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6. ANALYSE SOCIO-ECONOMIQUE


6.1 Prix du poisson
6.2 Analyse financière des opérations de pêche
6.3 L’emploi dans le secteur des pêches

6.1 Prix du poisson

Le prix du poisson varie sensiblement en fonction de la qualité, de l’époque et de la quantité des mises à terre, ainsi que de la présence d’autres produits alimentaires; toute analyse du prix du poisson est compliquée par la multiplicité des espèces débarquées. Les données relatives à ces prix doivent être traitées avec la plus grande circonscription.

On ne dispose d’aucune étude d’ensemble sur le prix du poisson en Afrique de l’ouest depuis les rapports préparés par Lagoin et Salmon (1967 et 1970). Néanmoins, certaines données éparses, concernant les cours actuellement en vigueur ont été présentées et analysées ici même et nous ont conduit à émettre certaines conclusions provisoires. Dans l’ensemble les informations relatives au prix du poisson pour l’ensemble de la Région sont médiocres et devront être améliorées si l’on souhaite disposer d’éléments plus définitifs, sur les tendances des bénéfices des pêcheurs par rapport à l’indice des prix à la consommation par exemple.

Il ressort à l’évidence des données présentées au tableau 6.1 que le poisson est en général moins coûteux dans la partie nord de la région, où il est plus abondant, que dans la partie méridionale. Il apparaît également que le prix moyen ex-navire du poisson capturé par les navires côtiers est dans l’ensemble supérieur au coût du poisson pris par des pirogues.

Cette différence inhérente au mode de capture s’explique en partie du fait des meilleures facilités de commercialisation du poisson pris par les navires, qui est presque toujours assuré de trouver un acquéreur puisque le navire décharge dans un centre urbain (où existe non seulement un important marché pour les espèces très prisées mais parfois aussi une usine qui transforme le poisson bon marché en farine de poisson). En outre, un certain nombre de bâtiments cherchent précisément à capturer des espèces très prisées qui peuvent parfois être exportées.

Les pêcheurs piroguiers ne sont pas assurés de tirer un bon prix de leur très beau poisson, surtout lorsqu’ils le débarquent dans des zones rurales isolées. Même lorsque la qualité de leurs captures est meilleure que celle des navires, ils obtiennent fréquemment un cours moins intéressant, simplement parce qu’il faut tenir compte du coût de l’acheminement de la marchandise au marché urbain. Dans le cas d’espèces moins prisées, comme la sardinelle, il apparaît que les prix ex-pirogue ne sont pas nécessairement plus faibles que les prix ex - navire car les zones rurales demandent souvent davantage de poisson bon marché que les régions urbaines. Ainsi, au Sénégal, en 1964, le prix moyen ex-navire pour la sardinelle était de 9 FCFA par kilogramme pour un premier prix rural moyen de 12 FCFA. En 1974, en ville la sardinelle (15 FCFA par kilogramme) coûtait encore moins que le prix moyen ex-pirogue pour l’ensemble du pays (20 FCFA par kilogramme).

Au Ghana le prix du poisson a dans l’ensemble connu une hausse rapide au cours des dernières années (tableau 6.2). Entre 1971 et 1974, les cours moyens du poisson de chalut hauturier ont monté de 75 pour cent, alors que le poisson débarqué par les navires côtiers augmentait de 90 pour cent et le poisson pêché par les pirogues, de 133 pour cent. La hausse du poisson capturé par les artisans pêcheurs a cependant été moins rapide que celle de l’indice des prix à la consommation (tableau-annexe II). Cette tendance défavorable des prix vient s’ajouter à la tendance médiocre du poids des mises à terre artisanales, qui ont baissé entre 1971 et 1974 par suite de l’écroulement de la pêcherie de sardinelles; les pêcheurs sont maintenant plue pauvres, en termes financiers, qu’en 1971. Le poisson d’origine hauturière obtient un meilleur prix du fait qu’il est débarqué dans les centres urbains alors que le poisson capturé par les navires côtiers et les pirogues est essentiellement mis à terre dans les zones rurales.

Au Maroc, les prix de gros du poisson sont groupés en trois catégories (tableau 6.3). La première a augmenté de 58 pour cent entre 1969 et 1974, la deuxième, de 51 pour cent et la troisième, de 38 pour cent. Le poisson bon marché de la troisième catégorie est essentiellement capturé par des navires exploités industriellement et les prix des trois catégories ont fait l’objet d’une hausse supérieure à celle de l’indice des prix à la consommation.

