FAO/SMIAR - Cultures et Pénuries alimentaires No.2, Avril 2000 - Page 3

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SITUATION DES RÉCOLTES ET DES APPROVISIONNEMENTS ALIMENTAIRES

VUE D'ENSEMBLE

On voit se constituer rapidement les conditions caractéristiques de la famine dans certaines régions de l'Afrique orientale, et plus de 16 millions de personnes risquent de connaître de graves difficultés d'approvisionnements alimentaires dans la sous-région. Une grave crise humanitaire est apparue dans les régions pastorales de l'est et du sud de l'Éthiopie, par suite des effets cumulatifs de la sécheresse au cours des trois dernières années, et l'on signale un nombre croissant de décès dus à la faim dans les zones les plus touchées. Les régions limitrophes du Kenya, de l'Ouganda et de la Somalie ont également été gravement affectées. Les perspectives sont défavorables pour les récoltes d'Afrique orientale, où les précipitations nécessaires à la campagne secondaire 1999/2000 ont été irrégulières et insuffisantes. En Afrique du Nord, les cultures sont durement éprouvées par une grave sécheresse, notamment en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Ailleurs, la situation alimentaire et la santé des personnes déplacées de l'intérieur (PDI) de l'Angola, de la République démocratique du Congo et du Burundi continuent de susciter de graves inquiétudes. Le 2 avril, le cyclone Hudah a frappé le nord de Madagascar, déjà dévasté par les cyclones Eline et Gloria. Bien que le cyclone Hudah n'ait pas été accompagné de pluies et d'inondations particulièrement abondantes, les vents extrêmement violents, atteignant parfois 300 km/heure, ont causé d'importants dégâts aux habitations et aux infrastructures comme les écoles, les hôpitaux et les centres médicaux ou les télécommunications, endommageant également les cultures, et tout particulièrement les plantations d'arbres. Au Mozambique, bien que le cyclone Hudah se soit dissipé avant d'atteindre la côte septentrionale, les pluies abondantes qui l'ont accompagné ont affecté les provinces du Zambèze et de Nampular, deux des principales régions productrices de maïs du pays, et la qualité de la récolte, qui atteint actuellement sa maturité, risque d'en être affectée. En Asie, l'hiver le plus rigoureux depuis trente ans a entraîné la mort de plusieurs centaines de milliers de têtes de bétail en Mongolie, affectant gravement les conditions de vie et la sécurité alimentaire d'un quart de la population du pays; parallèlement, la RDP de Corée reste tributaire d'une aide alimentaire, les conséquences des catastrophes naturelles qui l'avaient frappées étant aggravées par les difficultés économiques. Au Proche-Orient, les perspectives de récolte sont défavorables en Afghanistan, en Iraq et en Jordanie, par suite de la sécheresse prolongée. Dans la CEI, une aide humanitaire d'urgence est nécessaire en Tchétchénie ainsi que pour les réfugiés des pays voisins. En Europe, les conditions météorologiques ont été jusqu'ici satisfaisantes, de manière générale, pour les cultures. En Amérique latine, la principale activité en cours est la préparation des terres pour les cultures de maïs et de haricots de première campagne 2000/2001 en Amérique centrale et dans les Caraïbes, et pour le blé en Amérique du Sud.

SITUATION PER RÉGION

Afrique

En Afrique de l'Est, de graves difficultés d'approvisionnement alimentaire sont apparues, liées principalement aux pertes de culture et de bétail provoquées par la sécheresse. On estime à 16 millions le nombre de personnes affectées par de graves pénuries alimentaires, alors qu'on signale un nombre croissant de décès dus à la faim dans certaines régions. Les pasteurs de la sous-région sont les plus gravement éprouvés par la succession de pluies insuffisantes, cause de la perte d'un nombre important de têtes de bétail. Compte tenu des précipitations médiocres attendues dans la sous-région durant la campagne en cours, le nombre de personnes nécessitant une aide alimentaire devrait augmenter. La situation a évolué vers la crise alimentaire en Éthiopie, où plus de 8 millions de personnes sont confrontées à de graves pénuries alimentaires. La situation est particulièrement grave dans les régions pastorales de l'est et du sud, où pendant trois années consécutives les pluies ont été très faibles, voire absentes. On signale des décès dus à la faim, particulièrement parmi les enfants. En Érythrée, la situation alimentaire est très tendue pour près de 600 000 personnes affectées par la guerre avec l'Éthiopie et par la sécheresse qui a prévalu dans les régions côtières. Au Kenya, la situation des approvisionnements alimentaires est alarmante dans les districts pastoraux du nord, de l'est et du nord-ouest, affectés par des sécheresses successives. Près de 2,7 millions de personnes sont confrontées à de graves pénuries alimentaires. En Somalie, près de 650 000 personnes, réparties dans les six régions du sud, sont confrontées à de graves pénuries alimentaires; la catégorie la plus touchée est celle des agriculteurs dans les districts de Huddur, Wajid et Rab-Dure de la région de Bakool, où de nombreuses personnes ont quitté leurs villages à la recherche de nourriture. En Tanzanie, une aide alimentaire est nécessaire pour près de 800 000 personnes affectées par l'insécurité alimentaire, principalement dans les régions de Dodoma, Mara, Shinyanga, Singida, Tabora, Tanga et Mwanza Sud, qui ont subi pour la troisième fois consécutive une mauvaise récolte. Au Soudan, malgré une situation stable au plan de la sécurité alimentaire, environ 103 000 tonnes d'aide alimentaire sont nécessaires pour les quelque 2,4 millions de personnes affectées par la sécheresse et les troubles civils qui se prolongent. En Ouganda, la situation des approvisionnements alimentaires s'est détériorée dans les districts de Kotido et de Moroto, où près de 215 000 personnes ont un besoin urgent d'une aide alimentaire, tandis que, dans le district de Bundibugyo, près de 112 000 personnes ont été déplacées par suite des troubles civils.

