson) et en longueur de la carapace - ou du céphalothcrax - (du creux orbitaire au milieu du bord postérieur de la carapace) ;

    5. Type de fond préféré ;

    6. Profondeur de l'habitat - profondeurs où l'espèce a été signalée et profondeurs des zones de pêche ;

    7. Préciser s'il s'agit d'eaux marines, saumâtres ou douces ;

  7. La bibliographie sera considérablement développée, en se limitant toutefois aux traités de taxonomie, notamment ceux qui renferment des clefs des genres et des espèces ;

  8. La liste comportera deux index :

    1. Index des groupes taxonomiques et des régions géographiques ;

    2. Index des noms de genres et d'espèces, y compris les synonymes.

Le Groupe de travail recommande également :

4.2.3.2 Que M. L.B. Holthuis (Pays-Bas) entreprenne, avec le concours d'autres membres du Groupe de travail et de la FAO, la révision du document INF/2.

4.2.3.3 Que le questionnire ci-après (p.19) soit distribuś par la FAO à ses fonctionnaires régionaux des pêches pour diffusion dans leur région, les formules devant être, si possible, renvoyées avec un échantillon pour contrôle de l'identification.

4.2.3.4 Que soit établi, pour aider les chercheurs sur le terrain, un répertoire des spécialistes de la taxonomie des crevettes disposés à procéder à des identifications ; ce répertoire précisera les groupes taxonomiques et les régions géographiques en provenance desquels les spécialistes sont prêts à accepter des spécimens.

4.2.3.5 Que soient préparées deux autres publications :

  1. Listes analogues à celles dont il est question ci-dessus, mais complétées, pour toutes les espèces, par des clefs et des illustrations ;

  2. Carnets de conception simple, à feuillets mobiles, illustrés, destinés aux fonctionnaires opérant sur les marchés et autres personnes s'occupant de rassembler les statistiques. Le carnet remis à l'agent renfermera seulement les pages relatives aux espèces qu'il sera amené à examiner, tandis que les principaux laboratoires de son pays posséderont un jeu complet des feuillets publiés.

Il conviendrait d'envisager la possibilité que ces diverses publications paraissent sous l'égide de la FAO.

1 Pour la liste des membres du Groupe de travail, voir l'annexe 1.

QUESTIONNAIRE RELATIF AUX CREVETTES COMMERCIALEMENT IMPORTANTES

(Employer une formule pour chaque espèce)

1.Nom scientifique :  
    
2.Source de l'identification :  
 (manuel, clef, etc.)  
    
3.Nom(s) vernaculaire(s) :  
 (spécifier la langue ou le dialecte ; si le nom n'est employé que dans une zone restreinte, en préciser les limites)  
    
4.S'agit-il de populations naturelles ou de populations d'élevage ?  
    
5.Région(s) géographique(s) où l'espèce est capturée :  
 (énumérer séparément les populations naturelles et les populations d'élevage)  
    
6.Gamme de profondeurs des captures :  
    
7.Taille maximale :  
 (préciser le critère de longueur employé : i) longueur de la carapace (longueur du céphalothorax) [bord postérieur du creux orbitaire à milieu de la partie postérieure de la carapace] ou ii) longueur totale [y compris rostre et telson] ou, de préférence, les deux)  
    
8.Nature du fond habité par l'espèce :  
    
9.Salinité des eaux :  
 (bien que l'indication “eaux douces”, “eaux saumâtres”, “eaux marines” puisse suffire, il serait souhaitable de fournir des précisions supplémentaires)  
    
10.Importance commerciale :  
 (cocher l'une des cases)     grande moyenne mineure
11.Utilisation :  
 (préciser si l'espèce sert : a) à l'alimentation humaine ; b) comme appât ; c) à d'autres fins (spécifier). Sous a), indiquer si l'animal i) est consommé tel quel ; ii) sert à la préparation de farine, pâtés, pâte, sauces, etc. (préciser) ; iii) est utilisé entier ou décortiqué ; iv) est consommé frais, cuit, séché, frit, etc.)  
    
12.Indiquer de façon précise le lieu et la date de la capture, la personne ayant récolté l'animal, et tous autres détails relatifs à l'échantillon joint au présent questionnaire.  

4.3 Physiologie et comportement

Convocateur :H. Schafer
Rapporteur :A.B. Williams
Documentation :E/3, 4, 5, 14, 15, 25, 32, 33, 48, 49, 55, 56, 58, 59

En milieu saumâtre, les animaux marins doivent contrebalancer la dilution de leurs humeurs par des processus actifs. Le degré d'osmorégulation dont les animaux sont capables fournit un indice de leur tolérance à la salinité. Les crevettes des estuaires et des zones côtières accusent des différences de comportement osmotique, particulièrement en matière du point d'isotonie, mais tendent généralement à être hypotoniques en eau de mer et hypertoniques en milieu estuarin. Les processus métaboliques et l'activité des crevettes dépendent dans une grande mesure de la température ambiante, se ralentissant lorsque celle-ci baisse et s'accélérant lorsqu'elle s'élève. Si les postlarves et juvéniles de Penaeidae supportent relativement bien une gamme thermohaline étendue, les adultes tolèrent généralement mal les basses salinités et les basses températures.

Osmorégulation - A des températures de 8,7 – 8,8° C, l'activité osmorégulatrice de Penaeus aztecus et de P. duorarum est affectée, et le sang de ces animaux devient isotonique. La pression osmotique sanguine de Palaemon serratus croît, à salinité constante, avec un abaissement de la température. C. crangon recherche des eaux plus salées quand la température diminue. Nombre d'espèces marines d'eaux tempérées tendent à être représentées dans les régions tropicales par des homologues adaptés aux eaux saumâtres ou douces. C'est au-dessus de 15° C que la crevetticulture pose le moins de problèmes.

Il semblerait, d'après ce qui précède, qu'aux basses températures les processus métaboliques se ralentissent au point d'empêcher une bonne osmorégulation, tandis qu'à température plus élevée, la régulation osmotique permet aux animaux de vivre en eaux moins salées.

Température - La température semble influer sur la croissance. Entre 15 et 25° C, le taux de croissance de P. setiferus augmente régulièrement ; de 25 à 32,5° C, il demeure constant, puis diminue entre 32,5 et 35° C. Chez P. aztecus, on relève une augmentation rapide du taux de croissance de 15 à 20°C, un ralentissement de 20 à 25°C, et aucun accroissement de 25 à 32,5°C. A 35° C, le taux diminue, et à cette température aucun animal ne survit plus de 11 jours. Du point de vue de la survie, la période d'acclimatation joue un rôle très important.

L'hypothèse a été avancée que l'on pourrait tirer profit, pour localiser de nouvelles ressources, des connaissances déterminées in vitro sur les conditions optimales convenant à telle ou telle espèce. L'étude des captures de P. setiferus, P. duorarum et P. aztecus effectuées de la Caroline du Nord au Texas a révélé un lien apparent entre accroissement des pêches et augmentation de la température ambiante.

Le long du littoral allemand de la mer du Nord, les captures de C. crangon par unité d'effort augmentent durant les mois d'été chauds, mais cela dépend en partie de la taille du stock. Par contre, on n'a pas relevé dans le golfe de Tehuantepec (Mexique), de corrélation entre température et pêche, sauf durant une année aberrante où des prises plus importantes ont accompagné des températures en baisse. Mais on a noté un net rapport entre augmentation des captures et chute de température causée par des “upwellings”.

Dans les zones tropicales et subtropicales, les pêches subissent davantage l'influence de la salinité que celle de la température, sauf quand une température élevée est combinée à une faible teneur en oxygène dissous.

