Le contrôle et la gestion traditionnelle des terres sont de la compétence du Chef de village et au niveau supérieur de celle du Chef de canton ou de groupement qui sont dépositaires d'un pouvoir politique et judiciaire sur les terres. Les chefs coutumiers sont investis par l'Etat pour l'exercice du droit de contrôle sur les terres, ceci leur confère un pouvoir de décision sur la gestion des forêts protégées du terroir, donc sur les activités y afférentes. Cette superposition de droit a favorisé l'accroissement des pressions anthropiques sur les rares espaces forestiers. De plus, l'interprétation du statut de la forêt est à la base de beaucoup de confusions. Selon les acteurs, la forêt appartiendrait à Dieu, au Chef de canton ou du village ou à l'Etat. Mais, pour les populations rurales, le chef apparaît comme le vrai "détenteur" de la forêt.
L'agriculture est relativement diversifiée et ses performances restent globalement insuffisantes compte tenue de la baisse de fertilité, de la mise en culture des terres marginales et du déficit du bilan hydrique.
Un quart seulement des 15 000 000 ha des terres cultivables est aujourd'hui mis en culture. Selon les estimations de la FAO (1993), ce sont 70 000 à 80 000 ha de nouvelles terres qui sont occupées annuellement par l'agriculture aux dépens des forêts et de l'élevage.
L'élevage a une répartition spatiale liée à plusieurs facteurs, notamment la distribution des pâturages et la disponibilité en eau. Les sécheresses de ces dernières années ont provoqué des modifications par rapport à la composition du cheptel, à son effectif et à son transfert vers la bande Sud du Pays. Ceci a accentué les risques de conflits d'utilisation non rationnelle des ressources pastorales.
RESSOURCES FORESTIERES NATURELLES
Les formations naturelles comprennent les terrains forestiers primaires (forêts classées, gommeraies et espaces protégés primaires), les terrains forestiers marginaux (périmètres de restauration, jachères), les formations des terrains non forestiers (parcs agro-forestiers).
Les résultats présentés ici sont tirés des différents rapports annuels de la Direction de l'Environnement et de la Direction de la Faune Pêche et Pisciculture.
Le Niger compte 98 forêts classées et gommeraies. Le peuplement du domaine cultivé est constitué de parcs à Faidherbia albida, à Butyrospermum paradoxum, à Parkia biglobosa, à Parinari macrophylla (Ounteini, 1993; Mahamane, 1997), à Borassus aethyopum, à Hyphaene thebaica. (Jahiel 1996 et 1998).
Superficie totale des formations naturelles
Le Niger ne dispose d'aucun inventaire forestier exhaustif de l'ensemble des formations forestières. Plusieurs estimations ont été ainsi proposées, entre autre:
en 1970, les superficies boisées étaient estimées à 16 096 400 ha (Club du Sahel, 1981);
d'autres sources, FAO (1990) et Catinot (1991) ont estimé respectivement les surfaces forestières (terrains forestiers marginaux ou non) à 10,5 millions et 13 millions d'ha.
Les premiers travaux portant sur l'évaluation des ressources ligneuses ont été effectués par le projet Planification et Utilisation des Sols et des Forêts (PUSF) de 1982 à 1989. Ces travaux ont abouti à une stratification des massifs forestiers sur trois niveaux:
terrains forestiers primaires: couvert > 5% de la surface;
terrains forestiers marginaux: couvert dégradé mais existant <5%;
terrains non forestiers: sans capacité biologique de production forestière.
Le Projet Energie II (1989 à 1996) a, par la suite, entrepris des travaux qui ont porté sur l'évaluation du stock de bois de chauffe disponible sur pieds dans un rayon de 150 km autour des principaux centres urbains du pays (Niamey, Zinder, Maradi). Ces travaux, quoique moins exhaustifs que ceux entrepris par le PUSF, sont tout de même plus précis. Les surfaces, évaluées à l'intérieur de ce rayon de 150 km des trois centres urbains, tournent autour de 5 millions d'ha. Malgré le manque des données précises, ces travaux ont comblé progressivement les lacunes.
Plus récemment encore, une étude sur la vulnérabilité des formations forestières nigériennes aux changements climatiques (Hamadou et Gambo, 1999) a évalué la superficie des formations naturelles en 1994 à 5 741 917 ha. Le tableau 1 donne les superficies des ressources forestières par région selon une étude faite par le Projet Utilisation des Sols et des Forêts (PUSF, 1993).
