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Chapitre 3: Comment organiser un SIM?


3.1 La structure institutionnelle
3.2 Assurer la viabilité des SIM
3.3 L'analyse des systèmes de commercialisation et leurs besoins en matière d'information
3.4 Produits et marchés
3.5 L'information sur les marchés et les consommateurs
3.6 Qui doit collecter les informations sur les marchés?
3.7 Selon quel rythme et quand faut-il collecter les informations?
3.8 Les produits et leurs variétés
3.9 La qualité des produits
3.10 Poids et mesures
3.11 Quantités, stockage et autres informations
3.12 Précision des informations
3.13 Transmission et traitement des données
3.14 Diffusion des informations
3.15 L'utilisation des informations

Sur la base de ce qui a été dit au chapitre 2, il est maintenant clair que le développement d'un Service d'Information sur les Marchés (SIM) efficace, utile et viable n'est pas chose facile. Alors que les avantages que l'on peut tirer de ce genre de services semblent sans discussion, le fait que beaucoup de pays n'aient pas réussi à les faire fonctionner de façon fiable et viable porte la FAO et d'autres organisations internationales à se demander si elles ont eu raison de vouloir absolument créer des SIM. Il faut, à ce sujet, se concentrer sur la capacité des pays et de leur contrepartie de faire fonctionner un tel service, du point de vue technique comme du point de vue des disponibilités nécessaires, pour faire face aux coûts récurrents. L'organisation institutionnelle doit être analysée de très près, de même qu'il faut enquêter sur le potentiel d'intérêt du secteur privé. Certaines démarches élémentaires devraient être faites pour éviter les problèmes les plus évidents. Plus on fait attention au début, plus il y a de chances que le SIM serve à ses utilisateurs. Si le SIM est conçu pour avoir une taille et un but qui correspondent à ses disponibilités financières, il est probable que sa viabilité posera moins de soucis. Si, par ailleurs, on veille à ce que les agents préposés au service aient la formation nécessaire, il est probable que le SIM en sera d'autant plus efficace.

Les pages qui suivent n'entendent pas former un manuel sur la création d'un SIM, mais simplement traiter des aspects nécessaires à prendre en compte pour le fonctionnement d'un SIM efficace et viable.

3.1 La structure institutionnelle

Une bonne structure institutionnelle de SIM peut varier d'un pays à l'autre. Dans certains pays, il peut être préférable de s'appuyer aux Services des statistiques parce qu'ils font déjà partie d'un réseau où les collecteurs des données ont été dûment formés. Toutefois, à ceci, on peut opposer que les organismes étatiques de statistiques sont connus pour la lenteur avec laquelle ils publient leurs informations, ce qui ne les place pas exactement parmi les organismes les plus aptes à diffuser quotidiennement des informations sur les cours et les prix pratiqués. De leur côté, les Ministères de l'Agriculture disposent, pour la plupart, de réseaux d'information couvrant l'ensemble du territoire, mais leur personnel n'est pas toujours formé comme il faut pour collecter les prix, ou bien simplement il manque de motivations pour le faire correctement. Quand un SIM est géré par un Ministère de l'Agriculture, il arrive souvent que les ministères chargés de relever les statistiques continuent à collecter les informations sur les cours de leur côté, ce qui conduit à multiplier par deux les coûts, et ce malgré le fait que les ressources soient rares. Il faut donc éviter à tout prix ce genre de situation, et rechercher un plan d'entente entre les ministères concernés.

La viabilité économique des SIM pourrait être envisagée en faisant supporter les coûts aux utilisateurs par le paiement des informations dont ils ont besoin. Toutefois, et notamment dans les pays en développement, la plupart des agriculteurs n'ont que de faibles quantitatifs à offrir, manquent d'informations et se retrouvent en position de faiblesse au moment des tractations sur les prix. Leur faire payer ces informations ne servirait donc qu'à les pénaliser ultérieurement. C'est pourquoi la plupart des SIM dans le monde se présentent comme des services publics gratuits, l'information sur les marchés étant considérée comme un bien public, à l'instar des routes et de l'eau potable. Elle doit donc être à la portée de tous, et non simplement à la portée de ceux qui peuvent la payer.

Alors que les services publics, dans une certaine mesure, peuvent devenir commerciaux en attirant la publicité ou l'intérêt d'un sponsor, il est toutefois difficile qu'ils couvrent leurs frais, voire, fassent des bénéfices. Il est donc peu probable qu'un SIM du type décrit ici puisse trouver des bailleurs de fonds privés. Les SIM privés semblent mieux fonctionner quand ils ont la possibilité d'utiliser des informations sans avoir à les collecter, les coûts de diffusion étant très certainement moindres que les coûts de collecte. Comme on l'a déjà vu, le SIM privé d'Afrique du Sud se fonde sur les informations enregistrées par les banques de données des marchés de gros. La même chose a lieu à Pékin, où les informations recueillies par les services publics sur les marchés de gros sont ensuite diffusées de façon privée.

Il serait bon que les différents pays intéressés trouvent une voie d'équilibre entre un SIM public et un SIM géré par le secteur privé, ce dernier ne fournissant des informations qu'à ceux pouvant se le permettre. Un organisme autonome, paraétatique, peut offrir une solution. Ce genre d'organisme présente beaucoup d'avantages. Par exemple, les revenus produits par des services étatiques doivent, le plus souvent, être versés au Trésor ou au Ministère des Finances, alors que les organismes autonomes peuvent conserver les revenus qu'ils produisent. Ces organismes peuvent ainsi être motivés à rechercher un support commercial pour le financement d'un SIM, alors que cela est peu probable dans le cadre d'un ministère. Ils sont également exonérés des mesures restrictives qui régissent l'emploi dans la fonction publique, ce qui leur laisse une certaine flexibilité de gestion et donc la possibilité d'avoir une gestion rentable. Un financement étatique du SIM pourrait être une alternative, le secteur privé s'occupant de la collecte des données et de leur diffusion.

3.2 Assurer la viabilité des SIM

L'enquête menée par la FAO fait état de nombreux SIM créés par des bailleurs de fonds et qui ont, par la suite, connus des problèmes une fois l'oeuvre terminée. Différents SIM qui fonctionnent encore actuellement sur la base des fonds donnés pour leur création ont de bonnes chances de suivre ce même chemin. Le fait de pouvoir disposer gratuitement d'ordinateurs, de télécopieurs, de voitures et de motocyclettes peut sembler au premier abord très attrayant, mais un jour ou l'autre il faut les remplacer. Ayant conscience du problème réel que pose les très bas salaires des employés administratifs de nombreux pays, les bailleurs de fonds ont également souvent prévu des suppléments de salaire pour les agents du SIM. Malheureusement, dès que le bailleur de fonds s'en va, lesdits agents s'en vont également, s'ils le peuvent, car ils n'ont aucune envie de retourner à leur bas salaire antérieur. Un SIM apparemment efficace, créé sur la base d'un don, peut s'avérer être une pure illusion, les primes sur salaire et les autres avantages étant souvent la seule motivation de son personnel. Inclure un SIM dans un organe autonome non assujetti aux salaires étatiques peut éventuellement éviter ce problème, bien que la question de la recherche de fonds suffisants à son fonctionnement reste ouverte.