Il a été procédé à une comparaison entre deux populations de Pandalus borealis occupant dans la région de Terre-Neuve des eaux dont la température respective était 4 – 6° C et 0° C : la première population renfermait des individus de plus grande taille et un pourcentage élevé de femelles pondant toutes chaque année ; dans la seconde, les animaux étaient plus petits et comptaient peu de femelles, dont moins de 65 pour cent pondaient annuellement. Il apparaît évident qu'en eaux froides les mâles atteignent leur taille maximale avant l'inversion du sexe. L'étude en question a permis de formuler des recommandations touchant les futures activités de pêche dans la région.

Dans les eaux du Skagerrak, une baisse de 2°C a réduit les captures de 50 pour cent. En Alaska, des hivers particulièrement rigoureux peuvent chasser les peuplements de P. borealis vers les eaux plus profondes. Tant que la température demeure à l'intérieur de certaines valeurs extrêmes, il semble que les crevettes ne soient limitées dans leurs déplacements que par leurs exigences en matière de salinité.

Salinité - Dans des conditions expérimentales, les jeunes Penaeus duorarum manifestent une forte rhéotaxie positive pour une salinité constante, le sens du mouvement s'inversant lorsque la salinité décroît de 2 par 20 mn. Les postlarves ne nagent pas contre de forts courants, mais une baisse de salinité se traduit par une diminution d'activité, les animaux se posant alors sur le fond. L'accroissement de salinité déclenche le processus inverse. Ce comportement peut expliquer le mouvement vers le littoral des postlarves durant le flux et l'éloignement des juvéniles vers le large lors du reflux. Des modifications isolées - p. ex. une chute de salinité de 60 à moins de 10 dans une lagune équatorienne - n'ont pas produit d'émigration des juvéniles de la zone intéressée. L'hypothèse est avancée que la réponse des jeunes crevettes correspond dans l'ensemble davantage à la vitesse de la modification qu'à la variation absolue de salinité. Il faudra étudier plus avant l'incidence d'autres facteurs ambiants sur les réponses rhéo taxiques.

On a relevé au Texas de nettes corrélations entre prises de Penaeus setiferus et chutes de pluie durant les deux années précédentes sans noter de rapport analogue pour P. aztecus. Il faudrait étudier la liaison entre captures de crevettes, température et apports d'eau des fleuves. Il est possible que si la pêche augmente, dans les systèmes lagunaires et dans certaines zones maritimes peu profondes après des tempêtes, cela provienne d'un accroissement des disponibilités en nourriture.

Selon les résultats d'études effectuées dans les parages de Galveston Bay, une forte baisse de la température de l'eau semble stimuler l'émigration de P. setiferus, et l'on pense qu'ici le facteur thermique est déterminant.

Disponibilités en nourriture - Croissance, reproduction et migrations sont tributaires des disponibilités alimentaires. C'est l'existence d'une nourriture abondante qui favorise la croissance de la glande reproductrice des femelles de C. crangon, permettant la ponte après chaque mue. Quand la nourriture manque, les mues ne sont pas toutes suivies de ponte.

Les crevettes n'emmagasinent pas d'importantes réserves dans leur organisme. Chez des P. duorarum que l'on a fait jeûner durant ll jours, la teneur en lipides de l'hépatopancréas est tombée de 52 à 8 pour cent. La teneur en glycogène de la glande a également diminué, quoique beaucoup plus lentement. Le taux protéinique, exprimé en azote total, est demeuré constant, mais on a noté un rapetissement de la glande, tombée de 38 mg/g de poids corporel à 22 au bout de 7 jours de jeûne. Les crevettes privées de nourriture disposent, comme réserves, de quantités de lipides, protéines et glycogène équivalant respectivement à 85,8, 14,07 et 0,12 pour cent. La chute rapide de la teneur lipidique indique que ces réserves s'épuisent relativement vite.

Il ne semble pas que les populations nombreuses de crevettes consomment d'importantes quantités de particules alimentaires de grande taille, et l'épifaune et l'épiflore des substrats vaseux paraissent jouer un rôle prédominant dans leur alimentation. Certaines espèces manifestent des préférences, et les habitudes alimentaires évoluent avec la taille. Les crevettes maintenues en étangs dans des conditions constantes des points de vue de la salinité, de la température et de la disponibilité en nourriture manifestent une croissance fortement accélérée après leur mise en liberté. Il se peut aussi que certaines fluctuations “démographiques” proviennent de modifications de l'environnement influant sur les disponibilités alimentaires.

La présence de nourriture intervient dans la sortie de P. duorarum, dont l'enfouissement et l'émergence suivent non seulement un cycle obscurité-lumière mais aussi un rythme nycthéméral d'alimentation. P. duorarum s'enterre lorsqu'il fait clair et sort au début de la nuit, mais la présence de nourriture le fait “lever” même à la lumière.

Oxygène - Penaeus indicus et P. semisulcatus consomment moins d'oxygène lorsqu'ils jeûnent que lorsqu'ils sont alimentés, leur consommation d'oxygène diminuant de 32 et de 57 pour cent respectivement, entre le premier et le second jour de jeûne. Dans une eau renfermant la même quantité d'oxygène, la survie des crevettes privées de nourriture est en outre supérieure à celle des crevettes alimentées, constatation dont on peut tirer profit pour la conservation de ces animaux. P. schmitti survit plus longtemps hors de l'eau de mer à de basses températures et la consommation d'oxygène de cette espèce est en rapport direct avec le poids corporel.

Mue - Le cycle de la mue modifie les processus métaboliques des crevettes et peut masquer des modifications ayant d'autres origines. L'examen microscopique des brosses des endopodites des pléopodes révèle des modifications discernables de la structure interne qui permettent d'identifier chez P. duorarum les stades précoces de postmue et d'intermue.

Généralités - Certains aspects de la physiologie et du comportement des crevettes ont été étudiés, mais il demeure d'importantes lacunes exigeant des recherches. Il serait bon par exemple de connaître la réaction de ces animaux à certains stimuli ainsi que leurs processus physiologiques, afin d'élucider leurs migrations, leur croissance, leur mortalité, leur reproduction et de mettre au point de meilleures méthodes de capture. Une connaissance approfondie des facteurs ambiants influant sur les processus physiologiques permettrait non seulement de mettre au point des pratiques d'élevage, mais également d'améliorer les prévisions des prises de la pêche commerciale.

Si certains facteurs environnementaux - comme les pluies et la température de l'air - échappent actuellement à l'intervention de l'homme, celui-ci est souvent en mesure de modifier le milieu à ses fins. Malheureusement, dans la plupart des cas, son action a été nocive pour les pêcheries de crevettes : l'homme a pollué les estuaires, bloqué les chenaux d'accès, modifié les substrats par des dragages, et interrompu les apports d'eau douce par des opérations de drainage. Mais il serait possible de faire marche arrière et de s'efforcer par exemple de modifier les conditions ambiantes des estuaires et des lagunes pour y favoriser la survie et la croissance des crevettes durant certaines phases de leur cycle biologique.

4.3.1 Recommandation

La Conférence recommande que,

Pour combler les lacunes dont souffrent actuellement les connaissances sur la physiologie et le comportement des crevettes, l'attention des chercheurs soit appelée sur les points suivants, qui devraient faire l'objet d'une étude spéciale :

  1. Limites de tolérance des crevettes, à divers âges, pour ce qui est des facteurs physiques du milieu ;

  2. Evaluation des effets conjugués des facteurs environnementaux sur les populations de crevettes ;

  3. Clarification de la signification des termes “postlarve”, “juvénile”, “subadulte”, etc. ;

  4. Cause du cannibalisme au sein des populations en confinement ou faisant l'objet d'élevage ;

  5. Efficacité de l'alimentation et préférences alimentaires.

4.4 Statistiques des prises et de l'effort de pêche

Convocateur :J.L. Obarrio
Rapporteur :R.W. Ellis
Documentation :E/6, 9, 12, 19, 46, 54, 57, 61
INF/1

La session consacrée aux statistiques avait pour objectif de procéder à un débat et d'établir des définitions en matière de normalisation, d'exploitation et de qualité des données relatives aux crevettes.

