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9. CIFA/85/Symp. 10
LA PECHE DANS LES PETITES ETENDUES D'EAU ET SA CONTRIBUTION A L'APPROVISIONNEMENT EN PROTEINES ANIMALES DES POPULATIONS RURALES D'AFRIQUE

par

Garry M. Bernacsek
Halieutiste
Division des politiques halieutiques et de la planification, FAO Rome

Document présenté au Symposium sur l'établissement et l'application des programmes d'aménagement et de développement des pêches, 7–9 octobre 1985, Lusaka (Zambie). Ce Symposium s'est déroulé pendant la sixième session du Comité des pêches continentales pour l'Afrique (CPCA).

RESUME
Les populations rurales africaines vivent souvent à proximité de petites étendues d'eau telles que lacs, rivières, marécages, bassins de retenue et lagunes côtières: le poisson qu'elles contiennent est parfois la principale source de protéines animales des populations riveraines. En général, les pouvoirs publics ne fournissent pas une aide suffisante pour développer ces pêcheries et ces petits systèmes sont souvent sous-exploités. On estime qu'il y a en Afrique plus de 19 000 petites étendues d'eau lentiques et environ 12,7 millions de kilomètres de rivières et ruisseaux. Comparés à la plupart des grandes étendues d'eau, ces petits systèmes sont limités par plusieurs facteurs inhérents au milieu et subissent davantage les effets d'une exploitation humaine intensive. En Afrique, ils pourraient produire chaque année de 1 à 2,3 millions de tonnes de poisson (selon une estimation provisoire qui ne représente qu'un ordre de grandeur). Un plan d'action immédiat en trois points (inventaire des petites étendues d'eau, empoissonnement avec des alevins de tilapia et fournitures d'engins de pêche bon marché) est proposé afin d'augmenter rapidement et sensiblement la production dans un délai de deux à quatre ans. Un programme à plus long terme devrait comprendre les éléments suivants: surveillance de la production et de la consommation de poisson et de l'environnement, construction de petits barrages, plantation de rideaux d'arbres, enlèvement de la végétation gênante et des plantes de marécage, dégagement de la végétation avant la mise en eau des bassins de retenue, augmentation artificielle de la productivité par l'alimentation complémentaire des poissons et l'installation de structures en branchages, alevinage avec certaines espèces autres que les tilapias, examen et analyse de la documentation technique disponible sur les petites étendues d'eau et recherche multidisciplinaire visant à la pleine utilisation et à la conservation des petites étendues d'eau.
Les petites étendues d'eau conviennent parfaitement à la généralisation de certaines pratiques d'aquaculture asiatique et occidentale dans les pêcheries des eaux continentales d'Afrique.

il est recommandé de proposer que le rôle du poisson dans la lutte contre la sous-alimentation fasse l'objet d'un programme d'action spécifique pour le développement de la pêche

- Norvège/FAO (1983:12)

1. OBSERVATIONS LIMINAIRES

Le présent document a pour but de lancer un débat sur la pêche dans les petites étendues d'eau. Il est avant tout destiné aux gouvernements des 56 pays (et des îles qui en dépendent) qui composent l'espace géographique africain. L'auteur estime que, dans l'ensemble, on n'a pas suffisamment tenu compte des vastes possibilités qu'offre cette pêche pour fournir des protéines animales aux ruraux pauvres de la région. Dans le présent document, l'auteur montre que cette activité doit occuper une place à part dans les pêcheries des eaux continentales - distincte de l'exploitation des grandes étendues d'eau et des étangs de pisciculture artificiels - en ce sens qu'elle possède ses caractéristiques propres et qu'elle doit bénéficier de mesures de développement et d'efforts d'aménagement spéciaux.

Etant donné sa brièveté, le présent document ne peut être qu'une base de discussion. Il est centré sur les aspects généraux de l'environnement et de la pêche. Toutefois, on comprendra aisément que les effets des activités recommandées, telles que la construction de petits barrages et la plantation de rideaux d'arbres, iront au-delà de la production halieutique proprement dite et que celles-ci doivent donc être considérées partie intégrante des activités de développement rural. L'auteur espère également que le présent document aidera ainsi à provoquer le débat sur le rôle de la pêche dans les petites étendues d'eau dans le contexte du développement rural intégré.

L'auteur remercie chaleureusement ses collègues de la FAO pour leurs observations et critiques précieuses sur la version préliminaire du texte: A. Bonzon, J.J. Kambona, J.K. Kapetsky, G.W. Ssentongo, A.G.C. Tacon et M.M.J. Vincke.

2. LA POPULATION ET LES PETITES ETENDUES D'EAU

La population totale de l'Afrique en 1985 est estimée à environ 553 millions d'habitants1(ONU, 1985). Environ 28 pour cent sont des citadins, qui vivent le plus souvent dans les grandes capitales côtières ou dans les ports (par exemple, Lagos, Dakar, Alger, Dar es-Salaam) ou sur les rives de grandes étendues d'eau intérieures, comme Le Caire sur le Nil, Kampala sur le lac Victoria, Kinshasa et Brazzaville sur le fleuve Zaïre/Congo. Les 398 millions de ruraux vivent dans des environnements très divers. Bien que l'on manque de données récapitulatives, on peut supposer, sans risque de se tromper, qu'un grand nombre d'entre eux vivent à proximité d'une petite étendue d'eau - lac naturel, rivière, ruisseau, plaine inondable, marais, marécage, bassin de retenue, barrage agricole, canal d'irrigation, lagune côtière, mangrove ou estuaire. Dans la mesure où de vastes zones d'Afrique souffrent des trois “fléaux” que sont le caractère très saisonnier des pluies, le faible coefficient de ruissellement et les sécheresses périodiques, il est évident qu'il faut résider à proximité d'une étendue d'eau plus ou moins importante.1

Les populations rurales sont souvent très dépendantes de ces petites étendues d'eau: ce sont elles qui fournissent l'eau qu'on boit et qu'on utilise pour faire la cuisine, se laver, laver le linge, abreuver le bétail et arroser les cultures. Il n'est pas rare non plus que l'on y pêche (ressources naturelles ou empoissonnement).