Les perspectives concernant les cultures céréalières de la campagne secondaire 2000 sont inégales dans la région. Au Kenya, quelques bonnes récoltes dans les provinces de l'est et dans les provinces côtières, un volume cumulatif de précipitations inférieures à la normale pour la région ainsi qu'une sécheresse prolongée dans certaines régions ont eu des conséquences négatives pour la récolte de maïs. En Tanzanie, la récolte récemment rentrée de céréales pour la campagne Vuli a été réduite de façon draconienne du fait des précipitations insuffisantes, et les estimations actuelles font état d'une réduction d'environ 70 pour cent par rapport à la dernière moyenne quinquennale. Cependant, la production de cultures vivrières non céréalières a été satisfaisante. En Éthiopie, on prévoit une récolte belg inférieure à la moyenne, en raison de la poursuite de la sécheresse, mais aussi des pénuries de b_ufs de trait et de semences. En revanche, en Somalie, la récolte céréalière de campagne Deyr est estimée à 108 000 tonnes, soit 53 pour cent de plus que la moyenne consécutive à la guerre civile (1993-1998), ce qui traduit des conditions favorables dans certaines des principales régions de culture. Cependant, les pluies médiocres qui sont tombées dans la région de Bakool ont gravement affecté la production. En Ouganda, des pluies bien distribuées ont donné une production satisfaisante pour les récoltes, récemment rentrées, de céréales secondaires. Au Soudan, la récolte du blé est en cours et l'on prévoit une production de 288 000 tonnes, volume sensiblement supérieur à celui de la mauvaise récolte de 1999. Au Rwanda, la situation alimentaire s'est améliorée dans l'ensemble, grâce à une bonne campagne A 2000. En revanche, au Burundi, la récolte a été réduite du fait de la sécheresse généralisée et des déplacements de populations.

En Afrique australe, les perspectives globales pour les cultures céréalières de la campagne 2000 de la sous-région, en cours de moisson, sont favorables. En dépit des dégâts importants causés par les pluies torrentielles et par les cyclones Eline et Gloria en février/mars, les principales régions de culture du maïs n'ont pas été affectées par les inondations, et les pluies abondantes ont bénéficié aux cultures, qui avaient été victimes de stress hydrique par suite du temps sec qui avait prévalu dans certaines régions. Cependant, la situation varie d'un pays à l'autre et demeure incertaine; il conviendra d'évaluer l'incidence des pluies abondantes, mais aussi des précipitations irrégulières et insuffisantes dans plusieurs régions.

