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Examen des déclarations de principes sur le rôle de la science et la mesure dans laquelle d’autres facteurs sont pris en compte - Application à la BST et à la PST (Point 8 de l'ordre du jour)[10]

59. Le Comité a rappelé qu’à sa vingt-deuxième session, la Commission avait décidé d’interrompre ’examen de l’adoption des LMR pour la somatotropine bovine dans l’attente d’une réévaluation des données scientifiques par le JECFA et le CCRVDF, ainsi que de l’examen par le CCGP de l’application d’«autres facteurs légitimes» en ce qui concerne la BST. En réponse à une question relative à la réévaluation des données communiquées par la cinquantième session du JECFA, le Comité a été informé que le rapport succinct de cette réunion, qui comportait une section complète sur l’évaluation de la BST, avait été publié et distribué et qu’il était disponible sur Internet. Toutefois, les monographies sur la toxicité n’étaient pas encore disponibles et le rapport définitif serait publié par l’OMS au cours des prochains mois. Étant donné que la PST n’a pas été évaluée par le JECFA, le Comité ne peut examiner ce cas spécifique.

60. Le Comité a réaffirmé le rôle primordial de la science dans les problèmes de santé publique, ainsi qu’il apparaît dans les travaux en cours sur l’analyse des risques en liaison avec l’innocuité des aliments. Un débat approfondi a eu lieu sur l’application de la deuxième déclaration de principes concernant “d’autres facteurs légitimes ayant une importance pour la protection de la santé du consommateur et la promotion de pratiques loyales dans le commerce des denrées alimentaires”.

61. Plusieurs délégations, de même que l’observateur de la Communauté européenne, ont estimé que les comités du Codex n’étaient pas des groupes d’experts et que leur rôle ne se limitait pas à l’intégration systématique des recommandations du JECFA dans les normes et autres textes. Ils formulaient des choix de politique compatibles avec la responsabilité générale des comités du Codex en procédant à une gestion des risques, tandis que l’évaluation des risques était de la compétence des groupes d’experts. En qualité de représentants des gouvernements, les pays membres devaient prendre des décisions politiques qui prennent en compte un certain nombre de facteurs en plus de l’évaluation des risques. Les délégations et l'observateur de la CE ont fait ressortir que les normes Codex visaient à la fois à protéger le consommateur et à assurer des pratiques loyales dans le commerce des denrées alimentaires, et que la distinction entre les aspects relatifs à l’innocuité et ceux relatifs à la qualité n’était pas toujours bien nette.

62. Dans cette perspective, ces délégations ont déclaré que la prise en considération d’autres facteurs légitimes dans le processus de décision était essentielle et que, dans le cas de la BST, plusieurs éléments devaient être envisagés. L’évaluation toxicologique n’était pas le seul élément dont il fallait tenir compte; comme dans le cas des additifs ayant une DJA non spécifiée, il fallait prendre en considération la justification et la nécessité technologiques, lesquelles n’existaient pas dans le cas de la BST. En outre, elles ont déclaré que seuls les systèmes de production intensive permettaient son utilisation, ce qui était contraire à la politique agricole suivie par de nombreux pays et portait en général atteinte à ’environnement,l tandis qu’habituellement une telle pratique n’était pas accessible aux pays en développement. On a également évoqué la possibilité d’une baisse des défenses immunitaires de l’animal et, par voie de conséquence, le risque d’une utilisation accrue d’antibiotiques. Ces délégations, ainsi que l'observateur de Consumers International, rappelant l’opposition des consommateurs à l’utilisation de la BST, ont insisté sur le fait que les préoccupations des consommateurs représentaient un facteur légitime si l'on voulait s’assurer que les normes Codex reposaient sur un consensus et étaient largement acceptées. L’observateur du CSPI a déclaré qu’une plus large acceptation des normes dans le commerce mondial dépendait de la reconnaissance de valeurs sociétales. L’observateur de l’AMV a demandé au Comité de considérer la santé et le bien-être des animaux dans le cas de la BST comme un facteur légitime à examiner au cours du débat.

63. D’autres délégations, ainsi que l’Observateur du COMISA, ont appuyé les recommandations du document et souligné qu’une évaluation des risques fondée sur la science devait être l’élément déterminant lorsqu’on abordait un problème d’innocuité des aliments comme l’établissement de LMR pour les médicaments vétérinaires. Elles ont reconnu que, si d’autres facteurs étaient pris en considération dans la définition des politiques à l’échelle nationale, les normes internationales avaient pour objet de servir de référence pour la protection de la santé, telle qu’elle est définie par l’Accord SPS, quand il s’agissait de mesures sanitaires. Les facteurs évoqués par les délégations s’opposant à l’établissement de LMR pour la BST pouvaient être pris en compte à l’échelle nationale, mais n’avaient pas leur raison d’être dans le cadre du Codex; en particulier, des questions telles que la santé animale et l’environnement ne relevaient pas de sa compétence. En outre, aucun critère objectif n’avait été avancé pour justifier des facteurs économiques spécifiques ou tout autre facteur lié à la BST, et l’interdiction de cette substance semblait restreindre les échanges plus qu’il n’était nécessaire.

64. Ces délégations ont estimé que la prise en considération de facteurs tels que les préoccupations environnementales, les préférences du consommateur ou le bien-être animal variait considérablement d’un pays à l’autre et était du ressort des autorités nationales; certaines délégations ont également souligné que les préoccupations ou les préférences des consommateurs n’étaient pas les mêmes dans les pays développés et dans les pays en développement.

