Page précédente Table des matières Page suivante


CONSÉQUENCES DE L’INSCRIPTION SUR LES LISTES D’UNE ESPÈCE AQUATIQUE FAISANT L’OBJET D’UNE EXPLOITATION COMMERCIALE


Coûts administratifs

69. Pour chaque Partie, les implications financières d’une inscription dépendent de la mesure dans laquelle cette Partie se livre au commerce de l’espèce inscrite, comme pays exportateur, réexportateur ou importateur. Les coûts sont avant tout liés aux inscriptions dans les Annexes II et III puisque le commerce des espèces inscrites à l’Annexe I s’inscrit dans des limites très précises, même si la répression du commerce illicite peut exiger l’emploi de certaines ressources.

70. Il est difficile de définir précisément les coûts de la mise en application d’une inscription à la CITES puisqu’ils sont généralement absorbés par les pays intéressés dans le cadre de leurs programmes de gestion des ressources nationales et de lutte contre la fraude. Les principaux coûts directement liés à la mise en application d’une inscription peuvent cependant être séparés en frais de démarrage et en coûts de fonctionnement.

71. Les frais de démarrage peuvent inclure la formation et le renforcement des capacités des fonctionnaires, les campagnes d’éducation et la sensibilisation des secteurs de la pêche et de l’aquaculture aux prescriptions du commerce dans le cadre de l’inscription et, le cas échéant, la production d’outils destinés à faciliter l’identification des spécimens des espèces dans le commerce. Pour certaines Parties, notamment les pays en développement, la mise en application d’inscriptions peut exiger la mise en place de nouvelles infrastructures. Pour ce qui est de l’inscription d’espèces aquatiques faisant l’objet d’une exploitation commerciale, l’expérience limitée des fonctionnaires et des acteurs du secteur de la pêche au plan de la mise en application des inscriptions requiert probablement des efforts plus intensifs et entraîne donc des coûts plus élevés durant les étapes initiales.

72. Les coûts ordinaires incluent:

i) les recherches nécessaires à l’avis de commerce non préjudiciable;

ii) le traitement des demandes de permis, la préparation et la présentation des rapports annuels;

iii) l’inspection des importations et des exportations et la détection et la poursuite du commerce illicite.

73. Le fardeau financier tombe en général sur les gouvernements, notamment sur les organes de gestion, plutôt que sur le secteur privé lorsqu’une espèce est inscrite à la CITES.

74. Certains problèmes d’administration et d’aménagement des espèces inscrites à la CITES peuvent venir de conflits de juridiction entre les organes environnementaux et ceux des pêches, ainsi que du manque de clarté dans leurs attributions respectives. Le manque de communication et de coordination entre ces organes peut avoir des conséquences négatives pour la gestion tant de l’environnement que des pêches (comme indiqué au paragraphe 15).

75. Dans certains pays et dans certaines circonstances, les capacités administratives et humaines peuvent avoir à être renforcées pour faire face aux obligations supplémentaires découlant de l’inscription à la CITES d’une espèce aquatique faisant l’objet d’une exploitation commerciale. Cela peut être le cas dans les pays où l’aménagement des pêches n’est pas très développé ou bien où les infrastructures sont insuffisantes. Quelle que soit leur situation économique, les ressources dont disposent les pays pour contrôler les mouvements transfrontières des poissons et de la faune et pour lutter contre la fraude sont limitées et les autres activités de contrôle frontalier sont souvent plus prioritaires.

76. Les études de cas ont permis d’obtenir certaines indications sur les coûts administratifs liés à une inscription à la CITES. Par exemple, les coûts des opérations de surveillance des bancs de pêche du strombe rose dans les eaux de la Jamaïque, aux fins d’établissement de l’avis de commerce non préjudiciable, sont considérables. La Consultation a noté que si les études de cas sur les coûts et avantages de la mise en œuvre des inscriptions à la CITES avaient permis d’obtenir des informations utiles, des recherches complémentaires devaient être menées afin de bien comprendre toutes leurs implications. Les coûts de la recherche aux fins de l’établissement d’un avis de commerce non préjudiciable, de l’attribution de permis et de certificats et des inspections peuvent être élevés et, sans aide bilatérale ou multilatérale, certains gouvernements peuvent avoir des difficultés à les supporter. Dans certains cas, des retards dans le processus d’octroi de permis ou de certificats d’exportation peuvent se traduire par une baisse de la valeur économique. Néanmoins, la documentation et les autres formalités requises aux fins du commerce au titre de la CITES devraient faciliter les mouvements des espèces et des produits avec un minimum de délais.

Gestion

77. Le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO (1995) donne des directives complètes pour la gestion des pêches dans les pays où il est appliqué. La CITES demande des avis de commerce non préjudiciable fondés sur les meilleures informations et données de recherche disponibles (voir paragraphe 28). En pratique, dans nombre de pays en développement où les capacités de gestion sont insuffisantes, lorsque des espèces sont inscrites à la CITES, les Parties peuvent avoir besoin d’une aide pour mettre en place les diverses mesures d’aménagement nécessaires. Selon le Code de conduite, ces mesures doivent être inscrites dans un plan de gestion approprié. Lorsque la gestion des pêches est déficiente, une inscription à la CITES ne résout pas en elle-même les carences de la gestion. Elle peut cependant, dans certains cas, contribuer à une gestion plus responsable des ressources, comme cela a été le cas pour les strombes roses à la Jamaïque. Les mesures d’aménagement pour les espèces inscrites à la CITES peuvent aussi, dans certaines circonstances, avoir des effets bénéfiques pour d’autres ressources halieutiques amenant ainsi une amélioration globale de la gestion des espèces non inscrites.