Le plus souvent, il s'agit d'une activité occasionnelle pratiquée au filet maillant et à la nasse, par les hommes adultes et à la ligne par les enfants.2 Les captures totales sont bien sûr faibles comparées au rendement des grandes étendues d'eau et la pêche est rarement un emploi à plein temps. Mais il ne faut pas sous-estimer l'apport quotidien de protéines et d'éléments nutritifs que le poisson assure à ces populations (dont le niveau de vie est souvent bien en dessous du seuil de pauvreté). Il semble en fait, que cet apport n'ait jamais été correctement évalué pour une zone géographique importante.

Les responsables du développement des pêches en Afrique ont souvent négligé les petites étendues d'eau car ils s'intéressaient aux grandes nappes continentales et aux mers ou à l'aquaculture dans des étangs artificiels. Il semble que les petits lacs de barrage, par exemple, soient très sous-exploités dans de nombreuses zones d'Afrique (Bowmaker, 1975; Welcomme, 1977). Il existe heureusement quelques exceptions telles que les programmes de repeuplement des petits lacs et retenues en Tanzanie (Bailey, 1966; Kambona, communication personnelle), en Zambie (République de Zambie, 1972:36–7) et en Ouganda (FAO, 1965:20). Les petits systèmes lentiques3 sont souvent considérés insalubres car ils peuvent abriter des organismes vecteurs de maladies (escargots et larves de moustiques) et font donc l'objet d'opérations de drainage et de bonification. Or, la mise en valeur et l'enrichissement des petites étendues d'eau seraient un moyen d'augmenter la consommation de protéines animales des ruraux pauvres d'Afrique. On estime qu'en 1990, la population urbaine représentera 32 pour cent de la population totale de l'Afrique - soit 200 millions de personnes. Cet énorme secteur, pratiquement incapable de produire sa propre nourriture, mais disposant de moyens politiques et financiers disproportionnés, exercera une pression de plus en plus lourde sur les ressources ichtyques continentales et marines du continent. On peut même prévoir que l'essentiel des approvisionnements commerciaux en poisson d'eau douce et d'eau de mer sera “monopolisé” par les consommateurs urbains, au détriment des populations rurales pauvres qui ne profiteront guère de cette précieuse ressource. Vu le coût excessif des transports et de la distribution, il est probable que le poisson des petites étendues d'eau échappera à ce genre de commercialisation. En fait, le principal avantage de la pêche dans les petites étendues d'eau est qu'elle supprime les intermédiaires et les frais de transport; le produit reste bon marché et accessible aux ruraux pauvres. A long terme donc, la pêche dans les petites étendues d'eau, complétée par l'élevage de la volaille et du petit bétail, pourrait constituer la seule garantie d'autosuffisance en protéines animales et d'alimentation équilibrée pour une grande partie des populations rurales d'Afrique.

3. SUPERFICIE ET NOMBRES

On trouve en annexe un bref inventaire des petites étendues d'eau de 56 pays africains et des îles qui en dépendent.

Il est difficile de préciser la superficie maximum qui différencie, tant qualitativement que quantitativement, les petits systèmes lentiques des grands systèmes. Pour des raisons de commodité, Bernacsek (1984:6) a classé les réservoirs africains comme suit:

Types de bassinsFourchette de superficie
Très grands1 000 km2et plus
GrandsDe 100 à 999 km2
MoyensDe 10 à 99 km2
PetitsDe 1 à 9,9 km2
Très petitsDe 0,01 à 0,99 km2
“Etangs”Moins de 0,01 km2(< 1 ha)

Toutefois, on ne gagnerait rien, à l'heure actuelle, en adoptant une définition trop rigide. Il faut savoir que la productivité par unité de superficie des lacs et bassins de retenue augmente en général à l'inverse de la superficie (en particulier si les eaux sont peu profondes et riches en substances chimiques nutritives). Ainsi, certaines petites étendues d'eau lentiques alimentent des pêcheries commerciales d'une certaine importance et ont un rôle socio-économique qui s'apparente davantage à celui des grands systèmes.

Il est difficile aussi de calculer le nombre et la superficie totale des petits systèmes lentiques en Afrique. On trouvera au tableau 1 une énumération des lacs, retenues et lagunes côtières, tirée d'un travail de recherche effectué récemment par Bernacsek (en préparation) sur plusieurs milliers de rapports de la Bibliothèque des pêches de la FAO. Le total de 19437 auquel il est parvenu risque toutefois d'être très inférieur à la réalité car des inventaires détaillés tels que celui du Mozambique (Romano, 1972) n'existent pas (ou n'étaient pas encore disponibles) pour de nombreux pays. Il est également impossible de faire une estimation précise de la superficie totale des petits systèmes lentiques en Afrique. Rares sont les pays pour lesquels ces informations sont disponibles (voir Kiener (1963) pour Madagascar, et Ita, et al. (1985) pour le Nigéria). En supposant que la superficie moyenne se situe entre 1 et 5 km2, il est évident que la superficie totale des petits systèmes lentiques est loin d'être négligeable.

Les petits cours d'eau correspondent souvent à un bassin de drainage unique se déversant dans la mer ou dans une grande étendue d'eau, soit des affluents de grands cours d'eau. On peut les définir (ici encore par souci de commodité) comme des systèmes lotiques1 classés de 1 à 6. Leur longueur moyenne est comprise entre 1,6 et 103,3 km (tableau 2). Sur un total théorique de 12,8 millions de kilomètres de cours d'eau en Afrique, 12,7 millions de kilomètres (soit 98,8 pour cent) correspondent à des rivières des classes inférieures (1 à 6). Les 19 grands cours d'eau (classes 9 à 11) d'Afrique sont par comparaison une ressource “rare”.

Le nombre et la superficie des autres types de petites étendues d'eau (plaines inondées intérieures et côtières, marécages d'eau douce et mangroves) ne sont ni connus ni aisément calculables.

