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La dégradation des sols [planche photographique 3]

La dégradation des sols peut aussi avoir diverses origines: salinisation, engorgement, compaction par la motorisation, minéralisation des matières organiques et squelettisation par érosion sélective. En zone tropicale humide, alors que l'érosion comprend trois phases (arrachement, transport et sédimentation), la dégradation des terres cultivées ne concerne que la déstabilisation de la structure et de la macroporosité du sol sans transport de particules à longue distance. Elle provient essentiellement de deux processus:

- La minéralisation des matières organiques du sol (d'autant plus active que le climat est chaud et humide) et l'exportation minérale par les cultures (non compensée par des apports de fumure) qui va entraîner la baisse de l'activité de la microfaune et de la mésofaune, responsables de la macroporosité.

- La squelettisation ou l'enrichissement en sable des horizons de surface par érosion sélective des particules fines, des matières organiques ou des nutriments, suite à la battance des pluies qui tasse le sol, casse les mottes, arrache au passage des particules qui vont former alentour des pellicules de battance et des croûtes de sédimentation favorisant le ruissellement.

Un exemple de la chaîne de la dégradation des terres tropicales est donné à la figure 2.

Sous les forêts tropicales, les sols sont très bien protégés de l'énergie solaire et pluviale, d'une part, grâce à la canopée (850 t/ha de biomasse) qui tempère les écarts de température et d'autre part, grâce au sous-étage et en particulier à la litière (de 9 à 15 t/ha/an de matière organique redistribuée toute l'année), qui nourrit la mésofaune et recycle rapidement les nutriments ("turn over"). Les racines sont très nombreuses dans l'horizon humifère et jusqu'au contact avec la litière. Elles limitent les pertes en nutriments par drainage et par ruissellement. Une faible proportion de racines s'enfonce à grande profondeur, procurant de l'eau et des nutriments aux époques où le sol superficiel est sec. Peu de ruissellement (1 à 2 %), 50 % d'évapotranspiration et autant de drainage, entraînent la formation de sols homogènes profonds, plus acides en surface qu'en profondeur. La vigueur de la forêt (avec des arbres dominant à plus de 35 m de haut) peut faire illusion quant à la fertilité des sols (ferrallitiques) qui la portent. En réalité, la forêt tropicale recycle perpétuellement ses résidus et récupère en profondeur les nutriments lixiviés par les eaux de drainage ou libérés par l'altération profonde des roches et des minéraux: c'est la remontée biologique (Roose, 1980).

La savane compense déjà nettement moins bien les variations d'énergie. La biomasse (10 à 100 t/ha) est beaucoup moins importante et la litière (2 à 8 t/ha/an) brûle au passage fréquent des feux de brousse, laissant le sol nu pour affronter les premiers orages, brefs mais très agressifs: il en résulte un ruissellement plus abondant que sous forêt, surtout en cas de feux tardifs (Roose, 1979).

Plus le climat est chaud et sec, plus les termites se substituent aux vers de terre mais le bilan de leurs activités de creusement de galeries et d'enfouissement des matières organiques à l'abri des feux est moins bénéfique que celui des vers (Roose, 1975). Le ruissellement et l'évapotranspiration étant plus forts (à cause des croûtes de battance) et les pluies moins abondantes, le front d'humectation de l'eau pénètre moins profondément dans le sol et dépose des particules fines arrachées en surface et le fer complexé aux matières organiques. Il s'agit des sols ferrugineux tropicaux lessivés. Les horizons sont plus contrastés, le sol moins homogène. Les racines s'enfoncent régulièrement jusque dans l'horizon d'accumulation, mais beaucoup moins profondément que sous forêt.

Sous culture, comment évolue la situation après défrichement de la forêt ou de la savane ?

Au niveau du couvert végétal, on observe une simplification de l'écosystème (plus de 200 espèces d'arbres vivent à l'hectare sous forêt, moins de 25 sous savane et 2 à 4 plantes en cultures associées dans le meilleur des cas). La biomasse (1 à 8 t/ha) diminue ainsi que l'enracinement, souvent gêné par les techniques culturales (croûtes de battance et fond de labour). La couverture du sol est réduite dans le temps (cycle de 4 à 6 mois) et protège mal la surface du sol contre les rayons du soleil (les températures extrêmes augmentent) et contre la battance des pluies (formation de croûtes de battance et d'un fort ruissellement).

