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LA SCIENCE, FONDEMENT D’UNE POLITIQUE DE SECURITE SANITAIRE DES ALIMENTS


Dans la plupart des pays, les principales décisions prises en matière de sécurité sanitaire des aliments sont déléguées à des agences spécialisées, qui sont en général celles dont la mission est de protéger la santé publique. Ces décisionnaires ont besoin d’exercer leurs responsabilités d’une manière objective et sont tributaires des experts techniques et de la science pour agir avec le degré de certitude et d’objectivité qui semble exigé.

Au plan international, les agences de sécurité sanitaire des aliments conviennent aussi que la science est un outil important dans la prise de décision en matière alimentaire et l’élaboration de normes alimentaires. Les directives de politique générale de la Commission du Codex Alimentarius contiennent des déclarations de principe concernant le rôle de la science dans le processus de prise de décision du Codex et le degré de prise en compte des autres facteurs pertinents.

Les deux premières de ces déclarations sont les suivantes:

  1. Les normes alimentaires, directives et autres recommandations du Codex Alimentarius doivent reposer sur une analyse et sur des preuves scientifiques objectives, après un examen approfondi de toutes les données pertinentes, de façon que les normes garantissent la qualité et la sécurité des approvisionnements alimentaires.

  2. En élaborant des normes alimentaires et en prenant des décisions à leur sujet, le Codex Alimentarius doit tenir dûment compte, le cas échéant, d’autres facteurs légitimes ayant une importance pour la protection de la santé du consommateur et la promotion de pratiques loyales dans le commerce des denrées alimentaires.

La Commission du Codex Alimentarius a en outre élaboré des critères pour prendre en compte les «autres facteurs légitimes» mentionnés dans la seconde déclaration de principe citée ci-avant. Les éléments essentiels dans l’identification de ces facteurs sont les suivants:

Les politiques du Codex soulignent que l’analyse des risques doit reposer sur l’évaluation des risques en tant qu’activité scientifique. Puisque la relation entre la science et l’éthique est essentielle dans le processus d’analyse des risques, il est important de préciser la signification du terme «scientifique». Si «scientifique» est synonyme de rigoureux, d’impartial et d’objectivité interpersonnelle, il décrit parfaitement dans ce cas la norme vers laquelle doit tendre l’évaluation des risques. Si «scientifique» est utilisé dans le sens de «dépouillé de valeurs» et qu’il sert uniquement à donner les «bonnes» réponses en matière d’identification, d’évaluation et de gestion des risques, cette utilisation est complètement erronée. L’analyse des risques comprend implicitement un certain nombre de jugements de valeur qui ne sont pas pour la plupart sujets à controverse et méritent une analyse approfondie (se reporter à la section 7).

Dans la grande majorité des cas, les experts techniques et les autres parties prenantes sont d’accord, pour l’essentiel, sur ce qui constitue un aliment sain. Dans ces situations, il y a peu ou pas de désaccord sur les jugements de valeur émis pendant le processus d’analyse des risques. Cependant, il existe des situations d’analyse des risques qui suscitent des jugements de valeurs controversés. Prenons, par exemple, l’évaluation d’une nouvelle technologie, d’un nouveau processus de production alimentaire ou d’un danger qui vient d’être identifié. Dans ces cas, ce qui est «sain» peut ne pas faire encore l’objet d’un consensus et l’analyse des risques comporte des dimensions éthiques plus explicites.

Pour que les dimensions éthiques du processus d’analyse des risques soient plus transparentes, il est important de comprendre ce qui déclenche le besoin d’un tel processus. De même, il n’est pas toujours possible d’effectuer une analyse complète de toutes les questions liées aux risques, tant du point de vue des ressources disponibles que de la capacité technique. Le raisonnement suivi lorsque l’on s’emploie à définir la portée d’une analyse des risques doit donc être explicite.

Bien que l’évaluation des risques repose sur la science, les preuves scientifiques et l’analyse ne peuvent pas toujours donner les réponses immédiates aux questions posées. La plupart des preuves scientifiques sont indicatives car les processus établis de la science comprennent la vérification et la revérification des résultats, seule façon d’obtenir le niveau de confiance requis. Quel que soit le délai imparti, les réponses fournies par la science ne résolvent pas forcément les problèmes rencontrés. La fiabilité d’une évaluation des risques est influencée par de nombreux facteurs, dont les moins importants ne sont pas l’énonciation correcte des questions posées et le degré relatif des connaissances que possèdent ceux qui évaluent les risques.

L’enquête scientifique et l’interprétation des preuves scientifiques ne sont pas des activités entièrement objectives. Elles font intervenir leurs propres séries de valeurs et de principes. Si nombre d’entre eux sont reconnus et dirigent les processus scientifiques, d’autres sont obscurs ou présumés. Les valeurs scientifiques qui sont au cœur d’une analyse des risques doivent être expliquées, ce qui permet de préciser le positionnement relatif de ces valeurs par rapport à d’autres séries de valeurs qu’elles recoupent (par exemple les valeurs religieuses ou politiques).

Par exemple, les valeurs scientifiques incluent la reconnaissance de l’incertitude inhérente de la preuve et la remise en cause de la véracité d’une connaissance acceptée. Ces principes constituent en fait une partie des atouts que la science apporte à l’élaboration d’une politique de sécurité sanitaire des aliments. Si la nature investigatrice de la science révèle les faiblesses systémiques, ce qui permet d’améliorer constamment les connaissances, elle fournit parallèlement un outil de prévision des conséquences des actions entreprises. La science est le moyen de présenter différentes options de gestion des problèmes aux décisionnaires et à ceux qui sont concernés par les décisions. La science renforce la confiance dans les décisions prises car elle rend ce qui est inconnu plus familier et prévisible.


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