4. PRODUCTION ET CAPTURES DE POISSON DANS LES PETITS SYSTEMES

Bien qu'elles soient morphologiquement différentes les unes des autres, toutes les petites étendues d'eau subissent des influences écologiques et sociologiques similaires qui les distinguent nettement des grands systèmes, ne serait-ce que par l'échelle des “opérations” qui s'y déroulent. Leurs bassins de réception sont généralement restreints, mais ils collectent proportionnellement davantage d'eau de ruissellement et de sédiments que les grands bassins. En effet, le volume de ruissellement par unité de superficie augmente à mesure que l'aire de drainage décroît (voir par exemple Karpiscak et al., 1984). Toutefois, les petits cours d'eau tarissent plus facilement pendant la saison sèche car il y a proportionnellement moins d'infiltration des eaux de pluie dans le sol et une restitution moins importante des eaux souterraines en dehors de la saison des pluies. En outre, les petits systèmes lentiques s'envasent rapidement, ce qui réduit leur capacité de stockage de l'eau (= volume et profondeur), et peut entraîner à terme la formation de marécages (donc une perte du point de vue de la production de poisson - voir tableau 5).

Si l'on excepte les lacs de cratère et certains bassins de retenue recouvrant un lit au gradient très accentué ou accumulés en amont de barrages élevés, la plupart des petites étendues d'eau lentiques sont peu profondes (quelques mètres seulement). L'évaporation annuelle en Afrique peut atteindre 2,8 m et la plupart des petits lacs et retenues situés en dehors des zones de forêts denses humides sont partiellement asséchés chaque année1. Si la pluviosité annuelle est trop faible, les petites étendues d'eau s'assèchent complètement après la saison des pluies, malgré “l'efficacité” plus grande avec laquelle les petits bassins versants acheminent l'eau de ruissellement. En cas de sécheresse prolongée, tous les petits systèmes sont asséchés sur une zone très vaste. Il s'ensuit que le poisson disparaît de l'alimentation des populations locales; en outre, une fois que les pluies reviennent et que les lacs se remplissent à nouveau, ceux qui ne sont pas reliés à des systèmes plus importants ayant surmonté la sécheresse seront sans poisson à moins d'être repeuplés artificiellement. Dans la mesure où l'évaporation est fonction à la fois du rayonnement solaire et du vent, et qu'elle est renforcée par la présence de végétaux macrophytes flottants, il est possible de réduire les pertes dues à l'évaporation en plantant des rideaux d'arbres le long des berges et en supprimant la végétation flottante (ces pratiques ont en outre l'intérêt de fournir du bois de feu pour les usages domestiques, d'améliorer la qualité du sol par accumulation de terreau de feuilles, de réduire l'habitat des organismes vecteurs de maladies et de fournir du fourrage pour le bétail ou du compost horticole).

La faible profondeur des systèmes lentiques offre des conditions idéales aux macrophytes aquatiques. Ainsi, certains petits lacs sont pratiquement envahis de végétation macrophyte, immergée ou flottante, voire les deux, et des fourrés de roseaux ou de papyrus couvrent les berges. Les systèmes lotiques eux-mêmes sont parfois envahis par les plantes. Par exemple, en Ouganda, beaucoup de vallées sont complètement envahies par les papyrus; on estime que 30 pour cent environ du territoire rural ougandais sont constitués de marécages à papyrus (Hickling, 1961:26; Beadle, 1974:246).

La présence d'une certaine quantité de macrophytes immergés et le long des berges favorise la production de poisson. Mais leur prolifération a manifestement un effet contraire. En Afrique, les espèces de poissons indigènes herbivores, comme Tilapia rendalli (= T. melanopleura), sont utiles pour nettoyer la végétation immergée des eaux lentiques (Maar, et al., 1966; Junor, 1969; Toots, 1975) mais la végétation flottante et celle des berges doivent être supprimées à la main ou à la machine (Hickling, 1961:25-6) - et cela peut représenter jusqu'à 15 tonnes à l'hectare quand il s'agit de papyrus.

Qu'il s'agisse de systèmes lentiques ou lotiques, du fait de la superficie réduite, le rapport longueur des berges - superficie est plus élevé (tableaux 3 et 4). En outre, les petits cours d'eau ont des rapports extrêmement élevés comparés aux petits lacs et retenues. Par exemple, une rivière de 10 mètres de large peut avoir 200 km de berges par kilomètre carré de superficie, alors qu'un petit lac circulaire d'un kilomètre carré de superficie n'aura que 3,5 km de berges. Ce point aurait besoin d'être précisé mais il semble que la densité ou l'espacement de la population agricole le long des berges ne dépende pas de la superficie de l'étendue d'eau. Cela signifie que le nombre de personnes par kilomètre de berge est sans doute identique pour les grands et pour les petits systèmes. Inversement, par kilomètre carré de superficie, les petites étendues d'eau auront tendance à avoir des berges beaucoup plus peuplées et les effets de l'occupation humaine seront donc plus intenses.

C'est dans le domaine des pêches que cette occupation intensive aura le plus d'effets car le volume d'eau disponible, même dans les systèmes très restreints, sera en général amplement suffisant pour les utilisations domestiques et agricoles traditionnelles. L'étude des grands lacs et bassins de retenue a montré que, si l'intensité de la pêche dépasse un pêcheur au kilomètre carré, on approche de la pleine exploitation (Henderson et Welcomme, 1974). On comprendra aisément que 2 ou 3 unités familiales étendues installées sur les berges d'un petit lac d'un kilomètre carré représenteront sans peine une intensité de pêche réelle dépassant un pêcheur au kilomètre carré, et que ces mêmes 2 ou 3 familles espacées de la même manière le long d'une petite rivière exerceront un effort de pêche frôlant la catastrophe. On ne sait pas très bien si la formule d'un pêcheur au kilomètre carré est applicable aux petits systèmes (ni même si elle est approximativement correcte pour les grands systèmes). L'auteur du présent document estime que l'intensité optimale de pêche est nettement plus élevée. Par exemple, en Tanzanie du sud, le petit lac Rutamba (2,4 km2) que l'auteur a pu voir en janvier 1980 faisait vivre 115 pêcheurs autorisés travaillant à temps partiel (soit 47,9 pêcheurs au kilomètre carré) et aurait produit 79,4 tonnes (soit 331 kg/ha) en 1979, les captures étant essentiellement des tilapia de petite taille, néanmoins bien acceptés par la population locale. Quel que soit le chiffre exact, il semble qu'une intensité de pêche très forte, voire excessive, soit la règle quasi générale dans les petits systèmes. Ils sont donc beaucoup plus exposés au risque de surexploitation des stocks et d'effondrement de la pêche. Toutefois, d'un point de vue plus optimiste, cela signifie aussi que l'exploitation des ressources existant dans les petits systèmes est beaucoup plus systématique et qu'il y a moins de gaspillage dû à la mortalité naturelle1. Un pourcentage plus important de la chair de poisson produite dans le système finit donc dans l'assiette du consommateur.