En plus des difficultés de survie d'un SIM après le départ de son bailleur de fonds, il semblerait que les pays voulant commencer même un embryon de SIM aient également besoin d'une assistance technique et financière. Mais actuellement, la tendance générale au niveau mondial est de réduire l'assistance technique accordée aux projets ainsi que la durée d'encadrement. Selon l'expérience de la FAO, très peu sont les pays en mesure d'établir un SIM en ne disposant que d'une assistance de courte durée. Pour la plupart des pays, un encadrement d'un an et une assistance technique à plein temps représentent le minimum nécessaire.

Le financement de la diffusion des informations devrait, plus tard, représenter le majeur obstacle à la viabilité des SIM. Les SIM ne peuvent plus partir du principe que l'accès à la radio étatique leur est dû gratuitement. Ils doivent donc se mettre à la recherche de fonds leur permettant de payer la diffusion de leurs informations. Dans de nombreux pays, les SIM recontrent déjà des problèmes parce qu'ils n'arrivent pas, à long terme, à payer leurs frais de diffusion. Quand on entend créer un SIM, il faut donc s'occuper au plus tôt de la manière dont il va pouvoir financer ses coûts, et il faut que ces coûts fassent l'objet d'un budget précis. Il faut en même temps qu'il cherche des sponsors. Il n'existe aucun motif valable pour que personne n'ait envie de sponsoriser un SIM. Au Sri Lanka, par exemple, les prix de gros des légumes sont diffusés par une radio commerciale et l'émission est sponsorisée par une société privée d'engrais. Il faut également explorer la possibilité de vendre des informations plus détaillées en plus de celles qui sont diffusées.

3.3 L'analyse des systèmes de commercialisation et leurs besoins en matière d'information

En théorie, on ne devrait jamais créer un SIM sans étudier auparavant dans le détail le fonctionnement du système de commercialisation. Pour pouvoir étudier ce système dans le détail, il faut bien entendu qu'il existe, ce qui n'est pas toujours le cas dans les pays qui sont actuellement en train de le libéraliser. Toutefois, en circonstances normales, il faut procéder à une analyse poussée du système de commercialisation afin d'évaluer les besoins en information de chaque acteur participant au système, ce qui comprend les agriculteurs, les négociants, les commissionnaires, les exportateurs, les détaillants, les consommateurs, les services de divulgation et l'Administration. Cette enquête devrait tendre à identifier le type d'informations requises par chacun, la manière dont ils désirent la recevoir, la fréquence avec laquelle ils en ont besoin, et les horaires de diffusion qui leur conviennent le mieux.

Le rôle d'un SIM dépend du fonctionnement du système de commercialisation. Cette recherche est donc essentielle car il y a autant de pays que de systèmes de commercialisation et il est donc impossible d'appliquer un modèle type de SIM. Il faut s'informer de la manière dont les produits passent des agriculteurs aux marchés, et d'un marché à l'autre, ainsi que des fonctions assurées par chaque intermédiaire. Il est essentiel de savoir comment s'établissent les prix à chaque maillon de la chaîne et les qualités ainsi que les quantitatifs qui font l'objet de transactions. Il est vital de connaître les systèmes de poids et mesures utilisés si l'on veut recueillir et diffuser des informations fiables.

L'importance de cette recherche est bien visible dans le cas du SIM indonésien (voir encadré 6). Il n'a été implanté qu'après une minutieuse recherche sur les attentes de ses utilisateurs potentiels. Cette approche a permis de décider de collecter les prix directement dans les zones de production, alors que la plupart des SIM existants s'étaient jusqu'alors concentrés sur les prix de gros pratiqués dans les marchés principaux. C'est également cette approche qui a permis de s'apercevoir que les fruits n'avaient pas la priorité et que, du moins en un premier temps, il suffisait que le SIM indonésien s'occupe des légumes, même en nombre limité. En Indonésie, les négociants qui traitent avec les agriculteurs ont des liens bien établis avec certains commerçants des marchés terminaux. La vente sur d'autres marchés ne les intéressant pas particulièrement, le SIM ne leur sert donc pas pour l'arbitrage. Par ailleurs, dans de nombreux pays, les négociants achètent la récolte sur pied ou sur la plante, et une information sur les cours du jour n'intéresse donc pas beaucoup les agriculteurs.

Quand on cherche à évaluer les besoins en information des agriculteurs, on se heurte souvent au problème qu'ils ne comprennent pas, au début, l'intérêt de cette information. D'où l'approche, sous forme de participation, adoptée en Indonésie afin de permettre aux créateurs du SIM d'expliquer aux agriculteurs les implications du service et de discuter avec eux la façon dont ils aimeraient recevoir l'information.

Cette recherche sur le fonctionnement du système de commercialisation ne doit pas automatiquement considérer qu'un SIM est nécessaire. Par contre, se demander qui en bénéficiera est une bonne question. En Grande Bretagne, par exemple, le service n'est pas quotidien. Il est instinctif de penser qu'il serait peut-être bon de le rendre quotidien, jusqu'au moment où l'on réalise que plus de 60% des produits maraîchers sont directement fournis à des supermarchés et que les agriculteurs qui fournissent les marchés de gros y ont des agents à qui ils téléphonent. Aux Pays-Bas, la plupart des agriculteurs disposent d'une liaison informatique avec le système d'enchères des halles et reçoivent donc les cours en temps réel. Il existe bien un organe étatique qui relève ces cours et les publie, mais son rôle principal est de s'assurer que les réglementations UE sur les prix sont bien respectées, et ne sert nullement de source primordiale d'informations aux agriculteurs.

Une fois identifiés les bénéficiaires du SIM, qu'il s'agisse d'acteurs participant déjà au système de commercialisation ou de potentiels participants, il faut en déterminer les besoins exacts. Par exemple, il est important de connaître le type de prix qui intéresse les agriculteurs. En Indonésie, les agriculteurs sont particulièrement intéressés par le prix local et ne cherchent pas à interpréter ce que peut signifier pour eux les fluctuations des cours des halles. Par contre, au Sri Lanka, le projet FAO a découvert que les agriculteurs considèrent la diffusion des cours pratiqués aux halles de Colombo, la capitale, comme essentiels et qu'ils étaient capables de transformer ces cours en prix à la ferme.