Selon un rapport relatif au Cameroun et paru dans la revue “Afrique Agriculture” (1975), le prix du poisson congelé d’importation débarqué surtout par des navires soviétiques est resté stable au cours des dernières années, tandis que le poisson débarqué par des navires battant pavillon camerounais a presque doublé (tableau 6.4). Cette différence est due à l’accroissement du coût d’exploitation des navires camerounais par rapport aux unités soviétiques. Par contre, stockfish a plus que doublé et cette hausse reflète une importante augmentation du coût des opérations de pêche dans l’Atlantique Nord.

Tableau 6.1 Comparaison des prix du poisson débarqué par les pirogues et les navires côtiers (1964)

FCFA par kilogramme

Pays

Pirogue

Navire

Mauritanie

28

27

Sénégal

19

37

Gambie

21

·

Guinée

54

78

Sierra Leone

21

42

Liberia

19

47

Côte-d’Ivoire

27

46

Ghana

27

59

Togo

37

·

Bénin

39

51

Nigeria

27

·

Cameroun

54

39

Guinée équatoriale

36

85

Gabon

37

80

Sao Tomé-et-Principe

34

34

Congo

40

36

Zaïre

30

30

Moyenne

32

49

Source: Lagoin et Salmon (1967 et 1970)
Tableau 6.2 Prix du poisson au Ghana ex-navire (1971-74)

Cedi/tonne

Technique de pêche

Année

1971

1972

1973

1974

Chalutier hauturier

212

306

314

374

Navire côtier

160

140

208

304

Pirogue

134

142

306

313

Source: Département des pêches, Accra
Tableau 6.3 Prix de gros du poisson au Maroc (1969-74)

Catégorie de poisson

Année

1969

1970

1972

1973

1974

Première catégorie

6.31

7.01

8.81

9.64

9.96


Pourcentage d’augmentation


11.1

25.7

9.5

3.3

Deuxième catégorie

2.22

2.31

3.29

3.44

3.35


Pourcentage d’augmentation


4.0

42.4

4.6

-2.6

Troisième catégorie

0.68

0.74

0.75

0.82

0.94


Pourcentage d’augmentation


8.8

1.3

9.3

14.6

Source: Office, National des pêches, Casablanca
Tableau 6.4 Prix du poisson au débarcadère camerounais (1971-74)

FCFA par kilogramme

Type de poisson

Année

1971

1972

1973

1974

Poisson congelé importé (ex-navire)

42.1

40.6

39.1

44.0

Poisson congelé provenant de navires indigènes (ex - navire)

50.3

58.9

86.1

99.5

Stockfish (Prix caf)

239.0

272.0

386.0

520.0

Source: Afrique Agriculture (1975)
On trouvera au tableau 6.5 des données récentes sur les prix pratiqués dans certains pays de la région. Le prix moyen du poisson capturé par des pirogues au Sénégal est peut être gonflé étant donné que 25 pour cent du poids des mises à terre artisanales portent sur des espèces non identifiées auxquelles on a attribué arbitrairement un prix sans doute excessif de 60 FCFA par kilogramme. Le poisson de chalut est dans l’ensemble très cher parce que les chalutiers rejettent en mer les espèces bon marché et ne débarquent que les espèces plus prisées (crevettes, soles et sciaenidés de l’Atlantique). Les différences de prix du poisson ghanéen suivant la méthode de capture montrent combien sont prisées les sardinelles prises par des navires indigènes; la plupart des poissons de chalut (surtout balistes) sont assez bon marché tandis que le poisson congelé d’origine hauturière est relativement cher. Avec ces rares données éparses, il est malheureusement impossible de comparer dans de bonnes conditions les prix en vigueur en 1974 et ceux recueillis par Lagoin et Salmon (op. cit.).

Les données annuelles sur les prix du poisson et des produits alimentaires en Sierra Leone et au Liberia, depuis 1962 et 1964, respectivement, sont présentées dans les tableaux 6.6 et 6.7. En Sierra Leone, les prix ont augmenté entre 1962 et 1973 de 128,8 pour cent pour le riz, 100 pour cent pour le poisson frais, 52,9 pour cent pour le boeuf et 20,7 pour cent seulement pour le bonga séché. Ce produit est fabriqué par des artisans pêcheurs de la Sierra Leone et de la Gambie. Les prix ont également subi une hausse rapide au Liberia et tout particulièrement entre 1972 et 1973: ainsi, le prix du riz montait de 55,8 pour cent. Il est intéressant de noter que le poisson importé (chinchard ou sardines en boîte) a augmenté plus rapidement que la sardinelle d’origine artisanale. On peut déduire de cette faible augmentation du prix de la sardinelle (et du bonga en Sierra Leone) que les revenus des artisans pêcheurs n’ont peut être pas augmenté parallèlement à l’indice des prix à la consommation.