Les interventions humaines destinées à accroître la production de poisson sont théoriquement plus efficaces dans les petits systèmes que dans les grands, et ce également pour des raisons d'échelle. La maind'oeuvre est relativement abondante et les petits projets ne nécessitent pas de machines ou de matériaux importés coûteux car les ressources locales suffisent en général. Les projets destinés à accroître le rendement en poisson, tels que la suppression à la main de la végétation gênante (papyrus ou jacinthes d'eau) dans les petits lacs et les marécages, ou bien la construction de retenues en travers des petits cours d'eau pour accroître la taille du bassin en saison sèche (Hickling, 1961:3–5, 24-6; Bowmaker, 1975) sont des activités communautaires d'auto-assistance à fort coefficient de main-d'oeuvre, que les populations rurales peuvent effectuer avec un minimum d'encadrement technique (parfois même aucun) et sans s'engager dans des dépenses excessives et inutiles pour acheter des machines et des matériaux “exotiques” ou importés. Ces activités de valorisation de l'environnement et de la pêche seraient sans doute impossibles à réaliser sur les grandes étendues d'eau en mobilisant uniquement de la main-d'oeuvre.

L'alimentation complémentaire du poisson est obligatoire en aquaculture. Mais on ne peut pas demander aux pêcheurs de jeter leurs feuilles de manioc ou leurs ordures ménagères dans une étendue d'eau aussi vaste que le lac Tanganyika - et ce pour deux raisons tout à fait valables. D'une part, il serait difficile de leur prouver que cette pratique aura vraiment pour effet d'accroître la biomasse dans le lac. D'autre part, rien ne garantit que, sans clôtures, une augmentation de la production de poisson due à cet apport alimentaire n'ira pas remplir les filets des autres pêcheurs du voisinage. Par contre, sur des systèmes plus petits, où les pêcheurs sont moins nombreux et l'intensité de pêche plus forte, ces arguments sont moins convaincants et les avantages de l'alimentation complémentaire deviennent manifestes. Pour les pêcheurs, une petite étendue d'eau est plus “personnelle” et ce n'est plus une vaste ressource appartenant à tous et à personne. Il est très probable que les pêcheurs cherchent à délimiter leurs fonds de pêche et à empêcher d'autres pêcheurs d'y pénétrer, ces derniers ayant même parfois des difficultés à accéder à l'eau depuis la berge. L'alimentation continue du poisson avec des déchets végétaux et animaux disponibles sur place en des points précis de la berge devrait permettre d'accroître les captures autour de ces emplacements, en raison d'un effet “d'attraction” et d'une augmentation de la production biologique. L'installation d'enclos ou de digues dans ce contexte peut même être inutile - et c'est là un argument de poids dans des pays où la législation interdit de clôturer les étendues d'eau. Par exemple, au Bénin, les pêcheurs utilisent, pour l'alimentation complémentaire du poisson, des végétaux pourris, des vieilles rafles de maïs etc. sur les étendues d'eau relativement restreintes que sont les ahlos et les whedos (fossés creusés par l'homme, dépressions naturelles dans des zones marécageuses en permanence, canaux de drainage naturels, anciens fossés de drainage et autres trous d'eau) dans les plaines inondables du sud du pays et on a ainsi obtenu des rendements excellents de 1500 à 5 000 kg/ha (Di Palma, 1969:3). M. A. Tacon (1985) a décrit divers aspects d'une stratégie d'alimentation complémentaire des poissons pour les villages africains. On peut augmenter encore l'apport d'éléments nutritifs en utilisant du fumier (c'est ce qui se produit spontanément si la zone découverte en période d'étiage en bordure des systèmes lentiques est utilisée pour faire paître le bétail) et les eaux d'égout après traitement (Maar, et al., 1966:98; Bowmaker, 1975:214).

L'acadja ou piège-refuge en branchages permet aussi d'obtenir une production de poisson bien supérieure au niveau naturel et l'introduction de cette méthode pourrait être généralisée dans les petits systèmes lentiques. On peut même parfois obtenir des rendements extrêmement élevés atteignant jusqu'à 28 000 kg à l'hectare (Welcomme, 1979:192–4; Welcomme et Kapetsky, 1981:3–4).

Au stade actuel, il est impossible de faire une estimation exhaustive et fiable de la productivité potentielle des petites étendues d'eau en Afrique. On peut toutefois avancer une première approximation qui donnera un ordre de grandeur. On a utilisé des équations de régression pour prévoir les rendements potentiels de diverses catégories d'étendues d'eau figurant au tableau 5. Si on associe ces résultats aux nombres d'étendues d'eau indiqués dans les tableaux 1 et 2, on peut faire une estimation approximative du potentiel total. Partant de l'hypothèse que la taille moyenne des petites étendues d'eau lentiques se situe entre 1 et 5 km2, on peut supposer que les 1 000 petits lacs recensés peuvent produire de 32 000 à 120 000 tonnes de poisson. Les 17 247 petites retenues pourraient produire de 400 000 à 1 550 000 tonnes et les 470 petites lagunes pourraient produire de 4 700 à 24 000 tonnes. Les 720 autres étendues d'eau lentiques qui ne sont pas classées pourraient sans doute produire entre 16 000 et 62 000 tonnes. Dans les petites rivières (classes 1 à 6), on pourrait capturer respectivement 33 000, 69 000, 89 000, 104 000, 116 000 et 128 000 tonnes de poisson. L'éventail des captures potentielles est donc le suivant:

Types d'étendues d'eauRendement potentiel (en tonnes)
Petits systèmes lentiques450 000 – 1 760 000
(lacs, retenues, lagunes) 
Petits cours d'eau540 000
(classes 1 à 6) 
Total:  990 000 – 2 300 000 

A titre de comparaison, en 1983, les captures nominales réalisées dans les eaux intérieures (il s'agit en grande partie des captures effectuées dans les grandes étendues d'eau) ont atteint 1 420 000 tonnes, alors que les captures dans les eaux maritimes ont été de 2 920 000 tonnes (et une quantité au moins égale a été prise par les flottilles étrangères dans les eaux africaines). La production de l'aquaculture intensive en étangs serait d'environ 30 800 tonnes (Bernacsek, en préparation).