D'autres points, dont on a déjà eu l'occasion de parler plus haut, doivent également être étudiés. Un SIM ne doit jamais rester statique, il doit évoluer en fonction des temps, il faut donc dès l'origine penser à évaluer les questions suivantes:

3.4 Produits et marchés

La règle d'or est toujours de commencer petit et d'agrandir le SIM en fonction des ressources disponibles. Par exemple, sur la base de l'analyse faite du système de commercialisation, il peut convenir de débuter par un SIM se limitant à donner les cours pratiqués dans les halles les plus importantes, que l'on renforcera par la suite par les prix pratiqués dans les autres marchés de gros et les marchés de groupage. Quand il n'y a pas de bailleur de fonds, il devient plus facile d'éviter l'erreur qui consiste à vouloir tout faire tout de suite. Quand bailleur de fonds il y a, non seulement, celui-ci veut le plus souvent créer quelque chose d'important, mais les bénéficiaires aussi cherchent à obtenir le plus possible, tout de suite, pendant que l'aide est là. Cela se comprend d'ailleurs, car si l'on procède par paliers, il se peut en effet que le bailleur de fonds ne soit plus là quand le SIM est prêt à s'agrandir.

Encadré 6: Organisation d'un SIM: l'exemple du SIM indonésien financé par l'Allemagne 1

Entre 1978 et 1985, l'Etat allemand a organisé un SIM horticole en Indonésie (Schubert et al, 1988; Shepherd & Schalke, 1995). On décrit ici les différentes étapes qui ont marqué la préparation du projet et sa mise en place.

Identification du projet et l'évaluation des besoins

Pour donner une identité au projet, on a commencé par faire une évaluation de la nécessité de créer un SIM. Les principales informations alors en circulation ont été revues et ont porté à la conclusion que les acteurs du système de commercialisation manquaient d'informations sur les prix et sur certains autres aspects. Une analyse de préfaisabilité a donc été effectuée pour vérifier s'il existait des contraintes pouvant gêner le fonctionnement d'une information améliorée et pour voir si la base institutionnelle permettait de créer un SIM. Une analyse coûts/avantages en faisait partie.

Conception du projet

La conception du projet s'est fondée sur trois documents:

1. L'analyse de la situation, a tout d'abord permis de procéder à une évaluation rapide du système de commercialisation pour déterminer les priorités à donner aux produits, aux zones de production et aux types d'informations. Ensuite, une évaluation des points forts et faibles du Ministère de l'Agriculture ont été évalués pour déterminer là où il fallait procéder à un renforcement de l'institution. Enfin, il a été procédé à l'évaluation des activités d'information existantes sur les marchés agricoles.

2. Le projet-cadre, a permis de déterminer les grandes lignes du projet et de son fonctionnement. Les objectifs à moyen et long terme ont été identifiés, ainsi que les ressources nécessaires pour le mettre sur pied, selon ses différents stades de réalisation.

3. Le projet-pilote, dont les différents aspects ont été étudiés en détail, bien avant sa mise en oeuvre. De plus, la préparation d'un plan de fonctionnement attribuant à chaque activité prévue une échéance, un coût et les ressources nécessaires a aussi été réalisée.

Mise en oeuvre du projet

Le projet a été fourni d'un système de gestion qui avait pour fonctions de:

  • organiser, c'est-à-dire assurer la disponibilité de tout ce qui était nécessaire pour que le projet puisse fonctionner de façon fiable et efficace dans le respect d'une gestion rentable. Ceci a été facilité par l'établissement d'un manuel donnant tous les détails nécessaires sur son organisation et son fonctionnement (Haerah et al, 1979);
  • attribuer les ressources, c'est-à-dire répartir les ressources disponibles sur les différentes activités en tenant compte de la qualification des agents de collecte des informations, déterminante pour la qualité de tout le service offert par un SIM. Par ailleurs, pour faire fonctionner le SIM correctement, il faut que les équipements nécessaires soient en état de marche, que le téléphone fonctionne pour pouvoir transmettre les données acquises, et que tout soit organisé avec les médias pour en assurer la diffusion. Le projetpilote avait montré que les activités sur le terrain avaient été gênées par une mauvaise gestion des fonds de fonctionnement. Il fallait donc faire en sorte que ces fonds soient bien disponibles au niveau du terrain;
  • gérer le SIM, c'est-à-dire assurer une présence responsable en mesure d'animer, de soutenir et de faire progresser les motivations des agents employés par le SIM;
  • assurer les liaisons, c'est-à-dire faire en sorte que les responsables du projet créent et maintiennent de bonnes relations avec les différents groupes ciblés (notamment agriculteurs et négociants), ainsi qu'avec les différents organismes avec lesquels ils devaient coopérer (comme les médias ou les services de divulgation). L'approche adoptée a été celle de la participation, et de bonnes relations publiques ont été entretenues par l'organisation de réunions, la publication de communiqués de presse ainsi que par la distribution d'opuscules de propagande;
  • contrôler, c'est-à-dire assurer que le fonctionnement du SIM se déroule comme prévu, ce qui demandait de vérifier les informations entrantes, de surveiller les activités des agents, de faire des hypothèses sur les résultats et leurs effets. L'évaluation récurrente des erreurs a permis de les corriger en revoyant l'attribution des ressources, en procédant à certains changements de procédures et aux ajustements nécessaires au plan de fonctionnement établi. Une revue annuelle d'évaluation interne a été réalisée, ce qui a conduit à modifier certaines activités.

Passation de pouvoirs

Durant les trois ou quatre ans qui ont suivi la passation du SIM aux responsables locaux, une assistance technique d'intervention rapide a été fournie pour le dépistage des éventuels mauvais fonctionnements.


Le SIM tanzanien a commencé par collecter les prix de 27 produits dans 45 centres, mais la plupart n'ont jamais servi. Le SIM ghanéen s'est basé sur la collecte des prix dans plus de 100 marchés. Dans sa réponse à l'enquête FAO, le Ministère de l'Agriculture a communiqué l'interruption, faute de fonds, de la formation des agents sur le terrain, alors que le SIM emploie encore plus de 100 personnes à temps plein. Ainsi, plus les marchés à prendre en compte sont nombreux, plus un SIM se heurte au problème d'avoir trop d'informations à gérer, trop de salaires à payer et pas assez de fonds à dédier à la formation de ses agents.

