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400. Situation du commerce congolais par rapport à ses principaux concurrents africains


410. Le Cameroun
420. La République Centrafricaine
430. Le Gabon
440. Le Zaïre
450. La Cote d'Ivoire
460. Le Liberia
470. Le Ghana

Comme nous l'avons indiqué au chapitre du commerce international des bois africains, les principaux pays producteurs africains de la zone ouest/centre ne représente qu'une faible part face à la concurrence asiatique (10% pour ce qui est des exportations de grumes et 8% pour les sciages).

Certes le mouvement général amorcé depuis 1970 de réduction mondiale des exportations de grumes s'est aussi produit pour l'Afrique mais à un rythme nettement moins soutenu.

Pour les sciages, la tendance est inverse au niveau mondial où s'est produit une spectaculaire montée du volume exporté, tandis qu'on assistait à une stagnation de cette activité, voir une réduction en Afrique.

De plus, la majeure partie du commerce des bois tropicaux africains est sous dépendance de l'Europe en raison des circuits traditionnels établis de longue date.

Il est intéressant de situer la position du Congo par rapport aux autres pays producteurs car la situation est parfois différente d'un pays à l'autre et des conséquences sont à tirer.

cf: quelques graphiques et données statistiques ci-jointes donnant une idée de la faiblesse de la position du Congo.

410. Le Cameroun

Le niveau d'activité est plus de 2 fois plus important que celui du Congo (production supérieure à 2 Mio de m³/an avec une exportation moyenne de: 700.000 m³ de grumes, 80 à 100.000 m³ de sciages). Une autre caractéristique importante est la forte consommation locale (près de 400.000m³), atout considérable de ce pays.

Il existe donc un taux élevé de transformation qui s'explique par le niveau démographique du pays mais aussi la proximité de pays avoisinnants qui commencent à être fortement demandeurs (Tchad et surtout Nigeria) et qui devraient être une chance pour le Cameroun dans les prochaines années.

Bien que le Cameroun possède encore de grandes réserves forestières, notamment dans la zone Sud-Est, il est en position moins favorable que le Congo en matière de ressources.

De plus, la politique d'attribution de permis même dans la zone du Sud-Est n'a pas été aussi judicieuse qu'au Nord Congo si bien que certains problèmes se posent aujourd'hui pour assurer l'approvisionnement de certaines unités de production industrielles.

Enfin, en raison de la relative importance de sa population et de l'ouverture d'une importante infrastructure routière donnant aujourd'hui accès à presque toutes les régions, la pression de la population sur les forêts a été plus forte provoquant une destruction partielle non négligeable des ressources forestières notamment dans l'ouest et le centre du pays. Seul le massif Sud-Est est épargné pour le moment ainsi que certaines régions difficilement accessibles.

Les essences dominantes produites au Cameroun sont l'Ayous et le Sapelli qui représentent près de 60% du volume de grumes exportées.

Il est donc le concurrent direct du Congo le plus dangereux et le plus gênant puisqu'il bénéficie de conditions économiques plus intéressantes (moins d'éloignement, meilleure infrastructure routière et ferroviaire, main d'oeuvre moins onéreuse et plus qualifiée, important marché national).

A court terme, le Congo pourra difficilement lutter avec le Cameroun, mais en raison de la meilleure gestion de sa forêt du Nord et sous réserve d'un effort important interne pour réduire les coûts et charges des entreprises du Nord, il devrait pouvoir trouver à terme une place plus confortable et surtout plus durable.

Sur bien des points, le Congo a intérêt à composer avec le Cameroun dont les intérêts commerciaux du bois peuvent être liés. Aujourd'hui se crée déjà un courant d'évacuation d'une partie de la production congolaise par le Cameroun qu'il est préférable de favoriser (bien que cette solution ne soit pas économiquement satisfaisante pour le pays) en attendant d'avoir mis en place les mesures correctives et les infrastructures qui replacent les produits du Nord Congo en situation compétitive.

Les marchés traditionnels de débités du Cameroun sont la France et l'Espagne pour 60% et pour les grumes, 70% sont acheminées vers la France, l'Espagne et l'Italie.

Au plan industriel, le Cameroun est bien mieux équipé que le Congo:

- la production de placages se répartit entre 4 sociétés dont 2 privées (ALPICAM et SFID). 2 sociétés mixtes mais à considérer comme étatiques (COCAM et SOFIBEL) sont en énormes difficultés.

- le pays est autosuffisant en contreplaqué.

- les scieries sont nombreuses, diversifiées et plus de 10 d'entre elles sont des unités importantes et productives.