Les besoins statistiques des pouvoirs publics, de l'industrie, des économistes et des biologistes des pêches vont de pair avec le développement des pêcheries des crevettes. Des données sont requises dans les domaines suivants : captures totales et valeur par espèces, tailles des crevettes pêchées, effort de pêche, unités d'effort, ports de débarquement et lieux de pêche. Dans certains cas, leur collecte exige l'emploi de cahiers de pêche à bord des navires ou des interrogatoires directs des patrons de pêche.

Les communications dont était saisie la Conférence exposaient les diverses méthodes employées pour le rassemblement des statistiques et les problèmes à résoudre. Ces derniers portent principalement sur les points suivants :

  1. Exactitude et authenticité des données ;

  2. Hésitation de la part des pêcheurs à communiquer des renseignements sur la pêche (crainte du fisc) et sur les lieux de pêche, particulièrement en cas de découverte de nouveaux terrains ;

  3. Difficulté d'obtenir des statistiques complètes, notamment si l'on a affaire à un littoral étendu ;

  4. Difficulté d'obtenir une ventilation précise par espèces, étant donné l'usage de noms vulgaires différents pour les mêmes animaux dans divers secteurs ;

  5. Coefficients de conversion ;

  6. Etablissement de la valeur des prises au débarquement (“ex-ship”).

Les participants ont décrit diverses méthodes de manipulation de masses de données sur ordinateur (traitement, enregistrement et récupération rapide), et les suggestions suivantes ont été faites pour l'amélioration des statistiques actuelles :

  1. Normalisation des modes de collecte et de présentation, afin de faciliter la comparaison des données et d'accroître leur utilité pour les chercheurs ;

  2. Classement des espèces en catégories ;

  3. Détermination des captures de crevettes effectuées au large de tel ou tel pays par des navires basés dans d'autres pays ;

  4. Préparation d'une liste de noms vulgaires et scientifiques à employer dans la présentation des statistiques, d'abord régionalement puis à l'échelon mondial, afin de clarifier les classifications statistiques ;

  5. Distinction, dans les statistiques officielles, entre crevettes étêtées et non étêtées ;

  6. Amélioration de la collecte des données sur les quantités rejetées à la mer ;

  7. Inclusion dans les statistiques de la valeur des prises, qui joue un grand rôle dans les études économiques et dans les décisions de gestion.

Le débat a révélé que la plupart des données d'ordre commercial et économique sont rassemblées par dénombrement et que l'on a très peu étudié l'emploi du sondage stratifié. Aussi la Conférence est-elle convenue qu'il faut consacrer davantage de recherches à la mise au point de méthodes de rassemblement de statistiques commerciales et économiques sur les crevettes faisant appel aux techniques du sondage stratifié, cela afin d'abaisser le coût des statistiques et d'accroître leur actualité.

4.4.1 Groupe de travail ad hoc sur les statistiques des pêches (crustacés)1

La Conférence juge qu'il convient d'établir un Groupe de travail ad hoc sur les statistiques des pêches (crustacés), dont le convocateur sera M. G.G. Snow, pour s'occuper des problèmes soulevés. La Conférence entérine les recommandations suivantes :

4.4.1.1 Tous les pays doivent être encouragés à utiliser pleinement les moyens régionaux de la FAO et d'autres organisations internationales afin de mettre sur pied de bons programmes statistiques concernant les crustacés. Il convient aussi d'encourager le libre échange entre pays de renseignements touchant les méthodes employées et les résultats obtenus dans l'exécution de programmes statistiques relatifs aux crustacés.

4.4.1.2 Afin de permettre une précision plus grande dans les données relatives aux apports par l'emploi de coefficients normalisés de conversion pour le calcul du poids vif, la FAO est priée d'établir et de publier une liste de ces coefficients à l'intention de tous les pays, et de mettre sur pied une série do coefficients de conversion pour les produits à base de crustacés faisant l'objet d'échanges internationaux.

4.4.1.3 Des biologistes devraient faire partie de tous les comités et groupes de travail permanents s'occupant de statistiques halieutiques, ce qui assurerait l'élaboration de programmes conçus pour fournir des données répondant à tous les besoins.

4.4.1.4 La FAO devrait élaborer des directives en vue d'éliminer les doubles emplois dans la communication des données sur les quantités mises à terre.

4.4.1.5 La “Liste des espèces de crevettes présentant un intérêt économique” devrait servir de point de départ à la préparation de nomenclatures normalisées des espèces aux fins des publications statistiques de la FAO.

4.4.1.6 La FAO devrait publier dans des bulletins régionaux les apports par principaux types d'engins de pêche, en précisant la “prise par unité d'effort” quand cet élément peut être établi.

4.4.1.7 La FAO devrait encourager tous les pays à publier des statistiques sur les quantités de crevettes produites en élevages, statistiques qui feraient l'objet d'une rubrique distincte dans l'“Annuaire statistique des pêches” de la FAO.

1 Pour la liste des membres du Groupe de travail, voir l'annexe 1.

4.5 Evaluation des stocks

Convocateur :R.G. Ghittleborough
Rapporteur :E.S. Iversen
Documentation :E/7, 34, 35, 42, 43, 45, 47, 51, 60
SS/1 à 11

Les communications dont la Conférence était saisie visaient essentiellement l'évaluation des stocks plutôt que la biologie descriptive des espèces. Elles ont permis de passer en revue les connaissances sur l'état des stocks de crevettes, les progrès réalisés à ce jour, et les lacunes existantes. Elles renfermaient également des études sur les paramètres de croissance ou de mortalité naturelle qui jouent un rôle dans l'estimation des stocks.

L'évaluation des stocks peut servir à comparer niveau actuel d'exploitation et rendement maximal soutenu pouvant être obtenu d'une pêcherie. Elle peut également être utilisée pour tenter de prédire la production des stocks exploitables.

Parmi les caractéristiques générales des populations de crevettes intéressant l'étude de leur dynamique figurent la brièveté de la vie, la fertilité très élevée et la forte mortalité des larves et des juvéniles. Le recrutement est élevé, les nouvelles recrues constituant une forte proportion (chez certaines espèces, la totalité) du stock “pêchable” annuel. Mais la différence la plus marquée, en matière de dynamique des populations, entre la plupart des poissons Téléostéens et les crevettes est peut-être que chez ces dernières le recrutement fluctue davantage, apparemment du fait des modifications de plusieurs de ses éléments : fertilité, croissance et surtout mortalité naturelle.

Les aspects écologiques pouvant jouer un grand rôle dans l'évaluation des stocks, les participantants ont vivement appuyé une proposition aux termes de laquelle la Conférence insiste sur la nécessité de procéder à davantage d'études dans ce domaine.

Progrès signalés

a) Exposés synoptiques concernant les espèces - Les ll communications présentées ne constituent qu'une faible fraction du nombre total d'espèces mentionnées, mais il en ressort que l'évaluation des stocks de crevettes a progressé.

Sous la rubrique “Structure des populations”, les documents indiquent que l'on dispose de moins de connaissances sur l'âge des crevettes que sur le sex-ratio et la composition par taille. Chez les espèces à grande longévité - Pandalides et Crangon crangon - la structure par âge a été relevée pour certaines populations.