Au niveau du sol, le climat est plus chaud, plus sec sous culture, et l'énergie est moins bien amortie que sous forêt:

- la litière est très réduite, sauf en cas de plantes de couverture,
- le taux de matières organiques et l'activité de la microflore et de la mésofaune diminuent,
- la macroporosité s'effondre au bout de quelques années, la capacité d'infiltration diminue,
- le sol devient plus compact et accuse les discontinuités spatiales: pellicule de battance et fond de labour.

On comprend dès lors que la mise en culture de friches soit une véritable catastrophe qui remet en cause l'équilibre du système sol. Les fuites d'éléments nutritifs s'accélèrent, les apports compensatoires diminuent, la fertilité physique et chimique de la terre s'effondre après quelques années de culture intensive. On connaît de nombreux exemples d'échec de culture "moderne" comme celle de la Compagnie Générale des Oléagineux Tropicaux, en Casamance vers les années 50 (Charreau, Fauck, Thomann, 1970; Roose, 1967).

Le ruissellement et l'érosion apparaissent alors clairement comme un signal d'alarme: le système d'exploitation n'est pas en équilibre avec le milieu. Il va falloir restaurer la fertilité des sols, soit par une longue jachère forestière (20 à 30 ans) soit par des interventions vigoureuses pour rétablir la macroporosité (travail du sol), la matière organique, la biomasse fermentée nécessaire pour la vivifier (fumier ou compost), les amendements indispensables pour renforcer la structure et améliorer le pH. En réalité, il faut encore inventer des systèmes progressifs de défrichement et des systèmes de production intensifs durables et équilibrés plus productifs que les systèmes traditionnels actuellement en place.

Les termes du bilan hydrique

La pluie et les apports occultes (rosée, brume: quelques dizaines à 150 mm par an) sont très variables dans l'espace en fonction de l'altitude, de la distance à la mer, de l'orientation des versants par rapport aux vents humides qui apportent la pluie.

Il faut enfin définir les différents termes du bilan hydrique (figure 3):

Le ruissellement superficiel est l'excès de pluie qui n'arrive pas à s'infiltrer dans le sol, coule à sa surface, s'organise en filets et rejoint rapidement la rivière où il provoque des débits de crue élevés après des temps de réponse relativement courts (de l'ordre d'une demi-heure pour des bassins d'un km2 ).

Le ruissellement hypodermique (interflow) est déjà plus lent car il chemine dans les horizons superficiels du sol souvent beaucoup plus poreux que les horizons minéraux profonds (temps de réponse de quelques heures sur un bassin de 1 km2 ).

Enfin, les nappes temporaires et les nappes phréatiques (pérennes) entretiennent le débit de base des rivières grâce à un écoulement beaucoup plus lent: temps de réponse de plusieurs jours (sur un bassin de plusieurs km2 ), voire quelques mois sur les plus grands bassins.

En conclusion, l'érosion est un ensemble de processus variables dans le temps et dans l'espace, en fonction des conditions écologiques et des mauvaises conditions de gestion de la terre par l'homme. La lutte antiérosive intéresse divers acteurs dont les intérêts ne sont pas forcément compatibles. Il va donc falloir définir clairement les objectifs prioritaires des projets de lutte antiérosive et choisir pour chaque situation, les méthodes les plus efficaces, soit pour conserver ou pour restaurer la fertilité et la productivité des terres paysannes, soit pour gérer les sédiments et améliorer la qualité des eaux qui intéressent particulièrement les citadins, les industriels et les sociétés d'irrigation.