En Afrique du Sud, en dépit des pertes causées par les inondations dans certaines provinces, les dernières prévisions officielles font état d'une récolte de maïs exceptionnelle, atteignant 9,3 millions de tonnes contre les 7,7 millions de tonnes rentrées l'an dernier. En revanche, à Madagascar, la récolte de paddy de la campagne 2000 a été affectée par le temps sec en début de campagne, puis par trois cyclones consécutifs qui ont provoqué de graves inondations et infligé des pertes importantes aux cultures. Au Mozambique, les graves inondations qui ont touché les parties méridionale et centrale du pays en février/mars n'ont pas affecté les principales régions de culture du nord, lesquelles ont bénéficié de bonnes pluies au mois de mars. Cependant, les pluies violentes associées à l'ouragan Hudah qui ont touché le nord du pays risquent d'avoir affecté la qualité de la récolte de maïs, qui est à présent proche de la maturité voire déjà en cours de moisson. Au Zimbabwe, la production de maïs de cette année devrait subir un déclin par suite de la réduction des emblavures et des pluies très abondantes qui sont tombées en février et en mars, entraînant une baisse des rendements. Au Malawi, malgré les pertes de culture infligées par les inondations qui ont touché le sud, les pluies abondantes de la deuxième décade de février ont amélioré les perspectives de récolte de maïs dans les régions centrale et septentrionale, affectées en début de campagne par une période sèche. Les prévisions officielles font état d'une production de maïs de 2,33 millions de tonnes pour la campagne 2000, soit 6 pour cent de moins que la récolte exceptionnelle de l'an dernier. Au Swaziland, les perspectives de récolte sont médiocres, en raison des pluies excessives qui sont tombées en décembre et des graves inondations de début février. On prévoit que la production de maïs diminuera de 37 pour cent, atteignant un niveau nettement inférieur à la moyenne. Au Botswana, les perspectives de récolte sont incertaines, du fait des pluies abondantes tombées au cours des deux derniers mois et des graves inondations subies fin février. En Zambie, les pluies abondantes tombées depuis mi-février ont profité à la récolte principale de maïs, affectée par les précipitations irrégulières du début de campagne. En Namibie, les perspectives demeurent incertaines; les pluies abondantes de la mi-février tombées sur les principales régions de culture du nord du pays ont été suivies d'une période de précipitations inférieures à la moyenne au mois de mars. En Angola, les perspectives alimentaires sont également incertaines, par suite de précipitations inférieures à la moyenne depuis le mois de février dans les importantes régions de culture du centre, et en raison des déplacements continus de populations durant la saison de croissance. Au Lesotho, malgré des précipitations généralement bonnes depuis la mi-février, les rendements des céréales secondaires risquent d'avoir été affectés par une période sèche prolongée en début de campagne, suivie d'inondations dans les basses terres.

En Afrique du Nord, les perspectives actuelles de récolte pour la campagne 2000 sont défavorables, par suite d'une sécheresse qui se prolonge depuis le mois de janvier. À l'exception des régions de haute altitude et du littoral atlantique, où de légères précipitations sont tombées au mois de mars, les régions de culture qui s'étendent du Maroc vers le nord de l'Algérie n'ont reçu que peu de précipitations depuis le mois de janvier. Le temps sec a également affecté certains secteurs du nord et du centre de la Tunisie ainsi que du nord de la Libye. Il en est résulté une perte totale de récolte dans plusieurs régions du Maroc et de l'Algérie. Les perspectives sont également défavorables pour les éleveurs de bétail, par suite d'une pénurie de fourrage et d'eau dans de nombreuses régions. Cette situation ne manquera pas de se répercuter gravement sur la sécurité alimentaire, notamment pour les petits pasteurs dont les conditions de vie sont étroitement tributaires du bétail. Le déficit de production de la campagne 2000 devra, par conséquent, être en grande partie couvert par les importations. En Égypte, en revanche, la récolte de blé, irriguée pour la plus grande part, pousse dans des conditions favorables jusqu'ici et l'on prévoit une bonne récolte.

En Afrique de l'Ouest, les pluies ont commencé en mars dans le sud des pays bordant le golfe de Guinée, ce qui a permis les semis de la première récolte de maïs. Dans le Sahel, des conditions sèches conformes à la saison ont prévalu et l'activité agricole est limitée, à l'exception des cultures de décrue et des cultures de contre-saison, dont les perspectives sont généralement excellentes grâce au niveau élevé atteint par les fleuves et par les réserves d'eau. Cependant, les infestations de ravageurs menacent les cultures en Mauritanie.

Grâce à des conditions de croissance généralement favorables au cours de la saison des pluies de la campagne 1999, une récolte exceptionnelle a été rentrée dans le Sahel. Plusieurs pays ont à présent diffusé leurs chiffres définitifs de production : celle-ci est estimée, pour la campagne 1999, à 11,6 millions de tonnes pour les neuf pays membres du CILSS, soit 8 pour cent de plus qu'en 1998 et 23 pour cent de plus que la dernière moyenne quinquennale. Des récoltes records ont été rentrées au Burkina Faso, au Cap-Vert, en Gambie, au Mali, en Mauritanie et au Sénégal, tandis que l'on prévoit une production supérieure à la moyenne au Tchad et au Niger. La production devrait rester inférieure à la moyenne en Guinée-Bissau, par suite des déplacements de populations provoqués par les troubles civils de 1998. Par ailleurs, les pluies abondantes ont permis une reconstitution satisfaisante des pâturages et des réserves d'eau.