Par conséquent, il faut veiller à n'inclure dans le SIM projeté que les seuls produits qui sont commercialement importants, et parfois, différentes variétés d'un même produit (par exemple, les oignons rouges et les oignons blancs). Augmenter le nombre de produits afin de construire une banque de données puissante du point de vue statistique est à éviter. Les coûts augmentent en fonction du nombre de produits, mais l'utilité obtenue est faible. La collecte des informations devient de plus en plus complexe, leur transmission et traitement demandent de plus en plus de temps, la durée de leur diffusion à la radio est de plus en plus longue, et donc de plus en plus ennuyeuse pour la grande majorité de ceux qui les écoutent, et qui ne sont pas tous des agriculteurs. Pour les produits dont la demande est faible, il est probable que les agriculteurs qui les cultivent disposent déjà de bonnes sources d'information et de bons contacts avec les marchés intéressés. Dans les pays en développement, des produits comme les asperges ou les salades rentrent très probablement dans cette catégorie. Si la publication des cours peut certainement encourager de nouveaux agriculteurs à se lancer dans une certaine culture, elle n'aura toutefois que peu d'intérêt pour la masse d'entre eux, et le coût de cette publication sera supérieur à l'intérêt suscité.

Les lieux où collecter les informations sont essentiellement déterminés sur la base de l'enquête réalisée pour connaître les desiderata des utilisateurs ciblés. Par exemple, si les agriculteurs veulent connaître les prix à la ferme, ou au plus près, il est totalement inutile d'aller recueillir des prix au détail. Le mieux serait de choisir des endroits où les plus grandes quantités de produits sont échangées. Là aussi, il faut chercher un équilibre entre les coûts et les avantages que l'on en tire. Il faut penser dès le début que tout marché retenu pour la collecte des prix augmente le nombre de préposés nécessaires, les besoins de supervision, de formation, de traitement de l'information et la durée des émissions diffusées à la radio, notamment dans les pays où il faut payer pour les transmettre. Les coûts de formation et de supervision peuvent être très lourds; dans certains pays particulièrement étendus, les frais de transport et de déplacement des responsables qui supervisent les agents sur le terrain sont souvent comparables aux salaires payés à ces agents.

Pour le SIM indonésien, l'enquête précédant la décision de collecter les prix pratiqués dans les marchés de groupage locaux et à la ferme avait déterminé d'importants coûts de gestion. L'Indonésie a la chance de pouvoir se permettre un SIM aussi détaillé. D'autres pays n'ont pas les moyens d'en faire autant. Toutefois, pour de nombreux pays, collecter les prix à la source n'est pas si important que cela, et parfois cela n'est même pas faisable. Quand les agriculteurs sont dispersés sur de grandes étendues et vendent leurs produits soit à la ferme, soit de façon irrégulière aux petits marchés de groupage locaux, la collecte des prix locaux peut s'avérer non seulement difficile, mais sûrement extrêmement chère. Dans ces conditions, il est préférable de se limiter à diffuser les cours des halles et à mettre en place des services de divulgation pour aider les agriculteurs à les interpréter correctement. Toutefois, comme on l'a déjà dit, il faut étudier tout ceci en détail au moment de la conception.

Les SIM doivent avoir la possibilité de varier leur couverture. Il faut donc faire la revue périodique des produits et des marchés pris en compte et les évaluer en fonction des évolutions de la demande et de la production. Cela peut comporter l'introduction de nouveaux produits, comme c'est le cas en Indonésie. De même, il se peut qu'à long terme, il soit nécessaire d'ôter un marché de la liste ou le remplacer par un autre qui soit plus dynamique et plus significatif pour les agriculteurs, les négociants et les consommateurs.

3.5 L'information sur les marchés et les consommateurs

Il existe un courant de pensées qui préconise que les SIM devraient plus que jamais être attentifs aux besoins d'information des consommateurs. Cela mérite certainement considération, toutefois, différentes raisons font penser qu'un SIM désireux de satisfaire également aux besoins d'information des consommateurs aurait quelques difficultés. En premier lieu, un SIM destiné aux agriculteurs et aux négociants s'oriente tout naturellement vers les marchés de groupage et les marchés de gros. Les prix pratiqués à ce niveau n'ont que peu d'intérêt pour les consommateurs, et pour les satisfaire, le SIM devrait s'organiser en parallèle pour recueillir les prix de détail pratiqués chez les détaillants. Cela comporterait une augmentation substantielle des coûts, bien qu'il soit sans doute plus facile d'attirer des sponsors quand il s'agit de fournir des prix de détail.

En deuxième lieu, même les informations recueillies dans les marchés de vente au détail risqueraient de ne pas être très utiles à la grande majorité des consommateurs. En effet, dans une ville de 10 millions d'habitants, il y a forcément de nombreux marchés. Les prix qui y sont pratiqués dépendent souvent de la distance qui les sépare de leur source d'approvisionnement (en général les halles centrales) ainsi que du niveau de qualité du magasin, or, ce niveau dépend à son tour du pouvoir d'achat des habitants du quartier. De plus, nombreux sont les consommateurs qui préfèrent acheter dans les magasins où le mode de calcul des prix est tout à fait différent. On voit donc mal comment un SIM pourrait diffuser des prix qui représenteraient une utilité quelconque pour les consommateurs, lesquels ont certainement plus vite fait de comparer les prix pratiqués par les commerçants du quartier que de les écouter à la radio.

Un SIM pourrait toutefois s'avérer utile aux consommateurs comme aux agriculteurs s'il indiquait, occasionnellement, quand un produit arrive à saturation sur les marchés et peut donc s'acheter à bas prix. Les bas prix payés aux agriculteurs en cas de saturation des marchés sont souvent lents à se réfléchir sur les prix de détail. Le fait que le public connaisse les produits devant être vendus bon marché devrait pousser les commerçants à en réduire le prix, ce qui en augmenterait la consommation.

3.6 Qui doit collecter les informations sur les marchés?

En principe, les informations sur les marchés devraient être collectées par des personnes qui, d'une part, aient le temps de le faire correctement et, d'autre part, soient intéressées à assurer le plein succès du SIM. En Indonésie, par exemple, les agents préposés à la collecte des prix sont des employés à temps plein qui ont su tisser de bonnes relations avec les agriculteurs comme avec les négociants. En général, cela se traduit par une qualité de collecte nettement meilleure que lorsque ce sont des agents du service des statistiques qui s'en chargent, en ne se rendant sur les marchés qu'une fois par semaine. Il semble que, dans la mesure du possible, il y ait tout intérêt à confier la responsabilité de la collecte des informations sur les marchés à des fonctionnaires qui s'occupent de développer la commercialisation là où les informations sont collectées quotidiennement, car ils sont alors dans une position idéale pour commenter les tendances et donner des conseils aux agriculteurs et aux agents des services de divulgation. Lorsque, par contre, la collecte ne se fait qu'une fois par semaine, il est préférable de donner cette responsabilité aux agents des services de divulgation, pour être sûrs que le travail soit fait par des personnes comprenant l'importance du SIM et connaissant le fonctionnement du système de commercialisation.