FIGURE 3 :

Bilan hydrique (d'après Roose, 1980)

Chapitre 2: Evolution historique des stratégies de lutte antiérosive


L'érosion des sols et la densité de la population
Les stratégies traditionnelles de lutte antiérosive
Les stratégies modernes d'équipement hydraulique des campagnes
La gestion conservatoire de l'eau, de la biomasse et de la fertilité des sols (GCES)


L'érosion est un vieux problème. Dès que les terres émergent de l'océan, elles sont attaquées par l'énergie du vent, des vagues et des pluies. L'homme s'est donc entraîné à en réduire les effets néfastes.

Le développement de la production agricole entraîne une augmentation des risques de dégradation des terres:

- soit par l'extension des surfaces à des terres neuves qui s'avèrent fragiles et s'épuisent au bout de quelques années de culture par minéralisation des matières organiques et exportation des nutriments sans restitution suffisante,

- soit par l'intensification et un usage inapproprié des intrants:

• la fertilisation minérale intensive peut entraîner l'acidification des sols et la pollution des eaux (surtout si les apports sont déséquilibrés par rapport aux besoins des cultures et à la capacité de stockage par le sol),

• l'irrigation diminue la stabilité de la structure des sols ou entraîne leur salinisation (en milieu aride),

• la mécanisation, et surtout la motorisation, accélèrent la minéralisation des matières organiques du sol, la dégradation de la structure, la compaction des horizons profonds et l'accentuation des discontinuités hydrauliques (chute brutale de la capacité d'infiltration au fond du labour, même en l'absence de semelle).

Si la mise en culture augmente généralement les risques de dégradation du sol, les sociétés rurales tentent d'élaborer progressivement des méthodes permettant de maintenir à long terme la productivité des terres (amendements organiques ou calcaire, drainage, cultures associées). Mais lorsque les besoins évoluent trop vite, se développe une crise à laquelle la société rurale ne pourra répondre à temps. C'est justement le rôle de l'Etat que d'aider cette société à surmonter cette crise par des aides techniques (référentiels) et financières (subsides).

La dégradation des sols par érosion, acidification ou salinisation est probablement l'une des multiples causes qui ont entraîné la décadence de civilisations anciennes dès que la concentration des populations dans les campagnes et dans les villes entraîne une pression économique trop forte sur la production des campagnes (ex. la France du XIIe siècle,

FIGURE 4 :

Relation entre la densité de la population, l'érosion, le système de culture, le système d'élevage et la gestion de la fertilité

Densité pop. < 40

100 à 400

400 à 800

> 800 hab/km2

Système de culture




- cueillette
- culture itinérante sur brûlis
- culture de racines qq céréales

culture extensive
- racines
- céréales mil - sorgho
- arachide

culture intensive
- céréales
- manioc, igname, patate
- arachide, soja
- bananier

jardin multiétagé
- arbres fruitiers
- bananiers
- racines
- peu de céréales
- haricots, soja

Système d'élevage




élevage:
- peu développé
- qq poulets + cabris
- séparé

- troupeau villageois sur parcours extensifs
- retour la nuit au parc

- petit bétail: à l'étable, au piquet
+ parcours 1/2 journée

- petit bétail + parc
- stabulation quasi permanente
- eau à l'étable
- cultures fourragères haies vives

Gestion de la fertilité




- brève durée des rotations culturales
- puis jachère arbustive longue
- cendres

- peu de poudrette (600 kg/vache/4 ha)
- peu d'engrais minéral
- durée des cultures ­
- durée des jachères ¯

- poudrette + compost
- plus de NPK
- jachères courtes + parfois légumineuses
- gestion des adventices

- culture continue
. fumier ou compost
+ NPK
+ Ca Mg CO3 si pH<5
+ gestion des adventices et des légumineuses

Gestion des arbres




- exploitation
- puis jachère

- défrichement accéléré
- bois de village
- rares arbres fruitiers

- défrichement
- haies vives
- arbres en clôture
- fruitiers

jardin à 3 étages :
- arbres forestiers
- arbres fruitiers
- culture associées

Déjà en 1944, le géographe Harroy avait bien compris pourquoi "l'Afrique est une terre qui meurt". Elle meurt sous l'influence des méthodes déséquilibrantes des systèmes coloniaux qui intensifient l'exploitation des sols, accélèrent l'exportation des nutriments assimilables et la minéralisation des matières organiques, et repoussent les indigènes sur les terres les moins riches et les plus fragiles, réduisant la durée de la jachère. Il proposait une politique en trois points:

- la protection intégrale des parcs nationaux pour protéger les écosystèmes naturels,
- les travaux antiérosifs du type "terrasses", banquettes ou fossés aveugles,
- des recherches sur les techniques culturales et les systèmes de production équilibrés associant l'élevage, la forêt et l'agriculture, l'agroforesterie.

