Chapitre VII. Développement de l'approche participative


Back to contents - Previous file - Next file


7.1. Introduction
7.2. Démarche suivie
7.3. Ressources humaines
7.4. Moyens materiels utilisés
7.5. Mesures d'accompagnement
7.6. Collaboration avec services techniques et autorités


7.1. Introduction


La stratégie d'intervention est basée sur une nouvelle approche d'intervention en milieu rural, dite Approche Participative.

Cette approche considère la population rurale pour laquelle l'action de développement est menée comme l'actrice principale. Elle accorde une place importante à la sensibilisation et la conscientisation des populations sur leurs problèmes de développement et les enjeux de la lutte contre la désertification et de la protection de l'environnement.

L'équipe a particulièrement mis l'accent sur la nécessité d'intervenir urgemment avant qu'il ne soit trop tard, à l'image de certains villages où les gens étaient contraints de quitter. Quant à la mise en oeuvre de l'approche participative, la contribution et les responsabilités de chaque partie (projet et populations) ont été clairement définies. Le projet apporte les moyens matériels et le personnel d'encadrement nécessaires pour garantir le bon déroulement des travaux et la réussite des actions. Quant aux populations leur contribution se retrouve au niveau de la main d'oeuvre pour exécuter les travaux.


7.2. Démarche suivie


La Composante a développé progressivement sa stratégie d'approche des populations par étapes successives:

7.2.1. Etape 1: Reconnaissance de terrain et prise de contact

Elle a consisté en une prise de contact avec les populations et à la reconnaissance du milieu physique. Le dialogue établi avec les populations avait pour but, d'une part de connaître leurs sentiments par rapport aux problèmes de l'environnement, et d'autre part de les amener à s'interroger sur les changements qui s'opèrent autour d'elles et de se situer par rapport à cela.

La première visite effectuée du 30 Octobre au 03 Novembre 1990, à l'occasion de la tournée du Préfet du Département de Diffa et des responsables des services techniques, dans le cadre de l'évaluation de la campagne agricole, nous a permis d'avoir une idée sur l'ampleur de la désertification et des phénomènes d'ensablement et de prendre contact avec les populations de l'Arrondissement de Mainé Soroa. Une vingtaine de cuvettes et une trentaine de villages à travers tout l'arrondissement ont pu être visités. Au niveau de ces différents villages et cuvettes, le projet a été présenté aux populations.

7.2.2. Etape 2: Diagnostic du milieu

A l'issue de la première visite, 13 villages ont été présélectionnés, sur la base du souhait exprimé par les populations et du degré de menace d'ensablement.

Une deuxième mission a été effectuée du 13 au 14 Novembre 1990, à travers les 13 villages présélectionnés. Cette mission a pour principal but de procéder au diagnostic du milieu phgysique et humain. Au niveau de chaque village il a été tenu des réunions au cours desquelles nous avons présenté et expliqué en détail le cadre, les objectifs et la stratégie d'approche du projet. Des renseignements sur l'environnement écologique, la végétation naturelle, l'état de dégradation de la végétation, l'ampleur de l'ensablement et la population et leurs activités socio-économiques. Les discussions engagées avec les populations, nous ont permis de mesurer leur degré de sensibilisation sur les problèmes de protection de l'environnement, leur sens d'organisation et de prise de conscience collective pour lutter contre les phénomènes d'ensablement.

Les populations ont réagi favorablement à l'égard du projet. Elles ont manifesté une ferme volonté de participer pleinement aux activités du projet, sans attendre en contre partie une rénumération quelconque car il y va de leur intérêt. Cependant elles n'ont pas manqué d'attirer notre attention sur la mauvaise situation alimentaire qu'elles connaissent.

7.2.3. Etape 3: Restitution et choix des sites

Après le dépouillement et l'interprétation des résultats du diagnostic du milieu, nous sommes retournés dans les villages pour procéder à la restitution des résultats et au choix des sites.

Cette étape est très importante car elle nous permet d'analyser en profondeur avec les populations les causes d'ensablement, les contraintes du milieu, les responsabilités et les possibilités de chaque partie. Les sites sont choisis sur la base des critères suivants:

7.2.4. Etape 4: Analyse des problèmes et identification des solutions

Cette étape ne concerne que les sites retenus. Elle consiste à engager des discussions avec les populations sur les causes et les dangers de l'ensablement et à les sensibiliser sur la nécessité et l'urgence d'engager une lutte énergique. Après analyse des problèmes, on procède ensemble avec les populations à l'identification des solutions à prendre et à la détermination des responsabilités de chaque partie concernée.

Ainsi, il appartient au projet d'apporter tous les moyens financiers et matériels et l'assistance technique nécessaire. Quant à la population, elle doit fournir la main-d'oeuvre nécessaire à la réalisation de toutes les actvités.