Pour la population rurale africaine actuelle (398 millions d'habitants), ce potentiel des petites étendues d'eau représenterait un apport de 2,5 à 5,8 kg de poisson par personne. Toutefois, pour diverses raisons, les disponibilités réelles pourraient être plus élevées:

  1. une part importante de la population rurale vit en bordure ou à proximité des grandes étendues d'eaux intérieures et elle ne serait donc pas intéressée par le poisson des petites étendues d'eau;

  2. un nombre inconnu (mais peut-être important) de petits lacs, retenues et lagunes n'a pas été recensé dans la présente étude et il n'y est pas question non plus des marais, marécages, plaines inondables et mangroves.

Ces quelques considérations permettent déjà de penser que l'on pourrait accroître de 50 à 100 pour cent la production par habitant; toutefois, la croissance démographique aura pour effet de réduire à nouveau la consommation par habitant. Enfin:

  1. les estimations concernant le rendement potentiel visent la production “naturelle” de poisson et ne tiennent pas compte des techniques qui permettent d'augmenter la production telles que l'empoissonnement avec des espèces indigènes pour combler des niches écologiques vacantes, l'alimentation complémentaire, l'eutrophisation avec des eaux d'égout, du fumier ou des engrais agricoles (soit directement, soit par le ruissellement provenant du bassin de réception, et la mise en place de structures en branchages (acadja)).

Ces techniques qui permettent d'augmenter nettement les captures par rapport au niveau “naturel” ne peuvent que se généraliser à mesure que les populations rurales cherchent à produire davantage d'aliments. A long terme, c'est sans doute en intensifiant la production plutôt que l'exploitation que les populations rurales pourront empêcher la croissance démographique de faire baisser la consommation de poisson par habitant.

Le problème, du moins du point de vue des planificateurs du développement, est que l'on ne sait pas exactement quelle proportion du rendement potentiel des petites étendues d'eau est déjà exploitée par les populations rurales. Dans les enquêtes nutritionnelles, en général, le poisson figure comme une denrée alimentaire distincte, mais dont la provenance n'est pas toujours précisée, ou bien l'enquête ne couvre qu'une petite partie d'un pays. A la connaissance de l'auteur, les prises totales actuelles (c'est-à-dire l'offre à la consommation) dans les petites étendues d'eau ne sont connues pour aucun pays africain. D'un point de vue pratique, toutefois, il est plus important à l'heure actuelle de mener des activités de développement destinées à stimuler rapidement la production plutôt que de se concentrer exagérément sur l'inventaire des captures actuelles car il s'agit d'un travail coûteux et de longue haleine qui ne contribue en rien à l'augmentation directe de la production1.

5. QUE FAUT-IL FAIRE?

De nombreuses petites étendues d'eau sont actuellement plus ou moins exploitées par des pêcheurs occasionnels. Leur production pourrait sans doute beaucoup augmenter dans un délai relativement court (2 à 4 ans) si les administrations nationales et provinciales appliquaient le plan d'action en trois points décrits ci-dessous:

1. Inventaire des petites étendues d'eau: ce travail est nécessaire pour planifier avec précision les besoins en matière de vulgarisation et on peut le faire rapidement en utilisant les cartes topographiques à grande échelle. On en tirera beaucoup de renseignements importants (par exemple, nom et type d'étendue d'eau; situation géographique et raccordement à des systèmes plus vastes; superficie1 des eaux lentiques; largeur du lit et catégorie ou classe dans le cas des eaux lotiques).

2. Empoissonnement avec des alevins de tilapia: des fonctionnaires doivent se rendre sur place, déterminer les espèces présentes (le cas échéant) et aider les pêcheurs à se procurer des alevins si nécessaire. Idéalement, la faune ichtyologique doit comprendre une espèce de tilapia se nourrissant du périphyton (par exemple Oreochromis niloticus) et d'une espèce de tilapia se nourrissant de macrophytes (Tilapia rendalli, par exemple). S'il n'y a pas d'espèces indigènes ou si elles ne conviennent pas, il faudra envisager d'introduire des espèces non indigènes. Il faut mettre au point des méthodes de transport simples afin que les pêcheurs ruraux empoissonnent eux-mêmes leurs zones de pêche avec des alevins provenant d'étendues d'eaux voisines et ne soient pas totalement tributaires de l'aide de l'Etat. Les stations aquacoles nationales, par exemple les centres pilotes, devront se consacrer en partie à la production d'alevins, car les pêcheurs ne disposent pas toujours à la proximité des espèces dont ils ont besoin, ni des quantités voulues. Un programme de ce genre a été appliqué avec succès en Tanzanie (voir Bailey, 1966). On y a obtenu de bons résultats avec des taux d'empoissonnement ne dépassant pas 500 à 1 000 alevins au kilomètre carré.

3. Fourniture d'engins de pêche bon marché: pour prendre du poisson dans les petites étendues d'eau, les pêcheurs doivent être équipés d'engins de pêche appropriés à des prix qui soient abordables. Il faut donc que le réseau national de fourniture de matériel de pêche bon marché englobe les points de vente au détail et autres points de distribution en milieu rural et non pas ceux qui sont situés près des grandes étendues d'eau mais plutôt ceux qui se trouvent à proximité des petits systèmes. En outre, pour garantir les pêcheurs contre d'éventuelles ruptures d'approvisionnement en engins de pêche “extérieurs” et également parce qu'une partie de la population rurale est trop pauvre pour acheter du matériel tout fait, il est souhaitable de leur apprendre à utiliser des matériaux locaux pour fabriquer ces engins (fabrication de filets avec de la ficelle et construction de nasses en roseaux).