Tableau 6.5 Données sélectives sur les prix moyens du poisson débarqué par des pirogues et des navires (1974)

FCFA par kilogramme

Pays

Pirogues

Chalutiers côtiers

Senneurs

Congelé hauturier

Sénégal

54

204

15

·

Côte-d’Ivoire

···

64

50

·

Ghana

73

62

112

89

Cameroun

···

···

···

99

Source: Estimations du Projet COPACE
Tableau 6.6 Prix de vente au détail des produits alimentaires en Sierra Leone (1962-75)

Cents pour 10 onces

Produit

Année

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1973

1974

1975

Bonga séché

14.3

12.1

10.4

11.1

11.5

10.8

12.9

15.1

16.3

Poisson frais

6.5

5.7

5.8

6.5

7.7

9.6

7.9

10.2

17.8

Riz

5.9

5.9

5.5

5.5

7.1

6.8

6.8

10.4

13.0

Boeuf

27.2

25.8

21.9

21.9

25.0

26.6

35.4

36.5

41.2

Source: Office central de la statistique, Freetown
Tableau 6.7 Prix de vente au détail des produits alimentaires au Liberia (1964-74)

Cents par livre


1964

1968

1972

1973

1974

Augmentation (pour cent) 1964-74

Sardinella eba séchée

35.6

24.9

38.3

42.7

54.2

52.2

Pampano (Trachinotus spp.)

25.8

25.7

20.7

33.8

47.1

82.5

Chinchard

11.8

14.3

18.9

19.3

29.4

149.1

Sciaenidés

13.8

14.0

19.1

22.1

32.2

133.3

Sardines en boîte de 2,5 onces

10.0

10.0

14.6

16.8

22.7

127.0

Viande

60.0

60.0

60.0

69.4

83.9

39.8

Manioc

3.4

3.5

3.2

5.0

7.4

117.6

Riz

12.0

13.4

12.9

20.1

24.9

107.5

Source: Ministère de la planification et des affaires économiques, Monrovia
Tableau 6.8 Prix du poisson congelé importé (1964-75)

dollars E.-U./tonne

Pays

Année

1964

1973

1974

1975

Sierra Leone

138

129

242

···

Liberia

162

342

···

···

Côte-d’Ivoire

···

192

235

339

Ghana

200

·

·

·

Togo

167

168

199

254

Bénin

176

153

···

···

Nigeria

154

346

···

···

Cameroun

···

195

220

···

Zaïre

···

322

300

···

Prix moyen (dollars E.-U./tonne)

166

231

239

296

FCFA/kg

33

54

53

60

Source:
Lagoin et Salmon (1567)
Estimations du projet COPACE
Le prix d’importation du poisson congelé dans les pays d’Afrique de l’Ouest (tableau 6.8) est assez variable compte tenu notamment des différences existant dans les méthodes de rassemblement des données par les autorités douanières. En 1975, le prix caf pour le poisson congelé dans les ports de l’ouest africain a été de l’ordre de 300 dollars E.-U. par tonne. Le chinchard représente sans doute environ 80 pour cent du poids de toutes les importations de poisson congelé.

Tableau 6.9 Prix de gros du poisson congelé importé dans les pays COPACE (1974)

FCFA/kg

Pays

Ville

Nom français

Chinchard

Maquereau espagnol

Sardinelle

Brème de mer

Nom russe

Stavrida

Skumbria

Sardinella

Karas

Sierra Leone

Freetown


86

86

96

106

Liberia

Monrovia


114

114

126

138

Côte-d’Ivoire

Abidjan


87

92

67

134

Togo

Lomé


98

113

95

121

Bénin

Cotonou


123

131

117

148

Nigeria

Lagos


137

···

96

···

Congo

Brazzaville


160

150

·

210

Source: Informations du projet COPACE
Les prix de vente en gros des poissons congelés importés (tableau 6.9) incluent le droit d’importation qui est prélevé dans différents pays. Ils sont généralement les plus faibles à Freetown. Suivent alors Abidjan, où semble-t-il il n’y a pas de droit d’importation sur le poisson (notamment sardinelles) importé du Sénégal et d’autres pays de la CEAO, alors qu’une taxe de 30 pour cent est levée sur le poisson provenant de pays comme l’Union soviétique. Les importateurs togolais payent un droit de 20 pour cent et au Bénin, ce droit est de 40 pour cent. Au Nigeria, où il n’y a pas de taxe d’importation les prix plus élevés s’expliquent par la congestion des ports; en effet les cargos attendent devant le port pendant 4 à, 6 semaines avant de pouvoir décharger. Dans tous les pays, à l’exception de la Sierra Leone et du Liberia, la sardinelle coûte moins que le chinchard. Les prix de gros à Brazzaville (Congo) sont plus élevés compte tenu des frais de transport (utilisation de la voie ferrée, à partir de Pointe-Noire). Le Congo n’importe pas de sardinelles congelées car les mises à terre du pays dépassent ses besoins.