Tableau 1: Superficie (ha) des ressources forestières naturelles par région (Sources PUSF, 1983)
Régions8 |
Forêts marginales |
Forêts primaires |
Total |
Tillabéry Dosso Tahoua Maradi Zinder Diffa |
4 451 300 1 494 000 3 318 400 479 000 1 305 700 573 800 |
2 562 600 782 500 237 200 327 800 354 300 209 800 |
7 013 900 2 276 500 3 555 600 806 800 1 660 000 783 600 |
Total |
11 622 200 |
4 474 200 |
16 096 400 |
Ces données semblent encore partielles malgré les grands efforts fournis en vue de rendre plus effectives les informations relatives aux formations naturelles du pays. Elles ne prennent pas en compte les superficies de la région désertique d'Agadez.
La situation des forêts classées et gommeraies au Niger est résumée dans les tableaux 2 et 3 ci-après.
Tableau 2: Situation des forêts classées et gommeraies par région
Régions |
Nombre |
Superficie (ha) |
Agadez |
1 |
1 050 |
Diffa |
22 |
71 636 |
Dosso |
4 |
17 236 |
Maradi |
19 |
102 042 |
Tahoua |
9 |
11 659 |
Tillabéry |
7 |
533 645 |
Zinder |
35 |
44 005 |
C. urbaine Niamey |
1 |
225 |
Total |
98 |
781 457 |
Il y a 98 formations naturelles sous forme de forêts classées et gommeraies au Niger couvrant une superficie totale de 781 457,2 ha. Sur les 98, il y a 84 forêts ou gommeraies classées (soit 85%) et 14 gommeraies (soit 15%) sous forme de formations protégées. La région de Tillabéry totalise seulement 7 forêts classées et gommeraies avec la plus grande superficie de réserves forestières primaires. Cela est dû à la présence du Parc W et de la réserve forestière de Tamou sous-jacente au parc qui font respectivement à eux seuls 330 000 ha et 142 000 ha. La région de Zinder dispose du plus grand nombre de formations forestières primaires mais leurs superficies insignifiantes du fait de leur dégradation. Il en est de même pour les régions de Diffa et de Maradi.
Tableau 3: Etat des forêts classées et gommeraies au Niger
Etat |
Forêts classées% |
Gommeraies% |
Total |
Dégradée ou disparu |
50 |
0 |
50 |
Sous culture |
10 |
0 |
10 |
Sous aménagement |
10 |
0 |
10 |
Bon état |
15 |
15 |
30 |
Total |
85 |
15 |
100 |
A partir de ce tableau, on peut remarquer que 50% des forêts classées au Niger sont dégradées ou complètement disparues ou bien confondues à des zones agricoles. Les forêts sous aménagement représentent 10%. Il s'agit des aménagements tests entrepris par certains projets pour ravitailler les grands centres urbains en bois énergie: forêts de Dan Kada, Bakabé et Kandama par la FAO, forêt de Gadabédji par la SNV, forêt de Takeita par SOS Sahel international, forêts de Faira par le Projet Forestier IDA/FAC/CCCE et forêts de Guésselbodi par le PUSF.
Les différentes méthodes d'inventaire utilisées dans l'évaluation des ressources forestières donnent une bonne estimation des ressources. Il s'agit des méthodes développées par Alegria (1986) dans le cadre des activités du Projet PUSF (1982 à 1989), du Projet Energie II (1992) dans le cadre de l'élaboration des schémas directeurs d'approvisionnement en bois énergie des centres urbains, de Ichaou Aboubacar (1995) sur les brousses contractées de la partie Ouest de la République du Niger.
Le Projet PUSF (1986) a estimé la productivité des formations forestières à 0,5 stère/ha/an dans la forêt à Combretacées de Guesselbodi. Ce chiffre a été utilisé par Ada (1986) pour estimer les formations forestières à physionomie dominée par des Combretacées dans la région de Dosso. En fait cette productivité est très variable suivant les sites, de 0,5 stère à 1 stère par ha et par an, et fonction de la couverture et de l'espèce qui domine la strate. Dans les calculs qui suivent nous utiliserons la productivité de 0,5 stères/ha/an qui approche plus la moyenne pour estimer l'accroissement des formations naturelles au Niger.