Dans les pays riverains du golfe de Guinée, les récoltes céréalières de la campagne 1999 ont été généralement bonnes au Bénin, au Nigéria et au Togo, mais moins favorables en Côte d'Ivoire et au Ghana. En Sierra Leone, une mission FAO d'évaluation des récoltes et des approvisionnements alimentaires qui s'est rendue en Sierra Leone en décembre a estimé la production de riz paddy à environ 45 pour cent du volume précédant la guerre civile. La production céréalière globale de la campagne 1999 pour les huit pays bordant le golfe de Guinée (Bénin, Côte d'Ivoire, Ghana, Guinée, Libéria, Nigéria, Sierra Leone et Togo) est estimée à environ 29,8 millions de tonnes contre 29,3 millions de tonnes en 1998 (y compris le riz paddy). Le Libéria et la Sierra Leone restent étroitement tributaires de l'aide alimentaire internationale, malgré certaines améliorations de la production alimentaire, notamment au Libéria.

Grâce aux récoltes généralement bonnes, la situation des approvisionnements alimentaires sera satisfaisante durant l'année 2000 dans la plupart des pays. Les marchés sont bien approvisionnés et les prix nettement inférieurs à leurs cours des périodes identiques des précédentes années dans le Sahel. Les agriculteurs ont reconstitué leurs réserves et les prix peu élevés des céréales ont facilité la reconstitution des stocks nationaux de sécurité alimentaire dans plusieurs pays. Les termes de l'échange sont favorables aux pasteurs. Toutefois, on prévoit des difficultés d'approvisionnement localisées durant la période de soudure dans les régions touchées par les inondations, particulièrement en Mauritanie, dans le nord du Sénégal et dans le sud du Tchad. On recommande de procéder à des achats locaux et/ou à des transactions triangulaires dans les régions excédentaires au bénéfice des régions déficitaires, afin d'appuyer la production intérieure.

En Afrique centrale, la production de la campagne 1999 a été supérieure à la moyenne au Cameroun, et elle a atteint un niveau record en République centrafricaine. Les troubles civils qui ont affecté tant la République du Congo que la République démocratique du Congo continuent cependant d'entraver les activités agricoles et commerciales. En République du Congo, le nord ainsi que la capitale Brazzaville ont été affectés par des inondations au mois de novembre-décembre. En République démocratique du Congo, de graves pénuries alimentaires ayant conduit à la malnutrition sont signalées parmi les groupes importants de populations déplacées par les troubles civils qui persistent, notamment dans le nord-est du Katanga et dans le sud de Kivu, régions rendues en grande partie inaccessibles par l'insécurité.

Asie

La région asiatique compte pour environ 49 pour cent de l'ensemble de la production céréalière. En 1999, la production de la région était d'environ 1 013 millions de tonnes, soit environ 1 pour cent de plus que l'an dernier. Dans plusieurs des pays qui avaient été affectés par la sécheresse provoquée par El Niño voici deux ans, la production a continué de se redresser, notamment aux Philippines et en Indonésie. Dans ces pays, on prévoit également une augmentation de la consommation de céréales à mesure que les économies se remettent des effets de la crise financière qui avait frappé l'Asie en 1997/98. On s'attend en particulier à une augmentation de la demande de blé et de maïs, parallèlement à l'augmentation de la consommation de produits à base de blé, de «fast food» ainsi que de volaille et de viande. En Chine, principal producteur de la région, le déclin de la production de blé et de maïs devrait se poursuivre, par suite des restrictions imposées au soutien des prix, qui incitent les agriculteurs à opter pour des cultures plus lucratives.

À l'heure actuelle, les principales activités agricoles de la région concernent la moisson de la principale récolte de blé d'hiver en Inde, au Pakistan et au Bangladesh, alors que les cultures sortent de la dormance et atteignent le stade du premier développement en Chine. Les conditions météorologiques ont été généralement favorables, grâce aux précipitations plus élevées enregistrées durant l'hiver. En dépit d'une réduction de 7 pour cent des emblavures en Chine, le déclin de la production de blé sera probablement moins marqué qu'initialement prévu par rapport aux 114 millions de tonnes produites en 1999. En Inde, les emblavures ont également subi une réduction et la récolte a été affectée par la sécheresse dans certaines régions, bien que l'on prévoie une production globale analogue à celle de l'an dernier, campagne record au cours de laquelle 71 millions de tonnes avaient été engrangées. Les perspectives sont extrêmement favorables au Pakistan, avec une augmentation probable de la production de près de 2 millions de tonnes par rapport à l'an dernier, tandis qu'une récolte exceptionnelle, analogue à la récolte record de l'an dernier, est également probable au Bangladesh. En revanche, en raison des précipitations inférieures à la normale enregistrées en République islamique d'Iran au cours des mois de janvier et février, un complément important de pluie reste nécessaire pour que les cultures en cours de croissance puissent retrouver un niveau normal, suite à la récolte de l'an dernier qui avait été gravement affectée par la sécheresse. Ailleurs dans la région, les activités liées à la campagne principale de riz concernent la récolte du riz boro irrigué au Bangladesh, dont les perspectives sont favorables. On prévoit, pour le pays, une récolte record de riz pour la campagne 1999/2000. En Indonésie, au Sri Lanka et au Cambodge, la récolte de la campagne principale de riz est amorcée et dans certains cas presque achevée, tandis qu'au Viet Nam, le repiquage de la principale récolte d'hiver-printemps (l'une des trois récoltes actuelles) est entamé dans les régions septentrionales, et il est déjà achevé dans le sud. Aux Philippines, la récolte du riz de saison sèche débutera au cours des prochaines semaines, tandis qu'en Thaïlande, elle doit commencer en mai.