L'application de ce plan d'action immédiat en trois points permettrait aux gouvernements de se rendre compte de l'ampleur des ressources et de la répartition géographique des petites étendues d'eau: de veiller à ce qu'elles soient correctement peuplées en poissons alimentaires et à ce que les populations locales aient les moyens techniques de récolter cette denrée.

A plus long terme, il faudra entreprendre un deuxième programme de vulgarisation ayant pour objectif d'une part d'empêcher toute baisse de la production dans les pêcheries existantes et d'autre part d'accroître la production totale: assainissement et aménagement des environnements détériorés, création de nouvelles étendues d'eau par la construction de barrages, augmentation de la production par diverses techniques d'aquaculture et introduction d'espèces ou de souches sélectionnées. Plus précisément, les programmes à long terme devraient comprendre tout ou partie des éléments suivants:

  1. Surveillance de la production de poisson et de l'environnement afin de préciser à quel moment certaines interventions deviennent nécessaires ou souhaitables. A cet égard, la télédétection par satellite peut s'avérer particulièrement utile pour surveiller en permanence les petites étendues d'eau de tout un pays ou d'un groupe de pays et elle peut faire partie d'un système national de surveillance générale de l'agriculture et de la végétation.

  2. Construction de petits barrages sur les cours d'eau d'importance secondaire afin d'accroître l'étendue des retenues en saison sèche, et sur les exutoires des lacs et des marécages afin d'élever le niveau et donc d'augmenter le volume de l'eau en amont.

  3. Plantation de rideaux d'arbres le long des berges afin de réduire les pertes par évaporation et de produire du bois de feu.

  4. Suppression de la végétation aquatique gênante afin d'assainir l'habitat en eau libre et d'améliorer l'oxygénation des étendues d'eau envahies par les plantes aquatiques.

  5. Enlèvement de la végétation fixe1 dans les lacs de barrage nouveaux ou anciens afin de faciliter la pêche, de supprimer les points d'ancrage des tapis de végétation flottante et d'éliminer les obstacles à la navigation (voir Maar, et al., 1966:81–7). Ce nettoyage peut être systématique dans les petits réservoirs et sélectif dans les réservoirs plus grands.

  6. Alimentation complémentaire, fertilisation avec des dêchets organiques et mise en place de branchages (acadja) pour que la production de poisson dépasse le niveau “naturel”.

  7. Repeuplement avec certaines espèces ichtyques indigènes (ou exotiques si les conditions le permettent) afin d'occuper des niches écologiques vacantes. Il peut s'agir d'espèces pélagiques herbivores (comme les clupéidés, quelques petits cyprinidés, quelques petits characinidés), piscivores (comme le robuste Clarias spp.), ou insectivores (les petits mormyridés et les schilbéidés), d'espèces supportant l'eau saumâtre (soles et mulets) et d'espèces utilisées contre les organismes vecteurs de maladies (comme Astatoreochromis et certains Synodontis utilisés contre les escargots; Gambusia, Aplocheilichthys, Nothobranchius, autres cyprinodontes utilisés contre les larves de moustiques - voir Maar, et al., 1966:99–103, 143–4). En outre, on pourrait introduire des variétés améliorées d'espèces de tilapia sélectionnées pour leur productivité élevée, leur adaptabilité aux milieux difficiles et leur résistance aux parasites1.

  8. Compilation, collation et analyse de l'ensemble actuellement très épars de documentation scientifique et technique concernant les petites étendues d'eaux africaines. Il faudrait de toute urgence établir des manuels à l'intention des vulgarisateurs.

  9. Lancement d'un programme de recherche multidisciplinaire orienté vers la solution des problèmes visant la pleine utilisation et la conservation des ressources des petites étendues d'eau. L'exécution du programme devra se faire en liaison directe avec les vulgarisateurs ruraux pour que les nouvelles méthodes et techniques soient transmises dans les plus brefs délais aux populations rurales et pour qu'on connaisse rapidement les succès et les échecs d'exécution. Un des objectifs du programme serait d'adapter et de transférer les éléments appropriés, de l'aquaculture traditionnelle et moderne à l'intention des pêcheurs des petites étendues d'eau. Il faudrait en particulier mettre au point des tactiques à utiliser d'urgence en cas de sécheresse pour protéger l'environnement et les stocks ichtyques.

D'un point de vue pratique, la pêche dans les petites étendues d'eau est une “troisième voie de développement” en Afrique, complémentaire de la pêche continentale et maritime. Elle permet d'introduire, avec les meilleures chances de succès, les techniques d'aquaculture d'une manière adaptée à la situation africaine et au concept africain de production de poisson1: ce point a souvent été négligé par les promoteurs de l'aquaculture qui s'efforcent d'appliquer en Afrique des méthodes asiatiques ou occidentales. Les effets des programmes d'action immédiats et à long terme que nous proposons dépendront toutefois des efforts des directeurs et responsables des pêches: ceux-ci doivent convaincre leurs gouvernements (ainsi que les instituts de financement extérieurs si nécessaire) que les petites étendues d'eau peuvent fournir aux ruraux pauvres les protéines dont ils ont besoin. Il faudra beaucoup de volonté politique et de conviction pour faire adopter ces activités de développement - qui ne sont pas auréolées du prestige des grands projets et ne bénéficient ni aux populations urbaines ni aux notables ruraux aisés - mais dont l'impact sera peut-être déterminant pour la suppression de la malnutrition chez les ruraux pauvres du continent africain.