Dans le cadre de l'élaboration des schémas directeurs d'approvisionnement en bois énergie, le Projet Energie II a estimé le volume de bois sur pied à 5,22 stères/ha, ce volume correspond à 1,45 m3/ha puisque 1 m3 est égal à 3,6 stère d'après une étude de projet forestier IDA dans le cadre de l'aménagement de la forêt de Faïra.
Changement de superficie et de volume au cours du temps
Plusieurs auteurs ont cherché à quantifier les pertes annuelles de superficie forestières.
Les projections faites à partir des besoins en terre cultivable d'un habitant du milieu rural (Ada, 1986) ont permis une bonne appréciation de la dynamique du couvert forestier en fonction de l'évolution démographique de la population. Selon Catinot (1986), le besoin en terres agricoles nouvelles (défrichées) est de 0,625 ha/an et par habitant rural, ce qui équivaut à une perte de superficie forestière de 100 000 ha à 170 000 ha (1998).
Selon un document de la Direction de l'Environnement ("Bilan de reboisement au Niger: période 1984 à 1996"), les pertes de superficies s'élèveraient à environ 200 000 ha chaque année. Enfin, une récente étude sur le défrichement au Niger (République du Niger, 1997a), a estimé que de 1958 à 1997 la perte de superficie des forêts est de l'ordre de 40 à 50% au profit essentiellement de l'agriculture, de la production de bois de feu et du développement urbain.
Une étude de la FAO (1990) et celle qui a permis l'élaboration du document "Environnement et devenir du Niger" ont chiffré cette perte entre 70 000 et 80 000 ha par an. Par ailleurs le rapport de préparation du PAFN (FAO, 1996) a estimé que 100 000 ha sont soustraits annuellement à l'espace forestier sous l'effet combiné des facteurs climatiques, des coupes incontrôlées, de l'expansion des cultures. D'après une autre étude de la FAO, (citée par Hamadou et Gambo, 1999), la part du défrichement agricole s'élèverait à 190 400 ha chaque année. Celle des variations climatiques et des sécheresses est estimée à 145 780 ha/an. Il nous apparaît plus plausible de considérer cette étude qui est plus récente.
Tableau 4: Evolution de la superficie (x 1000 ha) des formations forestières
Régions |
Agadez |
Diffa |
Dosso |
Maradi |
Tahoua |
Tillabéry |
Zinder |
Total |
Superficie de Région |
61 520 |
14 000 |
3 100 |
3 850 |
10 668 |
9 007 |
14 500 |
126 700 |
Superficies totales forêts en 1970 |
- |
784 |
2 276 |
807 |
3 556 |
7 014 |
1 660 |
16 096 |
Superficies totales forêts en 1994 |
- |
847 |
816 |
635 |
187,8 |
2 345 |
911 |
5 742 |
Taux de régression |
- |
+ 8% |
- 64% |
- 21% |
- 95% |
- 67% |
- 45% |
- 60% |
(Source, M. Hamadou et S. Gambo, 1999)
D'après le tableau 4, le taux de régression est de plus de 60% en 25 ans, ce qui correspond à 2,4% par an.
RESSOURCES FORESTIERES PLANTEES
Le reboisement constitue la plus importante action menée pendant et après les sécheresses des années 70 pour réhabiliter et améliorer l'environnement. En effet, les premiers projets forestiers ont surtout privilégié le développement des bois de villages, les ceintures vertes et l'enrichissement des terres de cultures. Les plantations réalisées concernent:
les sites agricoles (cultures pluviales ou de contre saison);
les sites pastoraux;
les sites forestiers (forêts classées et protégées, réserves);
les sites sylvo-pastoraux;
les sites agro-sylvo-pastoraux;
les sites menacés (berges, koris, dunes de sables).
Trois catégories de plantations sont conduites généralement au niveau de ces sites à savoir:
les plantations en bloc sont celles prévues dans le cadre de l'engagement de Maradi (1984), les bois de village, la fête de l'arbre;
les plantations de ceinture verte, de haie vive, bord de champs, alignements, plantations linéaires, etc.);
les regarnis sont toutes les plantations exécutées à l'effet de remplacer des plants morts sur les plantations antérieures.
Réalisations effectuées au niveau national
Le tableau 5 donne une estimation des superficies (ha) et des longueurs (km) des plantations réalisées au niveau national de 1992 à 1998 par type de plantation.