La dernière crise alimentaire apparue dans la région concerne la Mongolie, qui n'avait pas connu un hiver aussi rigoureux depuis 30 ans, lequel a provoqué la mort d'une grande partie du cheptel, très important pour la sécurité alimentaire de nombreux ménages nomades. On estime qu'un quart de la population de 2,7 millions d'habitants risquent de souffrir, à des degrés divers, de pénurie alimentaire au cours des prochains mois. La RDP de Corée continue de connaître des problèmes chroniques d'approvisionnement alimentaire, sous les effets conjugués des catastrophes antérieures et de problèmes économiques. Au Timor oriental, les effets des soulèvements de l'an dernier seront probablement moins graves que prévu pour la production, notamment grâce aux conditions météorologiques généralement favorables.

Au Proche-Orient, la sécheresse prolongée a affecté les cultures ainsi que l'élevage du bétail dans plusieurs régions. En Afghanistan, on a vu s'ajouter aux effets négatifs des troubles civils persistants et des pénuries d'intrants agricoles, ceux de la sécheresse qui a frappé une bonne partie des régions méridionale et centrale, nuisant à la production de céréales d'hiver de la campagne 2000 destinée à être récoltée en mai. En Iraq, la persistance de la sécheresse a exacerbé la situation, déjà tendue, des approvisionnements alimentaires. En Jordanie, malgré des pluies bénéfiques pour les cultures d'hiver, l'insuffisance des précipitations a affecté la production agricole dans plusieurs endroits. En Syrie, des précipitations favorables ont amélioré les perspectives des cultures céréalières, à récolter en mai. Cependant, des milliers de pasteurs, affectés par la sécheresse prolongée de l'an dernier, continuent d'avoir besoin d'une assistance. En Turquie, les bonnes pluies tombées récemment ainsi que la couverture de neige continuent de favoriser la croissance des cultures de blé, dont la récolte doit se faire en juin, inversant les effets de la sécheresse qui avait sévi auparavant durant la campagne.

Pour ce qui est des huit pays de la CEI situés dans la région asiatique, au Kazakhstan, de loin le principal producteur de la sous-région, le gros de la campagne céréalière 2000 ne sera pas ensemencé avant le mois de mai. Ailleurs, dans les huit pays de la CEI, les dernières indications font état d'une surface globale ensemencée en augmentation pour les céréales d'hiver, les seuls déclins substantiels étant enregistrés en Géorgie et en Arménie, du fait, entre autres, du prix élevé du carburant. Au Tadjikistan, il faudra s'attaquer aux maladies des cultures si l'on veut maintenir la production au niveau de l'an dernier. En Ouzbékistan et au Turkménistan, on enregistre une augmentation des emblavures de céréales d'hiver. À ce jour, les conditions de végétation ont été dans l'ensemble satisfaisantes, et si les conditions météorologiques restent normales jusqu'à ce que la moisson soit rentrée, la production de blé d'hiver pourrait poursuivre son ascension. Dans certaines régions, les semis de céréales secondaires de printemps et de coton sont en cours.