- la 2ème transformation est en cours d'évolution (séchage, moulures, menuiseries non encore vraiment industrielles mais déjà de taille intéressante).

Le Congo est donc en retard important et doit prendre des dispositions pour le combler.

420. La République Centrafricaine

La forêt dense centrafricaine est limitée a une superficie de 3 Mio d'ha dont seulement 2.2 sont exploitables et situées dans la région sud du pays. Comme au Nord Congo, la forêt Centrafricaine est dominée par 4 essences: Sapelli, Sipo, Ayous et Limba.

Comme au Nord Congo, la zone exploitable est enclavée et éloignée toutefois la RCA dispose d'un accès facile vers le Cameroun et également vers le Tchad qui lui permet de disposer d'un marché non négligeable assimilable à un marché local.

La RCA a donc développé la production d'Ayous beaucoup plus que le Congo.

Après avoir atteint un niveau de production grumière de près de 400.000m³, aujourd'hui la RCA ne produit plus que 150.000m³ environ.

Les exportations sont limitées à:

- environ 30.000m³ de grumes à destination de la RFA, la Roumanie, la Grèce et l'Espagne.

- 25.000m³ de sciages incluant les exportations vers le Soudan, le Tchad et même le Congo!

- 6 à 7 sociétés exploitent cette forêt dans des conditions généralement précaires.

L'outil de transformation est pauvre:

- une dizaine de scieries mais de capacité réduite et pas de matériel moderne.

- une unité de déroulage, contreplaqué de faible capacité, en difficulté (SCAD).

- il existe un complexe industriel possédant un matériel important en scierie, déroulage, tranchage qui avait été monté en Haute Sangha par les Roumains mais qui a été arrêté.

Au total la RCA ne représente pas un concurrent sérieux pour le Congo, pourtant il est paradoxalement un fournisseur régulier en sciage et contreplaqué à petite échelle.

430. Le Gabon

Il possède également une réserve forestière importante (20 Mio d'hectares exploitables dont environ 11 Mio d'ha déjà exploités dans la zone litorale et centre mais à très faible niveau hormis l'Okoumé).

Le Gabon est le pays de l'Okoumé qui constitue environ 33% des réserves totales estimées mais dans l'état actuel de l'exploitation commerciale près de 70% de la production.

La production annuelle s'établit au niveau de 1.500.000m³ de grumes.

Les exportations représentent annuellement en grumes:

- 800 à 900.000m³ d'Okoumé.

- 300.000m³ de bois divers parmi lesquels nous trouvons 6 essences dominantes (Moabi, Kevazingo, Ovangkol, Douka, Movingui, Iroko) et une quinzaine d'autres en quantité significative (5 à 10.000m³) avec Bahia, Dibetou, Ozigo, Pachyloba, Khaya, Agba, Aiele, Niangon (Ogoué) Doussié, Sapelli, Andoung, Ilomba.

- l'industrialisation se limite à:

* une unité de fabrication de contreplaqué moderne capable de 80.000m³/an en totale perte de vitesse du fait de son incapacité à s'adapter à la compétition internationale. Une autre unité privée fonctionne à Libreville.

* quelques rares scieries qui ne couvrent même pas les besoins nationaux.

- Le Gabon est donc un concurrent particulièrement sérieux pour ce qui concerne l'Okoumé, puisqu'il fait figure de leader mondial dans la spécialité et qu'il peut même se considérer en situation de monopole.

Sa commercialisation (de l'Okoumé) est contrôlée par un Office National (la SNBG) qui, outre une gestion déplorable qui a provoqué depuis des années des pertes financières importantes (à l'image de l'OCB), a été incapable de promouvoir correctement l'Okoumé qui se trouve aujourd'hui en crise aiguë.

Il faut retenir pour le Congo, les éléments suivants:

- depuis 1978, les normes de classement de l'Okoumé ont été modifiées (et simplifiées) au Gabon. Du fait de sa position de leader international, sa normalisation est celle qu'il faut appliquer à tous les producteurs. Le Congo qui continue d'appliquer l'ancien classement aurait tout intérêt à s'aligner et à appliquer les règles Gabonaises.

- dans le même esprit, les deux pays auraient sans doute intérêt à appliquer une politique de prix commune (à condition de fret maritime équivalent) ceci dans la mesure où le Congo poursuit sa politique d'exportation de grumes à un niveau significatif.

- le Congo pourrait également se rapprocher du Gabon pour précisément définir une politique commune pour la commercialisation et la transformation de l'Okoumé. Ils pourraient financer en commun une étude de marchés pour déterminer les autres débouchés de l'Okoumé y compris par des transformations en sciage.