7.2.5. Etape 5: Programmation

Cette étape consiste, d'une part à établir mensuellement et hebdomadairement un programme des activités à conduire et le type d'organisation à mettre en place pour assurer le bon déroulement des activités, et d'autre part à définir et pourvoir les moyens de travail.

La programmation se fait en fonction des objectifs dégagés, des moyens du projet, de la ressource humaine et des préoccupations des populations en tenant compte des engagements de chaque partie.

7.2.6. Etape 6: Mise en place des moyens

Une fois le programme de travail arrêté, nous procédons à la mise en place des moyens humains et matériels conséquents, en fonction des objectifs visés et des engagements pris lors des discussions. Ceci doit avoir lieu avant le démarrage des activités.

Ainsi au niveau des différents villages retenus, nous avons affecté des agents (ATEF et AVAF) chargés d'entraîner et d'encadrer les populations. Dans les villages où on note un degré élevé de motivation et d'organisation, nous avons préféré laisser les populations se débrouiller seules, en les encadrant à partir de la composante.

La mise en place des agents et du matériel de terrain a eu lieu, chaque année entre janvier et février. Le projet a mis à la disposition des AVAF et des ATEF du matériel audiovisuel (rétroprojecteur, projecteur de diapositives, appareil photo, albums photo, magnétophone, TV+VIDEO, etc.) pouvant leur permettre de mieux accrocher les populations lors des séances de sensibilisation et d'animation. Mais ce matériel incomplet (sans caméra vidéo) et insuffisant (une TV + Vidéo pour tout le projet) n'a pas permis d'atteindre nos objectifs, à savoir tenir des séances d'animation avec des projections de films dans tous les villages.

7.2.7. Etape 7: Sensibilisation des populations

La sensibilisation constitue la cheville ouvrière de l'approche participative que le projet a développée au cours de ces trois campagnes.

La première mission de sensibilisation des populations a eu lieu entre les 31. Décembre 1990 et 14 Janvier 1991. Au niveau de chaque site, l'équipe du projet composée de l' Expert forestier, du chef de la composante et de son adjoint, a tenu des réunions avec les populations en présence du chef du village et les responsables des services techniques (école, centre de santé, centre d'élevage) pour attirer leur attention sur la gravité des phénomènes d'ensablement, ses causes, son développement, ses conséquences et les moyens de le combattre. Il leur a été expliqué les objectifs globaux de l'approche participative qui sont, d'une part d'assurer une prise en main de la protection de l'Environnement par les populations ellesmêmes, sans la présence du technicien, et d'autre part de garantir un développement harmonieux autocentré pour une existence meilleure par le biais d'encadrement technique des hommes et des femmes.

Afin d'amener les populations à mieux connaître leur environnement, de comprendre les changements intervenus autour d'elles et de prendre conscience de la nécessité d'entreprendre des actions de protection contre toute forme de dégradation, particulièrement l'ensablement des terres et des infrastructures, une sensibilisation continue a été menée par les Agents d'Animation et de Vulgarisation Forestière (AVAF) affectés au niveau de chaque village. Il s'agit de faire prendre conscience aux populations des villages d'intervention, d'une part de la nécessité de protéger l'environnement et de lutter contre la désertification et, d'autre part pour une participation massive.

La composante a mis l'accent surtout sur la mobilisation des femmes pour que leur participation ne se limite pas seulement aux travaux de pépinière et sur leur organisation en groupements d'intérêt économique de productrices de plants.

La fréquence des réunions de sensibilisation et d'animation des populations, au niveau des villages, est de 2 à 3 réunions par mois, portant sur les thèmes:

7.2.8. Etape 8: Formation

La formation dans le tas a été privilégiée pour permettre aux populations de mieux maîtriser les techniques proposées. Au niveau des villages, au fil du temps nous avons procédé à l'identification de paysan(e)s pilotes. Trois à quatre personnes par villages ont été identifiées et formées davantage aux différentes techniques de lutte contre l'ensablement, depuis le diagnostic du milieu jusqu'à la stabilisation mécanique et biologique des dunes, selon les étapes chronologiques. Ces paysans pilotes ont pour rôle principal d'encadrer leurs pairs et de conduire l'exécution des travaux, sans la présence de l'AVAF ou des cadres du projet. Ils reçoivent des ordres directement de l'AVAF chargé du suivi du site. Ils sont en quelque sorte la courroie de transmission entre l'équipe de la composante et les populations.