L'érosion des sols et la densité de la population

L'érosion accélérée et le ruissellement excessif sont liés à un certain mode de développement déséquilibrant le paysage: défrichement de zones fragiles, dénudation et tassement par le surpâturage, épuisement du sol par les cultures intensives non compensé par les apports de matières organiques et de nutriments. Si c'est bien l'homme qui augmente les risques d'érosion par des techniques d'exploitation maladroites, alors on peut espérer renverser le sens actuel de l'évolution: améliorer l'infiltration pour produire plus de biomasse, augmenter la couverture végétale du sol pour restituer plus de résidus organiques au sol et par là, réduire le ruissellement, l'érosion et le drainage qui amènent rapidement les sols tropicaux à l'épuisement. Dans ce contexte, la conservation des sols n'est plus le principal objectif brandi par les aménagistes, mais seulement un volet du "paquet technologique" permettant l'intensification de la production agricole indispensable pour faire face au principal défi de ce siècle: doubler la production tous les dix ans pour rattraper le rythme de la croissance démographique.

Certains auteurs prétendent que l'érosion augmente en fonction de la densité de la population (figure 4). Il est vrai que dans un système agraire donné, si la population dépasse certains seuils, les terres viennent à manquer et les mécanismes de restauration des sols se grippent (Pieri, 1989). Ainsi, en zone soudano-sahélienne, dès que la population dépasse 20 à 40 habitants/km2 , le temps de jachère diminue et devient inefficace: on parle d'une zone dense dégradée dès que la population atteint une centaine d'habitants par km2 . Les adultes sont alors obligés de migrer en saison sèche pour trouver un complément de ressources pour assurer la subsistance de leur famille (ex. Burkina Faso).

Curieusement, dans d'autres zones tropicales plus humides, à deux saisons culturales ou sur des sols plus riches, volcaniques, par exemple, comme à Java, on ne parle de forte densité qu'au-delà de 250 à 750 hab/km2 . Les cas du Rwanda et du Burundi sont flagrants; malgré des sols très acides et des pentes dépassant 30 à 80 %, les familles se débrouillent mieux qu'au Sahel avec un seul ha à condition d'intensifier le système de production, d'associer des cultures, d'introduire des arbres et de gérer les animaux en stabulation, de recycler rapidement tous les résidus et d'arrêter l'hémorragie de nutriments par érosion et drainage.

On peut donc penser que le milieu se dégrade avec la densité de population jusqu'à atteindre certains seuils au-delà desquels les paysans sont contraints de changer de système de production. C'est le cas des zones soudano-sahéliennes sous l'impact de la longue sécheresse de ces vingt dernières années (la population n'augmente presque plus à cause de l'émigration). Les paysans du Yatenga acceptent d'investir 30 à 100 jours par an pour installer des structures antiérosives qui leur permettent de mieux gérer l'eau et la fertilité de leurs parcelles: cordons de pierres, mares, lignes d'arbres ou bandes enherbées, reconstitution des parcours et des parcs arborés sur des blocs cultivés (Roose et Rodriguez, 1990; Roose, Dugué et Rodriguez, 1992).

Les stratégies traditionnelles de lutte antiérosive

Depuis 7.000 ans, l'homme a accumulé les traces de sa lutte contre l'érosion, la dégradation des sols et le ruissellement, en vue d'améliorer la gestion de l'eau et la fertilité des sols (Lowdermilk, 1953). On constate que les méthodes traditionnelles sont strictement liées aux conditions socio-économiques.