65. L’Observateur de la Communauté européenne a tenu à corriger l’idée fausse que la CE aurait interdit l’importation de lait et de produits laitiers provenant d’animaux traités à la BST. En réalité, aucune interdiction de cette sorte n’a été introduite: il y a un moratoire concernant l’emploi de la BST dans l'Union européenne jusqu’à la fin de 1999. Il n’y a donc pas de problèmes commerciaux.

66. L’attention a également été appelée sur le fait que dans les déclarations de principes du Codex, l'expression “autres facteurs légitimes” n’était pas prise au sens large mais limitée à ceux concernant la protection de la santé du consommateur et la promotion des pratiques loyales dans le commerce. Il a été jugé important de travailler dans les limites de ces principes. D’autres délégations ont estimé que même si le bien-être des animaux et l’environnement ne faisaient pas partie des objectifs du Codex, les Etats devaient agir avec cohérence en refusant des décisions prises dans le domaine des activités du Codex qui auraient des incidences négatives sur la santé animale ou l’environnement.

67. Certaines délégations et l’observateur de Consumers International ont fait remarquer qu’il était difficile de définir le caractère légitime ou pertinent des autres facteurs et ont souligné qu’ils devaient être clairement identifiés et fondés sur des critères objectifs afin qu’ils ne soient pas utilisés comme un obstacle déguisé au commerce, compte tenu notamment des dispositions de l’Accord OTC, à savoir que “les règlements techniques ne seront pas plus restrictifs pour le commerce qu’il n’est nécessaire”. Certaines délégations ont également soulevé la question de l’étape à laquelle, dans le processus de décision, d’autres facteurs devraient être pris en considération, et de la façon dont ils pourraient l’être aux niveaux national et international.

68. Il a été précisé que, dans la pratique, d’autres facteurs avaient déjà été intégrés dans le processus d’élaboration et qu’il faudrait en tenir compte expressément dans le Manuel de Procédure par le biais de recommandations appropriées. Tel était le cas des décisions en matière de gestion des risques, où des aspects d’ordre pratique tels que les techniques de fabrication, la faisabilité et le coût économique devaient être intégrés dans le processus de décision. En outre, plusieurs domaines des activités du Codex n’étaient pas liés à l’innocuité des aliments et la science ne constituait pas l’élément déterminant du processus de décision: les textes concernant l’étiquetage des denrées alimentaires avaient pour objectif de fournir des informations fiables au consommateur et de prendre en compte les connaissances scientifiques fiables relatives aux questions liées à la santé lorsqu’elles sont appliquées à des dispositions d’étiquetage particulières dans les normes et directives Codex; de nombreuses normes de produits étaient destinées à garantir la loyauté des pratiques commerciales et à protéger les intérêts économiques des pays exportateurs et importateurs. L’observateur de la CIAA a déclaré que l’étiquetage était un moyen d’action limité dont il ne fallait pas abuser et qu’il ne fallait pas confondre protection du consommateur et information du consommateur. Le président du Comité du Codex sur l’étiquetage des denrées alimentaires et d’autres ont proposé qu’afin d’assurer que d’autres facteurs soient identifiés de manière appropriée et cohérente par différents organes du Codex, une politique générale sur l’intégration d’autres facteurs soit formulée par le Comité sur les principes généraux.

69. Plusieurs délégations ont proposé d’examiner d’abord les autres facteurs d’un point de vue général avant de les appliquer au cas de la BST. Le Secrétariat a cependant rappelé que le mandat attribué au Comité par la Commission se référait expressément à l’application de ces facteurs à la BST, et non à un examen général de la question. Il a cependant été observé que, dans le cadre des débats sur l’analyse des risques, la Commission avait approuvé les recommandations formulées par la Consultation mixte d’experts FAO/OMS sur la gestion des risques, à savoir qu’il serait nécessaire de définir avec plus de précision les modalités d’application de la deuxième Déclaration de principes[11]. Il a donc été admis que cette question devrait être examinée par le Comité.

70. Le Comité a reconnu qu’il n’existait, à ce stade, aucun consensus en ce qui concerne l’application d’autres facteurs dans le cas de la BST et qu’un approfondissement des discussions était nécessaire. Il est convenu que, même si les questions générales et spécifiques à l’étude étaient liées, il était nécessaire de bien les cerner afin d’éviter toute confusion et de faciliter les débats. A cet effet, le Comité a décidé que le Secrétariat devrait rédiger deux documents sur ces questions: 1) examen d’autres facteurs légitimes dans le cadre de l’analyse des risques conformément à la recommandation de la Commission; 2) application des autres facteurs légitimes au cas de la BST. Le Comitéest convenu de revenir sur ces questions à sa prochaine session. Il a été observé que le Comité devrait s’efforcer de trancher la dernière question à sa quatorzième session, afin que celle-ci puisse être examinée par la Commission à sa vingt-troisième session. Il a été noté par ailleurs que l’examen général d’autres facteurs légitimes devrait être considéré comme un processus de longue durée.


[10] CX/GP 98/8, document de séance n°7 (observations de la France), document de séance n°9 (observations de la Thaïlande), document de séance n°2 (observations du CSPI), document de séance n°5 (observations du COMISA), document de séance n°10 (document de travail de Consumers International), document de séance non numéroté (observations de la CIAA).
[11] ALINORM 97/37, par.163.

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