Il est difficile de conclure avec précision sur les marges commerciales. Lagoin et Salmon (1967) ont déterminé que dans de nombreux pays le prix de vente au détail dépasse généralement de 100 pour cent le prix ex-navire; parfois, l’écart va jusqu’à 200 pour cent mais peut aussi être inférieur à 8 pour cent. Le Gall et Petitjean (1975) ont noté que les marges de vente au détail au Congo sont dans l’ensemble de l’ordre de 50 pour cent du prix de gros; néanmoins, pour Sardinella aurita, elles sont de 110 pour cent, ce qui s’explique du fait que le gouvernement contrôle les prix de gros mais non de détail.

Une étude relative au prix du poisson ex-navire a été récemment entreprise à Pointe-Noire (Congo) (Le Gall et Petitjean, 1975). LES auteurs ont pu démontrer que les quantités de sardinelles vivant en bancs pélagiques déchargées peuvent être si importantes que les prix baissent à mesure de l’augmentation des mises à terre. En fait, cette débâcle des prix est si accentuée que les recettes effectives diminuent à mesure de l’augmentation des quantités débarquées. On en conclut notamment que le poisson devrait être congelé et mis en vente progressivement à un prix plus élevé. Contrairement à ce qui se passe pour la sardinelle, les poissons prix au chalut démersal ne s’écroulent pas de façon aussi catastrophique à mesure que les mises à, terre augmentent. Les prix se stabilisent autour de 73 FCFA par kilogramme et les recettes provenant des opérations de pêche augmentent en proportion de l’accroissement des mises à terre.

Dans l’ensemble, les prix en Afrique de l’Ouest ne sont pas affectés par les cours mondiaux étant donné que la plus grosse part du poisson est consommée sur place (y compris les quantités débarquées par les navires soviétiques et est-européens) et ne fait l’objet d’aucun échange international. Néanmoins, les crevettes, les encornets et les seiches, ainsi que le thon et la farine de poisson sont tributaires des cours mondiaux car, ils sont exportés; on trouvera les prix pertinents au tableau 6.10. Dans certains ports de la région comme Nouadhibou, les cours mondiaux affectent sensiblement la valeur des mises à terre, notamment pour ce qui concerne les brèmes de mer et les céphalopodes. Depuis 1973, la farine de poisson a subi une baisse sensible sur les marchés mondiaux, avec des conséquences importantes sur les pêches marocaines et mauritaniennes; certaines usines ont dû fermer. Le prix caf de la farine de poisson en Europe occidentale a été de l’ordre de 250 dollars E.-U./tonne en 1975 et la Banque mondiale a prévu que le cours mondial sera de l’ordre de 380 dollars E.-U./tonne en 1980, aux prix constants de 1974.

6.2 Analyse financière des opérations de pêche

Un certain nombre d’études financières importantes ont porté sur l’aspect théorique de la pêche au Maroc, au Sénégal, en Sierra Leone et au Nigeria. En récapitulant ces études nous espérons que l’on prêtera rapidement une plus grande attention aux données fondamentales, et que cela permettra de mieux comprendre les éléments financiers de l’exploitation des navires de pêche. Ces études devraient permettre de déterminer si les gouvernements doivent ou non encourager et stimuler les investissements dans le secteur des pêches et de la production de poisson.

Tableau 6.10 Prix du poisson et des produits de la pêche faisant l’objet d’échanges internationaux

Dollars E.-U./tonne

Produit

Année

1966

1968

1970

1971

1972

1973

1974

1975

Bonite à ventre rayé

292

288

349

408

446

497

599

519

Crevettes

740

770

1 662

2 125

2 513

3 349

2 557

4 409

Farine de poisson

174

166

203

174

204

527

304

263

Encornets seiches

637

738

1 073

1 544

1 476

1 680

···

···

NB: Prix du thon, qualité extra, ex-navire Californie; prix des crevettes ex-navire Etats-Unis d’Amérique, Atlantique Sud et Golfe, moyenne pondérée toutes tailles (étêtées); farine de poisson (menhaden), Côte Est des Etats-Unis d’Amérique; encornets et seiches frais, prix de vente au détail au Japon.