La culture itinérante (shifting cultivation) est la plus ancienne stratégie utilisée sur tous les continents à une époque où la population est peu dense (20 à 40 habitants/km2 en fonction de la richesse du sol et de l'humidité du climat). Après défrichement, on cultive sur les cendres et on abandonne la terre dès qu'elle ne rend plus assez pour le travail fourni (envahissement des adventices et perte des nutriments les plus assimilables). Pour que le système reste équilibré il faut une réserve de terre considérable (environ 20 fois la surface cultivée). Si la pression démographique augmente, le temps de jachère diminue et le sol se dégrade progressivement. Ces stratégies peuvent être bien adaptées dans les zones peu peuplées, sur les sols profonds recevant plus de 600 mm de pluie par an.

A l'opposé, les gradins en courbe de niveaux (bench terracing) ou les terrasses méditerranéennes irriguées apparaissent dès lors que la population est dense, que la surface cultivable est rare (hormis en montagne) et que le travail manuel est bon marché. Ces stratégies, qui demandent 600 à 1 200 jours de travail par hectare pour construire et entretenir ces structures, puis un immense effort pour restaurer la fertilité des sols, ne sont acceptées par les paysans que dans les cas où ils n'ont pas d'autre choix pour subsister, ou produire des cultures rentables. C'est le cas des Kirdis du Nord Cameroun, résistant à l'emprise de l'Islam, ou encore des Incas au Pérou, dans la région de Machu Pichu, qui, au 15ème siècle, ont construit des terrasses en gradins remarquables pour se défendre contre les incursions des peuples de l'Amazonie ... puis des Espagnols (Guide Bleu du Pérou, Hachette: 246-247).

Les billons, les cultures associées et l'agroforesterie. Dans les zones forestières humides et volcaniques du Sud-Ouest du Cameroun, les Bamileke ont réussi à assurer un équilibre raisonnable du milieu malgré une forte population (150 à 600 hab/km2 ) en combinant les cultures associées couvrant toute l'année de gros billons, à divers systèmes agro-forestiers.

Les alignements de pierres et les murettes combinés à l'entretien de la fertilité par la fumure organique. Comme d'autres ethnies en Afrique, les Dogons du Mali se sont jadis retranchés dans les falaises gréseuses de Bandiagara pour résister à l'influence musulmane. Pour survivre, ils ont dû développer toute une série de méthodes conservatoires:

- petits champs entourés de blocs de grès piégeant le sable en saison sèche et le ruissellement lors des pluies,

- murettes de pierres et remontée de terre sableuse depuis la plaine pour créer des sols sur les dalles gréseuses servant d'impluvium,

- structures en nid d'abeille servant d'unité de production pour des oignons irrigués à l'aide de calebasses,

- paillage et compostage des résidus de culture, des déchets familiaux et déjections animales pour entretenir les jardins familiaux en milieux arides et sableux.

Le bocage ou l'association étroite entre les cultures, l'élevage et l'arboriculture. L'Europe a déjà connu plusieurs crises d'érosion. La plus connue se situe au Moyen-âge, lorsque sous la pression démographique, il fallut abandonner la jachère naturelle. Le travail du sol et l'enfouissement du fumier furent introduits pour restaurer plus vite la fertilité chimique et physique des sols. L'élevage a été associé à la culture et les paysages ont été cloisonnés par une succession de bosquets, de petits champs et de prairies clôturées par des haies vives.

Mais actuellement, la mécanisation et l'industrialisation de l'agriculture, la crise économique et la désintégration des sociétés traditionnelles entraînent l'abandon de ces méthodes décrites avec admiration par des géographes et des ethnologues, mais méprisées par les experts "modernes" en conservation des sols qui les considèrent comme insuffisantes pour résoudre les problèmes d'aménagement des grands bassins versants (Critchley, Reij et Seznec, 1992).

Il faudrait, sans doute, reconsidérer ces positions et, sans vouloir idéaliser les stratégies traditionnelles, analyser leur aire de répartition, les conditions de leur fonctionnement, leur efficacité, leur coût, leur dynamisme actuel, et surtout développer les possibilités de leur amélioration.


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