Tableau 5: Réalisations effectuées de 1992 à 1998 au niveau national (Source: Rapports DE)
Opérations |
Années |
Totaux | |||||||
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
||
Plantations en bloc (ha) |
1 854 |
3 729 |
9 215 |
656 |
4 944 |
10 440 |
4 817 |
11 118 |
36 333 |
Plantations linéaires (km) |
1 754 |
1 450 |
4 244 |
1 687 |
1 419 |
1 187 |
894 |
3 537 |
16 172 |
Fixation de dune (ha) |
977 |
577 |
641 |
576 |
565 |
192 |
301 |
495 |
4 324 |
Environ 5 000 ha de terrain sont reboisés (plantations en bloc et fixation de dune) en moyenne chaque année. Les superficies plantées en bloc varient de 656 ha en 1995 à 11 118 ha en 1999.
Au niveau des régions, ces superficies plantées sont variables (Tableaux 6, 7 et 8). Cette différence peut être liée aux moyens mis en _uvre au niveau des différentes régions.
Tableau 6: Plantations (ha) en bloc de 1992 à 1998 (Source: Rapports DE)
Régions |
Années |
Total | |||||||
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
||
Agadez |
10 |
28 |
39 |
18 |
134 |
39 |
- |
- |
229 |
Diffa |
107 |
20 |
15 |
28 |
80 |
39 |
90 |
55 |
395 |
Dosso |
312 |
312 |
1 586 |
42 |
223 |
464 |
660 |
569 |
3 704 |
Maradi |
323 |
77 |
1 123 |
182 |
115 |
124 |
993 |
568 |
3 381 |
Tahoua |
168 |
2 866 |
2 641 |
237 |
209 |
9 000 |
2 771 |
9 835 |
18 727 |
Tillabéry |
611 |
81 |
2 624 |
106 |
3 810 |
767 |
- |
- |
7 232 |
Zinder |
309 |
335 |
1 186 |
41 |
370 |
- |
269 |
- |
2 510 |
Niamey |
14 |
10 |
1 |
2 |
3 |
7 |
34 |
91 |
155 |
Total |
1 854 |
3 729 |
9 215 |
656 |
4 944 |
10 440 |
4 817 |
11 118 |
36 333 |
Tableau 7: Plantations linéaires (km) de 1992 à 1998
Régions |
Années |
Total | |||||||
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
||
Agadez |
1 |
3 |
11 |
4 |
13 |
- |
- |
- |
32 |
Diffa |
5 |
6 |
5 |
23 |
25 |
134 |
109 |
460 |
767 |
Dosso |
103 |
110 |
134 |
102 |
399 |
121 |
242 |
1 482 |
2 693 |
Maradi |
405 |
653 |
445 |
197 |
461 |
570 |
397 |
1 180 |
4 308 |
Tahoua |
848 |
416 |
3 446 |
151 |
370 |
133 |
102 |
402 |
5 868 |
Tillabéry |
321 |
240 |
123 |
1 070 |
148 |
229 |
- |
- |
2 131 |
Zinder |
71 |
22 |
79 |
139 |
3 |
- |
43 |
- |
357 |
Niamey |
- |
0 |
1 |
1 |
- |
- |
1 |
13 |
16 |
Total |
1 754 |
1 450 |
4 244 |
1 687 |
1 419 |
1 187 |
894 |
3 537 |
16 172 |
Tableau 8: Fixation biologique de dune (ha)
Régions |
Années |
Total | |||||||
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
||
Agadez |
2 |
- |
0 |
- |
0 |
- |
- |
- |
2 |
Diffa |
511 |
209 |
114 |
115 |
253 |
108 |
32 |
50 |
1 392 |
Dosso |
- |
- |
0 |
- |
0 |
- |
269 |
- |
269 |
Maradi |
- |
44 |
106 |
75 |
0 |
14 |
- |
50 |
289 |
Tahoua |
227 |
150 |
278 |
301 |
215 |
70 |
- |
395 |
1 636 |
Tillabéry |
11 |
14 |
5 |
- |
0 |
- |
- |
- |
30 |
Zinder |
226 |
160 |
138 |
85 |
97 |
- |
- |
- |
706 |
Niamey |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
0 |
Total |
977 |
577 |
641 |
576 |
565 |
192 |
301 |
495 |
4 324 |