Pour certaines de ces espèces à grande longévité, les taux de croissance ont été notés avec beaucoup de précision. Les données sur la croissance enregistrées pour les Penaeidae d'élevage sont précieuses, mais il a été précisé à d'autres sessions que lorsqu'on étudie la dynamique des populations sauvages, ces données peuvent n'être pas applicables, ou tout au moins doivent être employées judicieusement. L'application des taux de croissance obtenus à partir de la variation des diverses catégories de taille modale, calculée sur des échantillons provenant de populations sauvages, nécessite des connaissances approfondies des migrations et dispersions si l'on veut être sûr que l'on suit bien la même catégorie.

Des mesures de la fertilité ont été faites pour certaines espèces, mais l'on possède peu d'indices de l'influence du milieu sur celle-ci.

Les seuls renseignements concernant le recrutement relevés dans les exposés synoptiques visaient Pandalus jordani et Crangon crangon.

Les données sur les taux de mortalité sont très rares. On dispose d'estimations pour P. jordani, accusant des variations tant entre classes d'âge qu'au cours d'une même année. Ce n'est que pour Metapenaeus dobsoni et Penaeus setiferus qu'ont été relevées des évaluations du coefficient de mortalité totale.

On a enregistré quelques valeurs de l'abondance relative, exprimées en captures par unité d'effort, mais seulement dans le cas de P. jordani s'est-on efforcé d'estimer la densité absolue sur la base des prises et de la superficie draguée par le chalut.

Aucun des ll exposés ne fournit de renseignements sur la dynamique des populations, ce qui laisse supposer que, si l'on a rassemblé certaines données d'ordre descriptif, on ne sait pas encore déterminer, pour aucune population de crevettes, l'interaction des diverses variables dans les différentes conditions du milieu et de la pêche. Toutefois, il devrait être possible de réaliser une évaluation des stocks même sans disposer de résultats concluants sur chacune des variables en question.

Bien que les exposés synoptiques concernant les espèces ne couvrent pas de façon complète la situation actuelle des connaissances sur l'estimation des stocks de crevettes, on s'est efforcé, dans des publications antérieures, d'évaluer l'importance des populations, la mortalité par pêche, l'immigration, ainsi que des valeurs combinant émigration et mortalité naturelle, pour les Penaeus duorarum de Floride méridionale.

C'est le recrutement qui paraît fournir la clef de l'évaluation des stocks de crevettes, les recrues constituant une fraction importante, voire la totalité, du stock présent sur les fonds de pêche en début de campagne, de sorte que le succès de l'exploitation est fonction des fluctuations du recrutement. En matière de recherche crevettière, trois méthodes ont été appliquées pour estimer celui-ci : la première s'appuie sur l'échantillonnage quantitatif ou semi-quantitatif de postlarves ou de juvéniles pour prédire le niveau du recrutement ; la deuxième a recours au marquage et à la recapture ; et la troisième repose sur les statistiques des prises commerciales et de l'effort de pêche. Pour être appliquée efficacement, chacune exige certaines connaissances d'aspects écologiques tels que la mortalité naturelle, la croissance et la migration. On a parfois combiné plusieurs méthodes, par exemple marquage et captures par unité d'effort dans une population de P. duorarum.

b) Comptes rendus d'expériences - Pandalus borealis étant une des espèces à grande longévité, l'étude des maximums de la composition par taille dans des échantillons de la population, si l'on connaît le taux de croissance, permet de comparer l'abondance de plusieurs classes d'âge. Un rapport a été établi entre fluctuations de l'abondance des classes d'âge et rigueur du premier hiver après l'éclosion. Il s'agit ici de valeurs relatives plutôt qu'absolues, mais qui présentent de l'intérêt, car les variations annuelles du recrutement sont liées aux fluctuations des conditions ambiantes durant les premiers stades de l'existence, les plus critiques. C'est là un utile premier pas vers la connaissance de la dynamique des populations de P. borealis des Pribilof.

Etant donné que les Pandalus jordani ne sont pas capturés par les filets de pêche avant leur seconde année de vie, le merlu du Pacifique (Merluccius productus), prédateur de cette crevette, est considéré comme un excellent collecteur de spécimens. La composition par âge des populations a été déterminée sur la base de la fréquence des longueurs des crevettes capturées par les merlus ainsi que de données sur les taux de croissance et sur l'âge à l'inversion du sexe. On a ensuite exprimé l'abondance relative de chaque classe d'âge en prise par unité d'effort pour un filet de pêche. L'inconvénient de la méthode est toutefois que l'on suppose identique d'une année à l'autre le rapport prédateur - proie. Les taux de mortalité ont été calculés à partir d'estimations successives des captures de chaque classe d'âge par “effort de pêche du prédateur”. Certains recoupements des résultats ont pu être effectués grâce à des enquêtes en mer soigneusement organisées et conduites pendant que l'on prélevait les divers échantillons dans les contenus stomacaux des poissons. Sur la base des études en mer, on a estimé l'effectif de la population en multipliant la prise moyenne par chalut par le rapport entre zone étudiée et superficie draguée par unité d'effort.

En se fondant sur un échantillonnage de la population d'Artemesia longinaris d'Argentine effectué à intervalles rapprochés, et compte tenu des modifications des tailles modales (avec l'aide d'études sur la mue en aquarium), on a pu obtenir des courbes de croissance de von Bertalanffy pour la population présente durant une année. Si ces travaux peuvent être poursuivis, on parviendra à déterminer certaines valeurs de la variabilité du taux de croissance d'une année à l'autre, et l'on s'efforcera alors d'établir des corrélations avec les facteurs ambiants.

L'une des communications traitait de la taille à la maturité, de la fréquence de la ponte et de la fertilité de plusieurs Penaeidae du sud-ouest de l'Inde. Si cette étude doit constituer un premier pas sur la voie de l'évaluation des stocks, on peut procéder de deux manières : soit, s'il est facile d'obtenir des premiers stades larvaires d'une espèce, les dénombrer afin d'avoir, en utilisant le taux de fertilité qui a été mesuré, une estimation de l'importance du stock de reproducteurs, soit effectuer des études quantitatives des larves et postlarves pour mesurer la survie avant le recrutement.

Cette seconde méthode - à savoir échantillonnage quantitatif de larves et de postlarves visant à déterminer la densité, et, partant, la biomasse totale aux divers stades de développement - est exposée dans une autre communication, qui traite de l'évaluation par cette technique du nombre de Penaeus duorarum pénétrant dans la “pouponnière” des Everglades. Cette façon de procéder marque un grand progrès dans l'étude de la dynamique des populations de crevettes.

Un autre document fait état d'une bonne corrélation positive entre abondance relative des jeunes P. duorarum quittant les “pouponnières” et volume des crevettes de petite taille figurant un peu plus tard dans les apports de la pêche commerciale. La méthode, reposant sur des procédés quantitatifs, a déjà atteint le point où il est possible de formuler un système de prévision de l'abondance relative des “pink shrimps” (P. duorarum) sur les fonds de pêche. Peut-être pourra-t-on à l'avenir mesurer les taux de survie et prédire ainsi le rendement effectif de chaque génération de juvéniles.

Une tentative a été faite de rattacher l'abondance relative des postlarves pénétrant dans une “pouponnière” et celle des juvéniles la quittant, et d'établir une corrélation entre les deux maximums d'abondance et les prises commerciales au large. Les résultats obtenus donnent une assez bonne idée des fluctuations annuelles du stock d'adultes des sept dernières années.

On dispose de très peu de modèles permettant d'évaluer les stocks de crevettes. La Conférence était toutefois saisie d'un modèle impressionnant de la pêcherie de crevettes de la baie du Requin (Australie), conçu afin d'obtenir des renseignements déterminés sur la dynamique des deux populations présentes. La construction de ce modèle confirme qu'une condition préalable est l'obtention de données précises et complètes sur les captures, l'effort de pêche et la composition des prises.