440. Le Zaïre

Ce pays détient la seconde forêt dense du monde après le Brésil avec environ 100 Mio d'Ha dont environ 80 Mio d'ha sont estimés exploitables.

Cette forêt n'a pratiquement pas été touchée. Environ 7 Mio d'ha auraient été mis en exploitation desquels seraient extraits environ 2 Mio de M3 par an mais dont 600.000M3 sont officiellement reconnus.

16 Mio d'ha ont fait l'objet de demande de prospection et d'intention d'exploitation mais non concrétisée.

Sur les 600.000M3 produits officiellement:

- 140.000M3 sont exportés en grumes
- 40.000M3 en sciages
- 40.000M3 en placages.

Le massif Sud du Mayombé s'apparente à celui du Congo avec des essences dominantes telles que Limba, Agba et Iroko. Il a déjà été très exploité en raison de sa proximité des ports de Boma et Matadi.

L'autre bloc de production s'est donc déplacé vers la cuvette centrale où l'on trouve de grandes quantités de Sapelli, Sipo, Khaya, Wengué, Afrormosia et Tiama ainsi que d'énormes peuplements de Limbali.

La structure des ressources s'apparente donc à celle du Congo pour cette zone. Mais à part 4 entreprises importantes dont 1 étatique (AGRIFOR), 2 mixtes (SOKINEX et FORESCOM), et 1 pratiquement privée Allemande (SIFORZAL) qui est la seule intégrant production de placages et scierie, il n'existe qu'une faible infrastructure industrielle. Des projets sont en cours pour des exploitations de projets à grande échelle mais dans l'immédiat aucun n'a débouché.

La production forestière du Zaïre fonctionne donc essentiellement grâce à la consommation interne rendue possible par une population importante. Elle envisage une planification pour produire 5 Mio de M3 par an dont 2 à 3 à l'exportation.

Malheureusement pour ce pays, les problèmes sont encore plus importants qu'au Congo s'agissant en particulier:

- d'une évacuation sur 1700 à 2500 km.
- de la faiblesse de l'infrastructure routière, ferroviaire et portuaire.
- de procédures administratives lourdes.

Pour le Congo, le Zaïre n'est pas un concurrent potentiel, au contraire:

- si le Zaïre parvenait à développer et rentabiliser son exploitation et sa transformation du bois (destiné à l'exportation) cela voudrait dire que le Congo n'a aucune raison de ne pas le faire dans des conditions au moins équivalentes (à la différence près des coûts salariaux très bas au Zaïre; le Congo devra méditer sur le sujet).

- Il est vraisemblable que le Congo ait intérêt à se rapprocher du Zaïre pour un développement commun de l'évacuation de leurs produits (nous avons déjà évoqué la possibilité, à étudier, de créer une évacuation ferroviaire comme pour le Nord, en liaison avec le Cameroun et/ou le Gabon; il existe peut-être des intérêts communs pour l'accès à l'Atlantique).

Ont été évoquées aussi les possibilités de recherches communes en matière de régénération de certaines essences du bassin du Congo en liaison avec les pays concernés par cette zone.

450. La Cote d'Ivoire

Paradoxalement, c'est encore ce pays dont le massif forestier productif est passé rapidement de 16 Mio d'ha à moins de 2 Mio d'ha aujourd'hui qui reste encore le plus important au niveau de la production, de la transformation et de l'exportation.

Il est l'exemple même de ce qu'il faut éviter de faire en matière d'exploitation forestière non aménagée (même si pour l'essentiel, d'autres facteurs sont à l'origine de la destruction des forêts) et de ce qu'il faudrait faire en matière de développement industriel et de diversification (avec toutefois certaines réserves). De nombreuses leçons doivent être tirées de cette expérience pour les pays disposant encore d'un fort potentiel forestier.

La production forestière qui avait atteint annuellement jusqu'à 5 Mio de m³ est descendue à 2 Mio environ tout en continuant de se réduire chaque année.

Les essences nobles (Khaya, Sipo, Sapelli, Niangon, Makore, Douka, Iroko) sont épuisées par l'exploitation intensive et non contrôlées des années 65 à 85.

Aujourd'hui, la Côte d'Ivoire a appris à exploiter et surtout à transformer des essences de moindre valeur: Koto, Bahia, Fromager, Framiré, Ilomba, Aniégré, Fraké, Samba, Bété, Ako. Les exportations de la CI sont maintenant plus importantes en produits transformés qu'en grumes:

- environ 500.000m³ de grumes dont pour l'essentiel 20% en Fromager (Espagne et Italie) le reste en Ako (Maroc, Turquie, Bulgarie, Tunisie) Ilomba (Espagne, France) Bahia (Italie, Espagne, Grèce) Aniégré (id) Fraké (id + Sénégal) Kotiké (Portugal).