Les négociants ayant une très grande méfiance des agents de l'Administration, il est important de leur faire comprendre que les prix qu'ils communiquent sont utilisés pour être consolidés ou pour établir des moyennes et que rien de personnel n'est enregistré. Il est également important d'instruire les préposés à travailler avec détachement, pour qu'ils soient vus comme totalement désintéressés par les questions individuelles. De nombreux pays ont confié la collecte des informations à des agents qui sont aussi du fisc.

Il arrive également que la collecte des prix se fasse au niveau du négoce. On a vu que certains marchés de gros fournissent des informations quotidiennes sur les transactions de la journée. Ces informations peuvent être utilisées comme base pour un SIM géré par le marché lui-même, ou encore elles peuvent être utilisées par un SIM étatique, semi-étatique ou commercial. Il est également possible que les informations soient fournies par les commerçants eux-mêmes par l'intermédiaire de leurs associations, des Chambres de Commerce ou des Chambres d'Agriculture. Toutefois, tout SIM utilisant des informations provenant du secteur privé doit obligatoirement prévoir une série de vérifications pour s'assurer de la correction de l'information, certains commerçants pouvant avoir envie de manipuler les informations à leur avantage. Néanmoins, le manque de ressources de nombreux Etats semble indiquer qu'il faudra, à l'avenir, trouver des alternatives à la conception jusqu'ici suivie pour les SIM. Parmi les alternatives possibles, le SIM pourrait ne pas directement collecter les informations mais se contenter de les recevoir de différentes sources, pour ensuite les diffuser aux utilisateurs.

3.7 Selon quel rythme et quand faut-il collecter les informations?

Comme on l'a déjà dit, les cours des céréales n'ont pas besoin d'être recueillis aussi souvent que ceux des denrées périssables. Alors que, dans certains pays, les cours des céréales peuvent subir des fluctuations à l'improviste, en certaines circonstances (comme par exemple quand les stocks urbains se font rares ou quand les routes sont bloquées), le plus souvent, les fluctuations quotidiennes sont assez faibles. Cela se doit en premier lieu au fait que les céréales sont récoltées, traitées et stockées et ne sont libérées sur le marché qu'en fonction des besoins quotidiens. Leurs cours ne sont donc pas influencés par les caprices du climat, ni par les problèmes que connaissent les denrées périssables, ou autres. Les prix des produits de base non céréaliers peuvent par contre connaître des fluctuations très rapides, en particulier les produits dérivés du manioc frais qui sont très rapidement périssables.

Les prix des produits maraîchers peuvent changer très rapidement. Du fait que la vente de certaines variétés ne concerne que de faibles quantitatifs et que ce genre de produits est hautement périssable, un nouvel arrivage sur le marché peut faire précipiter les prix. De plus, bien que la demande ne varie que faiblement d'un jour sur l'autre, la production peut, elle, changer de façon significative en fonction des conditions climatiques (mûrissement et/ou récolte), ou simplement en fonction du nombre d'agriculteurs qui ont décidé de récolter leurs produits ce jour-là. Une diffusion hebdomadaire des prix maraîchers ne saurait donc aider à créer une véritable transparence du marché et ne pourrait alors que donner une indication sur les tendances générales des prix en fonction de la saison et d'un certain nombre d'autres facteurs.

En principe, les prix maraîchers devraient être collectés et diffusés à chaque fois que le marché fonctionne. Dans la pratique, si un marché fonctionne durant les fins de semaine, il est souvent difficile qu'un SIM étatique puisse collecter les prix ces jours-là puisque les bureaux sont fermés. C'est pourquoi la collecte des prix se fait, dans la plupart des pays, du lundi au vendredi alors que dans les pays arabes elle a lieu du samedi au jeudi. De plus, une collecte quotidienne implique la nécessité d'employer des agents à plein temps. Or, quand les ressources ne le permettent pas, on est bien obligé de ralentir le rythme. Avant de prendre une telle décision, il convient d'évaluer s'il ne serait pas mieux de réduire le nombre des marchés pris en considération.

Toujours en principe, le mieux serait de recueillir les prix durant la période de pointe des transactions. Toutefois, dans la pratique, de nombreux SIM ont des difficultés à le faire. Par exemple, devoir payer des primes aux agents pour qu'ils travaillent plus tôt le matin, avant leur horaire normal, conduit à une augmentation des coûts pratiquement insupportable. Par ailleurs, collecter les prix aux heures de pointe peut créer des problèmes pour réussir à diffuser ensuite les informations à l'heure établie. Si l'horaire idéal pour diffuser les informations est tôt le matin, il est sûrement préférable de diffuser les prix enregistrés la veille au soir, plutôt que ceux de la veille au matin. Quand la période de pointe des transactions varie d'un endroit à l'autre, il peut également s'avérer nécessaire de trouver un compromis entre l'horaire de collecte et l'horaire de diffusion des informations.

Collecter les prix durant la période de pointe est toujours préférable parce que c'est le moment où le plus grand nombre de fournisseurs et d'acheteurs se trouvent en présence les uns des autres, c'est donc le moment où la formation des prix est la plus fiable. Les marchés travaillant 24 heures sur 24, comme c'est souvent le cas en Asie, reçoivent leurs approvisionnements assez régulièrement, et ne connaissent donc pas de fortes fluctuations des prix au niveau quotidien. Ce n'est pas le cas des marchés qui vendent leurs produits durant un horaire limité de la journée (comme les halles fonctionnant aux enchères). Toutefois, les marchés ouverts au public une bonne partie de la journée, mais recevant leurs approvisionnements essentiellement tôt le matin, peuvent avoir des prix qui diminuent au fur et à mesure, dans la journée, lorsque les produits commencent à se défraîchir et les agriculteurs, comme les commerçants, essayent de se défaire de leurs approvisionnements pour faire place aux nouveaux arrivages. Les prix relevés durant la période de pointe peuvent donc ne pas correspondre aux prix moyens payés aux agriculteurs. On ne peut pas non plus prétendre qu'un SIM relève les prix et les quantitifs échangés tout au long de la journée pour obtenir des moyennes pondérées fiables. Compte tenu de ceci, les prix de pointe ne peuvent donc servir qu'à donner un prix indicatif vers lequel les agriculteurs doivent s'orienter. Il faut par ailleurs que les émissions de radio et les articles de journaux qui diffusent les prix indiquent clairement aux utilisateurs que les prix communiqués sont des prix relevés à une certaine heure et ne correspondent pas obligatoirement aux prix moyens de l'ensemble de la journée.