Sources: National Marine Fisheries Service, Washington, D.C., et rapport FAO citant le Rapport annuel sur les revenus et dépenses des ménages, Bureau du Premier Ministre, Japon.

Le secteur des pêches marocain est très avance par rapport au niveau d’industrialisation des captures et de la transformation du poisson dans les autres pays de la région. La flottille marocaine est presqu’entièrement industrialisée et le gouvernement accorde des subventions et des prêts aux entreprises et aux individus pour améliorer la rentabilité de leur pêche. La firme norvégienne de consultants FIDECO a étudié le développement halieutique du pays (FIDECO, 1974) et analysé les aspects financiers de l’exploitation des senneurs en 1972. La FIDECO a classé les navires de pêche en trois catégories de tonnage: moins de 25 tonneaux de jauge brute, 25 à 40 tonneaux de jauge brute et 40 à 60 tonneaux de jauge brute. Elle a examiné les opérations des navires ayant leur port d’attache à Safi, Essaouira et Agadir et déterminé que l’exploitation des navires de Safi était déficitaire et que celle des navires d’Essaouira et Agadir était à peine rentable. Dans l’ensemble, la rentabilité des navires de 25 à 40 tonneaux de jauge brute est plus élevée que celle des autres catégories. Les pertes subies par les navires de Safi peuvent dans une certaine mesure être absorbées par leurs propriétaires - les conserveries - du fait que ces navires assurent du moins l’approvisionnement des dites. Néanmoins, on devrait pouvoir accroître l’intérêt financier de l’opération en multipliant le nombre de sorties ainsi que le nombre de traits de chalut annuels. Dans l’ensemble, la FIDECO est d’avis qu’il n’est guère possible de réduire les frais de fonctionnement, à moins de réduire les équipages.

Les consultants ont proposé que le tonnage des navires péchant la sardine soit augmenté. Si l’on évalue entre 200 à 300 dirhams (46 à 70 dollars E.-U.) la tonne de sardine, le navire devra prendre entre 3 900 et 5 800 tonnes par an pour rentrer dans ses frais. Les navires pécheraient au sud d’Agadir et captureraient du poisson en priorité pour les conserveries. Il s’ensuit que le cargage, la réfrigération du poisson immédiatement après la pêche (surtout mise en caisse et en glace) et la grande fréquence des retours au port pour débarquer sont des conditions impérieuses pour cette opération. Les dépenses en capital sont réduites par la prime d’investissement, qui représente 20 pour cent du coût en capital de tout nouveau navire, et les recettes sont encouragées par une subvention gouvernementale de 8 pour cent, consentie pour accroître les prix au débarquement.

La pêche artisanale est extrêmement active au Sénégal, tandis que le secteur industriel est très diversifié; pour autant que l’on sache, on n’a jamais disposé d’une analyse détaillée du budget de fonctionnement des navires de pêche sénégalais. Néanmoins, la FAO a ventilé les recettes et dépenses afférentes à un navire péchant à la ligne (tableau 6.13) et à un cargo congélateur (tableau 6.14). Avec l’assistance financière du Gouvernement français, des navires pêchant à la ligne à main ont été mis en service au cours des années soixante. Il est prévu de poursuivre ce programme, à bref délai, avec un navire de tonnage analogue et dans des conditions de souplesse telles qu’il pourrait pêcher au chalut ou à la senne coulissante. Les cargos congélateurs jouent un rôle de plus en plus important à mesure que le commerce du poisson congelé prend de l’extension en Afrique de l’Ouest. Etant donné que le Sénégal se propose d’accroître sensiblement ses exportations de poisson congelé, il semblerait logique que le pays étudie la possibilité d’acquérir des cargos congélateurs.

Tableau 6.11 Récapitulation des opérations des senneurs marocains

Caractéristiques des opérations: dans l’ensemble, 35 à 45 TJB, avec moteur de 150-350 cv, capturant 5 à 6 tonnes par sortie; 175 sorties par an; 50 pour cent de la pêche vendue aux conserveries à 400 DH (93 dollars E.-U.) par tonne; 50 pour cent aux usines de fabrication de farine de poisson à 200 DH (46 dollars E.-U.) par tonne.

milliers de dollars E.-U.