Les débats de la session ont fait apparaître que l'on dispose, pour la plupart des espèces de crevettes étudiées, de renseignements limités utilisables pour bon nombre des mesures requises pour l'établissement de l'équation de la dynamique des populations. Par contre, des données relativement complètes dans ce domaine n'existent que pour quelques espèces.

4.5.1 Recommandations

La Conférence recommande ce qui suit:

4.5.1.1 Une bonne évaluation des stocks de crevettes exige l'exécution d'un travail descriptif considérable sur la biologie de ces animaux. Il est instamment recommandé que les études visent particulièrement à estimer la taille et la variabilité des stocks.

4.5.1.2 Plutôt que de consister en une estimation du “standing crop” (stock transitoire de matière vivante), l'évaluation du stock doit porter sur plusieurs années, afin que :

  1. Puisse être établi un rapport entre variations du nombre des recrues entrant dans le stock “pêchable” et fluctuations des conditions ambiantes;

  2. Le niveau de pêche puisse être rattaché au rendement maximal soutenu de la pêcherie.

4.5.1.3 Du fait des nombreuses difficultés que présente l'estimation de la dynamique des populations de ce groupe d'animaux, notamment l'extrême variabilité, les travaux d'enquête devraient s'effectuer selon plusieurs voies, de manière à permettre des recoupements.

4.5.1.4 Les chercheurs devraient continuer à mettre au point de nouvelles méthodes et techniques pour estimer la densité et la taille du stock. Parmi les diverses possibilités figure l'emploi du sonar et de dispositifs optiques de “balayage”.

4.5.1.5 Les estimations de la taille du stock devraient être exprimées en des termes aisément compréhensibles et applicables par l'industrie des pêches. Il est fréquent que l'indication de la seule dimension du stock ne soit pas d'un grand secours à l'industrie halieutique, et il faut tenir compte de ses impératifs économiques. En fin de compte, biologistes, économistes et industriels doivent collaborer s'ils désirent que les données biologiques obtenues portent leurs fruits.

4.6 Elevage des crevettes

Convocateur :A.C. Simpson
Rapporteur :D.A. Hancock

Etant donné que les communications couvraient deux techniques distinctes, on a jugé bon de subdiviser la question en deux sessions : élevage en étangs et élevage intégral.

4.6.1 Elevage en étangs

Documentation :E/18, 25
R/2, 4
RS/1

La crevetticulture en étangs se pratique depuis longtemps dans la région indopacifique, et les communications présentées passaient en revue les méthodes employées en Inde, en Malaisie et aux Philippines. L'élevage y repose essentiellement sur l'habitude des Penaeidae de gagner, aux stades postlarvaires et juvéniles, les zones côtières de faible profondeur ; les crevettes pénètrent dans les étangs artificiels par des vannes que l'on ouvre durant le flux. Dans ces étangs, elles engraissent en consommant tant la nourriture naturelle présente que celle qu'apporte la marée. Les animaux sont ultérieurement récoltés au reflux dans des filets placés à la sortie ou lors de la vidange des étangs.

En Inde, on utilise des rizières de 1 à 10 hectares durant la période de six mois où l'on ne cultive pas le riz, tandis qu'en Malaisie, les étangs sont soigneusement choisis dans les zones de mangrove et mesurent de 12 à 16 hectares. On y pratique des méthodes d'élevage identiques à celles de l'Inde.

L'une des communications rendait compte d'expériences indiennes visant à déterminer les résultats obtenus par la crevetticulture en rizières à différentes époques de l'année. Elle concluait que l'on obtient une production supérieure en procédant à une récolte chaque mois plutôt qu'au terme d'une longue période d'élevage. L'étude de la composition par taille des crevettes entrant et quittant les étangs a révélé qu'à leur capture lors du reflux les animaux étaient demeurés confinés de 5 à 6 semaines environ.

Les débats ont fait ressortir qu'il existe en Inde trois types principaux de crevetticulture en étangs : a) en rotation avec la riziculture ; b) en même temps que celle-ci; c) dans des secteurs aménagés le long des berges des cours d'eau dans des zones basses de peu d'intérêt agricole. Au Pakistan, à Singapour, au Viet-Nam et au Cambodge existe un élevage en étangs essentiellement analogue à celui de l'Inde, tandis que ce type de culture ne se pratique ni en Birmanie ni à Hong-kong. En Thaïlande, on utilise à cette fin d'anciens marais salants et rizières, tandis qu'en Indonésie la crevette ne représente qu'un “sous-produit” de la pisciculture en eaux saumâtres. A Taïwan, l'élevage pratiqué par les deux méthodes (comme en Inde et aux Philippines) produit environ trois fois plus qu'aux Philippines. Il n'apparaît pas clairement s'il est dans l'ensemble plus rentable d'élever des crevettes seules ou concurremment avec des poissons, mais à Taïwan, l'association des deux “cultures” donne d'excellents résultats.

Les Philippines appliquent des méthodes plus perfectionnées, et l'élevage y repose sur une seule espèce, Penaeus monodon, désignée localement sous le nom de “Sugpo”. Par le passé, on cultivait ensemble la “Sugpo” et le poisson Chanos chanos, mais, la crevette rapportant un prix supérieur, cette “culture mixte” cède le pas à la pure crevetticulture. Des zones sélectionnées, divisées en étangs d'“alevinage” et de grossissement, sont soigneusement préparées pour favoriser la croissance de flore et de faune de fond (“lab-lab”), qui servent de nourriture. Les jeunes “Sugpo”, capturées par diverses méthodes en eaux peu profondes, sont déversées dans les “pouponnières” et transférées, au bout de un mois et demi, dans les étangs de grossissement - au taux d'environ 20 000 par hectare - où ils reçoivent une alimentation supplémentaire. La pêche s'effectue aux filets et aux pièges. Il a été précisé que l'on compte accroître la superficie des étangs d'élevage, qui est actuellement de 130 000–150 000 hectares.

Un débat consacré à l'économie comparative a permis de conclure que l'élevage en étangs revient cher, mais que les bénéfices peuvent être élevés, particulièrement là où existe une forte demande de crevettes vivantes. D'ailleurs, la récolte par bateaur de pêche peut également être dispendieuse, et il faudrait étudier les aspects économiques des deux systèmes. Les coûts d'exploitation de la crevetticulture en étangs seraient réduits si l'on trouvait le moyen d'éliminer les causes de mortalité. Un grand intérêt s'est manifesté vis-à-vis des investissements dans ce domaine ; mais l'avis a été exprimé que les risques de destruction par les typhons découragent les grands investissements.

Les chiffres de production fournis pour les Philippines paraissent trop faibles. Il a été relevé que les femelles croissent plus vite que les mâles, atteignant, dans les récoltes en étangs, une taille double ou triple. Dans le cas de C. crangon, le taux de conversion alimentaire de la femelle est également supérieur à celui du mâle. Sur la base de travaux effectués sur le genre Crangon en République fédérale d'Allemagne, il a été proposé d'entreprendre des recherches analogues sur les Penaeidae avec un objectif double : a) ségrégation et rejet des mâles dès les premiers stades de l'élevage ; b) influence sur le sexe par la création de conditions écologiques favorables aux femelles.

A propos du document traitant de l'élevage en étangs à Singapour, il a été observé que l'industrie dépérit du fait du manque de terres et pour des motifs politiques. Bien que l'élevage ait lieu dans un écosystème équilibré comprenant 13 Penaeidae et 7 Caridea, seuls 6 Penaeidae présentent une importance commerciale ; les autres crevettes, quoique comestibles, ne sont pas appréciées localement. On obtient des crevettes toute l'année du fait qu'une époque de reproduction de Penaeus s'intercale entre deux de Metapenaeus. La fertilisation des étangs présente un intérêt douteux, et cette pratique augmenterait l'envasement.