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Tableau 1

Petites étendues d'eau lentiques recensées en Afrique (d'après les données de l'annexe)

Types d'étendues d'eauNombre d'étendues d'eau dans chaque catégorie ou groupes de catégories
Petits lacs  1 000     200 520
Petites retenues (bassins, lacs de barrage)17 247
Petites lagunes côtières    470 
Total général 19 437

Tableau 2

Nombre et longueur théoriques de diverses classes de cours d'eau en Afrique. D'après Welcomme (1979:8, tableau 2.1)

ClasseNombreLongueur moyenne (en km)Longueur totale théorique (en km)Cours d'eau typique de la classe
 AB(A×B) 
  14 166 969       1,6 6 667 150 
  2   870 615       3,7 3 203 865 
  3   181 900       8,5 1 540 693 
  4     38 005     19,5    741 097 
  5       7 940     44,8    356 347 
  6       1 659   103,3    171 358 
  7          347   237,4      82 492Moa    
  8            72   547,1      39 392Ouémé
  9            151 259,1      19 013Volta   
10      3,2(3)2 897,8        9 273Niger   
11      0,7(1)6 669,0        4 668Nil      
Total  12 835 346 

Tableau 3

Rapport entre la longueur des berges et la superficie d'étendues d'eau lentiques de tailles diverses On suppose que ces étendues d'eau sont de formes parfaitement circulaires*

A
Superficie
B
Longueur des berges
Rapport
       1 km23,5 km3,5   km/km2
     10 km211,2 km1,1   km/km2
   100 km235,4 km0,35 km/km2
1 000 km2112 km      0,11 km/km2

* Si l'étendue d'eau n'est pas parfaitement circulaire, le rapport entre la longueur des berges et la superficie augmente. Ainsi, le bassin allongé et irrégulier de Cahora Bassa (superficie = 2 665 km2; longueur des berges = 1 775 km) a un rapport relativement élevé de 0,67. En général, les lacs naturels sont plutôt circulaires ou ovales tandis que les lacs de barrage ont une forme très irrégulière.

Tableau 4

Rapport entre la longueur des berges et la superficie de systèmes lotiques de tailles diverses. On suppose que les chenaux sont parfaitement rectilignes; les superficies sont calculées pour une section de 1 km de long

Longueur du chenalA
Longueur des berges (de part et d'autre du chenal)
Largeur du chenalB
Superficie de la section du chenal
Rapport
1,0 km2,0 km     10 m0,01 km2200 km/km2
1,0 km2,0 km   100 m  0,1 km2  20 km/km2
1,0 km2,0 km1 000 m  1,0 km2    2 km/km2

Tableau 5

Rendements potentiels théoriques de petites étendues d'eau de diverses dimensions Les rendements ont été calculés en utilisant les équations de régression indiquées (d'après Bernacsek, ouvrage en préparation).

C = captures totales (t)
A = superficie (km2)
L = longueur du chenal (km)

 Superficies
 1 km25 km210 km225 km2
Lac
(C= 31,955A0,816)
32 t120 t210 t440 t
Plaine inondable
(C= 5,467A)
5,5 t27 t55 t140 t
Marécage
(C= 2,5A)
2,5 t13 t25 t63 t
Lac de barrage
(C= 23,367A0,836)
23 t90 t160 t340 t
Lagune
(C= 10,0A)
10 t50 t100 t250 t
 Longueur du chenal (catégorie de cours d'eau)
 Cours d'eau
(C= 0,0032L1,98)

* Le rendement potentiel ne concerne que le chenal de la catégorie de cours d'eau indiquée et ne comprend pas les rendements potentiels de ses affluents de catégories inférieures.

ANNEXE

Inventaire des petites étendues d'eau de 56 pays africains et îles qui en dépendent

L'accent est mis sur les catégories les plus importantes dans chaque pays. Les données sont tirées de Bernacsek (ouvrage en préparation).

PaysPetites étendues d'eau
Afrique Australe (étendues d'eau non mentionnées ailleurs)Plusieurs petits lacs, souvent saisonniers ou salés; environ 300 petites retenues en amont de grands barrages; plusieurs petites lagunes côtières.
Algérie21 petites retenues en amont de barrages importants.
AngolaOn ne connaît pas le nombre exact de petits lacs éparpillés sur tout le territoire; nombreux petits cours d'eau et affluents secondaires de grandes rivières.
BéninPlusieurs petits lacs dans l'ouest et petits barrages pour faire boire le bétail dans le nord.
Botswana23 petits barrages de retenue
Burkina FasoAu total, 800 petits barrages ont été construits, dont 320 sont actuellement utilisés
BurundiQuelques petits lacs dans le nord; plusieurs petites plaines inondables et marécages dans le nord et le sudest.
Cap-VertQuelques ruisseaux courts très souvent à sec.
ComoresPlusieurs petits lacs et brefs cours d'eau
CongoNombreux affluents secondaires de cours d'eau plus importants et plusieurs petites fleuves côtiers.
Côte d'IvoirePlusieurs petites rivières et affluents secondaires de cours d'eau plus importants; plusieurs petits lacs de barrage; plusieurs petites lagunes côtières
DjiboutiLe pays ne possède pas d'étendues d'eau notables.
EgyptePlusieurs petits lacs salés près des oasis du nord-ouest et du nord-est; nombreux canaux d'irrigation dans le delta du Nil.
EthiopieQuelques petits lacs et marécages salés.
GabonPlusieurs petits lacs, cours d'eau et lagunes côtières
GambieLe pays ne possède pas d'étendues d'eau notables.
GhanaPlusieurs petites rivières ainsi que des affluents secondaires de cours d'eau plus importants; plusieurs petits barrages; environ 45 petites lagunes côtières.
GuinéePlusieurs petits cours d'eau.
Guinée-BissauQuelques petites rivières
Guinée équatorialeQuelques petits lacs de cratère; plusieurs petits cours d'eau.
Iles CanariesPlusieurs torrents de longueur réduite; environ 76 lacs en amont de grands barrages; plusieurs milliers de petites retenues.
Jamahiriya arabe libyenneQuelques petits lacs salés dans le désert.
KenyaNombreux petits lacs éparpillés dans tout le pays; environ 3 000 petits réservoirs construits pour abreuver le bétail.
LesothoNombreux petits barrages de retenue
LibériaPlusieurs petits cours d'eau; grand nombre de petites lagunes côtières, criques et marécages soumis au régime des marées.
MadagascarAu total, environ 520 petits lacs, retenues et lagunes côtières; plusieurs petits cours d'eau et mangroves.
MadèrePlusieurs torrents courts
MalawiQuelques petits bassins hydrographiques
MaliPas de ressources notables
MarocPlusieurs petits lacs et rivières, ainsi que 25 petits bassins de retenue
MauricePlusieurs petits systèmes hydrographiques; 10 petits lacs de barrage; 25 petites lagunes côtières artificielles.
MauritaniePas de ressources notables
MozambiquePlus de 1 000 lacs permanents, petits et moyens, et un nombre inconnu de lacs saisonniers; plusieurs petites rivières et de nombreux affluents secondaires de grands cours d'eau; plusieurs petits bassins de retenue; environ 400 petits lagunes côtières.
NamibiePlusieurs petits barrages de retenue
NigerPlusieurs petits lacs dans le sud; plusieurs petits affluents saisonniers de grands cours d'eau, ainsi qu'étangs et marécages associés; plusieurs petits bassins de retenue à usage agricole.
NigériaEnviron 200 petits lacs et bassins de retenue; nombreuses petites rivières et affluents secondaires de grands fleuves.
OugandaNombreux petits lacs; nombreux petits cours d'eau bordés de marécages à papyrus; environ 800 petits barrages pour abreuver le bétail.
République du CamerounPetits lacs de cratère éparpillés dans l'ouest; plusieurs petites rivières.
République centrafricainePlusieurs petits barrages
République-Unie de TanzanieNombreux petits lacs éparpillés dans tout le pays; plusieurs petits réseaux hydrographiques; au moins 32 petits lacs de barrage.
RéunionNombreux torrents courts
RwandaPlusieurs petits lacs; nombreux petits affluents secondaires
Sao Tomé-et-PrincipePlusieurs torrents saisonniers courts
SénégalPlusieurs petits cours d'eau; plusieurs petits marécages; plusieurs petits lacs de barrage; quelques petites lagunes côtières
SeychellesPlusieurs torrents courts
Sierra LeonePlusieurs petits cours d'eau avec mangroves et plaines inondables; plusieurs petits barrages; nombreuses petites lagunes.
SomalieEnviron 240 petits bassins de retenue pour abreuver le bétail
SoudanQuelques petits lacs isolés; plus de 800 petits bassins de retenue (et étangs) avec canaux d'irrigation associés.
SwazilandPlusieurs petits affluents de grands fleuves internationaux; plus de 200 petits barrages agricoles.
TchadQuelques petits lacs dans le sud-ouest
TogoPlus de 70 petits lacs de barrage
TunisieQuelques petits lacs et marécages salés; 11 petites retenues en amont de grands barrages; 15 petits barrages à usages agricoles et domestiques; plusieurs petits bassins associés aux neuf oasis principales.
ZaïreNombreux petits lacs éparpillés dans tout le pays; très grand nombre d'affluents secondaires de grands fleuves, avec marécages et plaines inondables.
ZambiePlusieurs petits lacs; 409 petits barrages agricoles.
Zimbabwe115 petites retenues en amont de grands barrages et 10 300 petits barrages

