Mokgadi Itsweng

«Si nous sommes capables d’adopter le quinoa si vite, alors nous pouvons faire de même avec nos céréales traditionnelles, pour qu’elles reviennent dans nos assiettes.»
15/09/2023

Afrique du Sud 

La cheffe sud-africaine Mokgadi Itsweng sait que son travail ne se limite pas au seul fait de cuisiner et qu’il a aussi à voir avec l’enseignement des origines des aliments. «Les cuisiniers sont importants car ils peuvent non seulement raconter l’histoire des paysans, mais aussi celle des ingrédients qui finissent dans nos assiettes», dit-elle. Et si ça ne tenait qu’à elle, ces assiettes contiendraient bien plus de mil et de sorgho. 

 

C’est pourquoi, avec d’autres chefs de sa région, elle se rendra cette année en Afrique du Sud, au Botswana et au Swaziland pour sensibiliser les gens au patrimoine des différentes plantes cultivées autochtones et aux avantages environnementaux et nutritionnels que celles-ci offrent. 

 

Selon Mokgadi, les gens pourront ainsi faire des choix alimentaires plus sains, en faveur des populations et de la planète. 

 

Dans son livre de cuisine, elle propose des plats à base de mil et de sorgho, deux céréales qui correspondent à ces critères et, alors que certaines variétés de celles-ci sont originaires d’Afrique du Sud, le regroupement des diverses recettes a été l’occasion de redécouvertes. 

 

«De nombreuses recettes permettent d’utiliser ces ingrédients jour après jour. Mais nous ne les connaissions pas et ce, uniquement parce que les savoirs autochtones ont été effacés», explique-t-elle. 

 

Les céréales de base que sont le sorgho et le mil ont d’abord été supplantées par le maïs, pendant la période coloniale, puis complètement éliminées sous le régime de l’apartheid. Tout ce qui était lié à la spiritualité indigène, y compris la cueillette et la culture des plantes autochtones, était interdit par la loi. Mais pour de nombreux Sud-Africains, ces deux céréales sont bien plus que de simples denrées alimentaires. 

 

«C’est un lien avec nos ancêtres. C’est ce qui nous relie à notre culture, à ce que nous sommes.» 

 

Pour Mokgadi, la contribution potentielle de ces céréales à la lutte menée dans son pays contre la malnutrition est tout aussi importante. Le mil et le sorgho apportent des nutriments essentiels et, de ce fait, ont beaucoup à offrir à l’alimentation locale car, même si les personnes mangent régulièrement, elles consomment souvent des aliments trop pauvres sur le plan nutritif. Pour le dire en quelques mots, selon elle, «nous devons revenir aux racines de notre alimentation.» 

 

Mokgadi Itsweng ajoute que le retour de ces céréales anciennes est fondamental pour la santé de la planète car elles nécessitent relativement peu de ressources pour pousser. 

 

Grâce à son livre de cuisine et aux manifestations auxquelles elle participe, Mokgadi contribue aux efforts visant à mettre en avant les avantages que procurent le mil et le sorgho en Afrique du Sud, efforts qui ont déjà permis de voir revenir ces céréales dans les rayons des magasins. 

 

Elle espère que d’autres chefs auront envie de se joindre à elle. «En tant que chefs, dit-elle, si nous créons une demande de mil, les paysans pourront développer leur activité, faire pousser cette céréale, vendre leur production et savoir ce que les gens attendent d’eux.» 

 

«C’est tout simplement notre alimentation. Il n’y a rien de nouveau dans tout ça, souligne-t-elle. Si nous sommes capables d’adopter le quinoa si vite, alors nous pouvons faire de même avec nos céréales traditionnelles, pour qu’elles reviennent dans nos assiettes.»