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Chapitre V - La fixation primaire: La technique de la palissade

1. Définition
2. L'édification de la palissade
3. Le rehaussement de la palissade
4. Le quadrillage
5. L'entretien


1. Définition

- La palissade est un obstacle linéaire opposé au vent dominant pour en diminuer la vitesse et provoquer à son niveau l'accumulation du sable en mouvement. Cette accumulation aboutit à la formation d'une dune artificielle qui constitue la première phase de la lutte contre l'ensablement.

- Suivant le positionnement de la palissade par rapport à la direction du vent dominant on distingue deux types de dunes artificielles:

• la dune "en arrêt", qui est destinée à arrêter la progression du sable aussi complètement que possible. Elle se forme à partir d'une palissade orientée perpendiculairement a la direction du vent le plus dangereux, ce qui est la pratique la plus courante (figure 11.a).

• La dune "en défilement", utilisée pour dévier la progression du sable dans une autre direction que celle du vent dominant. Elle se forme à partir d'une palissade dont l'orientation fait un angle de 120 à 140° avec la direction moyenne de ce vent dominant (Figure 11.b).

La disposition en défilement est peu utilisée, le sable détourné risquant d'envahir d'autres zones d'habitat et de mise en valeur situées à de très grandes distances de la zone qui fait l'objet des travaux de protection.

- Avec le sable d'origine maritime on édifie la palissade de bordure de mer, c'est-à-dire aussi prés que possible de la zone de mobilisation du sable. Elle créera une dune artificielle appelée cordon littoral.

Si le rivage est perpendiculaire à la direction du vent dominant le cordon littoral se comportera comme une dune en arrêt, et s'il est oblique à cette direction il aura le même effet qu'une dune en défilement. Il faudra alors construire des épis transversaux s'appuyant sur le cordon littoral et empêchant la progression d'une partie du sable le long de celui-ci.

2. L'édification de la palissade

2.1 Le positionnement
2.2 Les caractéristiques
2.3 La confection


2.1 Le positionnement

Aucune des parties de la palissade ne doit se situer à moins de 200 mètres de la zone à protéger. Si elle parvient à cette distance, il faut en interrompre l'édification et créer une seconde palissade de 40 à 50 mètres au vent de la première (figure 12).

En aucun cas la distance entre deux palissades successives ne doit descendre au-dessous d'une trentaine de mètres.

Fig. 12 - Tracé de la dune artificielle par rapport à la zone à protéger

2.2 Les caractéristiques

Pour remplir efficacement son rôle, la palissade doit répondre aux caractéristiques suivantes (figure 13):

Fig. 13 - Palissade

- être perméable au vent afin d'en ralentir la vitesse et permettre le dépôt du sable sans provoquer de phénomène tourbillonnaire. Cette perméabilité favorise l'accumulation du sable de part et d'autre de la palissade dont la surface des vides est comprise entre 30 et 40 % de sa surface totale;

- avoir une hauteur allant de 1 mètre et 1,20 mètre. Une taille plus importante ne se justifierait pas puisque 95% du sable déplacé par le vent l'est dans les 30 premiers centimètres au-dessus de la surface du sol.

2.3 La confection

a) L'utilisation de palmes
b) L'utilisation de plaques de fibro-ciment
c) L'utilisation d'un grillage synthétique
d) L'utilisation de branchages


L'orientation de la palissade étant déterminée, on procède au piquetage de son tracé à l'aide d'une boussole de terrain, de jalons ou de piquets (figure 14). Pour sa confection, différents types de matériaux peuvent être utilisés dont le choix dépend des conditions d'approvisionnement et du prix de revient.

a) L'utilisation de palmes

Lorsque le terrain est constitué d'un sol friable ou trop graveleux on creuse un fossé de 40 cm de profondeur et de 30 cm de large pour y enterrer la base des palmes (figure 15). Si le sol est consistant, il est préférable de construire d'abord une levée de terre d'environ 80 cm de hauteur qui supportera la palissade. Les palmes son enterrées jusqu'à 30 cm dans le fossé ou dans la levée de terre; la hauteur des palmes au-dessous du sol ne doit pas dépasser 1 mètre.