Tonnage (Tonneaux de jauge brute)

-25

25-40

40-60

Dépenses en capital

35

46

53

Revenu


Agadir

40

56

59

Essaouira

·

56

·

Safi

23

35

43

Frais de fonctionnement

14

16

20

Source: FIDECO (1974)
Tableau 6.12 Spécifications et coûts relatifs à l’exploitation de senneurs telle que prévue par la FIDECO


Unité


Longueur

mètres

28.5

Moteur

puissance (cv)

600

Captures annuelles

tonnes

3 900 à 5 800

Dépenses en capital

milliers de dollars E.-U.

651

Frais de fonctionnement

milliers de dollars E.-U.

126

Ventes

milliers de dollars E.-U.

249

Source: cf. Tableau 6.11
Des consultants italiens (PROPESCA, 1974) ainsi qu’une équipe FAO/NORAD (FAO, 1975c) ont analysé en détail les opérations des navires de pêche de la Sierra Leone; on trouvera au tableau 6.15 une récapitulation de leurs hypothèses de base. L’analyse du Groupe FAO/NORAD a porté sur les opérations de navires de plus de cinq ans; l’équipe n’a pas évalué la possibilité de recommander l’utilisation de navires plus onéreux, de construction récente. Les hypothèses de travail de la PROPESCA, relatives aux embarcations artisanales et aux chalutiers/senneurs sont les suivantes: il s’agirait de navires de construction locale sauf le senneur, qui a une coque métallique. L’une et l’autre études concluent que l’on pourrait accroître le nombre de navires de pêche de différentes dimensions affectés à l’exploitation de diverses espèces. En fait, les résultats des deux études justifient l’intervention du gouvernement auprès des banques de développement pour demander des fonda destinés à être investis dans le secteur des pêches de la Sierra Leone.

Tableau 6.13 Frais de fonctionnement, et exploitation d’un navire sénégalais péchant à la ligne à main



milliers de FCFA

Spécifications et dépenses en capital:


Longueur: 16 mètres; équipages 10 hommes; moteur: 70 cv



Coût


19 845,0

Frais de fonctionnement:


Carburant, glace, entretien, etc.

3 800,0


Equipage

4 800,0


Frais d’armement

3 600,0




12 200,0

Recettes:




120 tonnes/an × 120 FCFA/kg


14 400,0

Source: FAO (1975b)
Tableau 6.14 Coûts relatifs à un cargo réfrigéré ayant son port d’attache au Sénégal



milliers de dollars E.-U.

Spécifications et dépenses en capital:


Longueur: 277 pieds; tonnage réel: 1 950 tonnes; équipage: 16 hommes; nombre de sorties: 24 (aller-retour) par an, 250 journées de navigation



Coût


6 000,0

Frais de fonctionnement:


Combustible, entretien, etc.

665,0


Equipage

252,0




917,0

Recettes:


Sur la base de 43 000 tonnes de sardinelles à 49 dollars E.-U,/tonne et pas de fret au retour


2 107,0

Sur la base de 43 000 tonnes de sardinelles et 25 000 tonnes de thon au retour, à 31 dollars E.-U./tonne


2 108,0

Source: FAO (1974a)
Tableau 6.15 Principales caractéristiques des opérations de pêche en Sierra Leone


Unités

Artisanales

Chalutiers/ senneurs

Senneurs

Senneurs

Thoniers (ligne à main)

Chalutiers congélateurs

Longueur

Pieds

27

40

70

62

···

···

Moteur

Puissance (cv)

30

100

250

420

200

1 000

Temps de pêche

Jours

200

200

200

300

···

200

Captures/jour

Tonnes

0.125

1.2

17.5

14

···

8.5

Captures/an

Tonnes

25

240

3 500

4 200

460

1 715

Valeur par tonne

$ E.-U.

304

152

46

50

400

350

Valeur des captures

Milliers de dollars E.-U.

7.6

36.5

162

210.6

184

600

Dépenses en capital

Milliers de dollars E.-U.

8.1

33.9

4001/

269.1

2001/

1 0001/

Frais de fonctionnement

Milliers de dollars E.-U.

2.3

20.5

108

103.2

155

430

Source


PROPESCA

PROPESCA

FAO

PROPESCA

FAO

FAO

1/ Navires de 5 ans

Sources: PROPESCA (1974) et FAO (1975c)

Les services de la planification du Département fédéral des pêches nigérianes ont analysé le budget de nombreuses opérations de pêche, en fonction d’hypothèses variées. Ces analyses budgétaires ont été réalisées pour faciliter la prise de décisions relatives aux investissements dans le cadre du troisième Plan national de développement (1975-80). Le budget intéressant plus particulièrement les programmes de développement artisanal est reproduit au tableau 6.16 et les hypothèses retenues pourraient inspirer des hypothèses analogues dans d’autres pays de la zone COPACE, notamment lorsque ces pays utilisent des pirogues semblables à celles du Nigeria. L’analyse préliminaire des hypothèses retenues montre toutefois que les taux de capture prévus pourraient être trop élevés et peu réalistes.