Mention a été faite du nombre élevé d'installations d'élevage de la crevette, ainsi que de leurs perspectives d'avenir, le long de la côte pacifique du Mexique, dans des étangs éloignés de la mer (mais communiquant avec elle par de longs canaux), où les rendements demeurent faibles, On a émis l'opinion que le Nicaragua renferme des zones se prêtant à la crevetticulture en étangs. Au Pérou, des tentatives sont faites de recharger les fleuves et les étangs côtiers en “alevins” de la crevette d'eau douce Cryphiops caementarius. En 1965, un éleveur a reçu 10 millions de jeunes sujets. En aval des fleuves, on peut récolter jusqu'à 60 000 juvéniles en un quart d'heure.

Les participants ont appuyé la conclusion selon laquelle le cannibalisme peut être réduit par l'apport d'aliments supplémentaires, en veillant à ce que la nourriture soit du type voulu. L'hypothèse a été avancée que la surpopulation aggrave les risques de cannibalisme. Toutefois, ceux-ci seraient peut-être diminués si l'on prévoyait des abris pour les crevettes en période de mue.

On a jugé qu'il convenait de pousser les recherches sur les points suivants : a) maladies des crevettes élevées en étangs ; b) conditions chimiques et physiques et niveaux trophiques dans les étangs ; c) rendements et aspects économiques de l'élevage en étangs par rapport aux conditions normales de la pêche. Il faut que s'établisse une liaison plus étroite entre scientifiques et industriels, notamment par une participation accrue à des réunions communes et une expérimentation plus poussée de la part de l'industrie.

Les problèmes que pose la pollution doivent être étudiés d'urgence. Aux Etats-Unis d'Amérique, le Congrès a déjà examiné en 1966 et 1967 des projets de loi visant à réduire la pollution et à réglementer les altérations physiques apportées aux estuaires.

4.6.2 Elevage intégral

Documentation :E/2, 30, 31, 37, 44, 53, 63
R/1

La session a procédé à l'étude du sujet en deux temps : a) procédés d'élevage ; b) choix des espèces se prêtant à l'élevage.

4.6.2.1 Procédés d'élevage - L'élevage commercial des crevettes n'a jusqu'ici donné de bons résultats qu'avec Penaeus japonicus au Japon et Macrobrachium rosenbergii en Malaisie, quoique des progrès notables aient été signalés concernant Palaemon serratus au Royaume-Uni.

Comparaison de certaines caractéristiques de la ponte et des stades larvaires

 P. japonicusM. rosenbergiiP. serratus
Oeufsplanctoniquesportés par la femelleportés par la femelle
Nombre d'oeufs300 000–500 00060 000–100 000500–3 000
Durée du développement embryonnairequelques heures à 26°C et à un taux de salinité de 273 semaines à 26–28°C et à un taux de salinité de 12–16 4 semaines à 20°C et à un taux de salinité de 25–35
Durée du développement post-embryonnaire21–25 jours à 26°C4–5 semaines à 26–28°C3 semaines à 20– 25°C
Nourriture des larvesdans l'ordre de préférence, Diatomées et ArtemiaArtemia, plancton, aliments artificielsArtemia
Nombre de stades larvaires13 (taille maximale du dernier stade : 12 mm)8 (taille max.: 6 mm)7 (taille maximale : 7,5 mm)

L'élevage de M. rosenbergii est parvenu au stade où les éleveurs peuvent produire des juvéniles en grand, tous les principaux problèmes ayant été résolus. La culture de P. serratus demeure à l'échelle du laboratoire, mais nombre d'individus d'élevage ont parcouru tous les stades, et l'on connaît maintenant les conditions optimales de température, salinité, éclairement, alimentation et densité requises par les larves. Toutefois, d'autres travaux sont nécessaires sur les maladies ainsi que pour trouver une nourriture susceptible de remplacer les Artemia, et il faut étudier la sélection de souches à croissance rapide et résistantes aux maladies.

4.6.2.2 Choix des espèces se prêtant à l'élevage - L'étude des espèces convenant à l'élevage a abouti à la conclusion que celui-ci serait simplifié si l'on utilisait des Caridea à développement larvaire court ou même sans stade larvaire, espèces se trouvant notamment en eaux douces ou saumâtres, ainsi que dans les mers froides ou par grandes profondeurs. Cette thèse tend à être confirmée par des expériences faites sur des espèces affines à développement larvaire long ou abrégé. Le débat a révélé que des larves peuvent vivre de longues périodes et connaître de nombreuses mues, mais sans croissance ni métamorphose, le motif étant probablement une alimentation inadéquate.

En Malaisie, des évaluations de l'intérêt que peuvent présenter diverses crevettes d'eau douce pour l'alimentation humaine ont abouti à des recherches sur les espèces se prêtant à l'élevage. Le choix s'est porté sur Cryphiops lanchesteri, espèce d'eau douce capable de se développer en eaux stagnantes à faible teneur en sels minéraux, de tolérer un faible taux d'oxygène dissous et des températures allant jusqu'à 35°C ; de plus, on croit l'animal herbivore, ce qui réduirait évidemment les risques de cannibalisme.

D'autres caractéristiques sont jugées souhaitables chez les crevettes d'élevage :

  1. Coefficient élevé de conversion protéinique et croissance rapide ;

  2. Phytophagie, ce qui permet de réduire le coût de l'alimentation ;

  3. Tolérance aux modifications des conditions ambiantes ;

  4. Absence d'agressivité, pour réduire les risques de cannibalisme.

Il a été suggéré que la recherche d'espèces se prêtant à l'élevage tienne compte des facteurs suivants :

  1. Intérêt d'étudier les espèces les moins courantes ;

  2. Nécessité de trouver plusieurs espèces propices à une adaptation aux conditions des différentes parties du monde ;

  3. Ce sont probablement les espèces côtières ou d'eaux douces qui offriront la meilleure tolérance aux conditions artificielles.

Le point saillant de la session a été la présentation de documents relatifs aux progrès réalisés au Japon et en Malaisie en matière de techniques d'élevage intégral, ainsi que la discussion qui a suivi. Etant donné l'importance et l'intérêt exceptionnel de cette question, les principaux points exposés par l'auteur de la communication relative aux méthodes mises en oeuvre au Japon sont reproduits ci-après.

Le système permettant d'élever Penaeus japonicus jusqu'au stade juvénile a été adopté également pour P. semisulcatus et Metapenaeus monoceros. Depuis 1964, on a abandonné les petits viviers intérieurs pour des réservoirs 100 fois plus volumineux situés en plein air. Au lieu de cultiver à part une seule Diatomée servant de nourriture, on en obtient toute une variété lors du filtrage de l'eau de mer sur du tissu de Vinylon, le développement de ces algues étant intensifié par l'exposition au soleil, une forte aération et l'adjonction de sels nutritifs. La culture obtenue protège les larves du soleil et leur assure une alimentation saine et abondante. On place vingt femelles ovigères dans de petits viviers, et la moitié environ pondent dans les 24 heures, l'éclosion des oeufs (qui n'est cependant pas totale) ayant lieu au bout de quelques heures. Il faut 25 jours pour obtenir des juvéniles pesant 20 mg. A ce stade, les jeunes sont mis dans des sachets de polyéthylène renfermant de l'eau et suffisamment d'air pour 20 heures et distribués aux éleveurs du commerce.

Les pourcentages de survie sont les suivants : du stade nauplius au stade zoé : 90 pour cent ; de la zoé à la mysis : 70 pour cent ; de la mysis à la postlarve : 90 pour cent. Le stade zoé requiert de 4 à 5 jours, et le stade mysis de 3 à 4. Des nauplius d'Artemia sont introduits dans le vivier lorsque les larves sont au stade mysis, et doivent être abondants si l'on veut réduire le cannibalisme chez les postlarves. Quatre jours après l'apparition du stade postlarvaire, on commence à alimenter les animaux avec des clams et à procéder à un renouvellement partiel de l'eau, les postlarves se posant alors sur le fond. Au stade zoé, l'eau est fertilisée toutes les 24 heures à raison de 50 kg de nitrate de potassium et 5 kg de phosphate de potassium par 100 tonnes d'eau.