Dans les huit pays, la récolte globale de céréales de la campagne 1999 a connu une augmentation marquée, atteignant 24 millions contre 17 millions en 1998. La production de blé a augmenté de 6 millions de tonnes pour atteindre 19 millions de tonnes; ce phénomène est dû principalement à un très net redressement de la production au Kazakhstan et à une augmentation des volumes rentrés en Azerbaïdjan, en Géorgie, au Turkménistan et en Ouzbékistan. La production de céréales secondaires a augmenté de 1,4 million de tonnes pour atteindre 4,5 millions de tonnes. Au Kazakhstan, la récolte de blé a doublé, atteignant 11 millions de tonnes, tandis que la production de céréales secondaires s'est redressée pour s'établir à 2,7 millions de tonnes, contre 1,5 million de tonnes en 1998. Le Turkménistan a obtenu une récolte céréalière record de 1,5 million de tonnes, composée principalement de blé. En Ouzbékistan, la production céréalière globale pour la campagne 1999 est officiellement fixée à 4,3 millions de tonnes (4,1 millions de tonnes en 1998), dont 3,6 millions de tonnes de blé. Au Kirghizistan, la récolte de céréales a rejoint le niveau de 1998, avec 1,6 million de tonnes; toutefois, la production de blé, soit 1,1 million de tonnes, a enregistré un déclin du fait du transfert de terres vers des cultures plus rentables et vers les céréales fourragères. Contrairement aux indications antérieures, la production officielle du Tadjikistan est fixée à 475 000 tonnes, soit 5 pour cent de moins seulement qu'en 1998, volume qui reste supérieur à la moyenne nationale. L'amélioration de la récolte céréalière a réduit les besoins en importations de la plupart des pays. Alors que les besoins globaux en importations céréalières sont estimés à 2,5 millions de tonnes, 0,4 million de tonnes sont déjà promis sous forme d'aide alimentaire, le reste devant être couvert par des importations commerciales.

Dans tous ces pays, cependant, les statistiques globales masquent des disparités de revenu qui ne cessent de se creuser, et tous ces pays ont des catégories de populations socialement et économiquement vulnérables et qui ont du mal à survivre. En Arménie, en Azerbaïdjan, en Géorgie et Tadjikistan, pays qui ont subi un brutal déclin de leur PNB après l'indépendance et dont la situation a été aggravée par les troubles civils prolongés, les populations vulnérables, qui comprennent des réfugiés et des PDI, restent tributaires de l'assistance alimentaire.

Amérique latine

En Amérique centrale et dans les Caraïbes, les principales activités agricoles portent sur les travaux de préparation des semis pour la première campagne céréalière et pour les cultures de haricots de la saison 2000/2001, dont le démarrage est prévu avec l'arrivée des premières pluies de la saison, au mois d'avril. On prévoit, pour le Costa Rica, El Salvador, le Guatemala et le Nicaragua, des emblavures proches de la moyenne 1999/2000 voire supérieures à cette moyenne. Au Honduras, les cours peu attrayants qui prévalent rendent incertaines les perspectives de l'importante récolte de maïs. Les perspectives sont également mal définies pour la récolte de riz paddy. Cette situation est en grande partie attribuable aux contraintes, d'ordre financier notamment; cependant, le gouvernement applique des mesures pour aider les producteurs à surmonter ces difficultés. Au Mexique, la moisson de la récolte de blé de la campagne 2000 doit commencer sous peu, tandis que l'on prépare les terres pour les semis de l'importante récolte de maïs de printemps/été dans les principaux États producteurs de la ceinture centrale-méridionale. Dans les Caraïbes, le temps sec a persisté au cours des dernières semaines, mais on ne signale pas d'effets négatifs prononcés sur les cultures en croissance de Haïti et de la République dominicaine. À Cuba, le temps sec a profité aux activités de moisson de l'importante récolte génératrice de devises étrangères, celle de la canne à sucre. En Jamaïque, la persistance du temps sec a nui aux petites récoltes vivrières, principalement les légumes.

Dans les parties méridionales de l'Amérique du Sud, les terres sont en cours de préparation dans la plupart des pays pour les semis de la récolte de blé 2000/2001, tandis que la moisson de la récolte de maïs de la campagne 2000 a démarré. On prévoit, à titre provisoire, une production de maïs moyenne et supérieure à la moyenne au Brésil et en Argentine respectivement, tandis que les perspectives sont médiocres en Uruguay et au Paraguay, pays affectés par une sécheresse prolongée. Au Chili, la production de maïs devrait se redresser par rapport à la récolte de l'an dernier, affectée par la sécheresse. Dans les pays andins, la moisson de la récolte de blé de première campagne pour l'année 2000 est sur le point de démarrer en Bolivie, tandis que les semis ont été amorcés au Pérou, en Équateur et en Colombie. Dans les deux premiers pays, la récolte de la première et principale campagne de maïs pour l'année 2000 a également démarré. En Colombie, les pluies très abondantes suivies d'inondations qui ont marqué le mois de mars ont retardé les semis de la principale récolte de maïs. Au Venezuela, les activités de restauration et de reconstruction sont en cours dans les États affectés par les glissements de terrain et les inondations du mois de décembre. Les semis de la principale récolte de maïs ont commencé dans des conditions caractérisées par l'humidité.