Mais plus que de relever les prix aux heures de pointe, il importe de toujours les relever à la même heure. Les informations diffusées doivent être cohérentes afin de pouvoir les comparer d'un jour sur l'autre, ce qui ne serait pas possible si l'on collectait les prix un jour le matin et le lendemain l'après-midi. Une fois qu'un horaire de collecte a été fixé, il faut absolument s'y tenir et le SIM doit veiller à assurer une étroite supervision des agents sur le terrain à cet effet.

3.8 Les produits et leurs variétés

On a vu, plus haut, qu'un SIM doit au plus tôt décider des produits à prendre en compte. Il faut également qu'il décide des variétés à considérer pour chaque produit car il arrive souvent que les prix soient très différents d'une variété à l'autre. En Afrique, notamment, on trouve souvent différents types de haricots, et chaque type a son prix. Un SIM diffusant un prix unique sous le poste «haricots» n'aurait donc aucun intérêt ni pour les agriculteurs ni pour les négociants et serait très rapidement discrédité. Si des problèmes de ressources ou d'autres considérations limitent le choix des produits à prendre en considération, il est alors essentiel de ne choisir que les variétés les plus importantes, en excluant toutes les autres et, lors de la diffusion, de bien identifier la variété à laquelle correspond le prix diffusé.

3.9 La qualité des produits

Quel que soit le marché pris en considération, on y trouvera toujours différentes qualités pour un même produit. Or, les prix diffèrent d'une qualité à l'autre. Quand il n'existe pas un standard de qualité reconnu de tous (ce qui n'existe en fait que dans très peu de pays), le problème de la qualité peut créer des confusions pour l'interprétation des prix. Les producteurs de fruits de deuxième choix pourraient bien, en effet, contester amèrement le SIM et sa précision en l'entendant diffuser des prix correspondant à la qualité supérieure sans bien le spécifier.

Les SIM devraient donc s'employer à collecter et à diffuser des prix qui correspondent à une bonne qualité moyenne. Cela demande de bien former les agents sur le terrain pour leur faire assimiler ce qu'est un produit de bonne qualité moyenne, car il est évident qu'il faut assurer une cohérence entre tous les agents collecteurs des prix dans un même marché, mais aussi entre les marchés mêmes. Il faut également prévoir des services de divulgation pour bien faire comprendre aux agriculteurs et aux négociants que les prix diffusés correspondent à cette bonne qualité moyenne. Le jour où un produit répondant à ce niveau de qualité n'est pas disponible, il vaut mieux ne pas diffuser de prix qu'en diffuser un qui correspondrait à une qualité supérieure ou inférieure.

3.10 Poids et mesures

Dans de nombreux pays en développement, les systèmes de commercialisation n'utilisent pas de poids standards, exprimés en kilogrammes. Les agriculteurs vendent et les négociants achètent et revendent en parlant de sacs, de cartons, de caissettes, de ballots ou de barils. Au niveau des détaillants, les ventes se font souvent au «tas» et l'usage veut que le marchandage porte plus souvent sur la taille du tas que sur son prix. Cela rend évidemment difficile la collecte d'informations à la fois précises et significatives, notamment si les personnes concernées n'ont aucune idée de ce que peut être un système standard de poids.

Essayer de modifier des usages ancrés dans le temps pour faciliter le travail du SIM est peine perdue. La seule possibilité de faire adopter un système standard de poids est de faire en sorte que les personnes concernées en sentent la nécessité. Dans les pays où les agriculteurs et les négociants connaissent le kilogramme, il devrait être possible de diffuser les prix au kilogramme, tout en portant une particulière attention à la conversion des unités d'échange utilisées. Il ne faut pas partir du principe, comme on l'a déjà vu au chapitre 2, qu'un récipient quelconque aura la même taille dans l'ensemble du pays, ou d'une année à l'autre. Les agents préposés à la collecte des prix doivent constamment vérifier, et actualiser le cas échéant, les rapports de conversion. Dans les pays où les agriculteurs ignorent ce qu'est un système de poids standard, il vaut mieux diffuser les prix en se référant à l'unité d'échange la plus courante. Là aussi, si ces unités d'échange diffèrent d'une région à l'autre, il faut bien le préciser au moment de la diffusion des prix.

Il est préférable d'éviter l'utilisation d'une balance pour peser un produit offert à un certain prix. Un agent préposé à la collecte des prix se promenant quotidiennement dans un marché avec une balance à bout de bras ne pourrait que se faire remarquer, ce qui risquerait de provoquer un certain truquage des prix. Par ailleurs, les commerçants risquent de manquer de patience vis-à-vis d'un badaud qui vient «leur faire perdre du temps» pour peser des articles sans rien acheter. C'est pourquoi il vaut mieux noter le prix des articles et la forme sous laquelle ils sont vendus. Toutefois, quand ils sont vendus, surtout au détail, au «tas» ou au «baril», il devient nécessaire de procéder au pesage au moment de noter le prix.

3.11 Quantités, stockage et autres informations

L'attention a particulièrement porté sur le rôle le plus important d'un SIM, qui est de fournir des informations sur les prix. Toutefois, si les ressources sont suffisantes, il peut également avoir pour autre fonction, tout aussi valable, de donner des informations supplémentaires permettant aux utilisateurs de prendre des décisions au niveau de la commercialisation.

Une information sur les quantitatifs échangés peut aider les agriculteurs et les négociants à formuler des hypothèses fondées sur les futures tendances des prix. Ces informations présentent un gros problème car elles sont longues à obtenir, et il est difficile, voire impossible, d'en garantir l'exactitude. Pour collecter les prix dans un marché, une heure par jour peut suffire. Recueillir des informations détaillées sur les approvisionnements peut prendre une journée entière, selon l'horaire d'ouverture du marché. Certaines halles enregistrant elles-mêmes les arrivages et les transactions, le SIM peut alors utiliser ces informations. Toutefois, en l'absence de conditionnements standards, à moins d'exercer une surveillance constante (comme cela se fait dans les marchés de gros d'Afrique du Sud) il y a risque de fournir des informations assez peu fiables. Or, surveiller les arrivages est souvent difficile quand le marché n'est pas doté de pont-bascule, ou simplement parce que les camions qui apportent les approvisionnements transportent différents produits ensemble.