7.2.9. Etape 9: Encadrement des populations

La stratégie du projet est soutenue par une philosophie qui veut que ce soit les populations elles-mêmes qui soient les principaux acteurs des opérations. Afin d'assurer un transfert des connaissances avant la fin du projet, l'approche utilisée consiste à mobiliser et responsabiliser les populations, puis les abandonner progressivement à elles-mêmes. Deux étapes sont observées, à cet effet:

Afin d'atteindre les objectifs visés par le projet, l'équipe de la composante, conformément à l'esprit du document du projet, a mis en oeuvre une stratégie fondée sur une bonne utilisation de la ressource humaine permettant d'assurer un autoencadrement à la base des populations. L'équipe a vite compris que pour mobiliser les populations, les maillons de la chaîne doivent être à tous les niveaux très solides et que l'encadrement passe tout d'abord par une grande responsabilisation des populations. Cel les-ci ne pourront être efficacement encadrées que si les agents chargés de le faire sont eux-mêmes au préalable bien formés et bien organisés.

C'est dans cet esprit que des AVAF et ATEF, formés aux différentes techniques, ont été affectés dans les principaux villages. Leur présence quotidienne dans les villages leur a permis de mieux comprendre le comportement des populations, la complexité du milieu, l'enjeu des problèmes de développement et les difficultés qu'elles endurent pour survivre et d'en définir la stratégie d'encadrement.

Les villages de Mainé Soroa, Adébour, Métaram, Baboulwa, Chéri et NGuel Bayli, ont été encadrés par des AVAF et des ATEF résidents. Les populations des villages de Foulatari et de Garoua, après avoir bénéficié pendant un an d'un encadrement permanant assuré par un AVAF résident, ont été livrées à ellesmême. Dans les sites de Ambouram Ali, Adjidogori, Mallouri et Djajiri les populations ont travaillé seulles sous la supervision de l'équipe de la Composante.

7.2.10. Etape 10: Organisation des populations

Cette étape a consisté à organiser les populations en structures capables d'engendrer une dynamique interne d'intervention, de suivi des activités et des initiatives locales émanant d'elles.

Pour assurer une participation continue des populations dans les chantiers, elles ont été organisées en petits groupes (10 à 20 personnes) de travail, de manière à pouvoir concilier leurs occupations propres avec les activités du projet.

Dans tous les villages, la composante a mis en place, à partir de la deuxième année d'intervention, des comités de gestion de l'environnement, chargés de veiller à la bonne marche des travaux, de se prononcer sur les problèmes de protection de l' Environnement et de prendre avec leurs paires les mesures nécessaires. Ces comités comprennent le chef du village ou du groupement qui en est souvent le président, la présidente des femmes et des paysans et paysanes pilotes (An.8).

La constitution de comité de gestion dans les sites est volontairement retardée à la deuxième année, parce que nous avons pensé qu'en tant que processus de parachèvement d'organisation des populations, elle ne pourrait intervenir que lorsque certaines conditions sont remplies, à savoir: engagement réel et motivation des populations, une maîtrise par les populations des paquets techniques proposés par le projet. C'est pour cette raison que nous avons privilégié, avant la création de tout comité, la formation des populations dans le tas et de paysans pilotes capables de prendre en charge les activités.


7.3. Ressources humaines


La Composante dispose d'un personnel technique et d'un personnel d'appui.

a). Personnel technique

Le personnel technique est chargé de mettre en oeuvre le projet par la conduite des actions recommandées et l'encadrement des populations. Il comprend:

La Composante a bénéficié du concours des agents du Service d' Arrondissement de l' Environnement (SAE) de Mainé Soroa.

b). Personnel d'appui

Le personnel comprend deux chauffeurs de véhicule léger, un chauffeur de camion, un conducteur temporaire de tracteur et une secrétaire dactylographe, recrutés localement.


7.4. Moyens materiels utilisés

La Composante dispose de deux véhicules légers Toyota, tout terrain dont une Pick Up et une double cabine. La double cabine a été acquise dès le démarrage du projet et la pick up en Mars 1991. Ces deux véhicules sont proposés à la réforme. Ils ont été remplacés par une Toyota type HJ 80 du Projet de Dakoro et une Pick Up PZJ 75 du Projet de Tillabery, affectés au niveau de la composante, respectivement en novembre et décembre 1993.

Le tracteur et le camion commandés par la Direction du projet ne sont arrivés qu'en mi-1992.

Cependant nous avons bénéficié du concours du PNUD qui nous a prété, en 1991, un camion pendant 3 semaines pour transporter les matériaux de fixation. Nous avons aussi utilisé le camion et la Land Rover de la D.D.E de Diffa pour les mêmes besoins.


7 .5. Mesures d'accompagnement


L'étude menée sur les sites nous a permis de constater que l'adhésion des populations aux actions du projet passe nécessairement par la satisfaction de certains besoins vitaux tels que l'amélioration des conditions alimentaires et de santé, et la mise en oeuvre d'actions de microréalisations dans des secteurs clés tels que la production agricole, l'hydraulique villageoise et l'alphabétisation fonctionnelle.