- environ 600.000 m³ en bois oeuvres, dont:

* sciages en plots industriels 25.000m³ (Framiré, Niangon, Iroko)
* sciages avivés 435.000m³
* placages tranchés 10.000m³
* placages déroulés 65.000m³
* contreplaqués 25.000m³
* produit de seconde transformation (moulures, bois rabotés, portes) 25.000m³.

- le processus de transformation n'est pas achevé puisque de fortes incitations de l'Etat poussent les transformations de 2ème et 3ème stade.

Pour arriver à cette situation, l'Etat Ivoirien a dû prendre dans un 1er temps des mesures visant à réduire l'exportation de grumes (politique des quotas) puis à relever considérablement les taxes à l'exportation des bois bruts, puis fixer des quotas globaux. Malgré tout, il reste plus de 200 exploitants forestiers Ivoiriens et la forêt s'épuise à grande vitesse.

Même les unités de transformation ont des problèmes d'approvisionnement. Il y a plus de 70 scieries, 8 unités de déroulage et 6 usines de tranchage qui sont obligées de travailler avec des grumes de plus en plus petites et de qualité de plus en plus basse.

La rentabilité de ces unités est également en cause car le matériel implanté n'a pas été toujours de première jeunesse ni les performances optimales; de plus bien souvent, il a été mal entretenu.

La politique est maintenant de tendre vers une transformation totale et de dynamiser les quelques 40 entreprises impliquées dans la seconde transformation (moulures, menuiseries, parquets, ameublement) tout en incitant les dérouleurs et trancheurs à accroître leur niveau d'activité. Mais le problème le plus important qui se pose est celui de la pérennité de la ressource pour assurer la rentabilité des investissements nécessaires à la mise en oeuvre de cette politique.

Les politiques de reboisement développées depuis 1970 ont été timides et mal orientées. Aujourd'hui une tentative est faite pour associer quelques industriels à la gestion et à la protection des forêts qu'ils devraient exploiter. Il semble que cette initiative de dernier espoir arrive tardivement pour résoudre le problème.

Il nous semble que nous devons retenir de cette histoire un certain nombre de points capitaux:

1) Il faut penser à gérer la forêt naturelle avant qu'il ne soit trop tard

2) L'idée d'associer des industriels exploitants à ce projet est excellente car nous avons toujours dit que ces opérateurs étaient les meilleurs garants de la sauvegarde de leurs ressources. Il faut donc que l'Etat apprenne à travailler beaucoup plus en confiance et en association avec les opérateurs qui ont fait la démonstration de leurs compétences et de leur engagement dans la politique du pays par des investissements adaptés.

3) La promotion d'essences considérée comme pauvre est possible et la Côte d'Ivoire a fait la démonstration sous la contrainte qu'il fallait l'intégrer dans un processus de transformation poussée.

Certes, la CI bénéficie d'un important marché intérieur et avoisinant et d'une infrastructure routière excellente qui a grandement joué. Nous pensons qu'il ne faut pas attendre d'y être contraint pour le développer dans les régions où ces essences secondaires et pauvres existent en abondance sans être exploitées.

Il faut se servir de l'expérience ivoirienne en la matière et l'adapter en l'améliorant aux conditions propres du terrain au Congo.

4) La CI a crée un courant d'affaire à l'exportation avec des produits que l'Afrique n'avait pas l'habitude de voir fabriquer; il faut profiter de ce courant pour développer cette production. Encore faut-il qu'une politique soit menée dans cette direction pour la rendre possible, c'est à dire rentable.

5) La CI a, dans sa recherche effreinée de solutions à l'optimisation de la transformation, étudié, essayé, développé de nombreuses techniques, elle a réussi ou échoué (par exemple dans le problème de la construction des maisons à ossature bois). Les producteurs africains voisins auraient tout intérêt à faire l'analyse précise des causes de ces échecs ainsi que des raisons des succès pour orienter leur propre évolution.

460. Le Liberia

Exportant irrégulièrement entre 250 à 500.000m³ de grumes avant les événements récents, mais ne transformait guère. Ce pays peut perturber le marché du Niangon notamment car il peut l'exploiter à bas prix et le placer concurentiellement chaque fois que le dollar retrouve un faible niveau.

470. Le Ghana

A adopté une politique favorable à la transformation et était parvenu comme la CI à produire à l'exportation plus de sciages que de grumes.

Cf: divers graphiques joints et correspondant à ce chapitre.


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