On n'essaie aucunement d'agir sur la température ou la salinité, et la survie n'est pas affectée tant que la première ne dépasse pas 30°C et la seconde ne tombe pas au-dessous de 20. La production est passée de l million de juvéniles par vivier en 1964 à 1,6 million en 1966, et dépasse actuellement les besoins des éleveurs. L'excédent a servi à améliorer les stocks de crevettes de certaines baies, et l'on a noté un certain relèvement de la production. En 1966, 13 millions de juvéniles ont été immergés entre Hokkaido et le sud du Japon. Bien que l'on ne dispose pas de données sur les taux de survie, ceux-ci semblent être meilleurs par faibles profondeurs, là où la pente est progressive et où les algues sont abondantes, que dans les baies profondes. Le prix de revient a considérablement diminué. Depuis 1965, la production de 20 à 30 juvéniles coûte l cent E.-U., tous frais compris, et 5 hommes peuvent produire 50 millions de jeunes. Les viviers peuvent servir durant les 6 mois d'été à condition de récolter les femelles ovigères en différentes parties du pays. L'élevage n'est pas possible durant les mois froids d'hiver. Pour obtenir des animaux de taille marchande (20 g), il faut environ 5 mois, et 2 éleveurs s'occupant de ll stations ont pu fournir 200 tonnes de crevettes aux restaurateurs.

Le débat qui a suivi a fait apparaître que Mytilus sert également à l'alimentation des juvéniles, et que la reproduction peut être accélérée par un accroissement du pH. La croissance des femelles est plus rapide que celle des mâles, mais la différence n'est notable que lorsque l'animal pèse de 15 à 20 g, c'est-à-dire lorsqu'il approche de la taille marchande. On ne signale pas de modification de la saveur en fonction du type de nourriture, quoiqu'un auteur ait jugé que les C. crangon avaient meilleur goût lorsqu'elles s'étaient alimentées de crustacés plutôt que de vers. Il n'existe pas de problèmes de maladies, à l'exception d'un brunissement des branchies. Sur la base de certaines expériences, il semblerait que les crevettes préfèrent les aliments d'origine animale exempts d'hémoglobine.

L'élevage intégral de Penaeus orientalis à l'échelle commerciale, fondé sur les méthodes japonaises, se pratique également en Corée.

L'une des communications traite de l'élevage de Macrobrachium rosenbergii en Malaisie. Les principaux problèmes restant à résoudre sont ceux de la nourriture, du système d'alimentation, et de la lutte contre la mortalité causée par les maladies et le cannibalisme. Les établissements d'“alevinage” de l'Etat fournissent gratuitement des juvéniles pour encourager l'élevage industriel, et l'on ne dispose pas actuellement de données sur les coûts. Lorsque les jeunes sont élevés en étangs, généralement avec des poissons non carnivores, l'alimentation naturelle est complétée par du poisson de rebut. Les quantités de crevettes qu'obtiennent les éleveurs - de l'ordre de 100–200 kg/ha par an - constituent une sorte de sous-produit de la production de base, qui est le poisson.

Durant la discussion générale, l'opinion a été émise que, outre les tentatives d'imiter en crevetticulture les conditions naturelles, notamment sous l'angle de l'alimentation, il vaudrait mieux au stade actuel faire porter les efforts sur la méthodologie et les techniques nouvelles que sur les aspects économiques. Les études devraient s'orienter vers la préparation d'aliments plus faciles à stocker, comme produits synthétiques, lyophilisés, et même aliments en capsules de composition chimique bien définie, auxquels pourraient être incorporées certaines saveurs visant à réduire le cannibalisme, ou des produits chimiques destinés à provoquer l'inversion du sexe, etc. On a déjà utilisé l'alimentation en micro-capsules pour les mollusques, et des protéines provenant de déchets animaux, peut-être sous forme séchée et solubilisée, pourraient présenter de l'intérêt. Les organismes alimentaires tels que les Artemia offrent l'avantage de permettre un étalonnage des taux d'alimentation et de l'efficacité de celle-ci, bien qu'ils n'aient pas toujours une valeur alimentaire élevée.

4.6.3 Recommandations

La Conférence recommande l'adoption des mesures suivantes :

4.6.3.1 Relever séparément les statistiques de la production d'étangs ou d'élevages intégraux et celles des procédés courants de récolte.

4.6.3.2 Entreprendre une étude des aspects économiques et du rendement de l'élevage en étangs par rapport à la pêche ordinaire.

4.6.3.3 Etablir une liaison plus étroite entre scientifiques et industriels dans l'organisation et l'application de la recherche sur l'élevage en étangs et l'élevage intégral.

4.6.3.4 Lors de la Conférence technique FAO sur la pollution des mers et ses conséquences sur les ressources halieutiques et sur la pêche, qui doit se tenir en 1969, s'attacher particulièrement aux aspects suivants :

  1. La pollution des eaux peu profondes et ses conséquences sur les ressources en crustacés et en mollusques ;

  2. L'avenir des procédés d'élevage intégral.

4.6.3.5 Organiser une conférence mondiale FAO sur l'élevage intégral d'organismes marins présentant une importance commerciale et l'amélioration de l'habitat.

4.6.3.6 Pousser la recherche dans les domaines suivants :

  1. Préférences des diverses espèces de crevettes pour différents types de nourriture, et corrélation avec la survie et la croissance ;

  2. Rôle des aliments synthétiques et d'autres aliments dans l'élevage intégral ;

  3. Emploi éventuel d'hormones et d'autres substances chimiques régulatrices, et incidence sur le comportement et la croissance.

4.7 Normalisation des méthodes de recherche

Convocateur :T.H. Butler
Rapporteur :J. Carranza
Documentation :E/1, 7, 11, 14, 16, 17, 20, 21, 26, 28, 29, 30, 37, 47, 58, 59, 61
R/4
SS/1 à 11

Si la Conférence était saisie de nombreux documents décrivant des méthodes, huit seulement traitaient de méthodologie. Les techniques relevant de la crevetticulture et de la statistique ne sont pas étudiées ici.

Etant donné la variété des méthodes employées et l'utilité que présentent la comparaison et l'évaluation des résultats, la session visait à étudier les problèmes soulevés par les méthodes de recherche crevettière ainsi que la possibilité d'une normalisation. Les diverses méthodes mises en ceuvre par les auteurs sur tel ou tel sujet de recherche particulier, ainsi que les observations faites lors des débats en vue de leur perfectionnement, sont récapitulées ci-après. La Conférence a reconnu la nécessité de préparer un manuel des méthodes.

Pêche exploratrice - L'une des communications décrivait les techniques employées pour la collecte de données biologiques lors d'opérations au large du littoral nord et nord-est du Brésil, et une autre traitait des environs de Cuba, celle-ci renfermant en outre des observations météorologiques et océanographiques. Il est jugé indispensable de procéder à un échantillonnage des prises pour déterminer l'identité des espèces, la sex-ratio, la composition par taille des crevettes, ainsi que la composition par espèces de la faune associée. Il est possible de déterminer statistiquement la taille de l'échantillon avant l'enquête. La pêche exploratrice peut être secondée par l'application des connaissances sur le cycle biologique et l'écologie des espèces de crevettes de la région. Bien que l'on n'ait pas étudié l'emplacement des fonds de pêche ni les méthodes de pêche, il a été proposé que le manuel traite des techniques ultrasoniques et de l'interprétation des échogrammes.