1 Estimation de la variance moyenne

1 De nombreuses villes moyennes sont également situées à proximité d'une petite étendue d'eau pour des raisons similaires

2 La pêche à la ligne est parfois très efficace et tout à fait adaptée aux petits systèmes (voir Kenmuir, 1981)

3 Les systèmes lentiques sont de vastes étendues d'eau où l'écoulement est faible ou nul (par exemple lacs, bassins de retenue, marécages, lagunes côtières)

1 Les systèmes lotiques sont des étendues d'eau courante de forme allongée telles que fleuves, rivières et ruisseaux

1 Les lagunes côtières échappent en général à la sécheresse car elles sont reliées à la mer (en surface ou sous terre) et elles bénéficient en outre de l'apport plus régulier d'eau de ruissellement de cours d'eau importants, dont certains se jettent parfois directement dans une lagune avant d'atteindre la mer

1 En outre, moins d'éléments nutritifs sont “gaspillés” pour nourrir des poissons adultes dont le taux de conversion alimentaire est faible et qui ont donc une productivité moindre que les individus plus jeunes

1 En tout état de cause, pour des pêcheries aussi dispersées, on obtiendra plus facilement ces renseignements à partir d'enquêtes nutritionnelles bien conçues qu'à partir de statistiques des captures

1 Correspond approximativement à: longueur × largeur × 0,7

1 L'installation de bordigues en branchages et l'enlèvement de la végétation fixe dans les lacs de barrage méritent quelques observations car, à première vue, ces deux activités semblent contradictoires. Les bordigues en branchages sont un système de pêche très perfectionné. Il s'agit de structures spécialement conçues, construites et exploitées par les pêcheurs qui en ont la maîtrise totale. Elles permettent d'accroître considérablement la production de poisson par rapport à la production naturelle et l'accroissement ainsi obtenu profite directement aux pêcheurs. La végétation naturelle laissée en place dans les lacs de barrage permet en général un plus fort développement du périphyton et des insectes aquatiques dont se nourrissent les poissons; la production de poisson est donc plus importante que si cette végétation était enlevée avant la fermeture du barrage. Toutefois, la présence d'une végétation naturelle submergée réduit aussi les possibilités de capture du poisson car elle gène la pêche au filet et le produit de la pêche peut être inférieur à ce qu'il aurait été si le lac de barrage avait été débarrassé de cette végétation. Les bordigues en branchages et la végétation naturelle submergée accroissent dans les deux cas la productivité biologique par rapport à un système lentique dépourvu de structures, mais seuls les bordigues augmentent sensiblement et sûrement les captures de poisson.

Notons en passant que la construction de bordigues nécessite une grande quantité de bois. Au début, on peut utiliser la végétation enlevée avant la mise en eau; ensuite, on exploitera les rideaux d'arbres plantés le long des berges (voir section c) ci-dessus).

1 L'introduction de variétés génétiques améliorées est une technique courante en agriculture et élevage. Si, après une évaluation rigoureuse, il n'y a pas de danger à craindre pour l'environnement, il serait absurde de ne pas appliquer de telles pratiques à la pêche dans les petites étendues d'eau, si l'on peut raisonnablement en attendre une amélioration de la production. Certaines étendues d'eau possèdent une faune ichtyque locale exceptionnelle qui mérite une protection totale contre la concurrence néfaste d'espèces exogènes, mais la vaste majorité des étendues d'eau africaines n'entre pas dans cette catégorie

1 Selon le concept africain, la production de poisson peut se définir comme l'exploitation du poisson naturellement présent dans une étendue d'eau située à proximité. Les pratiques d'aménagement intensif telles que l'acadja ou l'aquaculture en étangs sont l'exception plutôt que la règle


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