La collecte des informations est plus facile quand les arrivages se font durant un horaire limité et précis, mais même dans ce cas, il est difficile d'obtenir des chiffres exacts. Il est certain qu'une information détaillée sur les quantitatifs traités par un marché peut être très utile au niveau de la planification (évaluation de la demande en vue de la création d'un nouveau marché, établissement de la topographie de la production), mais elle ne sert pratiquement ni aux agriculteurs ni aux négociants. Dans la pratique, l'évaluation des arrivages faite par un agent possédant une bonne expérience peut suffire aux fins commerciales à brève échéance. Un SIM devrait donc s'attacher à renforcer son information sur les prix par un commentaire sur les approvisionnements tel que, par exemple: «aujourd'hui, il y a eu saturation de tomates sur le marché», ou «les réserves d'oignons sont insuffisantes», ou encore «l'approvisionnement en melons d'eau a été faible aujourd'hui», sans chercher à donner des chiffres précis.

Dans les pays où les routes sont fréquemment interrompues quand les conditions météorologiques sont mauvaises, un SIM peut être utile aux agriculteurs s'il les prévient des itinéraires impraticables. Cela a même deux avantages: d'un côté, les agriculteurs de la zone isolée sauraient qu'il est inutile de chercher à apporter leurs produits périssables au marché où ils n'arriveront sans doute jamais et, de l'autre, les agriculteurs des zones ayant par contre accès au marché sauraient que c'est le moment de s'y précipiter car les prix y seront sans doute plus hauts que d'habitude.

Une information sur les produits disponibles est également utile aux négociants parce qu'elle leur permet de localiser les endroits où ils peuvent aller s'approvisionner, notamment quand un certain produit vient à manquer. Dans les pays où les produits alimentaires de base sont pour la plupart importés, un SIM peut être utile s'il informe de l'arrivée des cargaisons au port. Cela est particulièrement important quand il s'agit d'aides alimentaires car, si ces produits sont écoulés sans critères, ils peuvent sérieusement perturber la commercialisation locale et les prix payés aux cultivateurs locaux. En plus de prévenir les marchés de la prochaine date de vente ou distribution de ces produits de l'aide alimentaire à des endroits déterminés, les SIM des pays dotés de réserves alimentaires de sécurité peuvent également donner des informations concernant la date prévue d'écoulement des stocks de réserve.

3.12 Précision des informations

Quand les informations sur les prix ne sont relevées qu'occasionnellement et ne sont pas le résultat d'une collecte quotidienne systématique de toutes les transactions, il faut faire très attention à la bonne formation des collecteurs qui doivent bien connaître les techniques de collecte des prix et des autres informations. Il faut également prévoir des cours périodiques de remise à niveau. Le collecteur doit immédiatement transmettre les informations recueillies pour qu'elles soient traitées au plus tôt et transmises sans attendre aux utilisateurs. Le mieux est de procurer aux agents des formulaires à remplir au fur et à mesure, en leur donnant des instructions précises sur la qualité des produits à laquelle ils doivent se référer et sur la manière de calculer les moyennes (il est en général nécessaire de collecter un minimum de cinq prix par jour pour chaque produit). En présence d'écarts de prix importants, un prix moyen aura peu de signification à moins qu'il ne puisse être pondéré. Une autre manière d'utiliser les moyennes est de diffuser le prix le plus courant, ou encore le prix le plus fort et celui le plus bas. De toute façon, ces prix doivent toujours se référer à une bonne qualité moyenne et le prix le plus bas ne doit jamais correspondre à un produit défraîchi ou endommagé.

3.13 Transmission et traitement des données

Les collecteurs employés par le SIM devraient avoir un emploi du temps précis fixant les heures auxquelles relever les prix d'un marché déterminé, saisir les informations à l'ordinateur, et les transmettre à la station radio chargée de les diffuser. Des superviseurs devraient veiller à ce que ces horaires soient scrupuleusement respectés. Ces superviseurs doivent également écouter les émissions de diffusion, d'une part pour vérifier qu'elles ont lieu, d'autre part pour s'assurer qu'elles sont exactes.

Le traitement des données est soumis au vieil adage qui veut que ce qui est le plus simple soit aussi le meilleur. Il faut donc surveiller de près les informaticiens, sinon ils ont tendance à concevoir des systèmes qu'ils sont seuls à pouvoir comprendre. Les études de conception doivent prévoir la possibilité d'une extension future du SIM, mais il faut absolument éviter toute complexité pour que ceux qui l'utilisent quotidiennement le fassent facilement et soient en mesure de résoudre les problèmes qui peuvent se créer.

Le facteur «horaire» demande qu'un soin particulier soit apporté à la conception des systèmes de traitement des données relevées sur les marchés afin que des comparaisons valables soient possibles, au niveau quotidien, hebdomadaire et/ou mensuel, entre les différentes époques et les différents marchés. Le problème majeur reste la sécurité des informations. Il faut protéger les cellules qui contiennent des équations pour éviter que celles-ci soient effacer par une réécriture accidentelle, et leur appliquer un blocage pour empêcher les accès non autorisés. Certains fichiers doivent également être munis d'un mot de passe pour éviter ces mêmes accès non autorisés. Les informations elles-mêmes sont par contre difficiles à protéger puisqu'elles doivent être manipulées continuellement d'une feuille à l'autre, ou d'une cellule à l'autre. Il est également difficile de créer des vérifications automatiques sur les données au moment de leur saisie.

3.14 Diffusion des informations

Le moyen utilisé pour diffuser les informations doit être un moyen bien connu des utilisateurs du SIM. Diffuser les informations par l'intermédiaire des journaux quand beaucoup d'agriculteurs sont analphabètes n'a que peu d'intérêt. Il ne faut surtout pas penser qu'il suffit d'organiser les émissions radio ou télévisées ou de réserver les colonnes nécessaires sur les journaux pour considérer que le problème de la diffusion des informations est réglé. Il faut, de plus, faire très attention à la façon de présenter les informations. Dans les journaux, le coup d'oeil est très important, et la compréhension des données peut être grandement facilitée par l'utilisation de graphiques. A la radio, la lecture de longues et ennuyeuses listes de prix risque d'ennuyer l'audience au point de la faire disparaître. Les émissions radio doivent se limiter aux produits les plus importants, dont les prix sont sujets à des fluctuations importantes. Les journaux peuvent être utilisés pour donner une information plus complète. Les émissions radio devraient être intercalées de quelques commentaires sur les conditions des marchés et sur leurs éventuelles opportunités. C'est, de fait, ce que font les SIM décrits aux encadrés 8 et 9. Bien sûr, cela allonge le temps d'émission et coûte donc plus cher. Enfin, bien que ce soit évident, il faut absolument que les prix soient diffusés dans les langues parlées par les utilisateurs.

Encadré 7: Quelques conseils pour organiser une feuille de relevé des informations[7]

1. Ne compliquez pas les choses.

2. Pensez à bien documenter l'ensemble du système, et à relever toutes les équations qui s'y trouvent.

3. Protégez les cellules où sont mémorisées les équations.

4. Donnez des mots de passe aux fichiers.

5. N'utilisez pas de macros si vous n'êtes pas sûrs que le personnel qui se charge du traitement des informations les connaisse bien, ou s'il existe le moindre risque que quelqu'un puisse les bouleverser.