78. La réglementation de la mise à contribution des ressources halieutiques, y compris de leur exploitation à des fins de commerce international, ne permet probablement pas de s’attaquer aux problèmes du déclin des populations causé par la dégradation de leurs habitats (pollution et envasement, par exemple), et ces facteurs peuvent jouer un rôle important dans la raréfaction de certaines ressources, telles que l’esturgeon et les hippocampes.

Incidences socioéconomiques de l’inscription d’une espèce faisant l’objet d’une exploitation commerciale

79. La pêche, y compris l’aquaculture, est une source primordiale de produits alimentaires, d’emplois, de récréation, de commerce et de bien-être économique pour les individus partout dans le monde. L’inscription à la CITES d’espèces aquatiques faisant l’objet d’une exploitation commerciale peut avoir des répercussions sur l’emploi, le revenu et la sécurité alimentaire, notamment dans de nombreux pays en développement. L’inscription d’une espèce à l’Annexe I a des conséquences immédiates puisqu’elle impose une interdiction des transactions commerciales alors que le redressement du stock n’amène des avantages que dans le plus long terme. Les inscriptions à l’Annexe II peuvent avoir des effets négatifs à court terme mais des avantages à moyen et long termes.

80. Sur le marché international, l’inscription à la CITES peut améliorer le flux des produits obtenus légalement et réduire les risques d’entrée de produits obtenus de manière illicite, ce qui peut augmenter les chances de redressement des stocks. Dans certains pays, les importations de caviar de la mer Caspienne ont profité aux conditionneurs et aux exportateurs qui peuvent obtenir des prix plus élevés pour les espèces inscrites à la CITES, même si ce sont les consommateurs qui absorbent les augmentations de prix. L’inscription à la CITES peut aussi se traduire par une baisse des recettes d’exportation, chose qui peut être préoccupante pour les pays qui dépendent des exportations de poisson pour leurs devises, dont beaucoup sont des pays en développement. Elle peut amener une baisse des opportunités d’emplois et des revenus pour les pêcheurs, les pisciculteurs et autres ouvriers de la pêche, dont le revenu dépend de ces espèces.

81. L’inscription d’espèces à la CITES peut aussi déboucher sur la création de marchés illégaux. La politique intérieure et la réglementation d’une pêche en réaction à une inscription d’une espèce à la CITES peut transformer des pêcheurs bona fide en braconniers, comme on l’a vu à la Jamaïque avec le strombe rose, ce qui peut avoir des répercussions socio-économiques importantes, sauf mise en place de mesures efficaces d’éducation et de contrôle des activités illégales.

82. Une inscription à la CITES peut donner naissance à toute une gamme d’interventions réglementaires au niveau national. Certaines peuvent amener une restructuration de la pêche, avec les coûts connexes que cela implique. Les pêcheurs peuvent avoir à les assumer plus que les conditionneurs et les exportateurs dans la mesure, par exemple, où ils peuvent avoir à acheter un nouveau matériel de pêche, à trouver de nouveaux terrains de pêche ou à cibler de nouvelles espèces. De ce fait, les collectivités concernées peuvent avoir des difficultés à s’adapter à la nouvelle situation. Certains délégués ont avancé que cela s’était passé en Inde avec les hippocampes. A la Jamaïque, il a fallu instituer un système de quotas pour gérer la pêche des strombes au titre de la CITES, mais ces quotas ont été attribués avant tout aux grandes entreprises, ce qui a amené une baisse du nombre des usines de traitement et donc d’emplois. Les implications de l’attribution des quotas sont à l’étude. Lors de la formulation de règles destinées à faire respecter les inscriptions à la CITES, les autorités nationales et, le cas échéant, les Parties, doivent tout faire pour atténuer les effets économiques et sociaux indésirables.

83. Les conséquences du report de la mise à contribution sur des espèces non inscrites à la CITES doivent être soigneusement examinées. Elles peuvent être acceptables dans le cas de ressources halieutiques sous-utilisées mais elles peuvent avoir des conséquences négatives pour les pêches «stressées». Dans ce contexte, il faudrait envisager la possibilité d’offrir aux pêcheurs une formation et des emplois en dehors du secteur de la pêche. Des incitations appropriées, y compris des subventions ciblées et limitées dans le temps, peuvent aider les pêcheurs à passer, en tant que de besoin, de la capture d’espèces inscrites à la CITES à d’autres sources de revenu.

84. Certains pays adoptent des approches différentes pour traiter des conséquences financières d’une inscription; ces conséquences ne doivent pas nécessairement être à la charge du gouvernement. Certains pays, y compris des pays en développement, utilisent divers mécanismes - tels que le principe de l’«utilisateur-payeur» et des redevances pour demandes de permis - pour recouvrer la totalité ou une partie des coûts liés à la mise en œuvre des inscriptions à la CITES. Dans ces cas, il importe de prendre en compte la capacité de payer des divers utilisateurs. S’agissant du strombe rose de la Jamaïque, le secteur privé a payé pour réaliser les évaluations des stocks des bancs de pêche nécessaires à la préparation de l’avis de commerce non préjudiciable à la survie de l’espèce.


Page précédente Début de page Page suivante