Tous les pêcheurs ont récemment été gravement atteints par la spirale inflationniste des prix du carburant et des engins. Les hausses de prix les plus dramatiques ont affecté les moteurs hors-bord, qui ont augmenté de 36 pour cent entre 1973 et 1974 et de 31 pour cent entre 1974 et 1975. Le coût des filets et cordages a également monté en flêche de façon moins dramatique cependant. Ces augmentations constantes des coûts, ainsi que les fluctuations du prix du poisson, influencent sensiblement la capacité des pêcheurs à se procurer un revenu égal ou supérieur à celui que leur assureraient d’autres occupations. Elles sont également déterminantes du rapport des investissements dans le secteur des pêches et de son aptitude à attirer des capitaux.

Tableau 6.16 Opérations d’une pirogue péchant au filet maillant (filet fixe) et au filet encerclant dans les eaux côtières du Nigeria



naira

Dépenses en capital


Pirogues (8 à 10 mètres)

600


Hors-bords (puissance: 33 cv)

800


Filet encerclant et filets maillants

1 920


Total


3 320

8 pêcheurs travaillant au filet encerclant



3 pêcheurs au filet maillant



Frais de fonctionnement:


Main-d’oeuvre à raison de 1 N/homme/jour


Pêche au filet encerclant (80 jours)

640


Pêche au filet fixe (120 jours)

360


Carburant, à raison de 56, 3 litres/jour à 8,9 kobo/litre

1 000


Huile de graissage 37,5 kg/jour

75


Entretien,

moteur

100


pirogue

25


engins

100


Total


2300

Bénéfices:


Bonga, 7 600 unités (2,16 tonnes) par jour, pendant 80 jours, à raison de 5 N pour 200 unités (environ 125 livres ou 57 kilogrammes)

15 200


Divers (6,4 tonnes/an, à raison de N 440/t)

2 816


Total


18 016

Subsistance des pêcheurs pendant les jours d’inactivité


Pêcheurs travaillant au filet encerclant - 285 jours à raison de N 1/jour

2 280


Pêcheurs travaillant au filet maillant - 245 jours à raison de N 1/jour

735


Source: Département fédéral des pêches, Lagos

6.3 L’emploi dans le secteur des pêches

Les données relatives à l’emploi dans la pêche proprement dite, la transformation, la distribution et la commercialisation du poisson revêtent une importance particulière quant au niveau de développement halieutique d’un pays donné et à la contribution du secteur des pêches au développement socio-économique de ce pays. Cependant, on ne dispose que rarement, pour les pays COPACE, de données sur l’emploi telles que l’on puisse en tirer des conclusions satisfaisantes et des enseignements.

Dans l’ensemble, il est assez facile d’évaluer le nombre de personnes engagées dans les opérations de pêche en se fondant sur le nombre de navires et de pirogues ayant leur port d’attache dans le pays, qu’il suffit alors de multiplier par le nombre moyen d’hommes d’équipage pour chaque unité. En fait, on éprouve quelque difficulté à déterminer combien de navires fonctionnent à tout moment et combien de membres de l’équipage pêchent à plein temps ou à temps partiel; enfin, un certain nombre de pêcheurs à plein temps ne se servent que de sennes de plage et de pièges et n’utilisent jamais de pirogues.

Tableau 6.17 L’emploi dans les pêches maritimes

Pays

Affectés à la pêche

Affectés à la transformation, à la commercialisation, etc.

Maroc

15 000

20 000

Mauritanie

2 500

2 000

Sénégal

30 000

3 000

Gambie

1 500

···

Cap-Vert

1 500

···

Guinée

5 000

···

Sierra Leone

12 000

···

Liberia

3 000

1 000

Côte-d’Ivoire

16 000

···

Ghana

66 000

···

Togo

4 000

···

Bénin

3 000

2 500

Nigeria

61 000

···

Cameroun

12 000

···

Guinée équatoriale

5 000

500

Gabon

1 500

500

Sao Tomé-et-Principe

2 800

···

Congo

1 000

···

Zaïre

500

···

Sources:
Lagoin et Salmon (1967 et 1970)
FAO, Profils de la pêche par pays
Estimations du projet COPACE
Evaluer le nombre de personnes occupées à transformer, distribuer et commercialiser du poisson est encore plus difficile (tableau 6.17). Les femmes (mammies) contrôlent étroitement la vente au détail de poisson dans de nombreux pays et ces tâches commerciales peuvent occuper un nombre variable de membres de la famille d’une femme suivant l’heure de la journée, le jour de la semaine ou là saison. Le poisson est souvent fumé avant d’être vendu. Au Nigeria, on estime que dix personnes sont employées à terre dans le secteur des pêches, pour chaque homme monté sur une pirogue ou un navire; ce rapport n’est pas nécessairement caractéristique de tous les pays de l’Afrique de l’Ouest.