6. Construisez des fichiers de données hebdomadaires pour chaque produit et/ou pour chaque marché.

7. Veillez à ne jamais travailler directement dans un fichier de données pour établir vos rapports, mais à toujours travailler avec un deuxième fichier dans lequel vous copierez les données dont vous avez à vous servir.

8. Pensez à faire des copies de sauvegarde, et un back-up général à la fin de chaque année.

Pour la manipulation des informations relevées, il est recommandé d'utiliser un logiciel commercial de banque de données relationnelle (Access ou dBASE, par exemple). Ce genre de logiciel a en effet l'avantage d'avoir un accès direct aux données assez rigidement contrôlé et permet de construire des routines pour la saisie des données ayant des dispositifs de vérification pour éviter les erreurs. Les rapports peuvent également être organisés de façon à pouvoir extraire les données nécessaires automatiquement (par produit, par marché ou par période de temps), ce qui évite que les opérateurs manipulent trop la banque de données. L'utilisation d'une banque de données demande toutefois un temps initial d'organisation plus important et un personnel mieux préparé qu'une simple feuille de calcul (indications de Bridge Poon).


Les agriculteurs sont souvent déconcertés par les prix qu'ils entendent à la radio. Ils ne comprennent pas toujours bien la différence qui existe entre les prix de détail et les prix de gros, ou entre les prix payés au producteur et les prix de gros. Quand un SIM commence à utiliser les ondes, il faut qu'il prévoit une ou deux émissions préliminaires uniquement dédiées à présenter le service et à donner aux agriculteurs les explications nécessaires à la compréhension des prix diffusés. Ce genre d'émission devrait être répété périodiquement.

Les SIM s'occupent rarement de conduire des études sur l'impact des informations qu'ils diffusent, ou sur la manière dont ces informations sont reçues par les utilisateurs. Cela devrait pourtant faire partie de leurs tâches. Les études conduites dans le cadre de l'enquête FAO sur les SIM du monde entier ont inclus des entrevues avec les agriculteurs et les négociants, et ont montré que si certains SIM jouissent de l'appréciation de leurs utilisateurs, d'autres ne sont que très peu suivis, voire même, pas compris du tout.

3.15 L'utilisation des informations

L'utilisation que les petits agriculteurs font des informations fournies par un SIM peut être fortement améliorée si les agents des services de divulgation sont en mesure de leur expliquer comment interpréter les prix diffusés ainsi que les tendances saisonnières. Par exemple, si le prix relevé dans une grande ville est tant, quel peut être le prix payé à la ferme, après en avoir déduit le coût de la chaîne de commercialisation? A un niveau plus sophistiqué, les agents de divulgation peuvent construire des hypothèses de prix sur plusieurs années et conseiller les agriculteurs sur le moment de semer pour pouvoir récolter quand les prix sont au plus haut. La FAO a développé, ces dernières années, une collection de matériel didactique destiné aux agents de divulgation pour les aider à bien maîtriser les questions liées à la commercialisation (FAO, 1990). Les produits ne correspondant pas aux besoins des marchés doivent être abandonnés et les agents de divulgation doivent avoir certaines connaissances de base sur la commercialisation s'ils veulent pouvoir donner des conseils valables aux producteurs.

Encadré 8: La collecte des informations et leur diffusion par une radio locale au Cambodge

Au Cambodge, l'information sur les prix pratiqués dans les marchés était collectée, en 1996, par des organismes étatiques ou paraétatiques nombreux et variés, dont les activités se superposaient le plus souvent. Néanmoins, une très petite part de cette information était diffusée de façon à avoir une valeur commerciale quelconque.

Pour les agriculteurs, la seule information valable était fournie par une radio privée de Phnom Penh qui envoyait quotidiennement un journaliste visiter l'un des dix marchés de la ville pour en diffuser ensuite les prix par radio (FM). Le journaliste collectait les prix de 49 produits, qu'il transmettait ensuite, en personne, directement du marché, les comparait aux prix de la veille et concluait par quelques entrevues avec les commerçants qui exprimaient leurs opinions sur les conditions courantes du marché. La transmission des données entre le marché et la station d'émission se faisait au moyen d'un téléphone portable, et l'émission était sponsorisée par une compagnie de téléphonie mobile. Le rayon d'écoute de la station radio était d'environ 150 km, et elle se vantait du succès de son émission auprès des agriculteurs.

Quoique d'une valeur indéniable, cette initiative souffrait quand même de quelques inconvénients, qui démontrent bien que cette solution ne peut être prise en alternative à celle d'un véritable SIM. En premier lieu, la couverture géographique était limitée. En second lieu, la possibilité de construire des séries historiques de prix était handicapée par le choix journalier d'un marché différent. En troisième lieu, la station radio a fini par trouver que l'émission lui coûtait cher et que ses frais n'étaient pas entièrement couverts par le sponsor. Enfin, cette émission n'était que le fruit d'une initiative personnelle et de l'enthousiasme du directeur de la station radio, mais elle ne pouvait en aucun cas être considérée comme institutionnalisée. Néanmoins, toute démarche officielle pour améliorer les informations sur les marchés au Cambodge ferait bien de tenir compte de cette initiative, et de l'incorporer dans tout éventuel SIM de nouvelle création.


Encadré 9: Le SIM privé de Moldavie

En Moldavie, ancienne république de l'URSS, l'USAID a financé la création d'un SIM destiné aux exportateurs. Ce SIM leur fournissait des informations sur les marchés moldaves et sur ceux des pays limitrophes. Ce Projet avait pris la forme d'un contrat signé avec deux chefs d'entreprise locaux qui collectaient les prix et préparaient une émission de radio innovante de dix minutes par semaine durant laquelle ils exposaient les principales possibilités d'arbitrage et donnaient des conseils aux exportateurs sur les coûts à prévoir pour profiter de ces opportunités.

Il avait été espéré que ce SIM aurait réussi à engendrer une demande commerciale d'informations sur les marchés ou, en alternative, aurait su attirer les sponsors. Malheureusement, cet objectif n'a pas été atteint avant que ne s'épuise le financement USAID, qui était un financement à court terme. Il a donc été considéré qu'un service de genre ne pouvait être viable commercialement, du moins pour le moment. Les exportateurs s'étaient bien déclarés prêts à payer pour les informations, mais le montant qu'ils étaient prêts à payer ne suffisait pas à couvrir le coût du SIM.


[7] Bridget Poon, p.c.

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