Europe

Dans la CE, les conditions météorologiques généralement favorables au cours des deux derniers mois ont profité aux cultures d'hiver en croissance et ont favorisé des semis précoces de printemps. Signalons, comme principale exception, la région méditerranéenne où les précipitations ont été inférieures à la normale. Les dernières indications recueillies tendent à confirmer l'augmentation de la superficie générale ensemencée en céréales pour la campagne 2000, et ce en grande partie aux dépens des graines oléagineuses. En se fondant sur les analyses des conditions météorologiques générales qui ont prévalu jusqu'ici au cours de la saison, on peut prédire, à titre provisoire, des rendements moyens sensiblement plus élevés que l'année précédente. Ainsi, la FAO prévoit, à titre provisoire, que la production céréalière globale de la Communauté devrait être, cette année, de l'ordre de 210 millions de tonnes, soit 4 pour cent de plus qu'en 1999.

Ailleurs, en Europe, les conditions météorologiques sont également restées généralement favorables au cours des deux derniers mois. Une augmentation de la production céréalière est prévue dans plusieurs pays, avec un redressement des surfaces ensemencées comme des rendements à partir des niveaux, réduits par la sécheresse, enregistrés l'an dernier. Dans les pays des Balkans, une assistance internationale de grande envergure est maintenue pour les populations vulnérables. On compte actuellement 1,1 million de bénéficiaires de l'assistance alimentaire dans la République fédérale de Yougoslavie (à l'exclusion de la province du Kosovo), chiffre qui comprend les réfugiés, les PDI ainsi que les personnes économiquement et socialement démunies. Dans la province du Kosovo, on s'attache à réduire de 900 000 à 600 000 le nombre des bénéficiaires, compte tenu de l'amélioration des conditions économiques dans la province. Une assistance est maintenue, en Albanie et dans l'ex-République yougoslave de Macédoine, à l'intention des personnes vulnérables affectées par la guerre du Kosovo.

Dans les quatre pays de la CEI situés à l'est de l'Oural (Bélarus, Moldova, Fédération de Russie et Ukraine), les dernières estimations font état d'une surface ensemencée en cultures d'hiver (principalement blé et seigle) supérieure à celle de l'an dernier. Les conditions météorologiques ont été généralement favorables durant l'hiver, avec des températures plus douces et des précipitations suffisantes dans la plupart des régions. Dans la Fédération de Russie, les dernières estimations prévoient une augmentation des emblavures d'hiver de 4 pour cent, soit 14,2 millions d'hectares; ainsi, en tablant sur des conditions météorologiques normales, on peut s'attendre à une augmentation de la production de céréales d'hiver. Au Bélarus également, les perspectives sont satisfaisantes à ce jour. En République de Moldova et en Ukraine, les conditions de la récolte d'hiver, assez défavorables initialement, se sont améliorées grâce à la douceur de l'hiver; les estimations concernant les surfaces à réensemencer ont donc été révisées à la baisse. Cependant, il est probable que les emblavures de céréales d'hiver seront inférieures à celles de l'an dernier et que les carences liées à l'utilisation d'intrants pèseront sur les rendements .

Dans les zones méridionales de la région, les travaux de printemps ont commencé. Les prix élevés du carburant ainsi que les aléas climatiques ralentissent les progrès, mais le printemps est précoce cette année. En Fédération de Russie, certains intrants - dont les engrais et le carburant - sont plus faciles à obtenir que l'an dernier. En revanche, le crédit est plus restreint. Le cours élevé des céréales, lié à une conjoncture d'approvisionnements tendue dans la région, pourrait entraîner une extension des surfaces ensemencées en Fédération de Russie. Si les conditions météorologiques sont favorables, la récolte de céréales de la campagne 2000 pourrait atteindre 65 à 70 millions de tonnes, contre les 60 millions de tonnes rentrées en 1999. En revanche, en Ukraine, les semis de printemps risquent d'être affectés par le prix élevé du carburant, les difficultés d'accès au crédit et l'utilisation de plus en plus inadéquate des intrants dans les exploitations récemment réorganisées. Au Bélarus, les difficultés économiques généralisées devraient continuer de peser sur les rendements. En République de Moldova, avec l'amélioration des conditions climatiques, la production pourrait se redresser quelque peu par rapport au niveau médiocre de l'an dernier, soit 2,2 millions de tonnes.