Les palmes seront disposées (figure 16) par mètre linéaire comme suit:

- 7 à 9 palmes dressées verticalement et en quinconce de part et d'autre à l'intérieur du fossé;

- 8 à 10 palmes, inclinées à droite ou à gauche par rapport à la verticale et enchevêtrées les unes aux autres;

- 2 palmes, horizontalement, de part et d'autre des autres et fixées à celles-ci, au sommet de la palissade, par des nervures de palmes vertes.

A titre indicatif, les besoins par mètre linéaire de palissade sont de dix palmes. Leur longueur et leur largeur moyennes sont respectivement de 3 m et de 17 cm lorsqu'elles sont sèches. Il est recommandé d'augmenter l'enchevêtrement des palmes lorsqu'elles sont fraîchement coupées, car elles diminuent de volume par dessication, ce qui accroît les vides existant entre elles. L'efficacité de la palissade peut être renforcée si nécessaire, par l'implantation de piquets de bois tous les 2,5 à 3 mètres, rattachés aux palmes par du fil de fer et enfouis sur 30 cm dans le fossé.

L'approvisionnement en palmes dépend de l'importance des ressources locales et des utilisations traditionnelles qui en sont faites. Ainsi, leur utilisation comme combustible peut avoir pour conséquence une trop faible disponibilité par rapport aux besoins de la lutte contre l'ensablement.

On les récolte a deux époques de l'année, en décembre-janvier et en mars.

Figure 14 - Piquetage

Figure 15 - Confection d'une palissade

Figure 16 - Une palissade

b) L'utilisation de plaques de fibro-ciment

Si on se heurte à des difficultés d'approvisionnement en palmes, on est contraint d'utiliser d'autres matériaux pour la confection des palissades. Les plaques en amiante-ciment (figure 17), appelées aussi plaques en fibro-ciment, ont permis l'édification de palissades très efficaces. Au Maroc, on a utilisé des plaques de 1,25 m de longueur, de 0,92 m de largeur, et pesant 14,70 kg pour une épaisseur de 6mm. Ces plaques sont perforées de 16 trous de 3 cm de diamètre répartis par rangées de quatre trous. Chaque rangée est séparée de la suivante par une distance de 3 cm. La trouaison permet d'obtenir une légère perméabilité des plaques.

Figure 17 - plaque en fibro-ciment

La pose des plaques est effectuée, comme pour les palmes, selon la consistance du terrain, soit dans un fossé, soit sur une levée de terre. Ainsi, chaque plaque est enfouie, verticalement, sur une longueur de 0,25 m de telle façon que sa hauteur visible soit de 1 mètre. Un espace de 4 centimètres doit être laissé entre deux plaques successives pour permettre de diminuer la pression du vent sur la palissade et de contribuer à sa perméabilité.

c) L'utilisation d'un grillage synthétique

Plusieurs grillages synthétiques existent sur le marché. La pose du grillage nécessite l'utilisation de piquets en bois de 1,50 m de longueur et de 0,15 m de diamètre au fin bout. Ces piquets sont destinés a soutenir le grillage; ils sont enfouis jusqu'à 30 cm dans le sol et rattachés au grillage par du fil de fer recuit. Le bord inférieur du grillage est enfoui sur 10 a 15 cm dans une levée de terre de même hauteur pour empêcher tout affouillement de la base de la palissade (figure 18).

Figure 18 - grillage en matière plastique

d) L'utilisation de branchages

Dans beaucoup de régions, il sera possible d'utiliser des branchages. Ceux-ci devront bien sûr être prélevés avec précaution dans les formations ligneuses avoisinantes sous peine de provoquer des destructions irréversibles. Les matériaux nécessaires sont des bois de petites dimensions et des branches aussi ramifiées que possible. Avec ces deux éléments on réalise un écran fait de piquets de bois enfoncés dans le sable et reliés entre eux par des branchages suffisamment entrelacés et pressés pour arrêter la progression du sable.