A mesure que la pression monte pour accroître les possibilités d’emploi dans un certain nombre de pays, il devient nécessaire d’examiner le rapport existant entre le capital utilisé et le nombre d’emplois créés. On trouvera aux tableaux 6.18 et 6.19 respectivement, un état des capitaux normalement investis dans le secteur des pêches et du nombre d’emplois créés par ces investissements. On constate qu’en termes d’emplois créés, l’investissement dans des pirogues aux fins de la pêche artisanale est de loin la façon la plus rentable, suivi par le financement de navires pêchant le thon à la ligne à main et de petites unités de pêche polyvalentes. Les investissements dans les gros senneurs ou les chalutiers constituent la méthode la plus onéreuse à cet égard.

Tableau 6.18 Indications sur les investissements et l’emploi dans les unités de pêche

Unité

Longueur (mètres)

Tonnage TJB

Puissance du moteur (cv)

Investissement (milliers de dollars E.-U)

Emploi

Milliers de dollars E.-U. par emploi

Pirogues

8

···

20

2.5

5

0.5

Navires polyvalents

9

···

30

20.0

9

2.2

Navires gréés pour la pêche à la ligne à main

16

···

70

90.0

10

9.0

Chalutiers

15

45

200

120.0

10

12.0

20

90

365

200.0

15

13.3

25

120

450

300.0

20

15.0

75

2 000

3 500

6 000.0

60

100.0

Senneurs

18

80

210

200.0

14

14.3

28

150

600

667.8

20

33.3

Thoniers (ligne à main)

16

50

200

200.0

23

8.7

Source: Estimations du projet COPACE
Le rapport entre les investissements en capital et les tendances de l’emploi dans les activités de transformation et connexes situées à terre est encore plus difficile à établir (tableau 6.19). Cela est dû notamment au fait que le coût de la construction des bâtiments est parfois extrêmement faible, voire nul si l’on se contente d’adapter des locaux inutilisés pour en faire une usine. Certaines formes de transformation emploient une main-d’oeuvre nombreuse: la mise en boîtes, le traitement des crevettes, le filetage du poisson, le nettoyage des céphalopodes; d’autres ne demandent que peu de main-d’oeuvre fabrication de la farine de poisson et de la glace; usines de congélation en vrac.

On ne devrait utiliser ces analyses qu’avec une certaine circonspection, car il existe un nombre infini de combinaisons investissements/création d’emplois. En effet, le faible taux d’emploi à bord des navires est parfois contrebalancé par l’utilisation d’une main d’oeuvre nombreuse dans les activités de transformation à terre et les opérations commerciales. D’autre part, ce type d’analyse ne tient pas compte de la valeur ajoutée engendrée par chaque type d’investissement.

Il conviendrait d’examiner ultérieurement les secteurs ci-après pour évaluer le rôle des stratégies gouvernementales de développement en matière d’emploi: (i) l’effet de la motorisation des pirogues sur l’emploi (opérations de pêche proprement dites ou l’accroissement des possibilités d’emploi dans les réseaux de transformation et de commercialisation destinés à écouler le surcroît de captures), (ii) les différentes options possibles pour accroître l’utilisation de main - d’oeuvre dans le secteur des pêches, en zone rurale et/ou urbaine et (iii) le rôle des subventions et/ou augmentations des prix dans les créations de postes de travail.

Tableau 6.19 Indications sur les investissements et l’emploi dans les usines de transformation


Tonnes de matières premières par jour

Investissements (milliers de dollars)

Emplois (nombre)

Milliers de dollars par emploi

Filets de poisson, congélation et entreposage réfrigéré

5

80.0

40

2.0

Crevettes, congélation et entreposage réfrigéré

1

60.0

25

2.4

Mise en boîtes

10

100.0

100

1.0

Fabrication de farine de poisson

20

100.0

20

5.0

50

400.0

25

16.0

100

700.0

30

23.3

Usines à glace

20

120.0

6

20.0

100

500.0

10

50.0

Source: Estimations du projet COPACE


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