Mesures - Dans la mesure de la taille, le plus couramment exprimée par la longueur, on emploie trois dimensions : longueur totale, longueur de la carapace (céphalothorax), et longueur de la queue. On relève que parmi les communications examinées, 23 mentionnent la longueur totale, 7 la longueur de la carapace, et 16 les deux mesures ; de plus, l utilise la longueur de la queue et l la hauteur du corps, Si l'on a recours à la longueur de la carapace, il convient de donner un coefficient de conversion permettant de la rapprocher de la longueur totale. Mais un coefficient unique peut ne pas convenir pour certaines espèces. La Conférence est convenue que la normalisation des mesures de longueur, si elle n'est pas, dans la pratique, réalisable entre espèces, l'est par contre au sein d'une même espèce. Quelles que soient les dimensions utilisées, elles doivent être bien définies.

Une seule des communications décrivait une méthode de pesée. Etant donné l'importance du rapport longueur-poids, il serait bon de réaliser une certaine normalisation dans ce domaine.

Marquage - Bien qu'il soit question de méthodes de marquage dans les exposés synoptiques relatifs aux espèces Crangon crangon et Penaeus setiferus, la Conférence n'était saisie d'aucune étude générale sur cette question. L'un des participants a fait une récapitulation des diverses techniques de marquage avec des colorants biologiques. Des crevettes ne mesurant pas plus de 40 mm de longueur totale peuvent être ainsi marquées, la tache colorée demeurant visible jusqu'à ll mois. Il est possible de traiter de 300 à 400 animaux par heure, et la cuisson n'affaiblit que légèrement l'intensité de la couleur.

Echantillonnage des larves et des postlarves - Deux communications traitaient directement de cette question. Il semble que pour les stades larvaires les filets à plancton à grande vitesse donnent de bons résultats, sauf en eaux peu profondes, où il vaut mieux employer le filet type de l m. Pour la récolte des postlarves, ce dernier engin paraît également préférable. On évitera les erreurs dans la détermination de la profondeur et du débit en utilisant des indicateurs précis, dont certains modèles ont été récemment mis sur le marché.

Maturité et fertilité - Trois communications étaient consacrées aux méthodes permettant de déterminer le stade de maturité de Penaeus californiensis, de Solenocera indica et de cinq autres Penaeidae de la côte sud-ouest de l'Inde. La définition de cinq stades de maturité donnée dans deux d'entre elles semble acceptable aux spécialistes des Penaeidae. La fertilité a été déterminée soit par sous-échantillonnage de l'ovaire mûr soit par dénombrement direct.

Autres méthodes - Cinq comptes rendus d'expériences traitaient de méthodes intéressant divers autres domaines d'étude : examen des contenus stomacaux de Penaeidae, détermination de certains stades du cycle de la mue de Penaeus duorarum, détermination de l'entrée dans les eaux estuarines des postlarves de P. vannamei, élevage de larves de Penaeidae, et programme de traitement automatique (sur ordinateur) des données sur l'abondance. Le convocateur de la session a également été saisi de la description d'une méthode permettant d'isoler les appendices de stades postlarvaires de crevettes.

4.7.1 Recommandations

La Conférence recommande :

4.7.1.1 Que la FAO entreprenne de préparer un manuel sur les méthodes courantes de recherche sur la crevette. Avant la rédaction du texte, des circulaires préliminaires devront être adressées aux spécialistes, selon l'ordre de priorité ci-après :

  1. Mesures ;

  2. Echantillonnage durant les campagnes de pêche exploratrice ;

  3. Récolte de larves et de postlarves ;

  4. Détermination de la maturité et de la fertilité ;

afin d'obtenir leurs observations et suggestions.

4.7.1.2 Que la FAO organise, compte tenu des besoins régionaux, un centre de perfectionnement sur les méthodes de recherche.

4.7.1.3 Que l'on encourage l'utilisation par les organismes nationaux et internationaux de circulaires, dont le texte serait continuellement revu à la lumière de l'expérience.

4.7.1.4 Que l'on mette à jour et que l'on diffuse largement la série de manuels FAO de science halieutique.

4.8 Groupe de travail ad hoc sur l'étude des ressources en crustacés dans le cadre du Plan indicatif mondial (PIM) de la FAO 1

Convocateur :     A.R. Longhurst

La Conférence a été informée, sur la base d'un projet de document, de l'historique et de la portée du Plan indicatif mondial FAO pour le développement agricole, dont une des sections prévoit une étude mondiale sur les ressources en crustacés. Un débat a été consacré à la forme, plutôt qu'à la teneur, du document, et il a été généralement admis qu'il serait possible d'améliorer le texte en y faisant figurer : a) une introduction traitant de l'écologie des ressources en crustacés ; b) une liste taxonomique, établie d'un commun accord, des espèces d'importance économique, comme celle qui est à l'étude (voir ci-dessus section 4.2.3) ; c) une bibliographie beaucoup plus développée que celle du projet, qu'il y aurait intérêt à subdiviser par régions géographiques, et qui devrait accorder un traitement différent aux diverses parties du monde selon qu'elles sont bien connues ou peu explorées, en veillant à ce que soient consacrées à ces dernières davantage de références fondamentales que d'études récentes.

L'opinion a été exprimée qu'il convenait d'observer une distinction, parmi les données à inclure, entre potentiel économique et potentiel biologique, et l'on a précisé que des données sont nécessaires à trois niveaux : a) connaissances actuelles sur les stocks exploités ; b) prédictions des ressources virtuelles, fondées sur des enquêtes effectives ; c) hypothèses concernant les ressources probables, basées davantage sur des conjectures que sur de véritables prospections.

L'avis a été émis qu'il serait utile d'employer un système de codage pour les stocks de diverses espèces, les régions géographiques et l'état des stocks ; cela pourrait s'effectuer par une mise en tableaux des données du texte de la version définitive.

Sous la direction du Convocateur, le projet de document a été examiné région par région, des spécialistes étant désignés pour chacune d'elles afin de faire rapport sur les ressources de leur région, conformément à la demande initiale de renseignements. Les experts ainsi désignés sont convenus de s'adresser à d'autres sources d'information dans leur région afin de rassembler les données nécessaires pour mettre au point le projet de document, et de les transmettre au Convocateur, qui les centralisera et les présentera à la FAO aux fins de préparation du texte révisé. L'espoir a été exprimé que la FAO serait en mesure de retransmettre à ces rapporteurs régionaux les données ayant permis à l'origine d'établir le document.

Rapporteurs régionaux désignés :

  1.Atlantique, Centre-EstA.R. Longhurst (Etats-Unis d'Amérique)
  2.       -      , Nord-EstA.C. Simpson (Royaume-Uni)
  3.       -      , Nord-Ouest (CIPAN)S. Apollonio (Etats-Unis d'Amérique)
       -      ,         -B. Rasmussen (Norvège)
       -      ,         -H.J. Squires (Canada)
  4.       -      , Sud-Est(non désigné)
  5.       -      , Sud-OuestE.E. Boschi (Argentine)
  6.       -      , Centre-OuestM.J. Lindner (Etats-Unis d'Amérique)
  7.Océan Indien, EstD.N.F. Hall (Royaume-Uni) 
  8.       -      , Ouest
  9.MéditerranéeM. Massuti (Espagne)
10.Pacifique, Centre-EstR.W. Ellis (Costa Rica)
11.       -     , Nord-EstT.H. Butler (Canada)
12.       -     , Nord-OuestB. Ivanov (U.R.S.S.)
13.       -     , Sud-EstD.A. Hancock (Chili)
14.       -     , Sud-OuestW.B. Malcolm (Australie)
15.       -     , Centre-OuestA. Sribhibhadh (Thaïlande)

1 Pour la liste des membres du Groupe de travail, voir l'annexe 1.


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