3. Le rehaussement de la palissade

3.1 Cas des palmes et des branchages
3.2 Cas des plaques de fibro-ciment


La palissade remplissant son office finira par être totalement submergée par le sable. Il ne faut pas attendre qu'elle soit parvenue à ce stade pour songer à la rehausser; ce travail s'effectue dés que le sable arrive à 10 ou 15 cm de son bord supérieur (figure 19).

Figure 19 - rehaussement de la palissade

3.1 Cas des palmes et des branchages

Lorsque la palissade est constituée par des palmes ou des branchages, les manipulations de rehaussement sont difficiles ou impossibles; généralement, on en érige une nouvelle avec les mêmes matériaux sur la dune artificielle en voie de formation. Il s'agira de suivre la crête de la première palissade et d'en confectionner une nouvelle identique à la première.

Dès que la nouvelle palissade se trouvera sur le point d'être ensevelie à son tour, on procèdera à son rehaussement par l'édification d'une troisième, et ainsi de suite jusqu'à ce que la dune artificielle atteigne son profil d'équilibre.

3.2 Cas des plaques de fibro-ciment

Le rehaussement de cette palissade ne nécessite pas l'utilisation de nouvelles plaques; il consiste à extraire partiellement celles qui sont en place, une à une, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus que 25 cm enfouis dans le sable et que la hauteur visible soit de 1 mètre. La distance séparant deux plaques successives doit rester égale à 4 cm.

Pour soulever une plaque, il suffit d'introduire dans les deux trous de la rangée supérieure un bâton ou une barre de fer tenu à ses extrémités par deux ouvriers situés de part et d'autre de la palissade qui, par des mouvements successifs de bas en haut, arrivent à retirer progressivement la plaque de l'amas de sable où elle est enfouie.

Comme dans le cas de la palissade de palmes, le rehaussement doit avoir lieu dès que le sable arrive à 1015 cm du bord supérieur des plaques. Au cours du rehaussement, malgré les précautions prises, il arrive que quelques plaques soient abîmées; il faut donc prévoir le remplacement de 5 à 10 % des plaques en cours d'utilisation.

4. Le quadrillage

Il peut arriver que des tourbillons se créent et déplacent d'importantes quantités de sable entre les palissades, sous l'effet de vents sporadiques mais violents, de direction différente de celle du vent dominant. On est alors obligé de compléter le dispositif par un quadrillage qui intéresse tout l'espace compris entre deux palissades successives.

Le quadrillage consiste en un réseau de lignes d'arrêt délimitant entre elles des carrés ou des losanges (figure 20). La nature et la technique d'édification de ces lignes d'arrêt sont les mêmes que celles des palissades.

Figure 20 - le quadrillage

Les dimensions des mailles du quadrillage varient en fonction de l'intensité du vent à neutraliser, des pentes des versants et de la forme de la dune. Ainsi, les mailles sont d'une façon générale, de dimensions plus faibles sur la face au vent que sur celle située sous le vent et dans les dépressions.

A titre d'exemple, les dimensions moyennes des mailles utilisées sur les dunes présahariennes du Maroc sont uniformément de 10 x 15 m sur les hauts de dunes, 3 x 3 m sur les versants, 4 x 4 m dans les dépressions.

5. L'entretien

Pour que la palissade puisse jouer son rôle efficacement et d'une façon continue, il faut la protéger de toute détérioration. En effet, toute brèche constitue immédiatement un siffle-vent dangereux où le vent s'engouffre a une vitesse très importante, ce qui diminue l'efficacité de la palissade et peut même l'annihiler. Il est impératif d'assurer un entretien continu des dispositifs d'arrêt en intervenant immédiatement là où des brèches se sont produites. Tout retard risquant d'avoir de graves conséquences, il faut assurer un gardiennage permanent de la zone traitée pour empêcher la circulation des hommes et des animaux à travers ces dispositifs. L'efficacité des ouvrages de lutte contre l'ensablement est à ce prix.


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