Ainsi, nous avions envisagé de mener quelques actions d'amélioration de la production agricole dans la cuvette de Ambouram Ali et de Chéri par l'application de diverses techniques culturales. Il était aussi prévu d'organiser à l'intention des AVAF et des populations des séances de formation sur l'alphabétisation fonctionnelle et la santé primaire.

Seule la formation sur les soins primaires de santé a été organisée les 2 et 3 Septembre 1992 à Mainé Soroa. Des boites de pharmacie comprenant des médicaments de premiers soins ont été mises à la disposition de tous les sites.

La révélation faite par les résultats du diagnostic du milieu, d'une situation alimentaire déficitaire endémique, a amené la Composante à revoir la politique d'approche recommandée dans le document du projet en matière d'assistance des populations. Nous avons vite compris que sans un soutien alimentaire, il était illusoire d'espérer une grande mobilisation à long terme des populations. C'est ainsi que des pourparlers ont été menés avec le bailleur de fonds (PNUD) et l'agence d'exécution (FAO) pour autoriser le projet à distribuer des vivres aux populations. Sur accord des deux parties, la Composante a adressé des requêtes de vivres P.A.M auprès du coordonnateur départemental de Diffa.

A la fin de chaque trimestre, les populations reçoivent à titre de gratification des vivres P.A.M. Ces vivres servent à soutenir l'effort fourni et à contribuer à compenser le manque à gagner des populations, durant le temps imparti aux travaux du projet. Ainsi, de Janvier 1991 à Septembre 1993, le projet a reçu et distribué 381213 Kg de vivres à près de 260616 Hj (tab.20).

Tableau No.20: Quantité de vivres distribués en 1992 aux populations des sites d'intervention.

SITES ANNEES PARTICIPATION ANNUELLE (Hj) VIVRES P.A.M (Kg)
1991 1992 1993 TOTAL 1991 1992 1993 TOTAL
MAINE SOROA 7769 25692 12420 45881 7225 21974 29600 58829
AMBOURAM ALI 9605 18141 9666 37412 7225 24756 23600 55611
ADJIDOGORI 6250 7025 13275 8358 9600 14958
ADEBOUR 16150 17439 33589 19278 23700 42978
METARAM 5644 5644 16600 16600
DJAJIRI 8868 3590 12458 13801 12600 26401
BABOULWA 6306 6909 13215 5493 16600 22093
CHERI 5729 25005 13489 44223 7225 21974 21600 55829
NGUEL BAYLI 3134 6833 9161 19128 7225 8358 11600 27213
FOULATARI 2757 4211 1644 8612 7225 10882 7600 25737
GAROUA 17917 6342 24259 10882 16600 27482
MALLOURI 2920 2920 9500 9500
TOTAL 28994 135373 96249 260616 36275 145756 199200 381213

7.6. Collaboration avec services techniques et autorités


La réalisation de certaines actions a nécessité la collaboration avec certains services techniques de l'arrondissement. Les agents des services de l'agriculture, de l'élevage, la Santé et le Plan, ont été pleinement associés aux activités du projet. Ainsi ils ont participé à toutes les réunions de programmation annuelle des activités, aux différents séminaires organisés par la composante (en qualité de formateurs) et aux missions de suivi et d'évaluation.

La formation sur les traitements phytosanitaires a été dispensée par les agents du Service de l'agriculture, celle des soins primaires de santé par les agents de la Santé et celle sur les essais d'amélioration des parcours et la mise en défens par les agents du Service de l'élevage.

Les actions d'amélioration des terres de parcours de la parcelle de mise en défens de Mainé Soroa sont conduites avec la collaboration du service de l'élevage. Elles consistent à faire l'inventaire de la biomasse végétale herbacée totale et à identifier les espèces pastorales aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de la parcelle.

Les autorités administratives et coutumières ont été étroitement associées aux activités du projet . A chaque fois que le besoin en était, on faisait recours à elles, soit pour régler un problème, soit sensibiliser davantage les populations en descendant sur le terrain. Ainsi la première campagne a été lancée par le Préfet de Diffa, après une tournée de 5 jours à travers l'arrondissement. Il en est de même pour la campagne de 1993, où à l'occasion de la fête de l'arbre le lancement de la campagne de reboisement a été précédé par une visite des réalisations du projet par le Préfet et son équipe technique, des réalisations du projet. Tous les différents Préfets et SousPréfets qui se sont succédés à la tête, respectivement du Département de Diffa et de l 'Arrondissement de Mainé Soroa, ont visité à maintes reprises les réalisations du projet. Leurs visites ont suscité beaucoup d'intérêt auprès des populations.