La production globale de céréales et de légumineuses enregistrée en 1999 pour les quatre pays de la CEI situés dans la région, dont le volume est estimé par la FAO à 93 millions de tonnes, a été à peine de 3 pour cent supérieur à la maigre récolte de 1998 et son niveau a été nettement inférieur à la moyenne. En conséquence, la situation des approvisionnements en céréales demeure tendue dans les quatre pays et les cours des céréales sont en ascension. Les importations permettent de couvrir les besoins en consommation humaine, mais les approvisionnements en céréales fourragères sont très serrés et il faut s'attendre, pour l'année 2000, à une contraction supplémentaire de la production de bétail. Les importations globales de céréales pour ces quatre pays sont actuellement estimées à près de 10 millions de tonnes, soit plus du double de l'an dernier, ce qui reflète l'accroissement des importations notamment au Bélarus et en Fédération de Russie. S'agissant de cette dernière, malgré des importations céréalières qui devraient augmenter de façon très marquée, passant d'environ 3 millions de tonnes en 1998/99 à près de 8 millions de tonnes en 1999/2000, la marge manque toujours pour reconstituer les stocks ponctionnés en 1998/99. Près de 6 millions de tonnes ont déjà été importées durant la période allant de juillet 1999 à février 2000. Les importations de céréales du Bélarus pourraient doubler et atteindre 1,5 million de tonnes, sous réserve de la mobilisation des fonds nécessaires, suite à la récolte plancher de l'an dernier, soit à peine 3,6 millions de tonnes. La récolte de 1999 en Moldova, à savoir 2,2 millions de tonnes, couvre à peu près la consommation, si bien que l'on ne prévoit pas un volume important d'importations céréalières. Quant à l'Ukraine, malgré une très mauvaise récolte en 1999, estimée à 27 millions de tonnes, elle demeurera un pays exportateur net, avec un volume atteignant 3 millions de tonnes de céréales exportées, principalement du blé et de l'orge.

Les populations de Tchétchénie et des républiques environnantes continueront de nécessiter un volume considérable d'aide - alimentaire mais aussi sous d'autres formes. Une mission des Nations Unies qui s'est rendue en Ingoutchie au mois de février a constaté le besoin d'une assistance humanitaire considérable portant sur un large éventail de besoins fondamentaux, dont la nourriture, l'hébergement, les soins de santé, la nutrition, l'eau et les conditions d'hygiène. Elle a constaté que 355 000 personnes environ, dont 185 000 PDI - le reste étant formé par les membres des familles hôtes - ont un besoin urgent d'une aide alimentaire. La santé reste un problème majeur tant en Tchétchénie qu'en Ingoutchie, du fait des conditions insatisfaisantes d'hygiène et d'approvisionnement en eau. En Tchétchénie, les perspectives alimentaires sont mauvaises pour cette année, en raison des dommages subis par l'infrastructure, le bétail et l'industrie du raisin, mais aussi de la pénurie de fonds et d'intrants permettant de relancer la production, facteurs auxquels s'ajoute la nécessité de procéder au déminage des terres arables. Ajoutons que les populations de retour dans leurs foyers auront besoin d'une aide humanitaire considérable au cours des prochains mois.

Amérique du Nord

Aux États-Unis, les conditions de croissance des cultures de blé d'hiver et des semis des céréales secondaires d'été se sont considérablement améliorées fin mars, grâce à des pluies largement réparties dans les principales régions productrices, qui avaient beaucoup manqué d'humidité tout au long des mois d'hiver. Selon les dernières estimations officielles, les semis de blé d'hiver couvriraient 17,5 millions d'hectares, surface pratiquement inchangée par rapport à celle, réduite, de l'an dernier; quant aux premières indications concernant les semis de blé de printemps, elles donnent une réduction de 5 pour cent des emblavures, pour une surface d'environ 7,5 millions d'hectares. Les prévisions actuelles de la FAO font état, pour les États-Unis, d'une production de blé globale de 60 millions de tonnes pour la campagne 2000, soit 4 pour cent de moins qu'en 1999. Dans le sud, on a déjà planté certaines céréales secondaires précoces, mais le plus gros des semis de maïs ne commence que fin avril. Les premières indications font état d'une légère augmentation concernant le maïs, parallèlement à un déclin pour le sorgho. Les semis de la récolte de riz pour cette saison ont commencé, et l'on prévoit une réduction des surfaces ensemencées en raison de la faiblesse annoncée des cours, conjuguée au niveau élevé des stocks. Au Canada, les cultures de blé et de céréales secondaires sont pour la plupart ensemencées au printemps, principalement en mai et juin. Selon les premières indications recueillies auprès des agriculteurs, les emblavures de blé pourraient être étendues au détriment du canola et du lin, dont les cours sont relativement plus faibles.

Océanie

En Australie, les semis des principales cultures de blé et de céréales secondaires pour la campagne 2000 doivent commencer au mois de mai. Les pluies largement réparties du mois de mars ont déjà assuré une bonne humidité des sols favorable à la percée et à la croissance au cours de la prochaine saison. Cependant, les premières estimations officielles font état d'un déclin de la production de blé, dont le volume s'établirait à 22,7 millions de tonnes après la récolte record de 1999, du fait d'une réduction marginale des emblavures cette année assortie d'un rendement moyen. En revanche, on prévoit une augmentation vigoureuse de la production d'orge, en réponse à l'amélioration relative des perspectives des cours par rapport à ceux d'autres cultures.


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